Nos petites voix dans le tumulte
328 pages
Français

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Nos petites voix dans le tumulte , livre ebook

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Description

Tendres, poétiques et drôles, Nos petites voix sont, en quelque sorte, le divan symbolique d’une relation tumultueuse entre une patiente déroutée et sa psy déroutante.
Et si, finalement, l'âme à réanimer n'était pas celle que l'on croit ?...




Couverture : une séquence du tableau Bateaux Bouches de Youssef El Bandrawy – Marseille.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 septembre 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414121731
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-12171-7

© Edilivre, 2017
Exergue


« Qu’elle est la route, Doc ? – La route, Marty ? Là où on va on n’a pas besoin de route ! »
Retour vers le futur II
12-38-5,6, 7
33-9-6
19-2-5
5-40-11
133-4-4
Un
1
Lundi 19 octobre 2015 : le numéro qui s’était affiché sur mon téléphone portable m’était inconnu, mais ma disponibilité ne pouvant se retrancher derrière aucune excuse valable je décidai de décrocher. La voix féminine qui me salua d’un bonjour poli s’avéra méconnue elle aussi, mais je l’illustrais déjà d’une silhouette (plutôt banale mais charmante) d’un âge (entre 30 et 40 ans) et d’un état d’esprit (motivée mais en attente inquiète). De mon côté je me montrai réceptive, comme je savais le faire lorsque rien d’inopportun ne venait troubler mon carpe diem .
« Allo ? Je suis bien chez Madame Sarah Zed ?
– Oui !
– Je vous appelle de la part de Madame Jissey pour… » .
A cet instant-même, sans transition ni signal d’alerte, le sol se troua sous mes pieds. Pas une petite zébrure ou une légère brèche qui permet de voir venir l’abîme, non, une trouée franche et nette, soudain ouverte à tous les magmas possibles, prête à m’engloutir entière.
Luttant immédiatement pour ne pas m’offrir à sa béance, un rapide pas de côté me permit de me dégager dignement vers ce que je venais de comprendre, et la main libre qu’il me restait d’attraper mon agenda – qui me servirait peut-être de montgolfière pour la suite de la conversation. Fier de sa réactivité mais ébranlé par cet inattendu, mon corps ne trouva d’autre issue que de faire escale un instant sur le premier meuble capable de soutenir urgemment son émotion : mon lit.
L’incongruité de prendre cet appel depuis le fin fond de mon intimité nocturne me ramena à la voix féminine qui continuait à me parler : « Je vous appelle de la part de Madame Jissey pour ma fille de 8 ans qui… » . La suite n’appartient qu’à nous. Tout naturellement nous avons convenu d’un rendez-vous. A sa demande je lui expliquai, de ma place de thérapeute, ma manière de procéder en pareil cas. Quelques mots sur mes honoraires. Un à bientôt plutôt cordial de part et d’autre. Un clic. Et s’en était déjà fini de mon devoir de réserve émotionnel imposé par cet acte anodin mais résolument professionnel.
Soudain face à moi-même, secouée mais vivante, j’évaluai l’effet en moi d’une situation on ne peut plus banale d’un potentiel patient prenant contact avec son potentiel psy, et qui pourtant m’avait happée.
Il me fallut du temps, un très long temps, pour m’en remettre. D’abord perdu dans un pli du drap bleu qui m’avait recueillie, mon regard tenta de remonter ma pensée pour y mettre de l’ordre. Le peu de conscience qui vint à moi est qu’à 9 heures du matin mon lit était encore défait. Et, comme prise en flagrant délit de procrastination matinale, je me levai brusquement pour rendre à la couette son état diurne attendu. Mais fus interrompue :
Voix in : « Du calme Sarah ! C’est quoi cette hyper-réactivité à un simple appel téléphonique ? Je me rassis aussitôt, aux ordres et à l’écoute. J’étais censée répondre quelque chose de clair qui me recentrerait, mais…
– C’est que je… Tu vois… Elle ne peut pas avoir…
– Je, tu, elle… Des pronoms personnels à peine audibles, que veux-tu que je fasse de ça ?
– Elle, Candice, Candice Jissey… Ma psy, celle qui m’a guérie de mon ancien chagrin.
– Ton EX-psy, Sarah !
– Non, MA psy, même si elle ne l’est plus.
– D’accord. Mais regarde-toi, tu trembles de la tête aux pieds. Des mois que tu n’avais pas été dans cet état là… »
Exact. Trois mois et six jours pour être précise. C’est la durée qui s’était écoulée lentement mais sûrement depuis que le sablier de Notre Rencontre avait été renversé par… égarement. Opérant de justesse un tour complet sur lui-même pour éviter la brisure définitive, il avait poursuivi sa temporalité, mais dans le sens inverse d’une continuité attendue : le futur ne se répandrait qu’en rupture indéniablement consommée.
Notre rencontre… non, en fait il y eut deux rencontres : l’une à l’allure minuscule d’un petit r (celui de la raison de nos premiers échanges) l’autre au caractère magistral d’un grand R (une fois dégagée de cette raison initiale). Celle-ci méritait ses majuscules, ses lettres capitales… mais sans doute pas qu’on se laisse emporter avec autant d’impatience par ses tournures captivantes et enivrantes. Et sans doute pas qu’on s’y perde soi-même jusqu’à ne plus y trouver l’autre, l’autre réel.
A partir de là, du R de Rencontre à celui de Rupture il n’y avait qu’un pas, que chacune a franchi à sa manière et depuis sa place ; mais c’était déjà trop tard pour en rattraper les effets secondaires. Il y eut deux Ruptures aussi d’ailleurs : celle qu’elle signa sur notre contrat privé et celle que j’assénai à notre alliance thérapeutique.
Voix in : « Tu ne noies pas un peu le poisson, là ? Tu penses vraiment qu’on va croire à la belle sérénité avec laquelle tu racontes tout ça ?
– C’est parce que je garde la longue histoire pour plus tard. Mais oui, tu as raison, c’est la colère noire, sur la fin, qui prit le dessus des mots bleus et…
– Des mots bleus ?
– Oui, parce que Rencontre et Rupture se sont articulées autour d’un livre. Celui que j’avais écrit en dehors de nos échanges, qui les a justement désarticulés, parce que… Mais s’il te plait, laisse-moi raconter à mon rythme… Fiche moi la paix ».
Il y a 5 mois (… à peine… alors que j’ai l’impression d’un siècle écoulé dans le sablier renversé…) j’avais remis à Candice un livre. Un petite livre hommage écrit pour elle, en remerciement de ce qu’elle m’apportait de nouvelle joie de vivre chaque semaine. Il lui avait plu. Beaucoup même. Beaucoup trop sans doute. Car finalement, c’est lui qui a tout gâché, nous entrainant dans un typhon émotionnel dont ni elle ni moi n’avons su arrêter l’emballement.
De notre Dernière Rencontre – celle où je pris la décision de la quitter vraiment – reste gravée en moi une réalité ineffaçable : le dernier mot qu’elle avait entendu de moi était « soyez heureuse », et la dernière chose que j’avais entendue d’elle n’est pas un mot mais un bruit, qui hante encore mes jours et mes nuits. Celui d’une dernière page qu’on déchire derrière la porte que je refermai définitivement, avec ce lourd sentiment que mon livre, cette partie de moi tournée vers elle, n’avait servi à rien ni à personne…
Infinie tristesse et grande colère avaient navigué de concert au fil du temps et d’une eau traitre jusqu’à ce que…
Voix in : « Attention, je sens que tu es prête à déformer la réalité. Ou à en cacher une partie…
– D’accord, pardonne-moi.
– C’est fait. Mais recommence.
– D’accord » .
Infinie tristesse et grande colère avaient navigué de concert au fil du temps, mais depuis Candice j’avais appris à les contourner sans les dénier. Dès le lendemain je commençai une suite à mon livre. Des semaines et des semaines durant je couchai des phrases et des phrases, amoncelai des pages et des pages. A4, A5, tickets de métro, bouts de journaux, confettis… Tout papier qui traînait était bon pour recueillir dans l’instant ma pensée galopant encore vers l’écho immatériel qu’il me restait d’elle. Jusqu’à… jusqu’à aujourd’hui.
Ce ne fut que l’ébauche d’un roman : Au square des Arts , titre tiré d’une phrase clairement prononcée dans mon sommeil au terme d’un rêve. Ma propre voix m’avait réveillée et avec elle ma volonté de continuer l’histoire, celle d’une femme nommée Yannick et de deux hommes, amenés à se rencontrer au hasard de petits poèmes écrits et disséminés par l’un d’entre eux dans des recoins précis de la ville.
Mais voilà, ça ne fonctionnait plus, ça ne dépassait pas le stade du brouillon, d’idées enchevêtrées à l’état de squelette incomplet, de mots fantômes… comme elle. Je ne suis pas faite pour les fictions : il me faut la vraie vie pour convoquer les idées d’une créativité fluide et cohérente. L’inauthenticité me perd et le faux me dilue. Les mots n’émergent pas. Pour écrire il me fallait un déclencheur positif, pas une goupille à retardement. Et pour écrire comme j’avais écrit il me fallait le regard d’une main qui prend, pas d’une main qui déchire…
Voix in : « Là, tout doux, reprends-toi, ça va aller, tu le sais.
– Oui…
– L’aurais-tu recontactée sans l’aide de sa patiente ce matin ?
– Un jour, dans longtemps. Je lui aurais envoyé mon premier livre publié et broché. Il était pour elle…
– Celui-là même qu’elle a pris avec fougue puis jeté avec rage ?
– … Entre la colère calmée et l’indifférence affichée il y a un gouffre. Mais je la sens curieuse, et grande lectrice aussi. Peut-être aurait-elle accepté ce qui était finalement son portait, quel qu’en soit le narrateur. De mon côté j’accepte de prendre des risques. C’est ainsi que la vie m’intéresse : parfois sur le fil.
– Indirectement c’est elle qui t’a recontactée aujourd’hui…
– Non. Elle avait donné mes coordonnées à sa patiente lors de nos temps heureux, pas de notre guerre froide… »
Alors, oui, ce coup de fil m’avait ébranlée. Du lit qui avait recueilli mes tremblements démesurés jusqu’au fauteuil de mon bureau toujours réassurant, une étape incontournable s’offrait à moi : informer… Madame Jissey du contact de sa patiente pour sa fille.
Ce n’est qu’à cet instant que la réalité m’enveloppa entière de son voile clair et chaud : bien que ne sachant plus rien de son état d’esprit actuel, je n’attendais qu’un signe du ciel pour lui écrire à nouveau…
2
Avant propos du livre I
… « C’est grave, docteur, d’avoir envie d’écrire à sa psy alors qu’une analyse se veut d’abord échange de paroles et de regards ?
– Euh… oui peut-être… enfin non, par

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