Mako
121 pages
Français

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Description

Laurent Guillaume Mako Policier Prix “coup de poing” de Frédéric Beigbeder, Prix du polar 2009 Éditions Les Nouveaux Auteurs 16, rue d’Orchampt 75018 Paris www.lesnouveauxauteurs.com ÉDITIONS PRISMA 13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex www.editions-prisma.com Copyright © 2009 Editions Les Nouveaux Auteurs — Prisma Média Tous droits réservés ISBN : 978-2-81950-014-8 A Violaine, Camille et Lucie, les femmes de ma vie. A Killian mon presque fils. I Lorsque Lily sortit du night-club, le froid de la nuit la saisit brutalement. Elle salua le portier d’un petit geste de la main. Le colosse, vêtu d’une parka de cuir noir, crâne rasé et regard épais, soufflait dans ses mains pour les réchauffer. Il répondit d’un hochement de la tête. Elle s’engagea dans la rue pendant que, simultanément, les rumeurs de musique techno s’estompaient. Les premières respirations lui brûlèrent les poumons tant l’air était glacial. Elle frissonna, sa petite robe de Stretch et son joli blouson d’été ne la préservaient pas des températures hivernales. Ses pieds, ankylosés par plusieurs heures de danse, la faisaient souffrir. Lily noua ses bras autour de sa poitrine pour atténuer la sensation de froid. Quelle soirée de merde ! Plusieurs types, alléchés par ses formes graciles et son maquillage exubérant avaient tenté leur chance. Que des pauvres mecs sans intérêt et sans discussion.

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Date de parution 20 juin 2010
Nombre de lectures 10
EAN13 9782819500148
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Laurent Guillaume
Mako
Policier
Prix “coup de poing” de Frédéric Beigbeder, Prix du polar 2009




Éditions Les Nouveaux Auteurs 16, rue d’Orchampt 75018 Paris www.lesnouveauxauteurs.com
ÉDITIONS PRISMA
13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex www.editions-prisma.com
Copyright © 2009 Editions Les Nouveaux Auteurs — Prisma Média Tous droits réservés ISBN : 978-2-81950-014-8

A Violaine, Camille et Lucie, les femmes de ma vie. A Killian mon presque fils.
I

Lorsque Lily sortit du night-club, le froid de la nuit la saisit brutalement. Elle salua le portier d’un petit geste de la main. Le colosse, vêtu d’une parka de cuir noir, crâne rasé et regard épais, soufflait dans ses mains pour les réchauffer. Il répondit d’un hochement de la tête. Elle s’engagea dans la rue pendant que, simultanément, les rumeurs de musique techno s’estompaient. Les premières respirations lui brûlèrent les poumons tant l’air était glacial. Elle frissonna, sa petite robe de Stretch et son joli blouson d’été ne la préservaient pas des températures hivernales. Ses pieds, ankylosés par plusieurs heures de danse, la faisaient souffrir. Lily noua ses bras autour de sa poitrine pour atténuer la sensation de froid. Quelle soirée de merde ! Plusieurs types, alléchés par ses formes graciles et son maquillage exubérant avaient tenté leur chance. Que des pauvres mecs sans intérêt et sans discussion. Elle soupira, les Français étaient persuadés que toutes les filles des pays de l’Est étaient des putes. Elle se reprocha cette sortie en boîte. Non seulement elle avait dépensé une part non négligeable de ses maigres deniers, mais, en plus, elle sera fatiguée demain matin pour ses partiels de psychologie. C’était d’ailleurs la raison pour laquelle ses copines avaient toutes refusé de sortir. « Quelle conne je fais » marmonna-t-elle. La rue était complètement déserte. Le son des talons métalliques de ses bottes montantes martelait nerveusement le bitume luisant d’humidité. Clac, clac, clac. La cité universitaire était encore loin et, à cette heure indue, pas question d’attraper un bus. Elle frissonna à nouveau, mais de nervosité cette fois. Un bruit de moteur gronda derrière Lily. La jeune fille sursauta et se retourna. Un gros 4X4 noir venait de se garer à une centaine de mètres. Des hommes descendirent sur le trottoir et parlèrent entre eux, l’un d’eux éclata d’un rire gras. Pas de quoi s’alarmer. Lily pressa le pas malgré tout. Elle s’alluma une cigarette et songea que ses habits allaient encore empester la clope. « Il faudra que je les laisse cette nuit sur le petit balcon » pensa-t-elle. Le 4X4 la dépassa soudainement en faisant hurler son puissant moteur. Le cœur de Lily faillit s’arrêter de battre. Le véhicule disparut au coin de la rue dans un couinement de pneus maltraités. Lily reprit sa marche en pestant. « Quel connard ! » Elle consulta sa montre et dut orienter le cadran afin de pouvoir lire le verdict des aiguilles à la lumière d’un lampadaire. 4 h 30. Ça lui laissait tout au plus deux heures de sommeil à condition de faire l’impasse sur le petit déjeuner. Cela l’arrangeait puisque, de toute façon, elle n’avait plus rien à manger, hormis un paquet de pâtes, une boîte de raviolis et une bouteille de lait entamée. Les larmes lui montèrent aux yeux. Soudain, sa famille, sa mère, son père et même son insupportable petit frère lui manquèrent à un point tel que cela lui fit mal physiquement.
Un son métallique tinta juste derrière elle. Le cœur de Lily se mit à battre à tout rompre. Elle jeta un coup d’œil par-dessus son épaule. Un homme marchait tranquillement derrière elle, à une vingtaine de mètres. Il jouait avec un briquet-tempête dont il ouvrait et fermait le couvercle avec le pouce. Il était vêtu d’une veste de treillis couleur camouflage et portait un bonnet noir enfoncé jusqu’aux oreilles. Il parut gigantesque à la jeune fille. Ses yeux luisaient dans l’ombre de son visage osseux. À cet instant, Lily sut. Son cœur s’affola dans sa poitrine et ses genoux menacèrent de flancher. Elle prit une profonde inspiration et repartit en direction de la cité universitaire, accélérant le pas. Elle était à la limite de courir, mais sachant que si elle cédait à la tentation, l’homme serait sur elle en quelques enjambées, elle réfrénait son envie de s’enfuir. Une sueur froide lui coula entre les omoplates. Elle réfléchissait à toute vitesse. Son téléphone était dans la poche avant de son blouson. Elle fit glisser discrètement sa main et se saisit du portable. Toujours en tentant de dissimuler son geste, faisant écran de son corps, elle fit coulisser le combiné et composa d’une main le numéro de la police. Elle portait discrètement le portable à l’oreille lorsqu’une poigne d’acier saisit son bras. Elle tenta de se dégager, mais l’homme se colla contre elle en maintenant le poignet dans un étau. Il serra si fort que Lily, les larmes aux yeux, dut lâcher le téléphone sous l’effet de la douleur. L’homme empestait l’alcool, il lécha la joue de la jeune fille d’un grand coup de langue. Lily cria de dégoût. C’était froid, humide et répugnant. C’était le baiser de la mort. Elle hurla de peur et d’impuissance.
– Non, lâchez-moi ! Au secours !
Il la frappa violemment de sa main libre.
– Ta gueule !
Personne ne réagit dans la rue. Dans ce quartier, les gens courbaient l’échine et s’occupaient de leurs affaires. C’était préférable. À moitié assommée, incapable de résister, Lily se sentit happée, tirée par le poignet en direction d’un grand bâtiment sombre, un peu en retrait de la rue. Elle geignit, mais ne put qu’opposer une faible résistance à la force colossale de son agresseur. L’homme s’arrêta un bref instant devant un mur d’enceinte en pierres meulières. Un portail métallique lui barrait le passage. Il donna un grand coup de pied dans l’obstacle avec un han de bûcheron. La serrure céda et le battant s’ouvrit dans un grincement aigu de protestation. Lily hurla à nouveau lorsque son bourreau l’entraîna dans les ténèbres.
***
La voiture de police banalisée hantait les quartiers déshumanisés de la banlieue. Dans la rue, pas âme qui vive pour tromper l’ennui des occupants du véhicule. Le front collé contre la vitre froide du passager avant, Mako, les yeux vides regardait les néons des lampadaires hacher la nuit de leur ersatz de lumière. Il contemplaît le ciel de la banlieue avec un rien de dégoût. Il avait une nuance tirant sur l’orange pisseux. Le policier ne se rappelait même plus quelle était la couleur réelle de la nuit.
– Y’a pas d’étoiles.
– Quoi ? Qu’est-ce tu dis ? râla Bill, le chauffeur.
Sur la banquette arrière, Papa marmonna :
– Il dit qu’il n’y a pas d’étoiles.
Mako regarda les deux membres de son équipage. Bill conduisait, attentif et tendu, cherchant le crâne 1 . Petit, osseux et nerveux, il s’était mis en tête de battre le record de la BAC 43. Ces salopards avaient réalisé 38 interpellations le mois dernier. La honte pour l’équipe de Mako qui avait peiné à en ramener une vingtaine. À l’arrière, gigantesque, placide et doté d’une imposante moustache, Papa avait casé ses cent vingt kilos sur la banquette de la grosse berline. Il caressait distraitement le cuir souple et clair du siège. C’était une belle voiture, un véhicule reclassé en provenance du service de protection des hautes personnalités. Véhicule rapide. Il fallait avoir subi un stage particulièrement éprouvant pour gagner le droit de poser ses fesses derrière le volant de cette bagnole. Normal, des ministres avaient honoré ce véhicule de leur présence technocratique. Le puissant moteur V6 ronronnait, engloutissant les kilomètres de rues désertes. Le froid avait chassé la clientèle de la BAC 47 de son terrain de jeu, elle se terrait dans les montées d’escalier des immeubles gris de la cité, fumant cigarettes et joints.
– C’est normal, ça s’appelle la pollution lumineuse, reprit Bill, j’ai vu une émission là-dessus, l’autre jour, à la télé.
Dans la vie, Bill faisait bien deux choses, tenir un volant et chasser les voyous. Le reste du temps, il le passait devant sa télévision à ingurgiter les programmes des chaînes culturelles. Il adorait étaler sa science pour épater ses collègues. Il ne voyait pas, ou feignait de ne pas voir, les regards ironiques que ses coéquipiers échangeaient.
Mako soupira :
– Putain de banlieue, même la lumière est polluée…
La radio embarquée du véhicule l’interrompit.
– À tous les véhicules dans le secteur du quartier des navigateurs, on signale une alarme intrusion à l’école Jules Ferry, rue Savorgnan de Brazza.
Mako se pencha et se saisit du micro en soupirant d’aise :
– On dirait que les affaires reprennent, il annonça au micro : BAC 47 prend l’intervention école Jules Ferry.
– Bien reçu BAC 47.
Bill pressa la pédale de l’accélérateur. Le moteur feula et propulsa ses passagers dans les rues glacées. Mako baissa la vitre électrique de sa portière et sortit le gyrophare tournoyant. Le bleu fit un bruit métallique quand le support magnétique adhéra au toit du véhicule. Il remonta la vitre. Comme à chaque fois, depuis vingt ans, Mako frissonna de plaisir.
***
Lily ne percevait plus son environnement qu’à travers un brouillard épais de souffrance et d’angoisse. L’homme la traînait par les cheveux. À chaque fois qu’elle trébuchait, son bourreau la soulevait de terre, la faisant hurler. Le cuir chevelu de la jeune fille semblait sur le point de s’arracher. Elle sanglotait, gémissait, le suppliait de l’épargner. Elle ne pouvait croire que cela lui arrivait. Pas à elle. Un immense sentiment de révolte mêlé d’impuissance l’envahit. L’homme s’arrêta un bref instant, ils étaient dans un immense couloir bordé, sur la gauche, de grandes baies vitrées donnant sur une cour intérieure. Dehors, tout était sombre, calme et indifférent. Lily distingua l’ombre d’un chêne séculaire dont les branches s’agitaient mollement sous la caresse de la bise. Sur la droite, il y

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