Lilith et Asmodée , livre ebook

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2012

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« Écrire à Asmodée, même un simple message sur l’écran, c’est autre chose. C’est avoir envie de respirer l’odeur de sa veste en cuir, de la mordiller avec les dents, de chercher l’odeur de la cigarette sur ses doigts, de l’alcool dans son haleine, c’est un besoin impérieux, absolu, immédiat de contact avec un homme rude, dur et violent, qui ne semble pas dénué de danger. Je hume sa trace comme un animal sur la piste. »

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Date de parution

12 octobre 2012

Nombre de lectures

0

EAN13

9782748392500

Langue

Français

Lilith et Asmodée
Marie Wisniewska
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Lilith et Asmodée
 
 
 
Retrouvez l’auteur sur son site Internet :
http://marie-wisniewska.societedesecrivains.com
 
 
 
 
 
 
Ma vie est comme un entrelacs celtique : on croit voir un tapis tressé de mille brins différents, aux formes tantôt rondes, tantôt anguleuses, aux couleurs variées, aux apparentes symétries ou à l’évocation d’animaux fabuleux, mais il n’y a qu’un seul fil qui passe et repasse, change d’aspect et se déguise.
Vous ne connaissez qu’un fragment de mon tapis, et peut-être moi-même je ne le connais pas complètement.
Telle Pénélope, mon subconscient le tisse chaque nuit pendant mon sommeil, et pendant le jour vous ou moi nous le découvrons.
Mais il y a des moments privilégiés où j’ai accès aux côtés les plus sombres de ce tissage, quand le calme est total autour de moi : alors apparaissent des idées bizarres, des fantasmes enfouis, des souvenirs oubliés qui comme des créatures fantastiques sortent peu à peu de l’ombre, s’enhardissent, s’apprivoisent et revendiquent une place dans mon existence.
 
Il n’est pas très tard mais il fait déjà nuit depuis quelques heures.
L’automne raccourcit le jour et je m’enfonce peu à peu dans la mélancolie humide et pourrissante du signe du Scorpion, mon signe, celui des eaux tourmentées.
Je me sens seule malgré le tourbillon quotidien, et cette solitude qui m’habite me ronge comme un cancer.
Elle me donne aussi une impression de vide qui m’attire, de vertige… une envie de tout arrêter…
Et pourtant il y aura sans doute encore des moments de soleil, de joie, de bonheur ; Alors je poursuis le chemin par curiosité, pour voir ce qu’il y a derrière la porte du lendemain.
Et si demain apportait un nouveau goût de vivre… oui, si demain avait un goût nouveau, car il y a si peu d’instants du passé que je voudrais revivre ; ils ont été si souvent assortis d’un versant gris ou noir qui gâchait le plaisir.
Le bonheur dans le passé se résume à des clichés que je respire à nouveau pendant de courts instants quand ils s’associent d’eux-mêmes au présent, sans que je les sollicite et sans que je puisse les retenir. Alors, pendant quelques secondes je vis avec volupté.
Mais les moments les plus intenses je les vis dans un imaginaire qui n’arrive jamais, là où les passions existent à l’état pur, tels les corps chimiques à leur naissance.
Où est ma vraie vie ? dans un quotidien froid, lisse, organisé, que chacun peut consulter et vérifier comme un annuaire, dans une vie parallèle pleine de concerts, de musique, de théâtre où je bourlingue d’une activité ou d’une passion à l’autre, ou dans un monde mystérieux peuplé de croyances et de fantasmes qui m’accompagne comme une présence discrète.
Et, par moments ces différentes vies qui coexistent ne se contredisent-elles pas ? L’une d’elle n’a-t-elle pas envie de douceur et de sensibilité alors que l’autre aspire à la violence, à la passion ?
 
Alors ce soir, comme beaucoup d’autres qui l’ont précédé, mais avec plus de détermination, j’ai envie de poser mon sac. Après tant d’années passées à courir derrière la notoriété, la réussite, la reconnaissance, le bien faire, le bien paraître, être enfin quelqu’un par moi-même… ou simplement, EXISTER, avant de disparaître définitivement.
J’ai commencé à mettre de l’ordre dans mes idées, dans mes souvenirs, dans mes vêtements, dans mes livres, simplement pour « être disponible ».
Prête à repartir pour cet « autre monde » dont nous sommes sans doute issus et qui va nous accueillir de nouveau ? Non, sincèrement, je ne crois pas à l’imminence de ce départ.
Prête à changer ? Peut-être, mais pour quelle vie ? Avec qui à mes côtés ?
C’est vrai que j’ai envie de trouver doucement ma résonance, une tendresse, une complicité, une main sur mon épaule, un silence partagé.
J’ai aussi une soif de rires, de caprices, de déraisons, de gloutonneries et de folies qui n’est pas assouvie.
Mais il y a là devant moi que l’immense page vide du lendemain qui restera peut-être à jamais non écrite. Je n’ai personne avec qui vieillir en paix, avec qui partager des poèmes, des musiques, des solitudes, des nuits de pleine lune et des couchers de soleil.
Je n’ai personne avec qui parler de la mort, avec qui préparer ce passage, initiation ultime à cet autre monde auquel je crois parce que je le sens quotidiennement à mes côtés comme une présence constante et rassurante.
 
Mes racines sont à jamais coupées, je me balance comme méduse au gré des courants, je flotte entre le chaud de la surface et le froid des profondeurs sans savoir si je vais m’échouer sur le sable ou être fracassée sur des rochers ; je n’ai plus ni repères ni attaches, et peut-être comme il est parfois écrit à la bombe sur des murs ou sur des palissades : NO FUTURE.
 
L’automne et le soleil couchant ! Je suis heureux !
Du sang sur de la pourriture !
L’incendie au zénith ! La mort dans la nature !
L’eau stagnante, l’homme fiévreux !
 
Oh ! C’est bien là ton heure et ta saison, poète
Au cœur vide d’illusions,
Et que rongent les dents de rats des passions,
Quel bon miroir, et quelle fête !
Verlaine : Un soir d’octobre
 
 
 
 
Rencontres
 
 
 
1.
Je suis en train de commencer
Un bouquin dont, affres muettes !
Le titre duquel je m’enquête
M’inquiète au point de laisser
 
Aller là mon esprit sans trêve,
Verlaine : Prologue
 
Je n’ai jamais été une passionnée de poésie, j’ai écrit des poèmes comme beaucoup d’adolescentes dans des circonstances romantiques : coucher de soleil en vacances, feu de bois à la campagne, indignation politique, ou quand j’étais déchirée par un éphémère mais pathétique chagrin d’amour
Au cours Simon nous devions tous présenter un poème ou une fable à l’examen d’entrée. Ne sachant pas trop comment m’en sortir sans ânonner des alexandrins, je choisis astucieusement « Le chat, la belette et le petit lapin » de La Fontaine qui me permettait de jouer différents personnages et de contourner de cette façon la diction d’un poème qui me paraissait trop difficile.
Au fur et à mesure des cours et des auditions, à travers les textes choisis par les élèves, je m’aperçus que quasiment toutes les poésies qui me touchaient sincèrement étaient de Verlaine.
Cette attirance se confirma quand je me plongeai vraiment dans son œuvre et que j’essayai de comprendre cet homme qui avait vécu un véritable enfer, déchiré entre ses différentes personnalités.
Comment concilier un amour des femmes sans limites, qui donne naissance à des poèmes d’une délicatesse exquise, d’une sensualité qui vous charme, vous captive et éveille vos sens, et une pornographie plus que rude dès qu’il parle de ses amours masculines.
Comment accepter une violence qui peut vous conduire au crime, et vivre un amour de Dieu et de Jésus si profond et si sincère qu’il s’exprime par une spiritualité de tous les instants ?
Et cette dépendance à l’alcool qui l’a conduit presque à la rue, alors que ses contemporains reconnaissaient et récompensaient son talent !
Il y a sûrement un héritier de Verlaine dans les poètes maudits d’aujourd’hui. Un homme chez qui on pourrait retrouver à la fois la même violence et la même sensibilité, qui ait atteint une certaine notoriété mais pas « la » célébrité et qui se débattrait entre l’ombre et la lumière.
Alors que nous assistions à ce festival de musique nous avons découvert par hasard qu’Asmodé allait chanter. On avait installé un podium sur la chaussée dans une rue assez large et bien située, entre un café ressemblant à un pub irlandais et une terrasse en plein air.
Il fait une chaleur caniculaire, ce qui est bien rare en Bretagne à quatre heures de l’après-midi ; de plus il nous a fallu abandonner une master class de harpe au Palais des Congrès – une prestation particulièrement culturelle – et venir en courant, car nous avions acheté nos billets à l’avance à Paris, et étant bien sûr tentés d’assister au plus grand nombre de manifestations il y a des chevauchements inévitables.
C’est la première fois que j’écouterai un concert d’Asmodé en sachant qui il est et ce qu’il a écrit : une légende vivante, une référence absolue.
Son nom de scène s’écrit avec un seul e à la fin, car je crois qu’il y a un groupe de heavy metal qui porte le même nom mais avec deux e ; de toute façon, lui ne fait pas partie d’un groupe, il est lui-même, et il ne chante que ce qu’il écrit : paroles et musiques. En tout cas c’est ce que beaucoup croient encore, mais dans ses derniers CD, comme me le faisait remarquer un spécialiste, toutes les musiques sont cosignées comme s’il n’avait plus d’inspiration musicale. Par contre les textes ne peuvent être que de lui car son écriture et son inspiration sont bien particulières. Il est vrai que la co-signature est bien souvent un moyen détourné de rémunérer les musiciens qui travaillent avec vous.
Je suis très proche du podium mais complètement sur le côté : c’était, quand je suis arrivée, la seule table encore libre et à l’ombre de surcroît.
Les cinq musiciens et l’ingénieur du son ont installé le matériel rapidement en buvant quelques bières, et, tout en faisant quelques essais de sonorisation, ils discutent avec des ombres à l’intérieur du pub ou avec des passants qu’ils ont l’air de bien connaître.
Georges Satanides organise tout, veille à tout, il teste les claviers avec virtuosité, surveille le public, accorde sa guitare, boit un coup, puis voyant l’heure arriver, il va chercher avec un brin d’aff

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