Lendemain de tsunami
342 pages
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Lendemain de tsunami , livre ebook

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Description

« Elle m'a pris la main, m'a tiré vers elle, et m'a serré contre sa grosse poitrine qui débordait de son chemisier rose. Elle me serrait si fort que je sentais son cœur battre. »


L’amour entre un enfant « gitan de la mer » et une occidentale d’une ONG internationale après le terrible tsunami de 2004 qui a ravagé les côtes thaïlandaises, rien ne pourra les séparer sauf l’irrémédiable peut-être.
Dans un récit d’un parcours absolu, Frédéric ANDRIEU livre une tragédie humaine, où un gamin thaï, obéit à une loi profonde qui le pousse à refuser le quotidien et à s’accomplir en même temps.
À travers ces deux portraits qui se découvrent, l’auteur reprend un thème qui lui est cher, celui de la rencontre entre deux mondes, loin de la vitrine exotique et du mythe touristique, il va au-delà de la vision idéalisée de lendemain de catastrophe des peuples appauvris vers un monde ambivalent, fait à la fois d’amour et de désillusions, repoussant et attirant.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 27 janvier 2015
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332878090
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-87807-6

© Edilivre, 2015
1
La première chose que je dois vous dire c’est qu’on habitait une cabane en tôle de trois mètres par quatre et que pour Madame Farang, comme je l’appelais, avec tous ces kilos qu’elle devait soulever chaque matin pour se lever, et seulement deux grosses jambes, c’était une vraie source de vie quotidienne, avec tous les ennuis et les peines. Elle nous le rappelait chaque fois qu’elle ne grommelait pas car elle était allemande d’autre part. Sa santé n’était pas très bonne non plus, il faut bien le reconnaître, et je peux vous dire aussi dès maintenant que c’était une femme qui aurait mérité un corps plus svelte ou une chaise à porteurs pour se mouvoir aisément.
J’avoisinais les trois ans quand j’ai rencontré Madame Farang pour la première fois. Enfin, je crois, car avant je n’ai pas de mémoire comme si l’ignorance avait fait partie de mon quotidien. Je dois vous avouer que j’ai cessé d’ignorer à l’âge de trois ans, ou peut-être trois ans et demi, et parfois, cela me manque, j’ai la nostalgie de mon jeune âge.
Il n’y avait pas de route pour venir à notre village au bord de la mer, juste un chemin de terre cabossé qui nous servait aussi de terrain de jeu. Madame Farang, quand elle venait nous voir, était obligée d’enjamber les bosses et les trous, elle disait qu’elle allait mourir sur ce sentier, en pleine chaleur suffocante. Pourtant, l’eau lui coulait de partout, sur le front, sous les aisselles, dans le dos, enfin, partout comme je vous le dis. Tous les enfants qui allaient à sa rencontre, se mettaient alors à pleurer, car chez nous, c’est ce que l’on fait quand quelqu’un meurt. Pas longtemps, car j’appris plus tard que nous nous remettions dans la peau d’un autre, ou d’une autre, voire d’un animal… C’est la réincarnation, mot difficile à se souvenir, mais maintenant, je le retiens bien et je sais ce que c’est ! Souvent nous étions sept ou huit autour d’elle quand elle venait au village, parfois même plus à lui sauter au cou.
Au tout début, je ne savais pas que Madame Farang s’occupait de moi seulement parce qu’on lui avait demandé de le faire. Quand je l’ai su, j’avais bien six ans révolus, et cela m’a porté un coup, je pensais qu’elle m’aimait pour rien, comme ça, mais pas pour un travail qui lui rapportait quelques sous. Je fus bien triste et j’en ai pleuré toute la nuit. Ce devait être vraiment mon premier grand chagrin d’amour. Je l’aimais bien, moi, Madame Farang.
Elle l’a bien vu le lendemain que je n’étais pas comme d’habitude, triste et boudeur. Elle m’a expliqué alors que la famille, ça ne veut rien dire, et elle m’a expliqué alors que dans son pays, en Allemagne, il y en a même qui partent en vacances en laissant leurs chiens attachés à des arbres au bord de la route, et qu’ils meurent privés d’affection. Elle m’a pris les mains et m’a assuré que j’étais ce qu’elle avait de plus précieux au monde. J’ai eu du mal à le croire et je suis parti en courant rejoindre mes copains.
J’ai réfléchi plus tard à ces chiens abandonnés, et je me suis dit alors que ces Farangs étaient fous, attacher des chiens parce qu’on part en vacances !!!…
Ici, en Thaïlande d’où je vous raconte mon histoire, les chiens errent, mangent quand ils veulent et ce qu’ils veulent, et s’amusent entre eux. Ils rentrent chez leurs maîtres quand ils en ont envie, et quand ils sont là. C’est quand même plus facile pour eux et pour les maîtres, ils ne meurent jamais de chagrin comme ça ! Je n’ai jamais vu un chien malheureux du haut de mes dix ans.
Moi, j’en avais un, un petit chien, et je l’aimais comme cela n’était pas permis. Il était toujours en liberté, et venait jouer avec moi et mes camarades quand il le voulait.
On me l’avait donné tout petit, une boule de poils que sa mère ne voulait pas, soi-disant un peu comme la mienne probablement. J’étais heureux ce jour-là de tenir ce chiot dans mes bras ; fier, il faut bien le reconnaître, et je n’arrivais pas à lui trouver de nom. J’allais encore à l’école à cette époque-là, et j’avais appris à lire, enfin un peu. Je voulais trouver un nom que personne n’avait jamais prononcé à un chien, et un nom qui ne fasse pas trop thaï. Des noms frappaient à la porte de mon cerveau, comme « Coca » ou « Mac Do », mais ils étaient marqués sur toutes les affiches publicitaires par-ci par-là. Je voulais qu’il soit mon chien, et pas qu’il ne devienne trop célèbre avec son nom sur toutes les affiches. Je n’arrivais pas à me décider, cela me turlupinait drôlement. Un matin, je me lançais, ce serait « Achtung ». Aucun chien thaïlandais ne pouvait s’appeler ainsi, j’en étais sûr. C’est Madame Farang qui disait ça tout le temps à notre égard quand nous jouions trop près d’elle, dans sa langue à elle. Je sus bien plus tard ce que cela voulait dire. « Attention ». J’étais plutôt content de son nom. De « l’attention », il fallait toujours en avoir, comme disaient les grands, surtout pour un chien. Et mon chien, je lui en donnais de l’attention, parfois excessivement je le reconnais. Quand je le promenais, je me sentais quelqu’un parce que j’étais tout ce qu’il avait au monde. Il me regardait avec ses petits yeux tout ronds au milieu de ses poils hirsutes et emmêlés car je ne le peignais pas, il ne me quittait jamais. Puis avec l’âge, il prit ses aises, et un peu plus d’indépendance pour aller traîner dans le village avec les autres de son espèce. Il en revenait encore plus sale. Il l’était tellement que Madame Farang quand elle venait à la cabane, le faisait s’enfuir en faisant semblant de lui jeter des pierres, elle craignait d’attraper des puces, qu’elle me disait. Moi, je pensais que les puces s’acoquinaient uniquement avec les chiens ou les chats, mais pas avec les hommes comme nous. Elle avait sûrement raison, les adultes savent toujours plus que nous, les enfants. Alors, lorsqu’Achtung a commencé à grandir vraiment pour moi au niveau sentimental, j’ai voulu lui construire une vie, c’est ce que j’aurais fait pour moi-même si cela avait été possible. Il faut dire que mon chien n’était pas n’importe qui, non plus, il avait des airs éloignés juste un petit peu, des chiens qui passent à la télé dans les séries pour chercher les bandits qui ont volé de l’argent. Il a la même couleur, ce qui me convenait parfaitement. Pour moi, sa destinée était toute tracée, il serait chien policier. Et moi, policier alors !
Je me mis donc à garder les voitures qui venaient se garer à l’entrée du village, sur la route au bord de la mer. Avec mon chien, nous aidions les touristes ou les gens du pays à faire la manœuvre pour mettre leur véhicule au bon endroit, et nous la gardions jusqu’au retour de son propriétaire. Eh bien, je ne sais pas si vous allez me croire, mais personne ne nous donna une pièce, par même un centime de baht. Alors, assis près de mon chien sur un trottoir, j’ai chialé comme une madeleine en me cachant de honte, mais j’étais heureux, j’avais un métier, il ne me rapportait rien, juste pour l’instant.
Madame Farang nous aidait un peu avec son association, une ONG qu’elle disait, pour nous apporter des vêtements, de la nourriture, et quelques jouets parfois. J’aurais bien voulu l’aider, avec l’argent gagné sur le parking avec mon chien, mais rien n’y faisait. Nous n’avions aucune sécurité, si elle tombait malade ou devait retourner dans son pays, sans son aide et un peu d’argent qu’elle nous donnait, qu’allions-nous devenir ? Ce n’était pas vraiment une vie pour un chien.
Alors, j’avais remarqué qu’en dehors de notre village, un monsieur Farang (blanc en langue thaïe) comme Madame Farang, venait tous les jours apporter de la nourriture aux chiens errants. Il faisait comme elle, mais pour les animaux. Je trouvais ça très bien, et sympathique de sa part. Il fallait voir les chiens accourir à son arrivée dans sa petite voiturette dévorée par la rouille. Ils lui faisaient une fête comme si c’était son anniversaire chaque jour, c’était drôle et je l’enviais d’avoir autant d’amis chiens. Achtung vint un soir avec moi voir comment cela se passait, et il alla participer au repas des autres, qui l’acceptèrent sans problème. C’est là que je me rendis compte que les animaux sont bien moins stupides que les humains, ils sont capables de se partager une gamelle de croquettes alors que nous, nous ne savons pas toujours le faire. J’ai habitué petit à petit mon chien à venir se nourrir chaque soir et il y prit goût. Il jouait aussi avec les autres, il s’était fait une autre bande de copains, et j’étais content pour lui et pour Madame Farang qui avait une bouche de moins à nourrir ainsi. Mon chien prit son indépendance et je ne le voyais plus que très rarement.
Je ne pouvais plus devenir policier à surveiller les voitures des Farangs qui curieusement venaient nous voir au village. Mais pourquoi donc, tous ces touristes venaient-ils ici ? Je ne me l’expliquais toujours pas.
Un jour, alors que je jouais avec des copains à proximité des étals de poissons, je m’approchais de Yao, un vieux pêcheur qui venait juste en ce début d’après-midi d’installer quelques-unes de ses prises sur son plateau métallique sur lequel il jetait de la glace pilée.
– Dis-moi, Yao, pourquoi les Farangs, ils viennent tous nous voir ici ?
– Ils viennent acheter du poisson tout simplement.
– Oui, je suis bête mais ça, j’avais compris. Non mais, ils n’achètent pas tout, ils regardent, prennent des photos aussi, ils achètent des colliers de coquillages que les femmes vendent un peu plus loin.
– Tout simplement, notre village est typique, nous sommes des gitans de la mer de père en fils, et ce, depuis très longtemps. Autrefois, nous n’avions pas de vill

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