Le rire de la peur
188 pages
Français

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Le rire de la peur , livre ebook

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Description

New York, 1970. Alan Stabritt, ancien joueur professionnel de football américain contraint d'arrêter sa carrière à la suite de claquages répétés, s'associe avec son ami de jeunesse de Harvard et devient détective privé. Une première enquête à deux, délicate et dangereuse. Il raconte...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 17 avril 2014
Nombre de lectures 2
EAN13 9782332707246
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-70722-2

© Edilivre, 2014
Le rire de la peur
 
Œuvre de fiction
Toute ressemblance avec des événements ou des personnes existants ou ayant existés serait fortuite.
Tous droits réservés
Copyright by Géraud de Murat
 
 
Vingt mois se sont écoulés et, malgré des diversions sans nombre alternées avec les soins successifs d’une demi-douzaine d’orfèvres en la matière, je ne suis pas parvenu à ce que s’estompe le lancinant souvenir de ce qui s’est passé.
Le dernier psychiatre consulté – le meilleur bien entendu – a eu la patience de m’écouter longuement sans m’interrompre. Lorsque je me suis tû, il a continué à observer un silence qui m’a donné la soudaine impression de me trouver dans une cabine où s’était fait le vide. J’ai fini par lever les paupières et, la vue de son visage évoquant le masque d’une pythie en transe, je me suis révolté à la brusque révélation de ma faiblesse. En proie à une gêne très proche de la honte, je n’ai plus eu que l’ambition de m’évader poliment de cette atmosphère où je n’étais désormais plus du tout certain d’obtenir la guérison d’un mal qui n’en était peut-être pas un.
D’un geste lent de l’avant-bras, l’homme de l’art à annihilé la velleité d’une fuite qui ne s’était pourtant pas encore manifestée. Expérience et savoir, il m’a figé sur place pour, d’un ton grave et convaincant, exprimer une opinion aussi brève que définitive : « Votre cas ne nécessite pas de sujétion aux tranquillisants. Supprimez-les. Continuez à vous distraire mais sans vous en faire une obligation. Enfin, astreignez-vous à écrire ce que vous venez de me dire et tout ce que vous ne m’avez pas dit. Racontez en détail les aventures vécues en compagnie de votre ami. Faites-en un roman. Faites-en des romans. Je ne vous garantis pas le succès littéraire mais je vous assure que ce fameux éclat de rire qui vous importune ne se manifestera plus ».
Un conseil à mille dollars ne se méprise pas plus que ne se discute l’estimation de sa valeur ainsi fixée par celui qui le donne. Alors, l’espoir balayant les doutes, je me suis muni de plusieurs rames de papier que je suis presque décidé à noircir.
* *       *
New-York, Greenwich Village. C’est là qu’en fin d’après-midi a commencé pour moi une vie étonnamment pleine et exaltante. J’y étais venu, en désœuvré, avec la seule idée de voir de près cette jeunesse composée de drogués et d’artistes, de talents et de vagabonds dont tout le monde parlait et que je n’avais pas eu l’occasion de connaître bien qu’ayant encore l’âge d’en faire partie. En trois heures, à pas lents, j’avais eu le temps de voir beaucoup, de plaindre ou d’admirer, d’être curieux ou dégoûté. Tête levée, je regardais, pensif, vers l’ancienne maison des Roosevelt lorsqu’une légère tape sur la nuque m’a fait sursauter et j’ai crié « Greg » avant même de me retourner d’un bond.
Greg Shelton était bien la seule personne à pouvoir se permettre de cette façon une telle familiarité. Nous étions donc face à face, les mains croisées et fortement serrées, le franc sourire heureux de l’un se reflétant sur le visage de l’autre.
– Allons, Al, dis-moi ce que tu trouvais de si intéressant à cette vieille baraque ?
– Elle n’est pas en cause. Regarde, au-dessus de la corniche, à gauche, le chat…
– Le siamois ? Je vois ! Parce qu’il est à côté d’une gouttière, te voilà en train d’en faire un poème… Etrangeté des fréquentations… Tu sais, même un pedigree a des besoins. Celui-ci a certainement repéré le meilleur endroit pour commencer sa ronde de nuit !
Il n’avait vraiment pas changé. Toujours aussi vif, enjoué, précis comme si, pour chaque jugement, il appliquait des règles mathématiques.
– Et toi, que fais-tu par ici ?
Avec les gestes d’autrefois, il a pris une allure de conspirateur, un doigt sur les lèvres, la voix basse :
– …Une filature…
– Et tu l’as interrompue ?
– Oh, non, rassure-toi ! Je t’avais déjà aperçu, je suis revenu vers toi quand j’ai fini par loger la bonne femme…
– Loger la bonne femme ?
– C’est un terme de métier indiquant que l’on sait où retrouver la personne dont on s’occupe.
– En somme, un truc qui fait partie de ton génie…
– Eh, là ! Ne confonds pas la patience avec le génie… Souviens-toi de ce prof de philo. Il s’appelait Lawson et on l’avait surnommé Fatty 1 par dérision, parce qu’il était très long et trop maigre. Un jour, en plein cours, il a trébuché sur ce mot de génie et, aussitôt, il a chaussé son archaïque pince-nez comme il le faisait chaque fois qu’il voulait souligner l’importance de ce qu’il allait nous expliquer…
– Oui, en effet. Et ça a donné à peu près ça : le génie est exceptionnel ; ses traits ne sont distribués qu’avec grande parcimonie. Il est parfois incroyable au point de le comparer à un éclair capable de donner la vue à un aveugle…
– Bravo ! Il a ajouté qu’espérer semblable privilège serait utopie et qu’il était plus profitable à l’homme d’essayer d’acquérir le talent puisqu’il peut l’obtenir par un travail assidu… Moi, avec l’expérience, j’ai transformé son explication en leçon d’humilité.
Replongé dans l’atmosphère de Harvard, j’en retrouvais soudain l’odeur. Inséparables, Greg et moi y avons passé notre jeunesse. Même âge, mêmes cours, même chambre, même taille, même aspect physique, même caractère, notre commun surnom de twins 2 concrétisait une opinion nous faisant éprouver une certaine fierté. Seule dissemblance, le choix d’un sport. Sans doute pour éviter, sans nous l’avouer, le risque de devoir un jour nous affronter. Après les avoir tous plus ou moins pratiqués, Greg s’est spécialisé dans les Arts Martiaux tandis que j’optais finalement pour le Football. Alors, coupes et trophées sont venus ajouter au studieux désordre d’une chambre sur les murs de laquelle nous n’aurions pu épingler un diplôme. D’ailleurs, je m’en suis aperçu plus tard, ce dernier détail n’aurait eu aucune influence sur nos carrières respectives car, en sortant de l’Université nantis de tous les certificats décernés aux plus brillants sujets, nous avons pris des décisions inattendues et jugées parfaitement incompréhensibles. Greg devenait Détective Privé et je signais un Contrat de Joueur Professionnel chez les Giants !
– Nous n’avons rien à regretter. Ni toi, ni moi, puisque chacun a réalisé ce qu’il souhaitait…
Comme nous le faisions souvent, et bien qu’elles soient passées très vite, il avait suivi mes pensées. Il continuait :
– A propos, sais-tu que contrairement à ce que l’on pourrait penser, c’est toi qui a choisi la carrière la plus dangereuse ? J’ai bien eu quelques bobos mais, en tout, pas plus d’une semaine d’hôpital. Compare… ta clavicule, ton ménisque, ta pubalgie… Trois opérations ! Ça fait combien de semaines d’hôpital, ça ?
J’ai voulu ironiser :
– Tu oublies les claquages, les élongations…
Il m’a interrompu :
– Ouais… Moque-toi ! En tout cas voilà près d’une année que je ne t’ai pas vu parce que j’enquêtais un peu partout mais c’est bel et bien depuis ce temps que je n’ai plus lu ton nom dans les journaux. L’éclipse est de longue durée, non ?
– Oui, tu as raison. Je peux même t’avouer qu’elle me cache complètement le soleil puisque, en vérité, mon contrat avec les Giants n’a pas été renouvelé et que je n’ai reçu aucune offre nouvelle.
– Alors que tu as été le plus grand marqueur de points de ces quatre dernières années, ton Club t’a donc remercié… ? De quoi être vexé !…
– Pas du tout ! J’ai seulement appris que le verbe remercier a une double signification. Pour le reste, je savais que la loi me serait tôt ou tard appliquée. Tu sais, professionnalisme sous-entend business. Quand un cheval boite, on ne l’engage pas dans un steeple-chase !
– Mais tu ne boites pas !!…
– Non. J’ai même été très bien réparé. Mais il est normal que les entraîneurs d’une part et le public de l’autre n’aient plus la même confiance. C’est le jeu. Il arrive un moment où le cheval le plus fringant doit se retirer…
– Au haras !!!
Greg m’a encore interrompu mais, cette fois, il est gai…
– …Dans ce métier, les coups sont nombreux et la carrière est courte. Te voilà obligé à une reconversion…
– Sans doute… mais j’ai le temps d’y réfléchir.
– Eh bien, je pense que nous pourrons en parler.
Brusquement, les traits de son visage se sont tendus, son regard s’est fixé au loin…
– La bonne femme se déplace…
Quel talent ! Du diable si je pouvais m’imaginer qu’il avait continué sa surveillance sans cesser de me regarder ! Sur une dernière phrase, et sans avoir l’air de se presser, il s’est élancé…
– Passe au bureau… j’y serai dans une heure… On dîne ensemble.
C’est ce soir là, au terme de ce dîner à la fois gai et sérieux que j’ai pris ma décision. Quelques jours plus tard, je recevais une Carte Officielle certifiant ma nouvelle profession et un Permis de port d’arme tandis que la porte du bureau de Greg s’ornait d’une plaque neuve associant nos deux noms dans une même fonction. Un apprentissage rapide dû à ses indications précises et à ses conseils judicieux m’a vite rendu capable de l’accompagner dans des enquêtes dont le danger n’était jamais exclu. Doué d’un sang-froid surprenant, il agissait alors avec une extrême rapidité et sans que cette précipitation soudaine compromette le succès de sa réaction. Comme libéré par un formidable éclat de rire extraordinairement sonore, le geste imparable d’une jambe fusant à toute vitesse frappait violemment le poignet armé qui le menaçait et déséquilibrait à tout coup l’attaquant.
Durant des années, je l’ai vu ainsi cent fois réduire à merci son adversaire. Cent fois j’ai entendu jaillir ce rire énorme sans parvenir à m’empêcher de frémir en en ressentant l’écho terrifiant

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