Le bras du diable
318 pages
Français

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Le bras du diable , livre ebook

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Description

Julie Waeckerli Le bras du diable Thriller Gagnant du Prix du polar 2012 Éditions Les Nouveaux Auteurs 16, rue d’Orchampt 75018 Paris www.lesnouveauxauteurs.com ÉDITIONS PRISMA 13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex www.editions-prisma.com Copyright © 2013 Editions Les Nouveaux Auteurs — Prisma Média Tous droits réservés ISBN : 978-2-81950-199-2 À Annie Waeckerli, ma merveilleuse tante, qui a passé des heures à me relire, me corriger, me conseiller, et dont l’aide si précieuse m’a permis de concrétiser ce rêve d’adolescente. Merci infiniment pour ton incroyable dévouement. « Il n’est pas bon que tout le monde lise les pages qui vont suivre ; Quelques-uns seuls savoureront ce fruit amer sans danger. » (Lautréamont, Les chants de Maldoror) Prologue *1957, banlieue d’Alger*   Les ténèbres l’enveloppaient. Un arôme de supplice flottait entre les murs, comme un goût de sang sec et intarissable. Dans la petite pièce, l’obscurité déployait ses bras de monstre, et engloutissait tout espoir de revoir le soleil. La jeune femme était là, allongée sur le sol et ligotée les mains dans le dos. Un jour avait suffi pour que sa vie touche l’enfer. Gênée par ses liens, la prisonnière se pencha en avant. La douleur dans son ventre devenait insupportable. Son corps n’était plus qu’une masse sanglante parcourue de convulsions.

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Informations

Publié par
Date de parution 25 juillet 2013
Nombre de lectures 1
EAN13 9782819501992
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Julie Waeckerli
Le bras du diable
Thriller
Gagnant du Prix du polar 2012



Éditions Les Nouveaux Auteurs 16, rue d’Orchampt 75018 Paris www.lesnouveauxauteurs.com
ÉDITIONS PRISMA
13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex www.editions-prisma.com
Copyright © 2013 Editions Les Nouveaux Auteurs — Prisma Média Tous droits réservés ISBN : 978-2-81950-199-2
À Annie Waeckerli,
ma merveilleuse tante,
qui a passé des heures
à me relire, me corriger,
me conseiller, et dont l’aide si
précieuse m’a permis de
concrétiser ce rêve
d’adolescente.

Merci
infiniment pour ton
incroyable dévouement.
« Il n’est pas bon que tout le monde
lise les pages qui vont suivre ;
Quelques-uns seuls savoureront
ce fruit amer sans danger. »
(Lautréamont, Les chants de Maldoror)
Prologue
*1957, banlieue d’Alger*
 
Les ténèbres l’enveloppaient.
Un arôme de supplice flottait entre les murs, comme un goût de sang sec et intarissable. Dans la petite pièce, l’obscurité déployait ses bras de monstre, et engloutissait tout espoir de revoir le soleil.
La jeune femme était là, allongée sur le sol et ligotée les mains dans le dos. Un jour avait suffi pour que sa vie touche l’enfer.
Gênée par ses liens, la prisonnière se pencha en avant. La douleur dans son ventre devenait insupportable. Son corps n’était plus qu’une masse sanglante parcourue de convulsions. Après s’être approchée du mur, elle se frappa la tête contre le béton dans l’espoir de s’évanouir. Son coup ne la blessa même pas, elle n’avait plus de force. Depuis une semaine, le monde lui-même avait perdu sa consistance.
Peut-être devait-elle essayer de se mordre la langue, pour étouffer avec l’hémorragie ? Mourir, cette idée l’obsédait. Mais ils reviendraient avant qu’elle ne succombe. Elle devait s’y résigner : elle n’arriverait pas à mourir seule… la mort ne viendrait pas. Depuis trois jours, elle l’avait attendue, appelée, provoquée, mais la Faucille capricieuse refusait sa demande. Elle ne la laissait pas partir et accentuait sa souffrance.
Un cri strident déchira le bâtiment. Un cri d’enfant, qui lui arracha un frisson. Jusqu’à présent, elle n’avait entendu que des adultes. La jeune femme s’était habituée à tous les bruits environnants. Le pas des militaires, le rire des officiers, ou plus fréquemment, les sinistres clameurs provenant des séances de torture.
Et puis une fois par jour, c’était son tour. Ses cris à elle lacéraient le bâtiment. Elle était innocente, mais les militaires français s’en moquaient. Il n’y avait aucune loi pour leur interdire la torture.
Le silence s’installa. Figée sur le sol, la jeune femme attendit. Une voix lointaine lui susurrait des vers, dans les méandres de ses pensées :
« Je t’aimerai toujours, belle et tendre amour,
Mon unique étoile, perle de mes jours,
Si viennent les pleurs, lèvent tes doux yeux,
De partout je veille, le cœur dans les cieux. »
Ce souvenir appela de nouvelles larmes. Elle pensa à lui, à ses paroles. Les bourreaux avaient dit qu’il était mort, et c’était peut-être à ce moment-là qu’elle avait pensé au suicide.
Soudain, la porte de la pièce s’enfonça. La lumière aveuglante d’une lampe torche lui éblouit les yeux.
– C’est elle.
La silhouette massive du lieutenant se dessina dans l’encadrement de la porte. Depuis son arrestation, cet homme l’avait torturée sans aucune compassion. On le surnommait le diable, car il était un des pires tortionnaires d’Alger.
Un deuxième soldat s’avança dans la pièce, plus jeune, métissé. Il dévisagea un instant la prisonnière, avant de bredouiller au lieutenant :
– Je… ne veux pas. Demandez à quelqu’un d’autre.
– Personne ne te donne le choix ! Suis mes ordres !
Le métis recula d’un pas, la mine trouble.
– En bas, on m’a dit qu’elle n’était pas avec les fellaghas.
– Et alors ? Tu veux qu’on la laisse filer dans cet état ?
Le lieutenant avança, les yeux verts et brillants d’une lueur démoniaque. Il attrapa la prisonnière par les cheveux et la retourna férocement sur le dos. Elle tenta de crier, mais aucun son ne sortit de sa bouche. Il lui balança son pied au visage.
– Tue-la, Nadji !
L’Algérien ne bougea pas. Il en était incapable. Il fallait être fou pour fusiller cette femme.
– Nadji, tu m’entends ? Ce n’est qu’une putain d’Algérienne !
– Algérienne comme moi, mon lieutenant.
Une foudre de colère traversa l’officier. Son visage se raidit. Il attrapa son fusil et d’un geste, balança la crosse dans l’estomac de l’Algérien. Nadji gicla contre le mur en gémissant.
– Tu as raison, c’est toute la race qu’il faudrait liquider !
Le lieutenant se retourna vers la prisonnière et la fixa quelques secondes… interminables. Au fond de ses prunelles, elle vit la mort la saluer enfin.
– Allez au diable !
Depuis la porte, le visage du lieutenant se barra d’un irrépressible sourire.
– Le diable, c’est moi.
Il braqua son fusil vers elle.
Et elle sut aussitôt que c’était fini.
 
*1 er  août 2010, Dombrefeuil, en Alsace*
 
Audrey Lawer colla son visage contre la vitre tiède de la fenêtre ouverte. Son souffle embuait le carreau. Elle pouvait sentir le vent s’insinuer par l’ouverture, une bouffée chaude, mais un râle austère. L’air glissait sur sa joue, puis filait contre les murs de la chambre. C’était à la fois doux et étrange. Agréable et frissonnant.
– Nous pouvons commencer, déclara Nelly Thomson en mélangeant les vingt-deux arcanes majeurs du Tarot de Marseille.
Audrey quitta la fenêtre et vint s’asseoir sur le lit. La nuit était tombée et elles opéraient à la lueur des flammes chancelantes de quatre bougies.
– Quelle question dois-je poser ? demanda Audrey avec scepticisme.
– N’importe laquelle concernant ton futur.
– Mais je ne veux rien savoir de mon futur.
Nelly soupira. Ses yeux châtaigne luisaient d’impatience. Elle avait le visage fin, la peau claire, parsemée de grains de beauté. Malgré son agacement, elle devait s’efforcer de garder une voix calme et aimante.
Les deux adolescentes étaient assises sur ce petit lit rose, depuis plus d’une demi-heure. La préparation de cette séance s’était déroulée dans le plus grand silence, et chaque objet avait été méticuleusement placé là, où il convenait de l’être. Une odeur d’encens défraîchi circulait furtivement.
– Tu ne veux même pas savoir comment se passera ton mois d’août ? Le Tarot peut tout prédire !
Audrey Lawer fronça les sourcils. Les histoires de fantômes, elle avait arrêté d’y croire il y a au moins dix ans, alors Madame Irma…
– Si tu insistes.
Nelly s’installa en tailleur en face d’Audrey et ferma les yeux.
Les deux adolescentes avaient passé leur après-midi ensemble. Pour la première fois depuis le début de l’été, une journée entière s’était écoulée sans qu’elles n’entrent en conflit ou ne « montent dans les tours ».
À vrai dire, Nelly et Audrey n’avaient jamais partagé de réelles affinités. Trop de points les opposaient : Audrey était teigneuse, marginale, issue d’une famille riche. Nelly était douce, timide, antimatérialiste. D’ailleurs, monsieur et madame Thomson s’arrachaient les cheveux pour faire comprendre à leur fille que sa fréquentation était mauvaise. Avec son piercing au-dessus de la lèvre et sa coiffure délurée, Audrey ne leur inspirait aucune confiance. Cette gamine séchait les cours, fumait comme un pompier, et injuriait ouvertement les personnes âgées.
– Regarde-la, disait Valérie Thomson, on dirait une junkie ! Et tu as vu ce décolleté ? Bientôt jusqu’au nombril… Elle va finir prostituée !
Mais Dombrefeuil ne leur laissait pas le choix. Le village était un trou perdu dans l’Alsace profonde, déserté de tout commerce attrayant. On y trouvait cent cinquante habitants, dont un tiers de retraités. Il n’y avait pas plus de cinq adolescents pour prétendre au titre d’« ami de leur fille ». Alors, au début des grandes vacances, Nelly s’était simplement résignée : Lawer ou l’ennui…
Aux angles de la chambre, les flammes des bougies vacillèrent sous le coup du vent qui entrait par la fenêtre. Nelly se laissa immerger par l’obscurité muette, le regard égaré dans la nuit de ses paupières. Au bout d’une minute, elle mélangea les arcanes du Tarot de Marseille d’un mouvement propre et homogène.
Audrey comprit qu’elle devrait bientôt choisir une carte, face cachée. Elle attendit en frémissant. La chambre se perdait dans un silence pesant, parfois rompu par le crissement d’un meuble. Ou d’autre chose…
Un bruit perturba Audrey, derrière la fenêtre. Elle tendit l’oreille. Elle entendait comme des craquements irréguliers provenant du jardin. On aurait dit que quelqu’un marchait sur des feuilles…
– Nelly, tu entends ?
Le cœur d’Audrey se resserra. Son amie ne répondit pas, immobile, à quelques centimètres d’elle. Ses cheveux bruns et ondulés couvraient ses paupières closes. Ce n’était plus drôle maintenant. Pour qui se prenait-elle, une voyante ?
D’autres craquements survinrent. Le bureau, l’armoire, la commode ? Nelly ouvrit les yeux et plaça les cartes en éventail entre son pouce et son index.
– C’est bon, choisis-en une.
Lawer la regarda, terrifiée.
– Tu n’as pas entendu ce bruit ?
– Reste concentrée… Fixe les cartes.
– Nelly, il y a quelqu’un dehors !
Le cœur d’Audrey bondissait furieusement dans sa poitrine, elle ne sentait plus ses membres tant la peur la tenait.
Un nouveau craquement. Cette fois, elle n’avait pas rêvé, une forme venait de bouger derrière la vitre. La silhouette se faufilait entre les feuillages.
– Tire une carte maintenant ! ordonna Nelly.
Audrey ne bougea pas, pétrifiée. Elle fixait la fenêtre à la recherche de l’ombre.
– Choisis une carte !
Subitement, un grand coup de vent s’engouffra à l’intérieur de la chambre. Le souffle envahit la pièce et étouffa toutes les bougies, plongeant la chambre dans un noir alarmant.
– Une carte s’est envolée ! s’exclama Nelly en se jetant sur sa lampe de chevet pour rétablir la lumière.
Paniquée, Audrey se leva à son tour et se précipita vers

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