La vengeance volée
112 pages
Français

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La vengeance volée , livre ebook

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Description

Irène Chauvy La vengeance volée Une enquête du capitaine Allonfleur Policier historique Gagnant du Prix Éditions Les Nouveaux Auteurs 33-35, rue de Chazelles 75017 Paris www.lesnouveauxauteurs.com ÉDITIONS PRISMA 13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex www.editions-prisma.com Copyright © 2013 Editions Les Nouveaux Auteurs — Prisma Média Tous droits réservés ISBN : 978-2-81950-355-2 À Christophe, Benoît et Anne-Laure. Prologue Paris, 25 mars 1863 Au vingt-quatre rue de Courcelles, l’horloge en bronze doré sonna sept heures. Un pas traînant accompagna un bâillement sonore. S’ensuivit le remue-ménage des fenêtres que l’on ouvrait. Il fallut attendre quelques minutes, que la lumière investisse la pièce, que les pieds se retournent pour que jaillisse un hurlement. Pour qu’une domestique expérimentée découvre, à une douzaine d’heures du dîner hebdomadaire d’hommes de lettres, une jeune femme immobile au milieu du salon de la cousine de Napoléon III. Pour Marcelle, qui avait enterré père, mère et sœur sur une seule décennie, cela ne fit aucun doute, le corps allongé sur le parquet de chêne était un cadavre. La morte avait les mains jointes sur la poitrine. Sa gorge et ses cheveux, une lourde tresse brune en partie dénouée, étaient souillés de sang. Marcelle se remit à hurler. À huit heures, ce même jour, Hadrien Allonfleur, jeune capitaine affecté au prestigieux escadron des Cent-gardes, vérifiait la tenue de ses soldats devant le palais des Tuileries.

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Informations

Publié par
Date de parution 25 juillet 2013
Nombre de lectures 78
EAN13 9782819503552
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Irène Chauvy
La vengeance volée
Une enquête du capitaine Allonfleur
Policier historique
Gagnant du Prix
Éditions Les Nouveaux Auteurs
33-35, rue de Chazelles 75017 Paris www.lesnouveauxauteurs.com
ÉDITIONS PRISMA
13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex www.editions-prisma.com
Copyright © 2013 Editions Les Nouveaux Auteurs — Prisma Média Tous droits réservés
ISBN : 978-2-81950-355-2
À Christophe, Benoît et Anne-Laure.
Prologue

Paris, 25 mars 1863

Au vingt-quatre rue de Courcelles, l’horloge en bronze doré sonna sept heures.
Un pas traînant accompagna un bâillement sonore. S’ensuivit le remue-ménage des fenêtres que l’on ouvrait. Il fallut attendre quelques minutes, que la lumière investisse la pièce, que les pieds se retournent pour que jaillisse un hurlement. Pour qu’une domestique expérimentée découvre, à une douzaine d’heures du dîner hebdomadaire d’hommes de lettres, une jeune femme immobile au milieu du salon de la cousine de Napoléon III.
Pour Marcelle, qui avait enterré père, mère et sœur sur une seule décennie, cela ne fit aucun doute, le corps allongé sur le parquet de chêne était un cadavre. La morte avait les mains jointes sur la poitrine. Sa gorge et ses cheveux, une lourde tresse brune en partie dénouée, étaient souillés de sang. Marcelle se remit à hurler.
À huit heures, ce même jour, Hadrien Allonfleur, jeune capitaine affecté au prestigieux escadron des Cent-gardes, vérifiait la tenue de ses soldats devant le palais des Tuileries.
À neuf heures, une berline arrivant côté nord s’immobilisa dans la cour du Carrousel. Monsieur Claude, le chef de la Sûreté, en descendit, un pli de fatigue barrant son front. Il vit Hadrien, hésita et se contenta de lui faire un signe de la tête avant de s’engouffrer dans le hall du pavillon de l’Horloge.
À neuf heures et demie, on envoya chercher Allonfleur. À dix heures, celui-ci saluait le comte de Persigny, ministre de l’Intérieur, sortait des Tuileries, empruntait la porte cochère de l’aile Napoléon et partait en direction de la rue de Rivoli. Devant sa guérite, un Cent-gardes l’aperçut déboutonnant sa veste d’officier tout en pressant le pas.
À onze heures, Hadrien Allonfleur était dans le salon de la princesse Mathilde, en tenue civile, en train d’examiner la victime.
1

Lorsque j’arrivai chez la princesse Mathilde, après avoir remisé mon uniforme dans un placard et défroissé ma redingote, j’avais encore en tête la réflexion du comte de Persigny. « C’est une sale affaire, Allonfleur. Un crime abject. L’Empereur compte sur vous. Ne le décevez pas. »
Je me tournai vers le docteur Bevior qui m’avait accueilli avec un soupir de soulagement.
— Vous l’avez trouvée dans cette position ?
— Oui. Allongée sur le dos, répondit-il. La pauvre femme a été égorgée si férocement qu’elle en a été presque décapitée.
Il toussa.
— Le reste a été commis post mortem.
Je m’agenouillai près du corps en évitant de marcher dans les traînées de sang. Je touchai les mains, elles étaient froides et maculées de rouge. La balafre qui cisaillait le cou aurait suffi à rendre le visage hideux, mais ce ne fut pas cette vision qui provoqua en moi un brusque dégoût et un sursaut que je ne pus réprimer.
La bouche formait un rictus, les yeux avaient disparu, laissant deux trous vides. Je me relevai en soufflant, les genoux vacillants. Je me raclai la gorge pour chasser la nausée qui l’envahissait avant de demander :
— Heure de la mort ?
— En tenant compte de la raideur cadavérique, je la fixerais en fin de soirée, annonça le légiste. Vous aurez des précisions après l’autopsie. Tout ce que je puis vous dire est que la fin a été rapide. On l’a attrapée par-derrière et…
Il mima le geste en passant son index le long de son cou. Je montrai le visage, les orbites vides.
— Les mutilations ont été faites post mortem, mais ce n’est pas tout, reprit-il.
Il s’agenouilla près du corps et souleva les mains de la morte avec son scalpel. La blancheur visqueuse d’un globe oculaire apparut.
— Seigneur Dieu !
Ma voix avait monté d’un cran. Le docteur Bevior se releva, le teint aussi blanc que le mien. Je m’offris un nouveau raclement de gorge et gagnai un terrain plus sûr.
— Qui l’a découverte ?
— Une domestique. J’ai dû la mettre sous sédatif. Avec ce que je lui ai donné, elle va dormir jusqu’à ce soir.
— Et vous-même, qui vous a appelé ? Pourquoi le médecin de la princesse Mathilde n’est-il pas là ?
Bevior se gratta l’oreille.
— Sa présence n’aurait rien changé à la mienne. Vous connaissez le général Rolin…
Le légiste s’interrompit. Je hochai la tête. Le général Rolin était l’adjudant général du palais des Tuileries,
— Il aurait de toute façon fait appel à moi. Nous en savons tous les deux la raison, n’est-ce pas, capitaine ?
Mon silence le força à poursuivre.
— Quand la victime a été découverte, la princesse Mathilde en a référé à l’Empereur et l’Empereur au ministre de l’Intérieur. J’ai été sorti de mon lit par monsieur Claude, le chef de la Sûreté, et emmené jusqu’ici. L’adjudant général montait la garde devant la porte fermée et les domestiques étaient cantonnés à l’office.
— On connaît son identité ?
Le légiste n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche.
— Delarue Yvette, femme de chambre.
La voix grave, un tantinet funèbre, de Martefon, inspecteur de la Sûreté à la retraite, emplit la pièce.
— Enfin, vous voilà.
— Je suis comme les primevères, Allonfleur. Je sors le printemps venu. Monsieur Claude m’envoie vous seconder.
Son humour déplacé me renvoya pourtant à une normalité rassurante. En janvier de cette année, nous avions résolu tous deux une enquête tortueuse. Je n’en révélerai pas plus sous peine de déflorer un des chapitres des mémoires d’Amboise Martefon. Ce dernier y avait conforté sa méfiance envers l’espèce humaine. Quant à moi, j’y avais gagné de l’avancement en obtenant le grade de capitaine et mon affectation dans l’escadron des Cent-gardes. Un régiment de cavalerie prestigieux, chargé de la sécurité personnelle de Napoléon III et de ses résidences. Ma carrière repartait sous les meilleurs auspices. Je le méritais. Lors de la campagne d’Italie, j’avais bataillé à Magenta et reçu un coup de sabre dans le ventre à Solferino.
Martefon serra la main du légiste. À l’évidence, ils se connaissaient. Tous deux m’arrivaient à peine à l’épaule. Pour être admis dans l’escadron des Cent-gardes, il fallait mesurer au moins un mètre quatre-vingt-deux. Je les faisais largement. Ce matin, j’avais entendu la concierge, madame Virla, discuter avec la modiste du rez-de-chaussée : « un gaillard comme lui, de six pieds de haut avec des épaules larges, ça plaît aux femmes… ». Elle s’était interrompue en me voyant descendre l’escalier.
— Vous parliez de moi ? avais-je dit, m’essayant au sourire ravageur. Ajoutez une élégance naturelle, un visage carré aux traits réguliers, une bouche volontaire, des yeux verts…
— Prétentieux ! avait répliqué gaiement madame Virla tandis que la modiste, une brune timide, rougissait.
Ma journée avait si bien commencé. Je me secouai. Le légiste recula vers la fenêtre entrouverte pour échapper à l’odeur caractéristique du sang séché.
Martefon observa longuement Yvette. Avec sa face défigurée, elle paraissait sans âge. Elle portait une jupe de serge grise sur sa chemise de nuit. Un châle en laine noire était coincé sous ses hanches et des bas en coton tire-bouchonnaient sur ses chevilles.
Il fit le tour du corps. Quand Bevior s’approcha et se baissa pour soulever les mains jointes, il eut l’air plus intéressé que bouleversé. En quarante ans de carrière, Martefon avait tout vu. Ex-inspecteur de la Sûreté depuis un an, il avait repris du service à sa demande. La retraite lui pesait.
— Pourquoi un tel traitement ? questionna-t-il, les yeux fixés sur la morte.
Le légiste secoua la tête et murmura :
— C’est la deuxième victime que j’examine dans cet état.
Il allait continuer, mais je me mis en face de lui et fronçai les sourcils. Il se détourna en toussant pour cacher son embarras. Martefon était penché sur le cadavre et ne s’aperçut pas de notre petit manège.
— Pourquoi cette atrocité ? répéta-t-il en se relevant avec difficulté.
Il sortit un mouchoir de la poche de sa redingote et s’essuya les doigts.
— Œil pour œil ? avança le légiste sans une once de sourire.
— Une vengeance ? Un trophée ? continua Martefon.
Ces interprétations ne me satisfaisaient pas. Je ne manquai pas de leur en faire la remarque. L’assassin avait emporté un œil. Un seul. Pourquoi pas les deux ? Martefon haussa les épaules en grommelant « Et pourquoi pas un ? »
— Supposons, ajoutai-je avec plus de conviction, qu’Yvette ait été la spectatrice involontaire d’un crime. Elle devenait alors un témoin indésirable dont il fallait se débarrasser. L’œil caché sous les mains est un avertissement pour les vivants. Regardez ailleurs.
Martefon m’examina pensivement avant de se gratter la tête.
— Votre analyse est abracadabrante, comme à votre habitude, Allonfleur.
— Abracadabrante ?
— Oui ! Extravagante, farfelue, saugrenue, baroque.
— C’est nouveau, ce vocabulaire ?
Bevior nous observait, la bouche ouverte, en lissant sa barbe. Une pauvre femme était à nos pieds, atrocement mutilée, et nous nous chicanions pour des mots.
— Que faisait-elle à minuit dans cette pièce, pieds nus ? reprit Martefon qui surprit le regard triste du légiste. Dans ce salon, au lieu d’être dans son lit ? Un rendez-vous ?
— Vous n’êtes pas dans n’importe quel salon, rétorqua Bevior. Mais celui de Son Altesse impériale, la princesse Mathilde. C’est ici qu’elle reçoit ce que Paris compte en meilleurs esprits. Pasteur, Sainte-Beuve, Flaubert, Renan, Taine, Dumas père, Gounod…
— Et Edmond et Jules de Goncourt depuis peu, dis-je, ajoutant ma pierre à la statue virtuelle de la princesse Mathilde.
— Vous voyez ! Eux aussi, clama Bevior. C’est ce que je viens de vous expliquer. L’élite intellectuelle et artistique parisienne foule ces tapis.
Le légiste en oubliait, lui aussi, l’incongr

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