La maison des deux folles
46 pages
Français

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Description

Le père Bichu, après une soirée de beuverie, rentre chez lui, de nuit, quand il entend un hurlement de femme qui provient de « la maison des deux folles ».


N’écoutant que son courage, il pénètre dans la demeure et y trouve le corps sans vie d’une vieille dame.


Sous le coup du choc et de l’alcool, le père Bichu s’évanouit sur le lieu du drame.


Le lendemain matin, il est découvert encore endormi par les gendarmes et arrêté pour le crime.


Heureusement pour lui, le célèbre détective Francis BAYARD dit « le Sphinx », de passage dans la région, se lance sur les traces du véritable assassin.


Pour l’identifier, Francis BAYARD va pouvoir compter sur un bien surprenant témoin...

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9791070033586
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES AVENTURES DE FRANCIS BAYARD
alias le « Sphinx »

LA MAISON DES DEUX FOLLES
Récit policier

Jean des MARCHENELLES
I
UNE FEMME CRIAIT DANS LA NUIT…

Prosper Bichu ne pensait pas. Il avançait à grands pas, inconsciemment, comme dans un rêve. Ses jambes ridicules, grêles, longues et difformes, de loin, dans la nuit, le faisaient ressembler à un faucheux, cet insecte bâtard de l'araignée, dont un humoriste a dit qu'il « ne s'arrête même pas s'il perd une jambe en route ! »…
Et, de fait, il semblait que notre homme ne se fût pas arrêté davantage pour si peu.
Un nuage soudain, devant lui, se déchira en silence découvrant le sourire vague et pâle de la lune contemplant la campagne endormie.
Il faisait froid, un froid sec et vivifiant. Prosper Bichu avait le visage rouge, la respiration brûlante… aux relents quelque peu… alcoolisés. Son cerveau somnolait, anesthésié par ces vapeurs perfides de l'alcool qu'il avait absorbé sans modération ce soir-là.
D'abord, il avait songé à Edmée. Son profil anguleux et son visage maussade lui étaient apparus au fond du cinquième verre… Il avait voulu esquisser un mouvement de retraite, quitter le comptoir. Mais il était déjà trop tard.
De toute façon, en rentrant à la ferme, il savait très bien l'accueil qu'on lui aurait réservé…
Alors… autant continuer, n'est-ce pas ? Puisque cela ne changeait rien à l'affaire.
Bichu avait peur de sa femme. Edmée ne comprenait rien aux hommes. Elle les confondait avec des mécaniques destinées à travailler dès le lever du soleil jusqu'au « brun soir »…
Bichu ne lui donnait pas raison, mais elle passait outre ses appréciations. C'est elle qui dirigeait « la boutique »… Alors, pour se venger, de temps à autre, le bon Prosper prenait sa revanche… Une toute petite revanche d'homme sans volonté : il se saoulait, rentrait fort tard, se laissait injurier copieusement, cuvait son vin dans l'étable – car Edmée, passé dix heures, verrouillait toutes les portes – et, le lendemain, malade, fourbu, honteux, il se remettait à l'ouvrage en silence, baissant l'échine sous le flot de sarcasmes que lui déversait son irascible épouse, complètement déchaînée.

* * *

Il avançait toujours. Dans la plaine, parmi les rectangles de peupliers, une petite lumière pointait.
La route qu'il empruntait devenait de plus en plus sinueuse et cahoteuse. Le charroi des fermiers l'avait profondément ravinée.
… Et l'événement se produisit soudain, dans le calme plat du paysage, tandis qu'il se tordait les pieds sur le sol inégal.
Il reçut un choc dans l'estomac et se mit à trembler de tous ses membres (un tremblement convulsif d'ivrogne aux nerfs atrophiés).
Il aurait voulu fuir. Mais, bien au contraire, il demeurait rivé au sol, empêtré dans sa frayeur panique.
Une femme criait dans la nuit…
C'était plus émouvant qu'un cri… une sorte de râle, aux sonorités surprenantes, inexplicables.
Cela montait en vrille sous le ciel et Prosper n'avait jamais entendu rien de plus épouvantable.
D'habitude, quand il se couchait sur le côté gauche, Bichu ne tardait pas à s'agiter et à pousser des gémissements qui réveillaient Edmée et enfin le réveillaient lui-même en proie à d'affreux cauchemars.
Le fermier avait nettement l'impression de s'être assoupi sur le côté gauche !
C'est idiot, murmura-t-il… On dirait que…
Il fit un brusque mouvement, comme pour sauter hors du lit, mais le cri strident le rejeta brutalement dans la réalité. En moins d'une seconde, il se souvint de tout. La rencontre qu'il avait faite au bourg avec son vieil ami le boucher, les tournées à l'estaminet du Calvaire, et le retour dans la nuit.
Il s'orienta. Il se trouvait sur la route qui mène de Capinghem à Englos. À sa gauche, les ruines du château de La Phalecque ; à sa droite, une chaumière ratatinée, rabougrie, faisant corps avec l'argile grise dont elle émergeait à peine.
Il pensa :
La Maison des deux folles !...
Alors, lui qui avait si peur d'Edmée, prit une grande résolution et fit preuve d'un fier courage.

* * *

Comment il poussa la grille, traversa le jardinet, ouvrit la porte de la masure ? Prosper Bichu n'aurait su le dire… Les cris venaient de là ; c'est tout ce qu'il pouvait expliquer.
Dans la cuisine basse aux carreaux bleus et blancs un triste spectacle l'attendait. Une femme était étendue tout au long, figée dans l'immobilité de la mort. Ses mains décharnées se crispaient autour de sa gorge. Bichu eut la force de se pencher vers elle…
Son visage, déjà, se violaçait. Il sortit de sa poche un énorme couteau à cran d'arrêt – qui n'avait jamais commis d'autre crime que celui d'égorger un poulet ou un lapin – et coupa d'un geste bref la corde qui enserrait le cou de la vieille femme.
Puis il se remit à trembler.
Un rayon de lune vint éclairer le visage de la morte.
Prosper lui trouva un air de ressemblance avec Edmée. Cette pensée baroque le fit sourire. Mais, bientôt, il perdit l'usage de ses sens et vit, dans un dernier éclair de pseudo-lucidité, le carrelage bleu et blanc, et la morte étendue tourbillonner dans une ronde infernale… Il poussa un long gémissement et s'affaissa soudain.
Une voix étrange cria :
J'ai faim, Henriette !!...
Et tout retomba dans le silence.
La lune, qui avait contemplé cet étrange spectacle, se retira, satisfaite, et s'enveloppant dans un manteau de nuages bariolés, partit se coucher dignement.
DANS LA MÊME COLLECTION
 
 
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