L île
196 pages
Français

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Description

À Henri Vernes, dont la plume enchanteresse m’aura fait découvrir bien des îles, Son héros aurait adoré la légende Espirito do Tubarão. Avec toute mon affection. Prologue Allongé sur l’herbe, l’homme blond observait à l’aide de la lunette de son fusil la crique s’ouvrant plus bas au pied du volcan. Un détail retenait son attention, un superbe voilier, tout en bois verni, se balançant à peine sous l’effet de la houle. Une seule personne était à bord, il le savait. Le propriétaire du bateau. Pour le moment, il devait se trouver dans la cabine, mais il ne tarderait pas à réapparaître sur le pont. L’homme blond voulait être sûr de bien le voir, parce qu’il allait mourir. Sans relâcher son observation une seconde, il tâtonna pour extirper de sa poche le minuscule boîtier émetteur d’ondes courtes, amena le premier interrupteur en position «  on  ». Le boîtier émit un petit bip suraigu. Le pouce glissa sur le deuxième interrupteur, en position d’attente. Il était prêt. Le visage du propriétaire s’encadra dans l’optique. Une chevelure assez ample, des traits marqués, mais bien en deçà de son âge, comme si les années n’avaient pas de prise sur lui, ou qu’il avait cessé de vieillir. L’homme blond le vit sauter sur le quai, récupérer une boîte à outils et regrimper sur le pont du navire. Il marqua un moment d’hésitation, contourna le poste de pilotage et s’accroupit devant la trappe d’accès aux moteurs qu’il déverrouilla pour l’ouvrir en grand.

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Informations

Publié par
Date de parution 14 novembre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782810428168
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

À Henri Vernes, dont la plume enchanteresse m’aura fait découvrir bien des îles, Son héros aurait adoré la légende Espirito do Tubarão. Avec toute mon affection.
Prologue

Allongé sur l’herbe, l’homme blond observait à l’aide de la lunette de son fusil la crique s’ouvrant plus bas au pied du volcan. Un détail retenait son attention, un superbe voilier, tout en bois verni, se balançant à peine sous l’effet de la houle. Une seule personne était à bord, il le savait. Le propriétaire du bateau. Pour le moment, il devait se trouver dans la cabine, mais il ne tarderait pas à réapparaître sur le pont.
L’homme blond voulait être sûr de bien le voir, parce qu’il allait mourir.
Sans relâcher son observation une seconde, il tâtonna pour extirper de sa poche le minuscule boîtier émetteur d’ondes courtes, amena le premier interrupteur en position «  on  ». Le boîtier émit un petit bip suraigu. Le pouce glissa sur le deuxième interrupteur, en position d’attente. Il était prêt.
Le visage du propriétaire s’encadra dans l’optique. Une chevelure assez ample, des traits marqués, mais bien en deçà de son âge, comme si les années n’avaient pas de prise sur lui, ou qu’il avait cessé de vieillir. L’homme blond le vit sauter sur le quai, récupérer une boîte à outils et regrimper sur le pont du navire. Il marqua un moment d’hésitation, contourna le poste de pilotage et s’accroupit devant la trappe d’accès aux moteurs qu’il déverrouilla pour l’ouvrir en grand.
Le pouce du tueur se crispa sur la télécommande. Sur le pont, le propriétaire se redressa, leva la tête droit dans sa direction. Comme s’il l’avait vu. Le blond eut un bref mouvement de recul, s’écarta une seconde de la lunette, s’essuya les yeux. C’était impossible ! Il riva à nouveau son œil sur l’oculaire, prêt à toute éventualité, mais sa cible avait à peine bougé. Elle se tenait toujours sur le pont, dos à la mer, et attendait. Le pouce appuya plus fermement sur l’interrupteur.
– Bye bye, Charles ! murmura le tueur.
En une seconde, ce qui avait été un magnifique voilier se transforma en une immense boule de feu. L’onde de choc vrilla la surface de la mer, projetant des débris du navire dans toutes les directions, entraînant avec elle une partie de l’embarcadère et les quelques petits bateaux alentour. L’explosion dut s’entendre à des kilomètres à la ronde. Sur le pont, le corps de la victime, littéralement carbonisé debout, fut soufflé et projeté en mer. Le tueur ferma un bref instant les yeux devant l’intensité lumineuse. Lorsqu’il les rouvrit, il ne restait plus que quelques ruines fumantes sur les flots. De la maison un peu plus haut, les secours se précipitaient. Trop tard. Il se redressa, rangea son fusil Accuracy dans sa housse de protection, regagna sa Jeep abandonnée plus loin sous les arbres. Un téléphone cellulaire était suspendu au tableau de bord.
– C’est fait, monsieur, dit-il après avoir obtenu la communication.
– Parfait Adam. Occupez-vous du reste. Je veux les papiers. Trouvez-moi ce que Charles cachait.
Le tueur blond – Adam – coupa la communication. La destruction du navire passerait pour une explosion accidentelle. Le « reste », comme avait dit son interlocuteur, n’allait pas tarder à se manifester. Il lui suffisait d’attendre.
La vieille Lagonda aux couleurs incertaines de Lazare Ledoyen avait connu des jours meilleurs. Il s’en rendait compte, tandis qu’elle grimpait la route sinueuse partant du centre-ville à l’assaut des flancs volcaniques, crachant une fumée suspecte. Il avait quitté son bureau de l’hôtel de ville dès le premier coup de fil. Un message bref, laconique : « c’est fini ». Même s’il s’y attendait depuis le début, il n’arrivait pas à y croire. Charles, le maître des lieux, disparu… Qu’allaient-ils devenir ? Il aborda un virage en épingle à cheveux, et les suspensions d’un autre âge émirent un couinement de protestation tandis que son poids plus qu’honorable se déportait sur le côté du siège. Cent trente kilos, pas moins. Une énorme masse de chair figée, taillée en motte de beurre, sur laquelle trônait la sorte de boule de billard qui lui servait de tête. Deux petits yeux, noirs comme la lave de l’île, le cheveu rare et gras. Lazare Ledoyen transpirait comme un bœuf, et sa chemise mal coupée lui formait une seconde peau moite. Allez donc trouver des vêtements à votre taille quand vous faites ce poids-là !
La trouée de la forêt laissa jaillir les intenses rayons du soleil, et malgré ses lunettes, le gros homme cligna des yeux. La route traversait des étendues d’herbes hautes, folles et jaunâtres, dominant la mer en contrebas. Deux cents mètres plus loin, les troncs épais d’eucalyptus formaient un rideau impénétrable. Les dernières habitations créoles étaient loin, comme le centre névralgique de l’île. Atalaias… il fallait suivre le plan à la lettre. Sur sa droite, une route se dessina, marquée d’un écriteau en lettres majuscules :
 
« CENTRE D’ESTHÉTIQUE ET DE REMISE EN FORME ».
 
L’accès était barré d’une chaîne cadenassée, mais Lazare Ledoyen en avait la clé. Il s’extirpa de la Lagonda, courut jusqu’au cadenas pour le déverrouiller et fit passer la vieille voiture. Il referma aussitôt derrière lui. Il fallait faire vite. La voiture parvint en cahotant jusqu’au Centre, désormais des bâtiments délabrés et dévorés par la végétation. Le Centre était définitivement abandonné. Sans ralentir, Ledoyen fit le tour de la construction. Il savait ce qu’il devait y faire et surtout ce qu’il devait récupérer. Il pénétra dans la construction par une porte de service, se dirigea vers les anciens bureaux de direction, gagna la salle des archives. Le paquet était là, posé sur la première rangée d’étagères vides. Lazare Ledoyen l’ouvrit nerveusement, jeta un œil sur ce qu’il contenait.
Des chiffres.
Des colonnes de chiffres et de pourcentage, des indications d’éléments chimiques, des calculs de radioactivité actuelle et résiduelle… Peu importe finalement ce que Charles avait cherché dans ces hectares de terre vierge, si tant est qu’il ait réellement cherché quelque chose. La chimie n’était pas le fort de Lazare, mais il y avait un mot que le dernier des demeurés aurait parfaitement compris : « radioactivité ». Du minerai radioactif. Une des raisons qui avaient poussé à la fermeture du Centre d’esthétique et de remise en forme. Atalaias avait fait son travail. Il fallait maintenant que le plan du maître de l’île soit respecté. Lazare rangea la feuille dans son enveloppe. Tout cela ne le concernait pas. Il quitta les bureaux et regagna l’air libre.
Le bruit d’un moteur tout proche le fit sursauter. Un véhicule se trouvait à la hauteur de la chaîne interdisant l’accès au Centre. Lazare fit la grimace : il n’avait pas pensé qu’ils seraient aussi rapidement sur ses pas ! Il ne lui restait qu’une solution, foncer avec la Lagonda sur le chemin défoncé et tâcher de bousculer ceux qui l’empêcheraient de passer. Il ouvrit la portière pour se glisser derrière le volant, et s’élancer sur le seul chemin carrossable menant au Centre. Quelque chose comme une main invisible le repoussa en arrière, et il s’affala dans l’herbe. Simultanément, une douleur atroce lui déchira l’épaule. Lazare Ledoyen contempla, incrédule, le trou sanglant qui découpait le gras de son bras droit, privé de tout mouvement.
À l’entrée du chemin, l’homme blond venait d’apparaître, un fusil à la main. Le sourire qu’il arborait était plus inquiétant que l’arme elle-même. La peur au ventre, Lazare se redressa, faillit se trouver mal. Renonçant à prendre la Lagonda, il s’éloigna en titubant en direction des plants d’eucalyptus et du petit sentier escarpé qui regagnait la vallée. Tout n’allait pas se passer comme prévu.
 
 
Le tueur blond avait décidé de ne pas se presser. Il avait tout son temps. Il connaissait le sentier qu’empruntait le gros homme. Quelques mètres plus bas, deux de ses comparses attendaient, barrant le passage. Et sa cible était bien trop handicapée par son poids pour espérer lui échapper. Il s’arrêta devant la portière ouverte, examina les traces de sang sur l’herbe, laissa flotter un sourire sur ses lèvres closes. Il glissa une deuxième balle dans le canon du fusil, se mit en chasse. Devant lui, Lazare Ledoyen venait de comprendre qu’il était attendu sur le sentier. Deux hommes s’approchaient, des locaux au teint basané et aux traits burinés par le vent et le soleil implacable de l’île. Deux caricatures de méchants de cinéma, tout droit sortis de Dr No . Sauf qu’il ne s’agissait pas de caricatures. Lazare hésita, juste assez pour que le tueur lui loge une deuxième balle, cette fois dans la jambe. Il s’écroula sur le sol sans parvenir à se relever.
Adam s’accroupit devant lui, examina d’un œil rapide les deux plaies, et secoua la tête.
– Disons que tu as une chance raisonnable de t’en tirer. À condition de collaborer. Qu’en dis-tu ?
Le gros homme fixa les traits de son interlocuteur pour tâcher de saisir une moindre expression, mais ils restèrent hermétiques. Il soufflait comme un phoque, la douleur l’abrutissant à moitié.
– Qui êtes-vous ? demanda-t-il.
– Ce n’est pas toi qui poses les questions, répondit Adam en appuyant sur la blessure de l’épaule, ce qui provoqua un hurlement du blessé. Qu’est-ce que tu fabriquais ici ?
De sa main valide, Lazare Ledoyen tendit l’enveloppe. Il n’avait pas envie de tergiverser. Il s’était bien attendu à être secoué, mais le type devant lui le regardait avec des yeux morts. Aucune pitié n’était à attendre.
– J’ai récupéré ça ! Des résultats d’analyses ! Ça ne devait pas se savoir ! Je vous jure que c’est la vérité !
Adam ouvrit à son tour l’enveloppe et en examina le contenu. Son commanditaire serait sans doute heureux de récupérer ça.
– C’est comment ton nom ?
– Ledoyen… Lazare Ledoyen.
– Lazare ? Mais c’est génial ça ! Comme Lazare ressuscité par le Christ ! Par contre, pour ton patron, c’est « cuit »… Tu noteras la touche d’humour ? Remarque, il s’en fout, il sert de hamburger aux poissons de la baie…
Les deu

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