L Arbre de Laetschi
190 pages
Français

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Description

Jean-Claude, la soixantaine passée, a quitté les turpitudes de la capitale de Basse-Normandie pour vivre dans un petit village campagnard. Une vie qui se déroule au rythme des saisons et des promenades avec son chien. Dans le champ qui jouxte sa maison, un inconnu se fait sauvagement agresser.


Son compagnon à quatre pattes ayant été mortellement blessé dans cette attaque, cet ancien soldat décide de retrouver les coupables. Il sera entraîné dans une spirale infernale, l’horreur de ses souvenirs de la guerre d’Algérie, les atrocités commises par des anciens du village sous l’occupation allemande, le quotidien de la vie des gens du voyage, rien ne lui sera épargné dans sa quête de la vérité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 17 janvier 2018
Nombre de lectures 1
EAN13 9782414138838
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-13881-4

© Edilivre, 2018
L'Arbre de Laetschi
 
 
L’été de l’année 2000 avait tiré sa révérence et, loin de la problématique informatique, aucun bug n’était venu perturber, ni la fin de la saison passée, ni le début de l’automne naissant. Aucun bug, que des bogues, dont les millions de piques inondaient les prés ombragés par les grands châtaigniers avoisinants la maison de Jean-Claude. Leur chute avait été précipitée nuitamment par le vent du nord venu de la Manche et poussé par la marée montante. Comme il le faisait depuis que son grand-père l’y avait initié lorsqu’il était encore bambin, Jean-Claude prit son panier et partit ramasser quelques châtaignes. Il existe des tas de paniers modernes, dont ceux en plastique qui se sont répandus jusque dans nos campagnes mais, pour Jean-Claude, rien ne valait son panier en osier acheté quelques années plus tôt à des gens du voyage. Ceux-ci, comme plusieurs générations avant eux, dans leurs roulottes tirées par quelques chevaux, circulaient dans l’arrière-pays normand en quête de lieux disposés à accueillir leur cortège hors norme. Au gré de leurs voyages, ils ramassaient l’osier nécessaire à la réalisation de leurs objets en vannerie.
Le vent s’était calmé, l’herbe du pré était encore humide de la rosée du matin ; les toiles d’araignées, ornées de centaines de perles d’eau, ondulaient sous l’effet de la brise matinale qui succédait aux rafales de la tempête nocturne. Jean-Claude, bottes en caoutchouc aux pieds et ciré vert sur le dos, accompagné de Celio, son doberman feu et noir, commença à parcourir l’orée du pré à la recherche de châtaignes. Il prit soin de ramasser les plus belles, que le feu de cheminée et la poêle à trous attendaient depuis l’an passé.
Le chien, malgré ses 43 kg et 70 cm, marchait à quelques pas de son maître, à bonne distance des châtaigniers. Pour cause, l’amer souvenir de son premier automne où, en chiot fougueux, il avait couru sur les traces d’un lapin (ou d’un lièvre), tête baissée parmi les bogues. Il en était ressorti la truffe et le museau remplis d’épines. Jean-Claude, dont les mains n’avaient rien de celles, douces et fines, d’une esthéticienne, s’était armé d’une pince à épiler pour les lui ôter une à une.
Il ne mit que peu de temps à ramasser deux à trois douzaines de marrons, ce qui suffisait amplement pour le repas du midi, aussi, il reprit sans attendre la direction de chez lui, ne supportant pas de ramasser ou de cueillir plus que nécessaire à sa consommation. Il prévoyait cependant d’y revenir, après le déjeuner, faire une vraie récolte à l’occasion d’une promenade digestive. Jean-Claude n’en faisait pas de réserve mais aimait partager ce cadeau de l’automne avec ses amis demeurant à Caen, la capitale bas-normande. Si certains venaient de temps en temps le voir depuis qu’il avait repris la maison de son grand-père, il savait que l’arrivée de l’automne faisait fuir les citadins des champs et des bois aussi sûrement, qu’une compagnie de CRS, des manifestants.
La maison de Jean-Claude était une maisonnette très sobre, de plain-pied, composée d’une entrée d’où on accédait à une partie des pièces. Sur la droite, une cuisine où trônait un réfrigérateur qui aurait sûrement eu sa place dans un musée et une gazinière du même acabit avec le gabarit d’une cuisinière à bois, un gros mètre cube de tôle épaisse dont le dessus était noirci par les années de frichtis cuisinés sans précaution. La table était recouverte d’une toile cirée afin d’en dissimuler les stigmates causés par le temps et le buffet en formica semblait à sa place depuis des décennies, calé par des planchettes, nécessaires à son équilibre sur ces tomettes inégales qui avaient dû traverser les deux guerres mondiales.
Une pièce plus grande, dans le prolongement de cette cuisine, servait tout à la fois de salon et de salle à manger. Les meubles de celle-ci étaient de style breton. Y trônait un buffet deux corps sur les portes duquel étaient sculptées des scènes de la vie paysanne. Cela faisait penser à un tableau de Millet ciselé en relief, avec ce paysan appuyé sur le manche d’une bêche. Celui-ci semblait discuter avec une femme dont la tête était ornée d’une coiffe en dentelle pointant vers le haut, tel un rostre de narval. Sur la table ronde au massif pied central, il ne restait que peu d’espace parmi les courriers, publicités et catalogues qui finissaient là quand Jean-Claude vidait sa boîte aux lettres. Puis ceux-ci s’avéraient d’une grande utilité, l’hiver, lorsqu’il était temps d’allumer la cheminée qui chauffait toute la maison.
Un vieux canapé, adopté depuis longtemps par Celio, faisait face à une télévision qui, malgré son apparence vétuste, recevait les émissions en couleur. Cependant, elle ne diffusait que trois chaînes et n’avait aucune télécommande. Les toilettes et la salle de bains, dans l’enfilade, précédaient les deux chambres.
Rien n’avait changé depuis l’arrivée de Jean-Claude. Lorsqu’il avait appris la mort de son grand-père, il sortait tout juste d’une procédure de divorce qui l’avait laissé dans une situation des plus délicates. En effet, dans sa grande bonté, la justice avait accordé à son épouse la totalité de leurs biens – appartement, voiture et meubles –, à l’exception des crédits à payer pour plusieurs années, gracieusement laissés à la charge de l’ex-époux. Mais heureusement pour ce dernier, le propriétaire de la maison où vivait son grand-père accepta de lui louer à un prix raisonnable. La bâtisse était restée telle quelle étant donné que personne n’avait réclamé les meubles, probablement achetés par ses grands-parents entre la fin de la dernière guerre et le début des années quatre-vingt. La seule touche de modernité dans la masure était l’ordinateur de Jean-Claude, rescapé du naufrage de son couple, et sur lequel il passait des nuits entières, bien que n’ayant pas Internet. Par le biais de l’encyclopédie Hachette sur CD-Rom, il voyageait au travers de son écran informatique.
Malgré ses 62 ans, Jean-Claude se sentait encore très jeune. Retraité depuis dix-huit mois, il disposait désormais de beaucoup de temps libre et cette vie à la campagne, qui lui avait pesé les premiers mois, lui seyait finalement à merveille. Ce qui lui manquait le plus, c’était la douche chaude du matin. Aussi, il prévoyait d’effectuer cet aménagement en priorité dès qu’il aurait la possibilité d’envisager des travaux, soit une fois que ses crédits seraient payés, ne le privant plus alors de la moitié de sa retraite.
Il était à peine 10 heures quand il revint chez lui ce matin-là. Après avoir ôté ses bottes, il enfila une vieille paire de Nike, geste que Celio comprit aussitôt. Les chaussures de sport étaient synonymes de ballade. Il jappait, la gueule dans l’encoignure de la porte, tout en remuant frénétiquement la queue. Jean-Claude sortit, devancé par son chien, enfourcha son VTT et, comme à chaque fois que le temps le permettait, ils partirent en direction des petits chemins qui serpentaient la forêt domaniale. Jean-Claude sortait cependant équipé d’un sac à dos et d’un couteau, au cas où leur excursion les mènerait à quelques cèpes ou autres pieds de moutons. Peu à peu, celui-ci abandonnait alors son instinct grégaire pour devenir un chasseur-cueilleur, comme il se plaisait à le dire. Un cueilleur chasseur atypique puisque, sans être végétarien, il se refusait à tuer des animaux de ses mains ; aucun fusil ou piège n’était jamais rentré chez lui. Il avait bien essayé d’élever des poules pour leurs œufs et leur viande, mais Celio et les renards avaient fait disparaître les poulettes avant même la ponte du premier œuf. Jean-Claude avait ainsi dû se résoudre à concocter ses omelettes avec les œufs achetés à l’épicerie du village.
Trois semaines s’étaient écoulées depuis que les châtaigniers s’étaient généreusement délestés de leurs fruits. Lorsque Jean-Claude, vaquant à ses activités habituelles, prit la décision d’une petite balade avec Celio, il prit conscience qu’il ne l’avait pas vu depuis un bon moment. Il fit le tour de la maison sans parvenir à le trouver. Dans le salon comme dans les chambres à coucher, aucune présence canine. Au fond de lui, il commençait à craindre que son chien ait de nouveau fugué, comme au début de l’été, avant de lui être ramené par un agriculteur furax à qui il aurait tué quelques volailles. Il avait alors eu beau expliquer à cet honnête travailleur de la terre que son chien poursuivait les poules dans le seul but de jouer, il n’avait reçu pour seule réponse que :
« II a tué six poules, il faut les payer. »
Après que Jean-Claude ait demandé à voir la preuve de ces méfaits, le paysan lui avait répondu :
« L’équarrisseur est passé le matin même pour récupérer un bovin mort, il a emporté les poulets avec. »
Bien que notre retraité fût convaincu de l’arnaque, il avait payé pour avoir la paix dans ce bled rural. Après tout, ses propres poules s’étaient aussi évaporées, et Celio y était peut-être pour quelque chose.
Jean-Claude contourna la maison et, lorsqu’il jeta un regard vers le pré, il resta stupéfait. Un homme était assis là, sur une chaise de camping, et caressait avec douceur Celio, qui se tenait à ses côtés, la tête posée sur sa cuisse.
Jean-Claude s’interrogea… Que faisait cet homme, assis seul dans un champ, et pourquoi Celio avait-il fugué pour aller le rejoindre ?
Il ne lui fallut que peu de temps pour les rejoindre. Arrivé à leur hauteur, l’homme avait levé la tête et répondu cordialement au salut de Jean-Claude. Celio, lui, n’avait pas bougé d’un poil, rien, aucune réaction. La présence de son maître semblait le laisser complètement indifféren

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