L affaire Dunkel - Prix du Polar - Prix Femme Actuelle 2018
296 pages
Français

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L'affaire Dunkel - Prix du Polar - Prix Femme Actuelle 2018 , livre ebook

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Description

Manuel Masse L’affaire Dunkel Gagnant du grand prix 2018 Éditions Les Nouveaux Auteurs 16, rue d’Orchampt 75018 Paris www.lesnouveauxauteurs.com ÉDITIONS PRISMA 13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex www.editions-prisma.com Copyright © PRISMA MÉDIA / 2018 Tous droits réservés ISBN : 978-2-8195-05709 À mon père. Chapitre 1 L’horloge du clocher indiquait trois heures. Sous un ciel semé d’étoiles, un village endormi se cramponnait à un roc surplombant la Méditerranée. La lune donnait à la côte calcaire un teint blafard et faisait danser un flot d’écailles argentées sur la grande étendue bleu marine. Le silence pesait. Des aboiements se firent entendre. Ils se répandirent et se répercutèrent en écho dans les ruelles qui menaient à un parc couché sur un promontoire, comme un balcon sur la mer. La brise automnale se mit à souffler en rafales. Les cyprès courbèrent la tête. Les pins et les pistachiers s’inclinèrent dans l’ombre immense d’un édifice antique. C’était celle d’une tour massive, puissante, dont la blancheur marbrée faisait pâlir la lune. Les rafales cessèrent. Un bruit perça le silence. Semblable aux râles d’un animal blessé, rampant sur le sol. Ou plutôt, pareil à celui d’une masse que quelqu’un traînerait sur le gravier, expirant bruyamment par intermittence. Sous les chênes, à l’abri de la pâle lueur, deux silhouettes cheminaient en procession. Un homme, plutôt corpulent et grand de taille, tirait d’une seule main un sac volumineux.

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Informations

Publié par
Date de parution 05 juillet 2018
Nombre de lectures 96
EAN13 9782819505709
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Manuel Masse
L’affaire Dunkel
Gagnant du grand prix 2018
Éditions Les Nouveaux Auteurs
16, rue d’Orchampt 75018 Paris
www.lesnouveauxauteurs.com
ÉDITIONS PRISMA
13, rue Henri-Barbusse 92624 Gennevilliers Cedex
www.editions-prisma.com

Copyright © PRISMA MÉDIA / 2018
Tous droits réservés
ISBN : 978-2-8195-05709
À mon père.
Chapitre 1

L’horloge du clocher indiquait trois heures. Sous un ciel semé d’étoiles, un village endormi se cramponnait à un roc surplombant la Méditerranée. La lune donnait à la côte calcaire un teint blafard et faisait danser un flot d’écailles argentées sur la grande étendue bleu marine. Le silence pesait. Des aboiements se firent entendre. Ils se répandirent et se répercutèrent en écho dans les ruelles qui menaient à un parc couché sur un promontoire, comme un balcon sur la mer. La brise automnale se mit à souffler en rafales. Les cyprès courbèrent la tête. Les pins et les pistachiers s’inclinèrent dans l’ombre immense d’un édifice antique. C’était celle d’une tour massive, puissante, dont la blancheur marbrée faisait pâlir la lune. Les rafales cessèrent. Un bruit perça le silence. Semblable aux râles d’un animal blessé, rampant sur le sol. Ou plutôt, pareil à celui d’une masse que quelqu’un traînerait sur le gravier, expirant bruyamment par intermittence. Sous les chênes, à l’abri de la pâle lueur, deux silhouettes cheminaient en procession. Un homme, plutôt corpulent et grand de taille, tirait d’une seule main un sac volumineux. De temps à autre, il laissait s’échapper une grande expiration, signe de la pénibilité de sa tâche. Il était suivi de près par un homme mince et élancé, à la démarche très raide, coiffé d’un chapeau. Il portait une corde enroulée autour de l’épaule.
— Arrête-toi ici. Cet arbre fera l’affaire, dit la voix un peu rauque, avec un léger accent de titi parisien.
— Tant mieux ! Je commençais à en avoir marre.
Le gros avait dit ça avec un accent américain, mâché comme du chewing-gum. Il cracha un excédent de salive sous la forme d’une mousse blanchâtre. Il lâcha le sac qui roula sur le sol jusqu’à un rocher blanchi par la lune, contre lequel il buta. Sous l’effet du choc, la cordelette qui le fermait céda, laissant apparaître, dans la lumière blafarde, le corps d’un jeune homme au visage tuméfié. Il était nu. Son dos et son torse étaient couverts de zébrures rouges qui s’étaient imprimées dans sa chair. Ses cheveux longs s’étaient collés en mèches épaisses sur ses joues. De ses narines, jaillissait un ruisselet écarlate qui rougissait ses lèvres. Ses yeux contemplaient fixement la grande tour de marbre plantée devant lui. Elle trônait, superbe et imposante, comme un colosse au centre d’une assemblée d’arbres qui semblaient s’incliner devant Sa Majesté. Le malabar s’approcha du corps dénudé pour le relever.
— Attends ! lui dit l’autre.
Le grand type se débarrassa de sa corde et s’élança vers le corps inerte. Il sortit de sa poche une lame que faisait reluire le clair de lune. Il s’accroupit à côté du jeune homme, juste à la hauteur de sa tête, puis se pencha sur son visage. Sa main gantée exécuta quelques gestes vifs et sûrs. Il se releva. Dans sa main de cuir noir, le sang perlait sur l’acier.
— Voilà, mon gars ! Maintenant, t’es paré pour le grand voyage ! dit-il, contemplant son travail.
Il fit un signe de tête à son complice, qui empoigna le jeune homme par les cheveux et le ramena dans les ténèbres. L’échalas sortit de la poche de sa veste un sac transparent dans lequel était enroulée une étoffe. Il l’ouvrit, plongea sa lame à l’intérieur et l’essuya sur le tissu. Il saisit le sac par le fond et laissa glisser l’écharpe sur le sol. Il prononça ces mots d’un ton grave :
—  Contra factum non datur argumentum .
Puis, il plia le sachet, le rangea dans sa poche, et alla rejoindre la large silhouette qui s’affairait dans l’ombre, sur un chêne.
— Ça y est ?
— Presque, dit-il, en nouant la corde autour d’une branche, avant de se laisser choir sur le sol, comme un bloc.
— OK. Alors, finissons-en !
L’armoire à glace vint se placer aux côtés de l’escogriffe. Elle s’immobilisa, croisa les mains sur son bas-ventre, et courba la tête. La silhouette filiforme ôta son chapeau et le tint, plaqué contre son torse. De sa main droite, elle traça une croix dans l’air en direction de l’arbre.
—  Memento mori. Quia pulvis es et in pulverem reverteris… Deus dedit, Deus abstulit, sit nomen domini benedictum et … Et… Et… Et… Merdum , à la fin !
— Et cætera, et cætera. Amen ! poursuivit l’autre.
— C’est ça, Amen ! conclut le grand. Il y en a une dont j’arrive jamais à me souvenir…
— Pas grave, monsieur White, ce qui devait être fait a été fait.
— Oui, et selon les règles. On pourra pas dire qu’on n’a pas fait c’qui fallait.
— Nom de Dieu, ça risque pas !
— Monsieur Pink !
— Désolé, monsieur White.
— Bon. Allons-y, maintenant. Ne traînons pas ici !
Le grand type se passa la main dans les cheveux, les peignant de ses doigts. Puis, il remit son borsalino en tirant sur le bord pour l’incliner sur son front. Il fit signe au balèze de le suivre. Tandis que les deux hommes s’éloignaient dans l’obscurité, un mince rayon de lune transperça le feuillage et frappa le visage de celui qu’ils avaient transporté jusque-là. Il avait les bras attachés en croix sur les branches tortueuses d’un chêne. Son visage blême était ceint de longs cheveux blonds. Son menton reposait sur son épaule, tandis que ses yeux bleus semblaient fixer l’ombre du monument qui touchait ses pieds. Du sang suintait de son front et s’écoulait goutte à goutte le long de son arête nasale. Ces mots avaient été gravés en lettres majuscules dans sa chair : REDDE CESARI QUAE SUNT CAESARIS .
Chapitre 2

Campagne du Nord, le lendemain matin.
Pour quelle raison étrange cette luxueuse berline noire s’était-elle engagée sur cette piste boueuse, coincée entre les champs fraîchement labourés ? Le chauffeur était un homme plutôt chétif. Avec son complet impeccable et ses cheveux grisonnants soigneusement peignés sur le côté, il avait quelque chose de désuet, comme les majordomes de la vieille aristocratie britannique. Il conduisait arc-bouté sur son volant. Derrière le pare-brise, ne paraissait que son visage émacié, vrillé de deux petits yeux craintifs qui balayaient l’horizon brumeux. La voiture progressait lentement, explorant le terrain comme si, à tout instant, un ennemi pouvait surgir des bas-côtés. Deux corbeaux croassèrent. Ils fendirent la brume froide de leurs ailes sombres. L’arrivée de plusieurs types à la mine patibulaire les avait chassés de la branche où ils reposaient, engourdis par la fraîcheur matinale. Embusquée dans un bosquet dénudé, sur une hauteur dominant le plat pays, une paire de jumelles reflétait la grisaille du ciel automnal. Un grand bonhomme, au teint cuivré et aux cheveux noirs, la tenait fermement calée contre ses arcades sourcilières. Son visage gras au menton mal rasé, surmonté d’une bouche charnue à demi couverte par une moustache épaisse, lui donnait l’air d’un patron de bistrot. Son ventre proéminent, dissimulé sous un pull de laine grossière, renforçait encore cette impression. Derrière lui, trois types, assis dans deux voitures puissantes, baragouinaient dans des radios embarquées qui leur répondaient en crachotant des phrases incompréhensibles. À la droite du malabar, un gars en blouson de cuir clair, la coupe en brosse, un casque-micro scotché sur les oreilles, attendait qu’il veuille bien lui adresser la parole.
— Qu’est-ce qu’il nous fait là, Nestor ? Pourquoi il avance pas ? Merde, c’est pas le moment qu’il fasse dans son froc. Vas-y Steph, parle-lui un peu pour le rassurer !
Dans la voiture, le petit homme entendit qu’on l’appelait dans le mini-haut-parleur caché dans son oreille.
— Monsieur Pincevent ? Est-ce que tout va bien ?
— Oui… Oui, enfin… Je cherche, mais je ne vois rien pour l’instant. Êtes-vous certain que nous sommes au bon endroit ? demanda-t-il, la tête penchée comme s’il parlait à son nombril.
— Certain. Il ne devrait pas tarder à vous contacter. Gardez votre calme. Surtout, ne laissez rien paraître. Vous avez compris ?
— Oui… Oui, j’ai bien compris, répondit-il d’une voix fluette.
— Ne vous inquiétez pas, nous sommes là. Il ne peut rien vous arriver.
Monsieur Pincevent fixait avec inquiétude le siège du passager. Une mallette de cuir y trônait, un téléphone portable à ses côtés. Une ornière bouscula la berline et surprit le chauffeur. Le véhicule fit une embardée et faillit partir dans le fossé. Un jet de boue macula le pare-brise. L’homme sortit un mouchoir de sa poche et épongea les quelques gouttes de sueur qui venaient de sourdre sur son front, en dépit de la fraîcheur matinale.
La sonnerie de son téléphone portable retentit. L’homme lâcha précipitamment son mouchoir. Il attrapa l’appareil qui manqua de glisser de ses mains moites.
— Allô ? Allô ? Allô ?
— Silence.
— Il y a quelqu’un ?
— Vous êtes seul, comme convenu ? J’espère que votre patron n’a pas prévenu la police. Sinon… tança une voix synthétisée, comme celle d’un robot.
— Oh non ! Non, non, monsieur. Monsieur Bormann a bien fait comme vous le lui avez demandé : dix millions de dollars dans une mallette…
— Bien. Arrêtez-vous au prochain carrefour.
L’inconnu raccrocha aussitôt. Le petit homme fut soudain pris de panique, il se pencha à nouveau sur le micro scotché sur son pectoral.
— Il a raccroché. Vous avez entendu ? Que dois-je faire ?
— Nous avons entendu. Calmez-vous, monsieur Pincevent. Nous avons la situation bien en main, insistait la voie rassurante. Faites tout ce qu’il vous dira de faire. On va l’avoir. Ne vous inquiétez pas.
Sur la colline, la tension était palpable. Chacun se tenait prêt à son poste. Les hommes avaient placé les bolides dans le sens de la marche, la clé sur le contact. Le grand trapu observait la scène, fixé à ses jumelles, toujours flanqué de son adjoint. Tous attendaient son ordre. Les fauves trépignaient dans leur cage, impatients de b

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