Kamala Harris
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Description

D’origine jamaïcaine par son père et indienne par sa mère, Kamala Harris était faite pour son destin : bébé, elle parcourait déjà en poussette les manifestations pour les droits civiques. Elle est le phénomène qui bouscule l’Amérique : jamais une femme n’avait réussi à accéder à la vice-présidence des États-Unis !Comme Barack Obama, à qui elle est souvent comparée, elle a toutefois très peu l’habitude de rester en retrait et ne se contentera pas d’un second rôle. Joe Biden, qui se voit comme un « pont entre les générations », ne s’y est pas trompé. Comme tout le monde, il voit sa dauphine de 55 ans gravir la dernière marche et lui succéder.Kamala entend pourtant aussi rester « Momala », un titre qui lui est si cher. C’est comme ça que l’appellent les deux enfants de son mari, l’avocat Douglas Emhoff. Car pour cette femme au destin hors du commun, sa famille passe avant tout.On le sait aussi, celle qui fait désormais rêver l’Amérique est une politicienne à poigne. Parfois trop peut-être : la gauche du Parti démocrate lui reproche d’être trop à droite. Donald Trump la qualifiait au contraire de gauchiste « radicale ». Ses détracteurs concluent qu’elle est opportuniste. On retient d’elle qu’elle ne flanche pas, même lorsque les décisions à prendre sont difficiles, une réputation qu’elle a acquise durant ses années de procureure en Californie.Ce qui est sûr, c’est qu’avec Kamala Harris, l’Amérique est en train de changer. La première vice-présidente de l’Histoire ré-enchante le Rêve américain et les petites filles, notamment « les petites filles de couleur qui se sentent si souvent oubliées et sous-estimées », se voient différemment pour la première fois : elles peuvent rêver de devenir un jour, elles-aussi, présidente des États-Unis.Jean-Éric Branaa est maître de conférences à l’université d’Assas. Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur les États-Unis, dernièrement de la biographie de Joe Biden parue chez Nouveau Monde.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 septembre 2021
Nombre de lectures 5
EAN13 9782380942224
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0650€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Tout est possible
« Je n’essaie pas de changer la société », a affirmé Kamala Harris après avoir été choisie par Joe Biden pour être sa vice-présidente. « J’essaie simplement de résoudre les problèmes qui réveillent les gens en pleine nuit. » Il n’est toutefois pas certain que la première femme vice-présidente des États-Unis n’aura pas la tentation d’en faire un peu plus si elle grimpe sur la dernière marche. Or, on a de bonnes raisons de penser qu’elle pourrait développer d’autres ambitions pour son pays, même si sa déclaration prend beaucoup de sens lorsqu’on se penche sur sa vie et que l’on parcourt le chemin qui l’a conduite jusqu’au sommet.
Il est d’abord indéniable que les combats menés par sa mère ont profondément façonné la politicienne qu’elle est devenue. Son histoire est celle d’une petite fille métisse qui porte la continuité d’un combat qui s’est structuré dans les années 1960, à la fois autour de la reconnaissance du peuple noir, de la défense des minorités et de la cause des femmes. Kamala Harris coche les cases de tous ces combats et y ajoute un élément particulier qui élargit encore les perspectives, de par sa double origine, indienne et jamaïcaine. Le 11 août 2020, par un simple Tweet, Joe Biden a fait savoir qu’il avait « le grand honneur d’annoncer qu’il avait choisi Kamala Harris, une lutteuse infatigable auprès des petites gens et une des femmes parmi les plus engagées du pays pour être sa colistière ». Et, comme c’était aussi le bon moment, elle désormais la première femme à la vice-présidence et, cette fois-ci, être une femme de couleur n’a pas été un obstacle.
La vice-présidente Kamala Harris a brisé la barrière qui maintient les hommes aux plus hauts rangs de la puissance dans ce pays depuis plus de deux siècles. En prêtant serment, elle a fait de ce moment l’incarnation de « l’aspiration américaine ». « Même dans les périodes sombres, nous ne nous contentons pas de rêver, nous faisons ce qui doit être fait. Nous ne voyons pas seulement ce qui a été, nous voyons ce qui peut être », a-t-elle déclaré dans un bref discours devant le Lincoln Memorial à Washington. « Nous sommes audacieux, sans peur et ambitieux. Nous sommes inébranlables dans notre conviction que nous allons surmonter, que nous allons nous relever. » Le message était clair : tout est possible désormais. La réinvention du « Yes, We Can ! » de Barack Obama.
Pour Kamala Harris, cette journée du 20 janvier 2021 était imprégnée d’histoire et de signification à plus d’un titre. Elle a été escortée à la tribune par l’officier de police du Capitole Eugene Goodman, l’officier qui a affronté seul une foule de partisans de Trump alors qu’ils tentaient de mener un assaut indigne contre le Sénat. Elle a été assermentée par la juge de la Cour suprême Sonia Sotomayor, la première femme de couleur de la Cour, sur une bible qui a appartenu à l’ancien juge de la Cour suprême Thurgood Marshall, pour la dimension historique, et une autre ayant appartenu à Regina Wilson, qui était en quelque sorte sa mère d’adoption, pour la dimension personnelle et émotionnelle. Elle portait une robe et un manteau d’un violet profond créés par deux designers noirs émergents avec une signification claire : le violet, qui est la couleur choisie par les nationalistes noires américaines pour se distinguer, est aussi un mélange du bleu et du rouge, les deux couleurs politiques qui n’ont de s’affronter avec une violence inouïe pendant les quatre années du mandat de Donald Trump. Elle indiquait ainsi clairement qu’il fallait que cela cesse.
L’ascension de Kamala Harris est historique pour de nombreuses raisons et ouvre de nouvelles perspectives pour la politique états-unienne. Mais elle est particulièrement significative parce qu’elle a pris ses fonctions à un moment où les Américains étaient à la fois aux prises avec le racisme institutionnel et systémique et où ils faisaient face à une pandémie qui oblige à se tendre la main à nouveau et à se tourner les uns vers les autres.
Tout laisse désormais penser que Kamala Harris ne s’arrêtera pas là, parce qu’elle porte dans son être tout ce qui fait ce pays aujourd’hui et la graine des États-Unis de demain. Elle se trouve dans une position très forte et indispensable pour traduire et porter les aspirations de toutes les minorités, de tous les genres, de toutes les Américaines et tous les Américains, et pour construire l’Amérique du futur.
1 Les premiers pas
Kamala Devi Harris est née à l’hôpital Kaiser d’Oakland, en Californie. Ses deux prénoms sont symboliques : ils rappellent son origine indienne, comme le voulait sa mère Shyamala Gopalan. En 2004, cette dernière a déclaré à Scott Duke Harris du Los Angeles Times qu’elle avait tenu à donner à ses filles des noms dérivés de la mythologie hindoue en partie pour les aider à préserver leur identité culturelle. « Une culture qui vénère les déesses produit des femmes fortes », a-t-elle assuré. Kamala signifie « fleur de lotus » ou « rouge pâle » en sanskrit. Il se prononce « Komala » ; et non pas Kamala, en respectant la racine étrangère. Kamala Harris tient particulièrement à cette bonne prononciation et ne perd pas une occasion de le préciser. C’est aussi le nom d’une déesse hindoue, mieux connue sous le nom de Lakshmi, que sa petite sœur, Maya, a reçu en deuxième prénom deux ans plus tard. Lakshmi est la déesse de la prospérité, de la bonne fortune et de la beauté.
Devi veut précisément dire « déesse » en sanskrit, mais c’est aussi le nom de la déesse mère hindoue. Elle est considérée comme la représentation de la féminité et elle est une force nourricière et la protectrice des villages. Cependant, elle a un côté féroce et participe non seulement à la création des mondes, mais aussi à leur destruction.
La naissance de Kamala Harris remonte au 20 octobre 1964. Était-ce un signe du destin ? Deux semaines plus tard le président Johnson était réélu à la présidence fédérale, avec un score qualifié de raz-de-marée, particulièrement en Californie. L’année 1964 fut la seule élection présidentielle où le Golden State ne fut pas remporté par un républicain dans la période comprise entre 1952 et 1988, avant que cet État ne devienne une terre fortement démocrate à la fin du XX e siècle.
L’histoire familiale, quant à elle, s’appuie sur une légende bien connue : elle commence avec les parents qui la poussent dans un landau alors qu’ils défilent pour les droits civiques, en mêlant leurs voix aux chants de protestation. Ce serait arrivé tellement de fois que Kamala aurait fini par y prendre goût et par apprendre les slogans. Ainsi, après une de ces marches, la petite fille balbutiait quelque chose. Sa mère lui a demandé ce qu’elle voulait et elle aurait répété plus clairement : « FWEEDOM ! » (« LIBE’TÉ ! ») La lutte des Noirs américains pour les droits civiques semble indissociable de la famille Harris et, si l’on veut voir des symboles forts, on relèvera aussi que Kamala est née entre l’adoption de la loi sur les droits civiques de 1964, le Civil Rights Act , et l’adoption de la loi sur le droit de vote, le Voting Rights Act , de 1965.
 
Dans les traces de sa mère
 
Ce qui est certain, c’est que l’enfance de Kamala a été bercée par les souvenirs de sa mère et par l’ambiance qui régnait à Berkeley dans les années 1960. « En grandissant dans les plaines de Berkeley, j’ai été élevée grâce aux histoires d’activisme des années 60 », a déclaré Harris à Berkeleyside , un journal local. Sa mère lui rapportait des anecdotes sur le mouvement des droits civiques, sur le mouvement anti-guerre et sur celui pour la liberté d’expression. Elle leur racontait comment les étudiants faisaient le piquet de grève au Mel’s Drive-In qui refusait d’embaucher des Noirs pour le service en salle, alors que cela ne leur posait aucun problème de les avoir en cuisine. Elle leur parlait des sit-in organisés pour protester contre l’inaction du gouvernement fédéral face à la discrimination dans le Sud. La conscience de lutte collective s’est donc ancrée très tôt chez la petite fille. Elle a aussi compris très vite qu’il lui fallait vivre avec les entraves que généraient le racisme, le sexisme ou la discrimination, même s’il ne fallait pas renoncer à changer les choses autour d’elle pour que ces difficultés s’atténuent et tenter de les faire disparaître.
La lutte a été un fondement dans la vie de la mère de Kamala Harris, et c’est très certainement la première arme qu’elle a transmise à ses enfants. L’Amérique des années 1960 était une Amérique dure, qui se recroquevillait sur son passé alors que la jeunesse voulait regarder au loin, vers son avenir. Shyamala avait conscience que ses filles seraient toujours considérées comme des petites filles noires, et que ce n’était pas un avantage à cette époque-là. Il était donc de sa responsabilité de leur apprendre comment se défendre. Très introduite dans les milieux universitaires protestataires, Shyamala a continué à fréquenter les cercles de réflexion ou de défense des droits civiques après ses deux grossesses. Elle voulait apporter sa pierre à la naissance d’une nouvelle culture politique aux États-Unis. Après avoir arrêté ses études, elle a participé à des rassemblements organisés le dimanche soir au Rainbow Sign, un ancien bordel reconverti en « centre culturel noir de Berkeley », situé sur Grove Street (aujourd’hui MLK’s Way), la frontière symbolique entre le noir et le Berkeley blanc. Le Rainbow Sign a été créé par Mary Ann Pollar et dix autres femmes noires en septembre 1971. Son nom a été inspiré par un verset d’un negro spiritual célèbre, « Mary Don’t You Weep » , dont les paroles « God gave Noah the rainbow sign ; no more water, the fire next time… » ont été imprimées sur la brochure d’adhésion. L’écrivain James Baldwin, qui était un ami très proche de Mary Ann, a utilisé ce même verset pour son livre The Fire Next Time .
Le centre a été très actif entre 1971 et 1977. Le site web Berkeley Revolution, consacré aux transformations apportées par les

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