Djihad aux abattoirs de Marseille
260 pages
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Djihad aux abattoirs de Marseille , livre ebook

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Description

« L'abatteur rituel va replonger l'estampille dans l'encre alimentaire brune contenue dans un godet qu'il tient dans sa main gauche lorsqu'il croit apercevoir quelque chose affleurant à la surface du liquide. Du pouce et de l'index il se saisit du fragment immergé, l'observe plusieurs secondes, médite... un cartilage et soudain un éblouissement : du cochon ! Il tient entre ses doigts une oreille de la bête immonde ! »
Premier incident dans cet abattoir où se côtoient juifs, musulmans, chrétiens. Qui cherche à troubler l'harmonie qui prévalait jusque-là et pourquoi ?
Dans ce roman à trame policière, dont l'épicentre est un abattoir où se pratiquent des abattages rituels, les auteurs ont voulu traiter de l'importance de l'alimentaire dans le religieux, sa symbolique, ses tabous.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 novembre 2013
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332615459
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
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Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-61543-5

© Edilivre, 2014
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Prologue
Il était environ six heures du matin quand l’abatteur rituel Matan Finbelstein immobilisa sa voiture sur le parking de l’abattoir Saumaty. Le shohet 1 venait de prier à la synagogue et portait encore sa kippa, signe extérieur de sa condition de Lilliputien sous le regard de Dieu. Il ouvrit le coffre de sa voiture, y jeta la coiffe et la remplaça par un casque de plastique blanc. Puis il plia sa veste avec soin, la posa sur la banquette arrière, déboutonna le col de sa chemise, en retroussa les manches et, ayant protégé le devant de sa corpulente personne par un tablier blanc, chasuble caoutchoutée à bretelles qui lui tombait jusqu’aux chevilles, il se chaussa de bottes, prit la mallette contenant les couteaux rituels et sa carte plastifiée de sacrificateur habilité : il était prêt.
Un jour froid se levait sur la baie de Marseille. La sombre masse de l’abattoir, construction aux parois de verre et à l’ossature métallique de couleur vive, une incongruité pour un site mortifère, se découpait sur un ciel méditerranéen piqueté d’étoiles pâlissantes. A gauche, les premières maisons de l’Estaque bâties sur la frange littorale qui a inspiré Cézanne ; à droite, nimbée de brumes hivernales, la zone portuaire avec ses grues, ses silos ; sur le devant, deux groupes de bâtiments, l’un réservé à l’abattage des porcs, espèce rebelle à la législation biblique et l’autre aux ruminants, bêtes à sabots fendus qui trouvent grâce aux yeux des juifs.
Voilà ce que voyait du parking le shohet Matan Finbelstein. Appuyé contre sa voiture, il caressait sa barbe grise rabbinique, humant la brise marine tout en écoutant les grognements furieux des porcs qui emplissaient les ténèbres de leurs cris hystériques. Quelle bête immonde ! L’abatteur rituel remercia le Créateur (béni soit-il !) pour ses mitsvoth 2 qui guident la vie du juif fidèle à la Loi. Il aurait préféré être damné, oui damné, plutôt que d’avoir à égorger des animaux aussi braillards. Ce qui est s’explique par ce qui fut. L’impureté du porc est consacrée par la Torah. Si les « goys », ces infatigables bouffeurs de l’exécrable, veulent s’empiffrer de cochon, c’est leur problème ! Mais un juif mange ce que mangent les juifs et c’est bien ainsi. Empli de la justesse de ses croyances, le shohet jeta un œil à sa montre, sursauta. Six heures quinze ! Au bout du parking, la Twingo du docteur Anémone Lambert, vétérinaire-inspecteur, était déjà là et, à côté, l’énorme moto de son adjoint, le préposé sanitaire Félix Lhérisson. Un drôle d’homme, celui-là, toujours à chercher des embrouilles. L’abatteur rituel détestait ce genre d’exalté « ami des bêtes » qui n’a à la bouche que souffrance animale, respect de la législation, dignité et protection des animaux. Le shohet retint dans son cœur des pensées mauvaises. Il devait se remuer… maintenant !
En hâte, il se dirige vers l’abattoir. Passé le hall, ses bottes couinent sur le sol carrelé d’un couloir silencieux comme une cathédrale. Il pousse la porte où est écrit : tenue réglementaire obligatoire. Une explosion furieuse agresse ses tympans. C’est comme s’il avait ouvert une écoutille donnant sur la salle des machines d’un navire. Sifflement des scies à fendre les colonnes vertébrales, des cisailles à trancher les sternums, des machines à éjointer les têtes, à arracher les cuirs, ronflement de la déméduleuse, chuintement des tapis roulants, choc métallique des crochets garnissant les rails qui courent entre des rangées de tubes fluorescents. Dans le ventre bouillonnant de cette usine de la mort programmée, monde hydraulique et pneumatique, s’active une vingtaine d’hommes vêtus de blanc, casqués, bottés, le corps ceint d’un tablier caoutchouté. Certains, juchés sur d’aériennes plates-formes, travaillent d’un couteau agile des carcasses de bovins suspendues aux crochets de fer. Leur tâche achevée, ils poussent la bête écartelée vers d’autres ouvriers de la chaîne qui, un peu plus loin, la récupèrent avec des gestes précis. Lorsque la cadence semble faiblir, un géant au tablier maculé quitte quelques instants son poste et, ventre en avant, propulse d’une bourrade les carcasses rétives qui reprennent à rythme accéléré leur défilé sanguinolent. Des chariots aux dents de loup encombrent les allées. Au niveau du box rotatif, là où s’effectue la saignée, une inondation écarlate, envahissante, du sang partout, des éclaboussures, sur les murs carrelés, le sol, les bottes, le tablier des ouvriers. Immolés dans une démoralisante indifférence, après transmutation sur les chaînes d’abattage, les bovins, carcasses anonymes, finissent leur parcours avalés par les chambres froides tandis que dans la salle aux murs aveugles baignée par la buée moite issue de la triperie mijotent, dans d’énormes chaudrons, panses et boyaux.
Le shohet pénètre dans la cage vitrée placée à l’entrée du hall d’abattage où Marcel Garbarini, dit familièrement Garba par les ouvriers bien qu’avec lui on ne rigole pas parce qu’il est l’œil du patron, est occupé à enregistrer sur son ordinateur le numéro de tuerie et le poids des carcasses qui défilent sur la chaîne. Sans quitter l’écran du regard il lève une main qui signifie « juste un instant » puis se retourne :
– Salut rabbi. Putain, on en a filé un rayon ce matin, je finis de peser les bovins. Vous allez pouvoir démarrer vos moutons.
L’abatteur rituel pose sa mallette, l’ouvre, choisit le couteau réservé aux petits ruminants. Il aiguise la lame avec une patience infinie puis, entre l’ongle du pouce et la pulpe de l’index, vérifie que le fil ne présente aucune aspérité, tout défaut, même de la taille d’un cheveu causant, comme le dit la tradition, « la coagulation du cœur ». Il éprouve une émotion chaque fois qu’il inspecte la lame d’acier qui va trancher la gorge d’une centaine de tendres agneaux aux yeux doux, la compassion des soldats du roi Hérode le jour du massacre des Innocents. Oui, il doit immoler avec amour, donner une mort sans violence à ces candides créatures bêlantes. Il n’a qu’à suivre à la lettre les prescriptions du Talmud de Babylone : surtout ne pas cisailler mais, après avoir tendu la peau, fendre d’un seul tenant trachée, œsophage et carotides sans toutefois toucher les vertèbres cervicales. Dieu a donné à l’homme le droit de consommer la viande des animaux de la terre mais pas sans conditions. L’abattage rituel a ses règles, les mammifères doivent être tués selon la Loi et pas autrement. C’est du moins ce que pense le shohet Matan Finbelstein en se dirigeant vers le poste de saignée, son grand coutelas à la main.
Le kabyle Zãhir Abdelkader, responsable de la stabulation, lève sur ce Barbe-Bleue talmudique le regard clair d’un natif de Tizi Ouzou. Il lui tend une main fraternelle et, s’étant touché machinalement la région du cœur, gagne la bergerie où il siffle « le cadet » Pépita, pacifique brebis hors d’âge qui gagne son foin en conduisant ses semblables à la mort. La brebis pénètre dans le couloir d’amenée d’une démarche paisible, sereine promesse de grand air et de liberté. Une cohorte d’agneaux bêlant, se bousculant pour être en tête, lui emboîte le pas. Au bout de l’étroit passage vers la lumière, le piège à contention et l’égorgement.
Donner sans trembler une mort douce, saigner sans brutalité, presque avec tendresse, tels sont les sentiments qui habitent le shohet lorsqu’il dégage la gorge de l’agneau immobilisé en tirant sa tête vers l’arrière. Une bénédiction mentale et le couteau glisse sur le cou, caresse mordante dessinant en aval du larynx une entaille nette, profonde, d’où gicle un sang bouillonnant qui flamboie un bref instant puis vire au rouge sombre, geyser intermittent rythmé par les ultimes pulsations du cœur. L’ouvrier arabe occupé à suspendre les carcasses au rail ne prête aucune attention à cet épanchement poisseux qui souille bottes et tabliers. L’agneau est dirigé vers l’arrache-cuir, une machine qui le dépouille avec le mouvement souple d’une femme enlevant son bas. Nue à présent, la carcasse à la chair rose et lisse doit être soumise à un contrôle sanitaire dont le protocole remonte à la Bible. Le devoir du shohet, dépositaire des lois alimentaires du Deutéronome et du Lévitique transmises à Moïse par l’Eternel au mont Sinaï : écarter résolument l’impur. Le shohet fend l’abdomen, passe son bras par la boutonnière, fouille les entrailles chaudes à la recherche d’adhérences, ces infimes soudures entre membranes et viscères qui peuvent mettre en péril la santé d’un juif. Bilan mental silencieux. La bête est parfaitement saine. Avec la lame du couteau rituel il ouvre à présent le ventre, largement, laissant s’écouler estomac et intestins en grappes. A l’aide d’une pince il fixe sur les viscères des plombs gravés de caractères en hébreu, sceau qui atteste du caractère kasher des entrailles. Puis c’est l’ouverture du thorax, extraction de la fressure, cœur, foie et poumons en une seule masse sanguinolente. Avant de placer de nouveaux plombs sur les abats, circonspect, il insuffle de l’air dans les poumons spongieux pour déceler d’éventuelles fuites. Dernier coup d’œil à l’intérieur de la carcasse crucifiée et parage des graisses. L’agneau est kasher, du moins sa partie avant, les zones innervées par le nerf sciatique étant prohibées, un interdit alimentaire remontant

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