Une Femme sans identité
75 pages
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Une Femme sans identité , livre ebook

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Description

Marie au cœur trop pur est en souffrance, opprimée par un mal-être dont elle ne perçoit pas l’origine. Elle évolue par la force de sa différence, dans une société brutale dont seul son propre brouillard la protège, avec pour seul point d’amarre son sac-Identité. Mais elle ne se plaint pas, se bat avec énergie et ne renonce pas ; elle aime les gens et naturellement les gens l’aiment… Un jour, un événement anodin du quotidien vient anéantir son équilibre durement acquis : cet incident va finalement se révéler d’une importance capitale. Marie va-t-elle enfin trouver le chemin de sa vérité ? Ce roman, tonique, est un hymne à la résilience, à l’amitié, à l’amour. Je vous invite à me suivre dans le monde de Marie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 janvier 2023
Nombre de lectures 6
EAN13 9782492126888
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0324€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Une femme sans identité
 
Roman
 
 
 
Tadiou SZWED
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
«   Tu n’es rien, tu n’es rien   !   »
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
A nnée  2005
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Le sac à main de Marie
 
 
C’est sûr que j’ai pas appris beaucoup de choses à l’école, c’était trop dur. Mais j’ai appris à lire, je lis pas mal   ; j’ai appris à compter aussi. La preuve, on est en 2005, je suis née en 1969, alors j’ai 36 ans. Alors vous voyez   ! On dit qu’une femme dit jamais son âge. Moi, j’ai pas peur de dire le mien, je répète, 36 ans. Parce que mon âge fait partie de mon identité. Même que mon âge change tout le temps, mon Identité change pas. Mon Identité, c’est moi.
J’ai une peur énorme, phobie qu’on dit, de ces gros meubles qu’on appelle congélateurs-bahuts, de gros réservoirs avec du très grand froid   ; dedans on pourrait mettre la moitié d’un bœuf ou, quelle horreur, un être humain tout entier. D’ailleurs j’ai vomi, il y a pas longtemps, en lisant un journal   ; c’était écrit en gros : un bébé retrouvé dans un congélateur. La mère est en garde à vue.
Donc j’en ai pas, ni de télé non plus d’ailleurs   ; la télé, ça me donnait mal à la tête et des bourdonnements dans les oreilles, quand je la regardais ailleurs   ; il y en a qui disent que je suis un peu spéciale   ; ils disent   spéciale , avec un ton, je vous dis pas   ; et avec les lèvres toutes pincées   ; ça, ça les regarde. Je sais que les congélateurs-bahuts les meilleurs du monde sont les Allemands, surtout ceux de la marque Mercedes (on me dit que c’est une marque de voiture   ; pff   ! Je sais ce que je dis, les gens aujourd’hui disent n’importe quoi).
Ce qui est sûr c’est qu’il y a des choses que j’aime, comme les sacs à main, en tout cas le mien. Car je vais vous dire, et c’est important, j’ai une identité, moi, quoi qu’on dise. D’ailleurs, je sais pas s’il faut écrire Identité ou identité ou IDENTITÉ… Je suis pas très calée, moi. Bref, quand même, j’ai une Identité et j’y tiens   ; et je tiens à l’écrire comme ça. Mon Identité, c’est elle qui fait que je suis moi et pas une pouffiasse quelconque à talons (j’aime pas les pouffiasses à talons). Mais la majuscule, j’ai été voir sur Google, j’ai vu écrit carte nationale d’identité , ça me déçoit, rien que des petites lettres. Je m’en fiche, quand je parle de moi, je pense avec des majuscules, même que l’autre, celui qui m’écoute (même que parfois c’est celle qui m’écoute   ; il faut pas oublier les femmes) il le sait pas, que je pense Identité avec une majuscule   ; ou, dans les bons jours, carrément IDENTITÉ . Bref, mon Identité existe parce que j’existe, ou c’est le contraire. Bon, c’est un peu pareil. Je fais pas vraiment la différence. En tout cas j’existe et je suis moi.
La preuve que j’ai une Identité, une vraie, c’est que j’ai un sac en cuir, mais c’est du faux   ; je sais pas si on peut s’en rendre compte, c’est très bien imité, parfois même moi je me laisse prendre, j’oublie que c’est du faux et ça me fait plaisir comme si c’était du vrai, même s’il sent pas comme la peau d’une vache. Je précise que mon Identité est dans mon portefeuille qui est en vrai plastique, peut-être du chinois, c’est moins cher   ; en tout cas il sent rien   ; et c’est écrit quelque chose in China (ça, c’est facile, c’est presque Chine   ; in c’est bizarre, mais c’est comme ça).
Quand on l’ouvre avec la fermeture Éclair, même que ça arrive qu’elle se coince, on tombe sur ma carte bancaire de couleur marron – Banque Centrale Européenne Populaire (BCEP   ; j’ai retenu)   ; sur ma Carte Nationale d’Identité (je mets des majuscules pour me faire plaisir), couleur bleu-gouvernemental, toute neuve, valable quinze ans, donc jusqu’en 2020. On voit mon nom : Lasne   ; et mon prénom : Marie. On voit aussi ma tête, faut regarder de face, pas de sourire, pas de cheveux dans les yeux   ; ça tombe bien, mes cheveux sont courts. Faut regarder de face d’accord   ; mais moi je louche, oh   ! je louche seulement un peu, même que Gaëtan me dit que ça me va bien. D’ailleurs beaucoup me disent que je suis jolie   ; je les crois   ; et je suis grande, mais ça se voit pas sur la photo, forcément. Gaëtan, c’est mon voisin de palier, même qu’il me court après   ; mais moi je suis pas intéressée   ; courir, courir, c’est manière de parler, car il pourrait pas courir vite, vu qu’il est trop gros et qu’il respire trop fort, c’est pour ça que je suis pas intéressée   ; mais enfin, il faut bien que tout le monde respire   ! Gaëtan est vraiment trop gros, car moi, je suis maigre   ; c’est Joséphine qui dit que je suis maigre. Moi, je me trouve mince   ; mince c’est mieux que maigre   ; mince, ça fait chic, ça fait beaux quartiers de Paris, le 16ème, tout ça. Mince, ça fait mannequin, même qu’on voit des photos partout de ces mannequins   ; elles sont toujours grandes, souvent avec des petits seins   ; mais c’est la mode   ; alors c’est ça qui fait chic, et qui fait qu’elles gagnent plein de sous, tout le monde sait ça. Moi, je suis grande aussi, comme j’ai déjà dit, mais j’ai de jolis gros seins, même que beaucoup louchent dessus.
Joséphine, c’est ma cousine. Attention, seulement ma cousine par alliance , comme on dit. Ouf   ! Car, eh ben, quel boulet, celle-là   ! Et c’est pas nouveau, ça dure, c’est depuis longtemps. Boulet, c’est le cas de le dire. Des bourrelets un peu partout. Presque cent kilos, qu’elle pèse. Et souvent, sale avec ça, les ongles noirs, les cheveux gras… Bon, on choisit pas sa famille, hein   ! Et elle a souvent besoin de moi   ; avec ses gosses, elle arrive pas à s’en sortir toute seule, alors je vais chez elle, car
«   La famille, c’est la famille !   » disait ma grand-mère.
Alfred, mon vrai cousin, l’a choisie, sa Joséphine, d’accord, mais pas moi. Et je me demande toujours pourquoi il a fait ça. Bon, les couleurs, les goûts, l’amour, on peut pas comprendre, ça se discute pas, c’est comme ça et c’est tout. Mais si elle avait été ma vraie cousine, pas par alliance, ça aurait été encore plus pénible. Ouf   ! Moi, j’aime bien mon vrai cousin, Alfred, il me raconte des histoires qui me font rire   ; je ris la bouche grande ouverte et avec beaucoup de bruit.
«   Toi, au moins, tu ris de bon cœur   !   » me dit Joséphine, qui rit moins que moi aux blagues de son mari.
C’est vrai qu’elle doit les connaître par cœur.
Moi, je les oublie tout le temps, c’est pratique pour lui, il peut recommencer, ça me gêne pas. Ça doit d’ailleurs faire longtemps qu’il me les raconte, ces blagues, depuis qu’on était petits   ; car on a à peu près le même âge et on a vécu, pas dans le même village, mais pas trop loin   ; alors on se voyait de temps en temps.
Son père et mon père, ils sont frères. Ils avaient tous les deux une ferme. Sauf que, si moi j’aimais bien aider aux champs, Alfred aimait pas du tout et ça arrêtait pas de faire des disputes   ; Alfred, ce qu’il a toujours aimé, c’est l’école. Il lisait tout le temps, il aimait le calcul, les tables de multiplication et tout ça, les poèmes   ; c’était facile pour lui   ; pas comme pour moi. Du coup il a quitté son village quand il a eu 15 ans pour aller dans un lycée à Clermont-Ferrand, il avait pu avoir des sous   ; une bourse, quelque chose comme ça   ; et après il a pu encore un peu étudier, mais pas trop, car ça coûtait trop cher   ; alors il a pu avoir un peu de diplômes, mais pas autant qu’il aurait voulu et qu’il aurait pu. Et à la fin il est parti travailler à Paris dans les robots. C’est là qu’il a rencontré Joséphine, sûrement qu’elle était jolie à l’époque, sûrement sans bourrelets. Alfred était très sérieux, enfant, quand il apprenait ses leçons. Mais c’était un drôle, il a toujours aimé rire, mais alors rire, rire, c’était comme des coups de tonnerre.
Il a toujours été beau, comme maintenant. J’aime bien sa petite moustache, ses longs cheveux et ses grandes jambes   ; j’ai du mal à le suivre quand on va se promener tous ensemble avec sa famille et qu’il a décidé de foncer   ; alors, Joséphine, je vous dis pas, elle souffle, elle transpire, ça fait rigoler ses enfants   ; après, Alfred est obligé d’aller moins vite   ; sinon, Joséphine, elle va tomber   ; et alors, pour la relever, il faudrait s’y mettre à plusieurs. Mon cousin m’a dit qu’elle est devenue grosse comme ça après avoir eu ses quatre enfants, que ça a été dur pour elle avec son boulot de secrétariat, même qu’elle doit prendre encore souvent du travail à la maison   ; alors elle compense en mangeant beaucoup des choses sucrées et elle a des médicaments   ; il me dit qu’elle a attrapé aussi des problèmes avec ses hormones, ce qui arrange rien pour le poids et qu’alors elle se laisse des fois aller, question propreté   ; ça, j’ai remarqué, ses ongles, ses cheveux   ; c’est pas terrible pour mon cousin   ; peut-être qu’il va de temps en temps voir ailleurs quelqu’un de mieux, mais ça me regarde pas   ;
«   Faut rester discret   », disait ma grand-mère.
Elle me répétait ça souvent, comme tout un tas d’autres choses   ; comme ça, à force, je risquais pas d’oublier. Et j’avais fini par écrire ses phrases dans un carnet vert avec des spirales   ; c’était mon carnet Grand-Mère.
Bon, si je reviens à mon portefeuille, il y a aussi mes clés de maison, j’en ai deux, pour la serrure du haut et celle du bas (porte-clés en plastique, couleur rouge-immeuble-de-quartier-parisien-en-briques) et ma clé de voiture (porte-clés pas couleur Mercedes   ; Mercedes c’est la marque des congélateurs comme j’ai déjà dit)   ; même que je m’en sers presque pas de cette clé   ; c’est une petite, je la garde bien à l’abri, je risque pas de la perdre.
En plus du bleu, du marron et des autres couleurs, il y a aussi dans mon portefeuille du rouge vif avec mon permis de conduire, même que j’ai eu beaucoup de mal à l’avoir. Tout se mélangeait dans ma tête, les pédales, les boutons, le levier de vitesse, les mi

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