Tranches de survie
141 pages
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Tranches de survie , livre ebook

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Description

2035, le parti nationaliste français est au pouvoir, il applique des réformes à caractère raciste, qui poussent à bout une partie de la population.
Censures et catégorisation des citoyens rythment la vie de certains d’entre eux : Sélim, régisseur déchu devenu contrôleur RATP et Mira, infirmière franco-tunisienne mal dans sa peau, se rencontrent et subissent ces différents changements, ce qui va les rapprocher.
Les événements vécus : perte d’emploi, restrictions sociales, maladie … font germer une idée dans leurs têtes : celle de l’exil. Mais l’exil vers où ? Est-ce que la quête d’un autre « chez soi » sera la solution pour éviter la désillusion ?
La Catalogne, autonome depuis l’implosion de l’Espagne, se dessine comme un compromis mais le gouvernement n’autorisera pas leur départ. Surtout celui de Mira, infirmière et essentielle dans le contexte sanitaire.
Pour se libérer et pouvoir reprendre leur vie, ils devront se mettre hors-la-loi. Vont-ils franchir le pas ? Auront-ils assez de courage ? Des évènements vont faire que tout va basculer.
Les valeurs auxquelles nous sommes attachés sont-elles définitivement acquises ? C’est une question que l’auteur évoque au cours de cette aventure où les rebondissements se succèdent pour tenir en haleine le lecteur.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 octobre 2022
Nombre de lectures 2
EAN13 9782312126760
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Tranches de survie
Rassim Bekhechi
Tranches de survie
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2022
ISBN : 978-2-312-12676-0
P REMIÈRE PARTIE : Sélim
Chapitre I
Il est sept heures trente-cinq du matin, Sélim se réveille, enfin, « se réveille », c’est un bien grand mot, il ouvre juste les yeux, il regarde directement son téléphone, comme depuis dix-huit ans maintenant, ça clignote, comme depuis dix-huit ans, quasiment tous les jours, ce sont des mails, la majorité, si ce n’est la totalité, sont des Newsletters, oui, Sélim est un flemmard invétéré, il ne s’est pas désabonné de ces dizaines de mails qu’il reçoit tous les jours ;
Ceci fait partie des nombreuses choses que Sélim s’est promis de faire depuis longtemps, mais qu’il ne fait pas,
Il daigne se lever de son lit une vingtaine de minutes plus tard, il est content, il est dans un de ses meilleurs jours ;
Il ne sait pas quoi faire, il prend son petit déjeuner, deux petits biscuits et un verre de lait, et va sous la douche, Sélim adore se doucher, même si ces derniers temps, se doucher est devenu un luxe, il en profite et savoure ces rares moments de quiétude, il sait très bien qu’il faudra attendre au moins quatre ou cinq jours avant que ça ne se reproduise, sous peine de prendre une amende, Sélim ne roule pas sur l’or, et il veut quand même garder son boulot ;
Toujours aucune nouvelle de Mira, il en était pourtant certain, il avait tapé dans l’œil de Mira, avec sa longue expérience d’échecs amoureux, il était pourtant rassuré sur le fait, que cette fois-ci, c’était différent,
Oui , Mira était différente, de cela il était certain, elle n’était pas comme toutes les autres, elle bossait certes pour le gouvernement, mais elle était infirmière, et puis, qui de nos jours peut se targuer d’être complètement indépendant, Sélim lui-même travaille indirectement pour le gouvernement, malgré tout le mépris qu’il a pour ce dernier, mais dans une époque pareille, on se doit bien de faire avec ce que l’on a,
Deux semaines auparavant, alors qu’il était aux Blouses Blanches, entrain de siroter sa pinte de blanche tranquillement, il a entendu un gamin de vingt ans dire à son ami : « il faut vivre avec son époque », Sélim était hors de lui, il aurait voulu intervenir, mais sa timidité naturelle, conjuguée au fait que le gamin avait l’air d’être issu de la « dominance », l’ont empêché de la faire,
Sélim s’en veut, il s’en veut de ne pas avoir eu le courage de le faire, si Mira avait été avec lui, il l’aurait fait, non pas pour l’impressionner, Mira n’était pas comme ça, et puis de toute façon, Sélim n’était pas de ce genre là non plus, mais juste parce que sa présence l’aurait rassuré et lui aurait certainement donné de la confiance,
« Vivre avec son époque », n’est-ce pas là la plus grande des bêtises, d’ailleurs, pensa Sélim, heureusement que tout le monde n’a pas pensé ça depuis l’avènement de l’humanité, sinon, quelle serait la gueule du monde aujourd’hui, enfin, après réflexion, le monde d’aujourd’hui n’est pas non plus à vanter.
Sélim avait maintenant 37 ans, célibataire, il vivait faubourg Saint-Antoine depuis quinze ans, ce n’est pas qu’il détestait sa vie, mais bon, il regrette quand même d’avoir pris quelques décisions, surtout du temps où le libre arbitre et les libertés individuelles étaient de mise, car en ces périodes sombres, il était ardu de sortir des sentiers battus.
Sélim ne s’était jamais imaginé la situation actuelle, d’ailleurs, rare sont les gens qui auraient pu prédire cela, il trouve quand même qu’il n’est pas le moins bien loti, il a un travail stable, il est assez bien vu par les contrôleurs et son logement est beaucoup plus confortable que celui de la moitié des gens qu’il connaît, un quinze mètres carrés avec des toilettes privées.
De plus, le quartier est assez sympathique, il garde d’ailleurs ce côté plus ou moins guilleret grâce à l’hôpital Saint-Antoine, le personnel de santé jouit en effet de quelques rares privilèges par rapport au reste de la population, il a réussi notamment à empêcher la fermeture de quelques bars et restaurants du coin tels que les Blouses Blanches et La Liberté, et Sélim le respecte un peu pour cela, il a toujours eu une certaine fascination pour les personnes qui travaillent dans les hôpitaux, et qui sont au contact de la maladie durant toute leur vie, surtout depuis la succession d’épidémies et LA pandémie qui a frappé l’humanité il y a de cela un certain nombre d’années et dont on subit les conséquences politiques, sociales et économiques encore aujourd’hui.
Après la douche, Sélim met son uniforme et va prendre le métro (ligne 8) à la station Ledru - Rollin , il ne fait pas très froid pour un lundi du mois de février 2035, il doit attendre le troisième métro pour pouvoir monter, direction République pour prendre la ligne 5 direction Gare de l’Est ; depuis les dernières coupes budgétaires et la grève des chauffeurs, il y a deux fois moins de métros, la grève n’aura servi qu’à mettre au chômage la moitié des effectifs RATP et SNCF ,
C’est depuis le changement de régime que Sélim occupe le poste de contrôleur, lui qui travaillait avant dans le théâtre comme régisseur, il s’était retrouvé au chômage à peine deux mois après l’élection du Parti Nationaliste Français ( PNF ), à cause des nombreuses réformes appliquées par le gouvernement concernant la culture : censure, contrôle des œuvres, restrictions budgétaires drastiques des subventions, tout ça sous l’égide du ministère de l’identité et de la culture,
Il se retrouve donc à faire l’un des jobs qu’il détestait le plus avant, et encore, il a réussi à le trouver grâce à un ami de longue date, dont le père avait un poste de responsabilité chez la RATP , un de ceux qui leur restait deux ou trois ans, et qu’on n’a pas viré pour pensées politiques « déviantes », pour résumer, il a eu de la chance d’avoir cet emploi,
Huit heures cinquante-six, Sélim est à son poste dans le couloir menant à la ligne P du Transilien, il y a du monde ce lundi matin, mais à midi, il se rend compte qu’il n’a que 35 % de ses objectifs, il devra remplir son quota pour dix-neuf heures (250 verbalisations, absence de port du masque compris), il est loin du compte, il prend la décision d’aller à Gare du Nord après le déjeuner, il est assez bien vu par le chef des contrôleurs de là-bas depuis qu’il lui a trouvé un exemplaire de 1984 de Georges Orwell, il le laisse parfois faire son quota quand il est en galère,
Midi trente, il va déjeuner à la boulangerie du coin, un jambon beurre, une cristalline et un pain au chocolat, cinq euros la formule, il ne peut se permettre mieux, pour des raisons économiques, il est obligé de manger du porc depuis quelques temps, les autres viandes lui sont inaccessibles, il avait arrêté de manger de la viande un moment, mais après un passage à l’hôpital, il a découvert qu’il avait quelques carences, car les substituts à la viande présents sur le marché étaient de très mauvaise qualité,
Sélim s’est donc résolu à manger du porc, chose qu’il n’avait jamais faite auparavant, beaucoup plus par tradition alimentaire que par conviction, cela fait partie des nombreuses concessions que Sélim a dû faire depuis le changement de régime, pas seulement alimentaires d’ailleurs, sa vie s’en est vue chamboulée,
D’ailleurs, avant, on lui posait toujours la question : « Pourquoi tu ne manges pas de porc ? tu bois pourtant de l’alcool, entre autres choses » et il répondait souvent par ironie : « Et toi tu ne manges pas de chien ? Pourquoi ? », les gens en général restaient bouche bée car la réponse les déconcertait ou alors balbutiaient un « Mais ça n’a rien à voir » au bout de quelques secondes de réflexion, secondes qu’utilisait Sélim afin de passer à autre chose.
Il se dirige donc vers Gare du Nord, il va chercher le chef des contrôleurs Cédric, dans le couloir séparant l’arrêt « La Chapelle » du RER B, l’endroit stratégique si l’on veut verbaliser au maximum, il le trouve en train de discuter avec un chauffeur de métro :
– Alors, ça se passe en ce moment, la ligne 2 ?
– Ben écoute, c’est toujours tendu au niveau de Barbès, il y a tous les jours les arabes-là qui manifestent et qui se mettent sur les voies, ils font ça depuis que les flics ont éradiqué leur petit business, mais bon on ne va pas se plaindre, on a un boulot, faut que j’y retourne d’ailleurs ! À la prochaine, Cédric
– Ouais, bon courage, Ah tiens en parlant d’arabes, ça va Sélim ? Toujours en galère à ce que je vois,
– Ouais, tu veux bien me laisser trois ou quatre heures ici ? ça me permettra de remplir mon quota,
– Ce n’est pas que je ne veux pas Sélim, mais aujourd’hui ça risque de ne pas le faire, il y a mon responsable qui rapplique, et ça doit être nickel, il y a déjà mes gars qui n’y arrivent pas, de plus, tu le connais Monsieur Dubois, les arabes comme toi, ce n’est pas trop sa tasse de thé
– Ouais, je vois, je ne pensais pas que t’étais raciste Cédric, vu que tu m’as commandé « 1984 »
– Écoute Sélim , Tu sais très bien que je ne suis pas de ceux-là, la preuve, je discute avec toi là, et pour le bouquin, Primo , ce n’était pas pour moi, ce sont les affaires, et Deuzio , de quoi tu te mêles ? T’as cru qu’en me dégottant le bouquin t’avais un passe-droit à vie peut-être ?! Donc , estime-toi heureux et profite de ma bonne humeur de temps en temps, mais là tu te casses, je ne veux plus te voir !!!
– C’est bon, c’est bon, je me casse,
– Et tant que j’y suis, pourquoi tu ne te casses pas chez toi carrément ?!!!
– Mais je dois bosser là si je veux garder mon emploi, je ne peux pas rentrer chez moi !
– Mais non, t’as rien compris, je te parle de te casser CHEZ TOI, genre au bled, Algérie, Tunisie ou je ne sais d’où tu viens,
– Ah, et bah ça c’est une longue histoire, Monsieur le « pas raciste du tout », je ne pense pas que tu puisses comprendre, allez bonne journée, t’as mon numéro si tu veux autre chose.
Chapitre II
Sélim revient à gare de l’Est dans

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