Sortilèges d’une Jeunesse
207 pages
Français

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Sortilèges d’une Jeunesse , livre ebook

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Description

« En 1942, c’est le branle-bas de combat. La Deuxième Guerremondiale est à nos portes. La déferlante a atteint tous les pointsnévralgiques du pays au grand bonheur des enfants qui sont de lafête. Les adultes s’affairent pour tenter de se prémunir contre cemonstre dont ils ne soupçonnent encore ni la figure ni les dommagesqu’il pourrait causer à leurs personnes ou à celles qui leur sont lesplus chères. Aussi assistons-nous à un spectacle trépidant. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9789938074468
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait





































Abdeljelil Karoui







Sortilèges d’une
Jeunesse








Arabesques 2020















Livre :.Sortilèges d’une Jeunesse.
Auteur :Abdeljelil Karoui
Conception de la couverture : Amira Mtimet.
Première édition 2020
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation
réservés à l’éditeur: ARABESQUES EDITIONS
ISBN : 978-9938-07-446-8
33, rue Lénine-Tunis 1000
www. editions-arabesques.tn

E-mail :editionsarabesques.tunis@gmail.com




A mes petits-enfants,
Kinza, Linda, Zakaria et Sandra.




































Autres publications de l’auteur :
éme - La Tunisie et son image dans la littérature française du XIX siècle
et la première moitié du XXème (1801-1945), édit. STD,1975.
- La dramaturgie de Voltaire, publication de la Faculté des
Lettres de la Manouba, 1992.
- Lumières et voyage, édit. CPU,2015.

Publication des actes de colloques :
- Journée Diderot, 1984, organisées par la Faculté des Lettres
ème de Tunis et la Société tunisienne d’étude du XVIII siècle.
Introduction et présentation par Abdeljelil Karoui.
Publication en 1990.
- Victor Hugo, l’Ecriture et l’Histoire, 1985. Introduction par
Abdeljelil Karoui, directeur du département de français,
publication de la Faculté des Lettres de la Manouba, 1991.
- Voltaire ou l’écriture de la tolérance, 1994. Actes recueillis et
présentés par Abdeljelil Karoui. Edit.CPU 1998. Publication
de la Faculté des sciences humaines et sociales de Tunis.

Distinctions et décorations :
- Officier dans l’Ordre des Palmes académiques, 1985.
- Prix spécial de l’Association Tunisie-France, 1999.

- Prix national du Mérite dans l’ordre de l’Education et de la
Science, 2001.
- Prix d’honneur à l’occasion du Cinquantenaire de la
fondation de l’Université tunisienne, mars 2008.



















AVANT-PROPOS


Mes souvenirs de jeunesse concernent mon parcours
depuis la toute petite enfance jusqu'à mon départ pour la
France en novembre 1958.
Mon propos serait de projeter quelques lumières sur des
faits plus ou moins saillants auxquels on n’assiste pas
souvent, je songe entre autres à la campagne de Tunisie en
1942-43. J'étais enfant mais les yeux d’un enfant peuvent
parfois mieux percevoir les choses qu’un adulte, ou en tout
cas autrement.
À travers cette pochade, événements importants ou
futiles sont perçus et reproduits par celui que les études et
l’expérience de la vie ont mûri. Il m’arrive donc souvent de
revivre le passé tout en le confrontant au présent parfois
amer et de réfléchir à l'évolution en histoire qui peut parfois
connaître des accélérations souvent consécutives à la guerre
- d’un mal peut naître un bien - mais aussi toutes sortes de
vicissitudes, comme parfois aujourd'hui une marche à
rebours.
Qui de l'enchantement des contrées étrangères ou du
charme du terroir, à travers ma géographie affective, aura le
dernier mot ? C'est selon. Comment faire le départ entre
l'important et le futile ? Même quand la différence est
évidente, il peut arriver qu'on privilégie le futile, quand
celui-ci a suffisamment de couleur et de relief pour

s'imposer, non pas par lui-même, mais pour les symboles
qu'il véhicule. Dans un travail de cette sorte, l'arbitraire est
permis parce qu'on n’est pas dans un registre de l'histoire
dont l'objectif serait de restituer autant que possible la
vérité. Il s'agit plutôt de témoignage avec des impressions et
réactions personnelles, à bien plus de soixante ans de
distance.
Ce témoignage me concerne sans doute au premier chef,
mais il touche aussi tous ceux que j'ai connus de près ou de
loin, famille, amis, enseignants, camarades de classe, etc.
Aussi ai-je choisi de nommer surtout ceux qui ne sont plus
de ce monde et qui n’ont laissé que de très bons souvenirs.
Pour le reste, il s'agit de souvenirs où se mêlent plus ou
moins de vérités et un peu de rêve, ne serait-ce que, parce
que la mémoire n'est pas toujours infaillible et que le monde
est mû par je ne sais quel tropisme. Mais, phénomène
classique, ce que nous avons vécu, étant enfants, reste bien
mieux gravé dans la mémoire que tout ce qui adviendra
ultérieurement.




I- LA PETITE ENFANCE



LA GUERRE ET L'EXODE VERS LES
ZONES RURALES

En 1942, c'est le branle-bas de combat. La deuxième
guerre mondiale est à nos portes. La déferlante a atteint tous
les points névralgiques du pays au grand bonheur des
enfants qui sont de la fête. Les adultes s’affairent pour
tenter de se prémunir contre ce monstre dont ils ne
soupçonnent encore ni la figure ni les dommages qu'il
pourrait causer à leurs personnes ou à celles qui leur sont les
plus chères. Aussi assistons-nous à un spectacle trépidant.
Qui de renforcer les vitres pour les préserver de la vibration
des bombes, qui de préconiser les abris les plus appropriés,
chaque fois qu’ulule une sirène précédant les
bombardements, qui enfin de prescrire la prière comme
meilleure parade. On n'entend plus que des litanies
d'invocation où le mot ya Latif est celui qui revient le plus
constamment. Ce mot implique qu'en admettant les
événements comme une sorte de fatalité, on ne demande à
Dieu qu'un peu de douceur et de mansuétude dans cet
inexorable déchaînement de la folie.
Pour nous autres, enfants, c'est les agapes et la joie
comme on n'en a jamais connu. Notre euphorie pourrait se
justifier par un spectacle inédit dont la scène serait le monde
et où nous serions tous acteurs avec une conscience
11 évanescente, mais sans doute aussi un plaisir non frelaté par
la peur. Au surplus, ce spectacle nous allons y assister
ensemble, puisque nos parents ont décidé que toutes nos
familles habiteraient dorénavant sous le même toit.
Il s'agit d'une grande bâtisse dans un petit bled pour
éviter d'être directement sous les bombes. Les grandes villes
étant avec leurs ports, leurs gares etc., la cible directe des
différents belligérants. Les retrouvailles des cousins et des
cousines à s’ébattre dans le même espace où le mur,
séparant les sexes fussent-ils en gestation, va subir des
coups de boutoir suffisamment forts pour qu'il cède la place
à la spontanéité enfantine.
Nous habitions les uns à proximité de la porte sud et les
autres avaient élu domicile dans une zone décentrée sur la
route de Tunis. Le nouvel espace que les circonstances nous
imposent va avoir pour les adultes comme pour les enfants
des conséquences irréversibles sur leur manière de voir et
d'apprécier les choses.
Nous étions neuf familles qui allaient loger dans trois
grandes chambres avec soupente. Cette maison rurale
comportait aussi une grande cour où il était possible de
vaquer à plusieurs occupations, sans préjudice de l’aire de
jeu qu’elle représentait pour les enfants. Quoique nous
appartenions à la même grande famille, le voile était chez
nous de rigueur, surtout lorsqu'il ne s'agit que de parents par
alliance. Mais nécessité fait loi. Les conditions de
promiscuité vont subrepticement jouer leur jeu, pour
infléchir les interdictions vers une permissive tolérance.
Quand trente-six fois par jour, une femme doit courir vers
sa chambre, chaque fois qu’arrive un homme, on finit par
s'en lasser et par se défaire d'un réflexe absurde, surtout que
les hommes, en chômage technique, sont souvent à la
maison.
Au surplus quand trois familles partagent la même
chambre, même si elles sont choisies en fonction de la plus
proche parenté, la promiscuité a en l’occurrence des
12 accointances avec tout ce qui est intime. Conclusion :
acceptons la réalité sans trop d'hypocrisie et cessons de
nous voiler la face au deux sens du terme.
Pendant ce séjour de quelques mois dans le village de
Kalaa Kebira réputé pour l'austérité de ses mœurs et où les
femmes telles des fantômes ne sortent quasiment que la
nuit, il nous a été donné de vivre des moments qui ont
marqué nos esprits. D'abord le décès d'une jeune femme en
couches. Pas de médecins, pas d'infirmières. Des
complications, sans doute remédiables dans d'autres
conditions, lui ont été fatales. Un parent dentiste est allé à
son chevet pour diagnostiquer le décès. La mère
comprenant le verdict s'est effondrée sur place.
La mort demeure un tabou dont les mystérieux arcanes
sont désespérément insondables. Les philosophes ont beau
cogiter pour en percer un tant soit peu le voile, mais rien n'y
fait. Montaigne, entre autres, aussitôt l'alerte à la peste
donnée, prend ses cliques et ses claques pour sauver sa
peau. Les plus humbles font preuve d'une bien plus grande
sérénité. Dès que les Parques blêmes frappent à leur porte,
sans rechigner, ils s'abandonnent à la mère nature, comme
s'assoupirait un enfant sur le sein maternel. Bref, pour nous
épargner le spectacle de la mort, le rituel qui en est l'attirail
et toute la consternation et la détresse qui lui font chorus,
on nous a conduits escortés par un adulte dans une maison
voisine, ce qui ne nous a pas empêchés, à travers les
interstices de la porte, de voir passer le cortège funèbre.
Avec l'anarchie que la guerre a suscitée dans le
fonctionnement de tous les services, bien des maladies
infectieuses se sont développées, c’est le cas par exemple, du
typhus. Or, un jour, pour en enrayer l’épidémie, des
responsables de l’hygiène se sont présentés avec pour
mission de procéder à une injection intramusculaire. La peur
de la piqûre nous a suggéré une parade : nous enfermer
collectivement, garçons et filles, dans les toilettes. Aussitôt
dit, aussitôt fait. On pensait avec fierté que l'on devait à
13 notre idée géniale d’en être quitte avec la maléfique aiguille.
En fait, les injections n'étaient pas prévues pour les enfants.
Tous ceux qui, étant fonctionnaires, artisans ou
commerçants, avaient perdu leur emploi habituel par l'effet

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