Seul un homme. D après la légende de Mulan
80 pages
Français

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Seul un homme. D'après la légende de Mulan , livre ebook

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Français

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Description

La colère du peuple gronde à nouveau. Après les indignés et les Gilets jaunes, un troisième mouvement s’est levé : les envoltés. À Nantes, So Yun est une jeune femme issue d’une famille de militaires. Elle ne supporte pas les violences policières. Face à la faiblesse des institutions, elle se saisit d’un bokken, se masque et va dans la foule défendre les participants. Mais, prise entre deux feux, elle se refuse à frapper et se contente de dévier les tirs. Sirin est une envoltée de la première heure. Avec l’apparition de ce protecteur fantomatique, elle trouve un symbole qui lui donne de l’espoir. La jeune femme décide de le soutenir à sa manière : en en parlant sur les réseaux sociaux. Pourtant, comme tout le monde, elle est convaincue que leur mystérieux défenseur est un homme… Lors d’une manifestation, avant que So Yun ait eu le temps de s’équiper, un jeune homme est gravement blessé. Alors, tout bascule. Et la colère grandit, qui devient rage.

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Informations

Publié par
Date de parution 19 février 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782756424293
Langue Français

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Extrait

Vanessa Arraven
Seul un homme
D’après la légende de Mulan

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© Pygmalion, département de Flammarion, 2020.
 
ISBN Epub : 9782756424293
ISBN PDF Web : 9782756424309
Le livre a été imprimé sous les références :
ISBN : 9782756424286
Ouvrage composé par IGS-CP et converti par Pixellence (59100 Roubaix)
Présentation de l'éditeur
 
La colère du peuple gronde à nouveau. Après les indignés et les Gilets jaunes, un troisième mouvement s’est levé : les envoltés.
À Nantes, So Yun est une jeune femme issue d’une famille de militaires. Elle ne supporte pas les violences policières. Face à la faiblesse des institutions, elle se saisit d’un bokken, se masque et va dans la foule défendre les participants. Mais, prise entre deux feux, elle se refuse à frapper et se contente de dévier les tirs.
Sirin est une envoltée de la première heure. Avec l’apparition de ce protecteur fantomatique, elle trouve un symbole qui lui donne de l’espoir. La jeune femme décide de le soutenir à sa manière : en en parlant sur les réseaux sociaux. Pourtant, comme tout le monde, elle est convaincue que leur mystérieux défenseur est un homme…
Lors d’une manifestation, avant que So Yun ait eu le temps de s’équiper, un jeune homme est gravement blessé. Alors, tout bascule. Et la colère grandit, qui devient rage.
Auteur française, VANESSA ARRAVEN revisite la légende de Mulan en la transposant à notre époque. Sous le nom de Terral, elle a publié de nombreuses nouvelles ainsi que les romans Cinq pas sous terre, L’Aube de la guerrière et Le Gardien de la Source .
Seul un homme
D’après la légende de Mulan
À mon père, qui a répondu sans hésiter à l’appel des ronds-points et cela, durant des mois ; à celles et ceux qui se sont battus pour chacun d’entre nous ; à ces personnes qui sauvent des vies – personnel soignant, pompiers, lanceurs d’alerte, avocats aussi – et qu’on n’écoute pas malgré leur détresse et les premiers décès ; à nous toutes et tous qui agissons en conscience, d’une façon ou d’une autre, en espérant qu’on devienne assez nombreux pour atteindre la masse critique et que notre société – et même, soyons folles et fous, notre civilisation ! – changent pour un système sain et pérenne. À celles et ceux qui vivent dans des conditions difficiles, mais qui gardent espoir. Vous êtes plus forts que ce que la « voix officielle » laisse entendre, vous êtes tenaces et puissants. Gardez la tête haute. Même si les épaules peuvent crouler, gardez la tête haute. Vous êtes dignes. The best is yet to come.
Elle mène cent combats décisifs
Et, comme en vol, franchit passes et cimes.
Tandis qu’au vent du nord portant le gong de nuit,
S’agitent moult armures mirant la lune bleuie.
Extrait de La Ballade de Mulan (Magnolia), in Thang-chi
 
 
Il ne faut pas attendre l’espoir. L’espoir, en fait, vient après le passage à l’action. On a d’abord besoin de courage pour se mettre en action, puis – quand on se met en action collectivement – l’espoir vient.
Pablo Servigne, interviewé par Guillaume Erner sur France Culture à l’occasion de l’émission L’Invité(e) des matins du 29 mars 2019, titrée : « Collapsologie : Comment vivre avec la fin du monde ? »
Prologue

« “… magnanimité à l’humanité. Parce que le moindre d’entre nous a sa part de responsabilité, mais aussi de pouvoir.”
Ces quelques mots avaient suffi pour sceller l’identité du mouvement. Voici à présent près de cinq mois que les manifestations ont commencé, ponctuant de lumières les samedis soir de nos villes, et un nouveau tournant… »
Le guerrier ferma l’écran de l’ordi portable, coupant la voix de la speakerine du même geste. Il finit un verre d’eau, le posa dans l’évier. Il était prêt. Seulement vêtu d’un jean noir, d’un tee-shirt du même acabit aux motifs discrets, il partait au combat. De toute façon, on lui confisquerait le moindre matos s’il essayait de passer avec.
En descendant les escaliers de l’immeuble, il attacha ses cheveux en une courte queue-de-cheval. Son pas était rapide tandis qu’il gagnait le lieu de rassemblement de la manif. Au-dessus des toits d’ardoise, le ciel flamboyait – ultimes parades solaires avant que ne se déverse la nuit. Dans son esprit tournaient les différentes caches placées sur les parcours possibles, les voies de repli, les nasses à éviter. Il était calme, sa respiration à peine saccadée. L’heure viendrait bientôt où il aurait à contraindre la colère, à la canaliser – bien assez tôt. Pour l’instant, il avait juste à avancer.
La moiteur de l’air prit un degré ou deux quand il arriva sur la place. Il franchit un cordon de policiers, puis un second – des CRS, cette fois. Un uniforme le fouilla. Il se laissa faire, indifférent. Repartit. Le cortège avait déjà commencé à battre la chaussée. La foule était dense, une masse dans la chaleur d’un soir rouge de fin juillet. Beaucoup de bras nus, de hauts colorés, des casquettes, des visages barrés par des lunettes de soleil. Le bitume ne tremblait plus de la fournaise du jour, mais les esprits vibraient, échauffés d’espoir et de promesses non tenues. Les autorités avaient cru que les vacances allaient dissiper le mouvement, mais il n’en était rien. Pas cette fois. Plus jamais.
 
« Plus jamais », le mot d’ordre circulait depuis le début. Très vite avait suivi le symbole de la révolte : un corbeau tenant dans son bec un soleil marqué d’un éclair. Entre les deux était apparu un nom. Le Lillois qui l’avait trouvé, dans une inspiration géniale du moment, avait eu son interview visionnée plus d’un million cent quatre-vingt-sept mille fois sur YouTube.
« Pas des “révoltés”, monsieur, avait-il répondu au journaliste. Il faut cesser de se placer en opposition au pouvoir, aux schémas de société ou je ne sais quoi. Nous avons tenté l’indignation, les insomnies de la colère, porté les gilets jaunes de la détresse. Cela n’a rien donné. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a rien à attendre de ces messieurs qui se disent “au sommet”. Il ne faut pas nous positionner par rapport à autrui, mais en phase avec nos propres aspirations ; il ne faut pas attendre qu’ils fassent quelque chose pour nous, mais agir sans eux. En cessant de les regarder, en arrêtant de jouer à leur grand Kapla qu’ils appellent “croissance permanente”, ils finiront par disparaître comme les mirages qu’ils sont – eux et leurs moyens d’action. Dans cette nouvelle société que nous appelons de nos vœux, l’affrontement coercitif évoluera en dialogue, en une négociation où chacun aura à cœur d’écouter les besoins de l’autre, mais aussi, dans une égale mesure, soutiendra les siens. C’est ce double mouvement d’ouverture et d’affirmation de soi, c’est notre envol loin au-dessus des ravins de l’ancien monde pour saisir la nécessité d’une harmonie dans notre dépendance mutuelle – et de façon générale, d’une harmonie avec tout ce qui nous entoure – qui donne son identité à notre combat. Nous ne luttons contre personne, nous nous engageons pour la dignité de tous – pour rendre sa magnanimité à l’humanité. Parce que le moindre d’entre nous a sa part de responsabilité, mais aussi de pouvoir. Chaque humain a la potentialité d’être l’étincelle. Nous ne sommes pas des révoltés, mais des envoltés. »
Le mot était lâché, le concept saisi par le plus grand nombre – à la surprise excessive de ce sommet qui croyait la plèbe plus basique que ça. Les premières manifs avaient vu fleurir des porte-clefs à LED et des bracelets fluorescents dans leurs rangs. Il y avait même quelques lampes de poche à manivelle. Une poignée de poètes avait brandi des plumes de pigeon ramassées sur le bitume. La ronde des rendez-vous hebdomadaires s’était lancée… Avec, pour galant du bal, son cortège de répressions – vif, immédiat et sanglant. Les autorités avaient repris là où elles en étaient aux plus beaux jours de la dernière protestation de masse, les LBD toujours de rigueur, de l’asphyxie plein les grenades. Les street medics rameutaient des mules pour que les sérums phy, les Maalox, les bandages et autres antiseptiques passent les cordons de la BAC. Il y avait la foule et les défilés dans les rues. Il y avait quelques arrêts de bus et des vitrines réduits en tessons de verre. Il y avait surtout – avant tout – cette marée de couleurs et de lumières, ces lucioles de phénol dans la nuit du monde.
 
Le guerrier claqua son bracelet. Le tube de plastique prit une teinte vert pétard. L’obscurité mettrait encore deux bonnes heures à atteindre son apogée, mais il faisait déjà assez sombre pour que les anneaux luisent doucement. Les lunettes de soleil s’étaient rangées ; les regards se dévoilaient – se cherchaient pour certains, plus enthousiastes au partage et assoiffés de discussions. Le protecteur avait repris sa marche. Le pas souple, les épaules en arrière, il se glissait dans la masse sans en troubler les courants. Les losanges sur son tee-shirt étaient juste assez voyants pour qu’on ne le confonde pas avec un black bloc , mais n’exprimaient rien qui l’aurait rendu identifiable. Il patrouillait là où on avait besoin de lui. Il se devait de combattre, puisque d’autres avaient pris les armes contre son peuple.
Très vite, il parvint à l’une de ses caches – le rebord d’une voie de tram, simple, efficace, répandue dans la ville comme des artères au goût chaud de métal. Il s’assit sur les pierres. Sa main droite en tâta l’envers. La foule avançait autour de lui ; quelques manifestants manquèrent lui marcher dessus. La masse qui l’entourait rendait le ciel plus lointain et plus sombre, mais elle le protégeait aussi. L’anonymat comme la meilleure des planques ; devenir res publica pour mieux défendre celle-ci.
Enfin, ses doigts serrèrent le manche de bois. Il tira et le bokken vint à lui. Il se remit debout et marcha, l’allure flegmatique. Le sabre de chêne accompagnait le balancement de la longue silhouette. Un humain parmi une forêt d’humains, avec des pancartes en guise de pierres

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