Mélanges
206 pages
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Description

« J’ai trouvé ce mot chez Montaigne (encore lui !), et il me plaît. C’est ainsi qu’il appelle, de manière imagée, les digressions où il semble s’égarer. On ne trouvera pas dans ces quelques pages un thème directeur, mais seulement des “farcissures” [...]. Autre image empruntée à la cuisine... Je rassemble ici des pensées qui me sont venues, des scènes qui m’ont frappée un jour, une expression entendue, comme on réunit deux oignons, quelques carottes, une tomate, un reste de viande, un bout de saucisse, et les indispensables pommes de terre, pour faire mijoter un ragoût, qu’on espère savoureux et roboratif, qu’on peut faire réchauffer sans qu’il perde son goût, au contraire. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 février 2013
Nombre de lectures 4
EAN13 9782342000085
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0071€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Mélanges
Georgette Claude Bories Chabert-Navarre
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Mélanges
 
 
 
Retrouvez l’auteur sur son site Internet :
http://georgette-chabert-navarre.societedesecrivains.com
 
 
 
« Mes fantaisies se suivent, mais parfois c’est de loin, et se regardent, mais d’une vue oblique. »
Montaigne, Essais, III 9, « De la présomption ».
 
 
 
 
À mes petits-enfants, Charlotte, Pierre-Louis, Gabriel, Aurélien, qui me sont si chers. Ils ont inspiré plus d’un texte dans ce recueil, né aussi du désir de leur laisser un souvenir de leur grand-mère et peut-être un motif de fierté.
 
 
 
 
Remerciements
 
 
 
Que soient remerciés ici :
- mes parents, qui croyaient au livre ;
- mes maîtres d’autrefois ;
- tant d’écrivains qui m’ont nourrie ;
- mon mari, mon premier lecteur, critique avisé, et qui supporta avec équanimité des repas tardifs ;
- nos fils, affectueux et attentifs ;
- ceux qui m’ont encouragée, Geneviève et Pierre, René, Christine, Marie-Reine, Muguette, Marie-Laure Bron-Bories.
- l’éditeur qui me fait la faveur de retenir cet ouvrage…
 
 
 
 
Quelques rencontres
 
 
 
« La vie (c’est) un drôle de cadeau. Au départ on le surestime, ce cadeau : on croit avoir reçu la vie éternelle. Après, on le sous-estime, on le trouve pourri, trop court, on serait presque prêt à le jeter. Enfin on se rend compte que ce n’était pas un cadeau, mais juste un prêt. Alors on essaie de le mériter. »
Éric-Emmanuel Schmitt, Oscar et la dame rose
 
 
 
« Je suis passé dans le parti de la vie. Il faut tant de temps pour être simple »
« L’enfance est un pays que l’on traverse sans s’en rendre compte. Arrivé aux frontières, si l’on se retourne, on remarque le paysage, mais c’est déjà trop tard.
L’enfance ne s’aperçoit qu’une fois quittée. »
Éric-Emmanuel Schmitt, Ma vie avec Mozart
 
 
 
« Je connais des gens de toutes sortes
Ils n’égalent pas leurs destins
Indécis comme feuilles mortes
Leurs yeux sont des feux mal éteints
Leurs cœurs bougent comme leurs portes »
Guillaume Apollinaire, Alcools .
 
 
 
« Les animaux sont un don de la création à l’être humain. »
« Les animaux sont à l’opposé du vide froid, ils sont denses, chauds et singuliers et ne cherchent pas de réponses parce qu’ils ne savent pas qu’il y a des questions. »
L’âge mûr : « c’est un âge où l’acceptation est une des clés du contentement. »
Nuala O’Faolain, Best Love, Rosie, traduit de l’anglais (Irlande) par Judith Roze, Sabine Wespieser éditeur, 2008.
 
 
 
« Les lieux que nous avons connus n’appartiennent pas qu’au monde de l’espace où nous les situons pour plus de facilité. Ils n’étaient qu’une mince tranche au milieu d’impressions contiguës qui formaient notre vie d’alors ; le souvenir d’une certaine image n’est que le regret d’un certain instant ; et les maisons, les routes, les avenues, sont fugitives, hélas, comme les années. »
Marcel Proust, À la recherche du temps perdu.
 
 
 
 
Au lecteur
 
 
 
Ces courts écrits,
À propos de tout et de petits riens,
Nés au gré des impressions et des humeurs,
Des réflexions, des émotions, des souvenirs,
Avec l’espoir qu’ils lui parleront de lui.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
L’oignon et la mémoire
 
 
 
J’aime les oignons, dans la cuisine qu’ils relèvent (il faut veiller à bien fermer les portes pendant qu’ils cuisent doucement, jusqu’à devenir translucides), à cause aussi de leurs couleurs variées, qu’on a envie de peindre : légèrement irisées, elles vont du blanc presque transparent au violet délicat et veiné, en passant par le rouge lie-de-vin ou l’orange discret de la pelure de l’oignon d’hiver, fine et craquante. Mais l’oignon est devenu pour moi, sans doute depuis qu’avec l’âge je ressens la fragilité du souvenir, comme une image de la mémoire.
Les couches concentriques de l’oignon se forment et se développent de l’intérieur vers l’extérieur, les couches superficielles sont les plus anciennes, celles qu’on épluche, parfois en pleurant, et qu’on jette, avant de faire revenir les autres, tendres et parfumées, pour l’omelette ou le ragoût.
La mémoire est une sorte d’oignon, mais à l’envers. Les souvenirs les plus récents sont à la surface et sont détruits les premiers, comme la partie la plus ancienne de l’oignon, l’enveloppe sèche et craquante, tandis que les souvenirs les plus anciens restent vivants en dernier, au cœur de la mémoire. Tel qui ne se rappelle pas les gestes qu’il vient de faire et ne reconnaît pas l’endroit où il habite chantonne les comptines de son enfance et arpente les chemins de son passé le plus lointain dont il hume encore les odeurs.
 
 
 
 
Naguère et jadis
 
 
 
Nous nous imaginons souvent que nul avant nous n’a pu voir les drames que nous voyons : l’histoire doit nous détromper, qui témoigne de la constance de la nature et des comportements humains. Je ne crois pas céder à cette illusion en pensant qu’aucune génération avant la nôtre n’a connu une semblable accélération du temps.
Je suis née à une époque où le linge battu au lavoir bouillait dans la lessiveuse, où n’existait pas d’autre téléphone que celui de la cabine téléphonique, où bien des gens (mes parents, par exemple, dans leur école de village) allaient chercher l’eau à la pompe, où les enfants reproduisaient, à peu de chose près, tout en profitant de quelques améliorations techniques, les gestes appris de leurs parents. J’ai connu en un temps très court la révolution du réfrigérateur, de la machine à laver (devenue lave-linge, à l’apparition du lave-vaisselle), des téléphones sans fil et du portable, de l’ordinateur, et de tant d’outils qu’il serait fastidieux d’énumérer. Nous voyons disparaître du jour au lendemain un appareil perfectionné chassé par un plus perfectionné, mais aussi ce qui constituait le cadre de notre vie, et que nous pensions devoir nous survivre.
Nos enfants, à l’évocation de notre vie d’avant, ont l’impression qu’il s’agit de temps reculés, presque antédiluviens. On a dit et répété qu’avec le développement des communications la mesure de l’espace avait changé, on a même parlé de « village planétaire ». La mesure du temps aussi a changé : ce qui était « naguère » est devenu « jadis ». Pauvre Verlaine, Pauvre Lélian , son titre n’a plus de sens !
 
 
 
Cortège
 
 
 
Le chemin monte, descend, dans son parcours sinueux. Les marcheurs le suivent, qui d’un pas léger, qui d’un pas pesant, tantôt plus rapide, tantôt ralenti. L’un ou l’autre s’arrête quand le temps est venu.
Derrière chaque marcheur se déploie un immense cortège. On n’en peut apercevoir la fin. Les visages semblent flotter, impalpables, comme transparents, plus lumineux quand le regard se porte sur eux. Cela fait penser aux clignotements de lueurs lointaines dans la nuit. Les couleurs pâlissent graduellement pour se perdre dans la ligne d’horizon et se fondre dans la transparence de l’air. Cela forme comme une traîne ocellée de visages.
L’air que respirent les marcheurs est rempli, à leur insu le plus souvent, de ces êtres flottants, absents et pourtant présents. Mais ils éprouvent parfois de mystérieux frôlements.
C’est un rêve familier, dont la vérité frappe au réveil comme une évidence : les générations qui nous ont précédés nous accompagnent tout au long de notre vie, continuent de vivre à travers nous de cette existence impalpable qui était pour les anciens celle des ombres des enfers. Nous ne pouvons pas plus les embrasser qu’Ulysse, descendu au royaume d’Hadès, ne peut étreindre sa mère. Mais notre souvenir parfois leur redonne la couleur de la vie.
 
 
 
Carnet d’adresses
 
 
 
À notre époque, les adresses s’enregistrent dans les répertoires de l’ordinateur, d’où on les fait disparaître à volonté, sans qu’elles laissent de trace.
D’aucuns sont recherchés, voire recrutés, pour leur « carnet d’adresses », c’est-à-dire leurs relations dans les milieux « qui comptent ».
Le mot « carnet d’adresses » évoque tout autre chose pour moi.
J’ai conservé l’habitude de noter les adresses sur un vrai carnet, que je regrette d’avoir dû parfois renouveler, lorsque les feuillets partaient en lambeaux, abîmés par un long usage, ou qu’ils ne laissaient plus de place.
Le carnet d’adresses n’est pas seulement un recueil de renseignements utiles, voire indispensables. Dans ce carnet on lit sa vie, on y retrouve les êtres disparus, on y voit se nouer et se défaire des relations et des amitiés, on y mesure la marche du temps aux noms et aux adresses barrés d’un trait définitif.
Rue des Capucins, rue Cotte-Rouge, rue Gustave-Rivet, avenue Washington… Autant d’adresses qui existent toujours, encore en usage, mais qui me renvoient à un passé défunt. Parfois, en ouvrant mon carnet à couverture rouge (celle du précédent, que j’ai conservé, était violette), je ressens, comme une bouffée, le désir d’appeler un de ces numéros de téléphone barrés, d’entendre une voix qui s’est tue.
On discerne aussi dans le carnet d’adresses la ligne de partage de la vie : un temps, il se remplit d’adresses nouvelles, puis on trouve de plus en plus d’adresses barrées…
 
 
 
Le chat est dans le sac
 
 
 
«  Quand je me joue à ma chatte, qui sait si elle passe son temps de moi plus que je ne fais d’elle ?  », écrivait Montaigne dans une page connue des Essais. La chatte Sécotine s’est bien jouée de nous ! Nous l’avons trouvée installée dans notre sac de voyage : aucune sollicitation n’a pu la faire sortir d’un sommeil parfaitement imité ; les yeux mi-clos, con

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