Les Rumeurs d’Ortemont
178 pages
Français

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Les Rumeurs d’Ortemont , livre ebook

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Description

Il faisait très beau, en ce début mai 1868, lorsque Guillaume et Élisabeth Vandermaelen se présentèrent à la haute grille du château d’Ortemont, chargés de leurs maigres possessions.
Ce jour marquait le début d’une nouvelle vie, dont ils avaient longtemps rêvé, mais, là, devant l'entrée monumentale, l’appréhension contenue jusqu’alors les envahit lentement, menaçant de les déstabiliser.
D’un geste décidé, Guillaume tendit la main vers la cloche pendue à la grille et en agita vigoureusement la chaîne, scellant, par ce seul geste et sans le savoir, leur destin et celui de tous les habitants du château et donnant ainsi l’impulsion première à un vaste jeu de dominos destructeur...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 31 octobre 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782334228763
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-22874-9

© Edilivre, 2016
Note de l’auteur
Cet ouvrage relève de la fiction et sauf en ce qui concerne les personnages historiques, toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé ne pourrait être qu’involontaire et fortuite.
Citation

« (…) N’avez-vous rien qui pèse à votre conscience ?
Ah ! ne voyagez point, le bonheur est chez vous ;
Vos plaisirs seront gais, vos travaux seront doux.
Monarque d’un arpent, sans tumulte et sans guerre,
Vous n’entendrez jamais les rumeurs de la terre ;
Et le cri des troupeaux, et vos rustiques chants,
Seront l’unique bruit qui traverse les champs. (…) »
Satire V, Sur la Modération (Auguste-François Fauveau de Frénilly).
Les Rumeurs d'Ortemont
 
Ortemont, mai 1868
Il faisait vraiment très beau et presque chaud, en ce début mai 1868, lorsqu’en fin de matinée, Guillaume et Elisabeth Vandermaelen se présentèrent à la haute grille du château d’Ortemont, portant leurs maigres possessions, enserrées dans de larges chiffons. Ils avaient suivi la longue allée ombragée menant à l’entrée monumentale avec une certaine appréhension, car, pour eux, ce jour marquait le début d’une nouvelle vie, porteuse de nombreuses espérances.
Guillaume était grand et sec, le cheveu châtain et dru, coupé ras, le regard franc et clair, d’un bleu aussi lumineux que celui du ciel en ce matin de printemps et le teint coloré des hommes habitués à vivre au grand air. Il avait déjà quarante et un an et venait d’une famille de fermiers à la nombreuse progéniture, installée dans la campagne avoisinante depuis des générations. Accoutumé aux durs travaux des champs et n’ayant connu que la terre, sur laquelle il s’était courbé depuis sa plus tendre enfance, il avait un corps tellement musculeux et noueux qu’il n’avait jamais l’air de se tenir tout-à-fait droit.
Malgré ses modestes origines, il n’était cependant pas dénué d’instruction car, avec l’aide du curé du village, le très charitable et débonnaire père Vandenbosch, auquel il avait servi d’enfant de chœur autrefois, il avait appris à s’exprimer parfaitement en français – alors qu’autour de lui, tout le monde utilisait un patois flamand difficilement compréhensible et parlait avec peine un français rudimentaire, qui était alors encore, pourtant, la langue officielle dans cette région – et, surtout, il avait appris à lire, ce qui n’était guère courant, à l’époque, chez les fils de paysans. Mu par une grande soif de connaissances, il avait dévoré quasi tous les livres de la bibliothèque du bon curé qui ne traitaient pas uniquement de religion et s’était surtout passionné pour tout ce qui pouvait l’aider à faire fructifier les terres que sa famille exploitait en métairie pour le seigneur local, le Comte de Wolters d’Ortemont. Il avait été captivé, notamment, par les ouvrages de l’abbé Rozier, agronome et botaniste français né en 1734 du côté de Lyon, qui s’était intéressé, en particulier, au vin et y avait consacré un mémoire en 1770.
Suite à cette lecture, Guillaume avait même tenté de faire pousser du raisin, pour se distraire du travail harassant de la ferme, sur un petit coteau – idéalement situé en plein Sud – sur les terres gérées par son père, qui lui en avait accordé la jouissance pour son usage personnel. Il y avait planté quelques pieds de vignes, ramenés d’un voyage en Bourgogne, et avait, ensuite, comme le faisaient les vignerons, là-bas en Côte d’Or, entouré ce lopin de murets de pierres, destinés à couper le vent et retenir la chaleur du soleil, afin d’en faire profiter la vigne au maximum. Et ses tentatives avaient porté leurs fruits : il avait obtenu un raisin blanc délicieux et sucré, réussite qui était parvenue aux oreilles du propriétaire des lieux, Gustave de Wolters.
Celui-ci était venu le trouver à plusieurs reprises, intéressé par ses essais. Ils avaient rapidement sympathisé, Gustave de Wolters étant vraiment heureux de pouvoir échanger des idées avec cet homme tellement différent de ses semblables. Ce n’était pas souvent qu’il avait l’occasion de parler, presque d’égal à égal, avec un fermier du coin et puis, cette idée qu’il avait de créer un jour un véritable vignoble dans la région, c’était original et pas inintéressant…
De son côté, Guillaume Vandermaelen avait été flatté de ces marques d’intérêt, qui l’avaient encouragé à poursuivre ses tentatives, car il était bien décidé à quitter un jour la ferme paternelle – ses cinq frères suffisaient largement à la tâche – et à tracer sa propre voie pour donner à la femme qui partageait depuis peu son destin, une vie plus confortable que celle qu’ils avaient, tous deux, connue jusque-là.
Il avait épousé Elisabeth Van Volxem quelques jours auparavant, le 22 avril 1868. Elle avait déjà trente-cinq ans et venait également d’une famille de fermiers des environs, aussi nombreuse que celle de Guillaume, où les enfants se succédaient comme des portées de chatons, s’entassant à plusieurs par chambrées et étant quasiment obligés de se battre à chaque instant pour atteindre le peu qui se trouvait à leur portée. Elle avait dû élever ses frères et sœurs, après le décès prématuré de leur mère, épuisée par ces maternités successives et, ceux-ci une fois tirés d’affaire et casés pour la plupart, elle pouvait enfin songer à faire sa propre vie.
Guillaume et elle-même se connaissaient depuis le berceau et étaient, pour ainsi dire, promis l’un à l’autre depuis toujours. C’était écrit, et tous deux n’envisageaient pas d’autre alternative que de se marier ensemble, un jour… Ce n’était pas une vision romantique, ils avaient trop les pieds sur terre pour cela, c’était ainsi, c’est tout ! Mais les contretemps s’étaient accumulés, retardant, à chaque fois, la cérémonie. Durant toutes ces longues années, Guillaume avait donc attendu patiemment de pouvoir épouser la femme de sa vie, ce qui était désormais chose faite, enfin ! Mais ils n’étaient plus de toute première jeunesse et n’avaient donc pas de temps à perdre. Ils avaient décidé de briser ce qui avait été la tradition dans leurs deux familles – par la force des choses, la régulation des naissances n’étant pas encore à l’ordre du jour à l’époque – et de n’avoir, eux, qu’un seul enfant, à qui ils donneraient toutes ses chances dans la vie et qui serait, en quelque sorte, leur chef-d’œuvre … Guillaume avait lu tant de livres dans la bibliothèque du curé qu’il savait comment faire… Les curés, s’était-il dit avec un petit sourire intérieur, s’y entendent d’ailleurs assez bien pour ne pas avoir trop d’enfants…
Ce qui surprenait chez Elisabeth, outre sa taille fine et élancée, c’étaient ses longs cheveux d’un noir de jais, qu’elle attachait en un chignon serré, comme pour les dissimuler, et ses yeux de braise, peu habituels en ces contrées peuplées de descendants de Germains. Cette chevelure d’ébène et ces yeux sombres tranchaient avec la blancheur de sa peau et lui donnaient un air sérieux, presque sévère. Elle devait en avoir hérité de lointains ancêtres latins, envahisseurs successifs de ces contrées fréquemment traversées ou occupées, au cours de leur histoire, par des cohortes de soldats venus du Sud. Il faut dire que la Belgique n’était un pays indépendant que depuis peu et qu’elle avait servi, jusque-là, de terrain de jeu à toute l’Europe, dont les armées s’y livraient à de sanglantes batailles et se défoulaient ensuite sur les indigènes, surtout si elles étaient jeunes et accortes, pour évacuer les tensions générées pas ces combats perpétuels. Elisabeth n’était pas vraiment jolie, mais avait un charme certain et une grande élégance naturelle, qui inspirait immédiatement le respect.
Deux jours auparavant, Guillaume avait eu, à nouveau, la visite de Gustave de Wolters, dont le vieux régisseur, Egide Gilissen, avait été brutalement obligé de prendre sa retraite, après un accident de chasse qui l’avait laissé sérieusement handicapé. Guillaume n’avait pas hésité une seconde quand le Comte lui avait proposé d’endosser la charge de celui-ci et de s’occuper désormais de ses terres, y voyant l’occasion tant espérée de changer enfin de vie. Il avait cependant mis comme condition à son acceptation de pouvoir prendre avec lui sa toute nouvelle épouse, ce qui lui fut immédiatement accordé par son désormais nouvel employeur. Sa demeure était tellement vaste qu’elle trouverait facilement à s’y occuper…
C’était donc une véritable aubaine pour le jeune couple et l’affaire fut rondement menée. Guillaume et Elisabeth Vandermaelen décidèrent même d’emménager dès le lendemain dans la petite maison qu’occupait précédemment le régisseur, à l’entrée de la propriété.
Mais, maintenant qu’ils étaient devant cette grille, l’appréhension que Guillaume et Elisabeth Vandermaelen étaient arrivés à contenir jusqu’alors les envahit lentement, menaçant de les déstabiliser.
« Crois-tu que nous serons heureux ici ? », demanda Elisabeth d’une voix blanche.
«  Heureux  ? Quel drôle de mot… Comme si nous, pauvres enfants de paysans, courbés sous le joug depuis la nuit des temps, avions été créés pour cela. Tout ce que j’espère, c’est que nous mangerons tous les jours à notre faim et que le soir venu, après une dure journée de labeur, nous pourrons nous retrouver et nous écrouler dans un bon lit, dans les bras l’un de l’autre, pour trouver un repos bien mérité. Ce serait déjà pas mal, et plus que nous n’avons eu jusque-là, toi et moi, qui avons toujours tout dû partager avec nos frères et sœurs. Tu sais bien ce que nous avons convenu et pourquoi nous sommes ici », lui répondit son mari. « Allez, courage, je sonne… ! »
Il tendit le bras vers la cloche pendue à la grille et en agita vigoureusement la

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