Les équilibres instables
182 pages
Français

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Les équilibres instables , livre ebook

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Description

Recueil de textes d'une dizaine de pages chacun. On y trouvera quelquefois des histoires se déroulant sur un fond historique ou d'autres totalement imaginaires. Un baron escroc, un trafiquant d'armes, des situations qui dérapent, qui échappent, qui explosent...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 27 novembre 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332650771
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-65075-7

© Edilivre, 2014
Deux exemples d’équilibres instables :
Les explosifs chimiques.
Les caractères.
Le bal à la Kommandantur
Il leva les yeux. De gros flocons s’écrasaient sur la toiture de la véranda. Le ciel était uniformément gris, une sorte de couverture épaisse, palpable, recouvrait Fontaines-sur-Sarthe.
– Bon sang de bonsoir !... Ce n’est pas le jour, juste aujourd’hui !
Il espérait vaguement que, d’ici la nuit, la météo allait s’arranger. Sinon il faudra reporter les festivités.
Depuis un an les Allemands creusaient le rocher et coulaient des épaisseurs invraisemblables de béton, juste à côté du terrain d’aviation, à une trentaine de kilomètres de Fontaines, en pleine campagne. Ils construisaient un dépôt de munitions qu’ils voulaient gigantesque et invincible, le plus invulnérable jamais réalisé. Une véritable forteresse ! Sans oublier l’imperméabilité aux attaques venant du ciel : huit batteries de défense aérienne entouraient l’ensemble formé par le terrain d’aviation et le dépôt de munitions. Et quelles batteries ! Des canons de 155 longs, des pièces précises et redoutables !
« Quelle idée saugrenue, avait pensé le vieux Jyl, et quelle belle cible ! »
Jean-Yves Lefranc, le vieux Jyl pour ses amis, avait soixante-huit ans. Avec son petit air souffreteux, toujours emmitouflé dans un énorme cache-col gris, sa casquette enfoncée jusqu’aux oreilles et son teint parcheminé, il paraissait bien plus que son âge.
Comment avait-il fait pour épouser, à quarante-huit ans, une jeunette de trente ans plus jeune que lui ? Dieu seul le sait… et encore… pas sûr ! C’était une jeune fille issue d’une bonne famille un peu désargentée, Odette Martin de Villecroix. En tout cas, elle lui avait donné un joli brin de fille, Julie, qui en cette année 1943, avait tout juste ses vingt ans. Auprès de sa fille le vieux Jyl avait l’air d’un papy.
En 1914, Jean-Yves Lefranc exerçait le noble métier d’instituteur, farouchement laïc et républicain. Ce qui lui valut d’être incorporé comme sergent. En décembre 1916 à Verdun, il gagnait son quatrième galon de commandant, avec un assortiment de décorations bien méritées. Un joli parcours, jalonné d’actions courageuses et souvent téméraires.
Pendant l’étroite parenthèse de l’entre-deux-guerres, resté jeune et combatif, il militait pour un parti de gauche. Ce qui ne plaisait guère à ses beaux-parents.
En 1940, il avait soudain vieillit. Il s’était voûté et marchait avec une canne. Ceux qui le connaissaient bien prétendaient que c’était à cause de la défaite. Au début, il avait accepté avec indifférence l’occupation allemande. Et par un revirement d’attitude assez inattendu, il s’était mis à les saluer, voir à leur sourire. On disait, dans son entourage, que le vieux Jyl devenait simplet. D’autres n’étaient pas loin de le considérer comme un collabo, surtout depuis qu’il avait reçu chez lui des Allemands de hauts grades. Le colonel commandant la Kommandantur locale, avait demandé bien poliment, bien korrectement , comme toujours dans ce genre de circonstances, à être reçu par le vieux Jyl.
Jean-Yves Lefranc était connu dans la France entière, tout au moins dans le petit monde des initiés, pour sa remarquable collection de timbres. La rumeur de l’existence de cette collection si proche, parvint jusqu’aux oreilles du colonel qui était lui-même un passionné. C’est ainsi que le colonel Heinrich von Stuffel escorté de deux officiers de son Etat-Major, furent reçu chez le vieux Jyl. Le tout accompagné de force claquements de talons et de baisemains pour Fraulein Julie et Frau Odette…
– Mais, s’étonna le colonel, je ne vois aucun timbre à l’effigie du Führer ? Heil Hitler !
– Heu ! … Eh bien, c’est que… heu ! … marmonna le vieux Jyl qui ne savait comment s’en sortir…
– Comptez sur moi, je vous en ferai parvenir… Ach ! Très bientôt. Ja, ja…
– Thank you, murmura Jyl, par mégarde.
Ce qui eut pour effet de faire s’esclaffer bruyamment les visiteurs…
– Vous bon français… Vous, aimer plaisanterie ! …
Le colonel avait été tellement ébloui qu’il l’avait invité à venir voir sa collection de timbres, à son domicile, à Francfort. « Wenn krieg, krieg finie. Wenn English und Russien kaputt... »
Cette entrevue avait engendré des murmures désagréables dans la population de Fontaines-sur-Sarthe. Ce fut un comble quand les Lefranc reçurent un carton d’invitation, rédigé en français, ainsi libellé :
Le 30 janvier 1943
Pour commémorer le 10 ème anniversaire de la prise du pouvoir par
le Führer Adolf Hitler
Le colonel Heinrich von Stuffel
recevra dans les salons de la Kommandantur
à partir de 18 h.
A 20 h 30, un Grand Bal clôturera la soirée
(Tenue de soirée de rigueur)
Au dos du bristol une note manuscrite en français, probablement de la main d’un interprète, précisait :
Chers amis, je compte sur vous. J’enverrai une automobile vous chercher.
Stupéfaction et embarras de Jean-Yves. Le 30 janvier… c’était le jour prévu pour… encore à confirmer et selon météo… mais…
Jean-Yves eut une conversation en termes assez vifs avec sa femme et sa fille.
– Naturellement je n’irai pas. Mais vous deux vous irez. Vous direz que je suis malade… que les médicaments sont rares et rationnés… que j’ai la fièvre… que je suis au lit… que je regrette beaucoup mais je ne suis plus tout jeune, etc. Vous saurez très bien envelopper ça pour que ce soit crédible…
– Mais papa, se rebella Julie, ce n’est pas possible. On va nous prendre pour des…
– Vous inquiétez pas, il y aura certainement du beau monde, le sous-préfet, le maire, plus ou moins obligés, et tous les autres que tu connais aussi bien que moi, tu vois de qui je veux parler… du gratin, du beau monde et du moins beau.
Odette, visiblement très en colère, intervint :
– Mais enfin Jean-Yves, nous ne fréquentons pas tous ces traîtres, tous ces profiteurs, dont quelques-uns sont de beaux salauds… permet-moi de te le dire tout net, tu veux que l’on se fasse fusiller par les maquisards ?
– Ecoutez-moi attentivement toutes les deux. Cette nuit-là, il va se passer quelque chose de très grave. Les meilleurs abris seront les sous-sols de la Kommandantur. Les Allemands sont installés, comme vous ne l’ignorez pas, dans l’ancien établissement thermal dont les sous-sols sont prodigieux. De plus ils les ont aménagés, bétonnés… Ils sont à l’épreuve des plus grosses bombes. Là, dès le déclenchement de l’alerte, les Allemands et leurs invités vont s’y précipiter… vous y serez en sûreté, mieux que partout ailleurs.
– Mais… Jean-Yves, de quoi parles-tu ? Alerte, bombes ! … Ce n’est pas avec ton poste de radio émetteur récepteur, une antiquité, que tu es dans les secrets…
– C’est bientôt l’heure de Radio Londres… J’attends un message important. Odette, surveille la rue par la fenêtre de la cuisine, Julie poste-toi à la fenêtre du salon. Si vous voyez un véhicule douteux…
– Oui ! On te donne l’alerte… tu nous l’as déjà demandé cinquante fois !
Depuis quelques mois les Allemands essayaient de dépister les mauvais Français qui, malgré le brouillage, écoutaient Radio Londres. Deux ou trois camions équipés de moyens de détection radio goniométriques circulaient discrètement dans les rues de Fontaines.
Jean-Yves s’installa devant le poste de T.S.F. du salon et chercha la bonne fréquence surchargée de tirlouit tirlouit tirlouit…
« Ici Londres. Les Français parlent aux Français
Aujourd’hui, 29 janvier 1943. 943 ème jour de la résistance du peuple Français à l’oppresseur »
Puis l’indicatif musical :
Radio-Paris ment, Radio-Paris ment,
Radio-Paris est allemand.
« Voici quelques messages personnels : La côte est rude, je répète, la côte est rude. Faites chauffer le potage, je répète, faites chauffer le potage… »
Il y eut une courte interruption musicale. Les doigts de la main droite de Jyl tambourinaient nerveusement sur la table du salon. Une oreille exercée aurait pu reconnaître la Marseillaise. Il s’immobilisa soudain.
« Voici la suite de nos messages personnels : Les raisins sont trop verts, je répète, les raisins sont trop verts. Que la fête commence, je répète, que la fête commence…
D’un geste sec Jean-Yves stoppa la radio.
– C’est pour demain ! s’écria-t-il ! bousculant sa chaise et levant les bras au ciel, les points fermés. On les aura ! Julie, Odette, arrêtez votre surveillance ! ... C’est pour demain… demain ! Vous entendez… demain !
– Papa ! Papa ! Arrête ! Vite ! hurla Julie complètement affolée.
– C’est fait… Que se passe-t-il ?
Un camion de l’armée allemande venait de s’arrêter juste devant le portail. Le chauffeur en descendit en criant. Le hayon s’abattit et six militaires casqués et armés en descendirent. Le chauffeur sonna…
– Je te l’avais dit, Jean-Yves, ce sont les Allemands. Ils vont nous fusiller. Les maquisards n’auront pas cette peine !
– Mais attends, Odette, on va lui ouvrir… Restez calmes…
Le soldat Allemand était dans l’entrée. Il salua militairement en claquant des talons avec une énergie qui dénotait une grande habitude.
– Heil Hitler ! Guten Tag Madame. Afez-vous téléfon ? … S’il vous plaît. Mein camion kaputt ! Moi téléfon à chef…
– Mais bien sûr… heu ! … Cher monsieur ! répondit Odette.
Jean-Yves refoula une forte envie de rire…
Julie regarda par la fenêtre : les six militaires, appuyés au camion, fumaient une cigarette le plus tranquillement du monde, en se racontant des histoires qui devaient être drôles à en juger par leurs mimiques et leurs éclats de rire.
– Merci peaucoup Madame und Mein Herr…
L’Allemand se retira. L’incident était clos.
Toute la famille Lefranc se regarda, encore sous le coup de l’émotion. On avait eu peur.
Une demi-heu

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