Les Amours illicites
112 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Les Amours illicites , livre ebook

-

112 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Léa Debarry est une artiste peintre reconnue. À quelques semaines de la première rétrospective de son œuvre organisée à New York, elle part se reposer dans sa maison au bord de la mer, en Normandie.
C’est dans le train qui doit la conduire dans son havre de paix qu’elle fait la rencontre de Grégoire Ribaud-Duval, jeune homme brillant qui la subjugue immédiatement.
Pourtant, Léa a tout pour être heureuse. Son ex-mari est galeriste, l’homme qui l’aime est son agent, son fils – du même âge que Grégoire – fait de brillantes études, et son art est unanimement reconnu.
Mais raison et sentiment n’ont rien de commun et Léa succombe sans hésitation.
Loin de leurs proches, leur idylle est parfaite… puis vient le retour à la réalité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 mai 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782756421599
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Philippe Séguy
Les Amours illicites

Pour plus d’informations sur nos parutions, suivez-nous sur Facebook, Instagram et Twitter. https://www.editions-pygmalion.fr/
© Pygmalion, département de Flammarion, 2019.
 
ISBN Epub : 9782756421599
ISBN PDF Web : 9782756421605
Le livre a été imprimé sous les références :
ISBN : 9782756421582
Ouvrage composé par IGS-CP et converti par Pixellence (59100 Roubaix)
Présentation de l'éditeur
 
Léa Debarry est une artiste peintre reconnue. À quelques semaines de la première rétrospective de son œuvre organisée à New York, elle part se reposer dans sa maison au bord de la mer, en Normandie.
C’est dans le train qui doit la conduire dans son havre de paix qu’elle fait la rencontre de Grégoire Ribaud-Duval, jeune homme brillant qui la subjugue immédiatement.
Pourtant, Léa a tout pour être heureuse. Son ex-mari est galeriste, l’homme qui l’aime est son agent, son fils – du même âge que Grégoire – fait de brillantes études, et son art est unanimement reconnu.
Mais raison et sentiment n’ont rien de commun et Léa succombe sans hésitation.
Loin de leurs proches, leur idylle est parfaite… puis vient le retour à la réalité
Grand reporter à Point de Vue , PHILIPPE SÉGUY est l’auteur de biographies et de romans historiques.
Les Amours illicites
Pour Ilan
Puisqu’il le faut Entraînons-nous à mourir À l’ombre des fleurs.
Kobayashi I SSA
Il n’y a pas de hasard. Il n’y a que des rendez-vous.
Paul É LUARD
Que le jour recommence et que le jour finisse
1

Elle détestait être en retard. Alors, elle était montée dans le train près d’une demi-heure en avance. Maintenant, elle avançait vivement, embarrassée de ses deux sacs, dans le wagon de première classe désert, silencieux, pas encore éclairé, plissant ses yeux verts de myope sur le numéro des places, jusqu’à la sienne. Reculant, avançant, elle vérifia encore une, puis deux fois, le numéro qui correspondait bien à son siège, dans le sens de la marche, comme Zélie, l’assistante de sa galerie parisienne, l’avait demandé au vendeur de l’agence. Elle voulait une place isolée, près de la fenêtre. Constatant l’inverse, elle soupira.
Elle hissa jusqu’au porte-bagages l’un des sacs gonflés comme une baudruche. Elle retira son manteau redingote, le plia d’un revers de la main, le suspendit au crochet couleur inox, lissa ses plis de drap bleu nuit entre le pouce et l’index. Elle ouvrit le second sac sur ses genoux, détacha la double bandoulière, sortit un magazine, des Kleenex, une boîte de Ricola à l’eucalyptus, ses lunettes. L’odeur doucereuse et froide du train monta à son nez, écœurante. Elle frissonna, ferma son poing sur le pashmina, le porta à ses lèvres qui mouillèrent l’étoffe de cachemire fin. Léa partait, via la gare Montparnasse 3, dans le train Paris-Granville de 7 h 38, en ce matin froid et clair de février. Elle se demanda pourquoi elle avait décidé de se lever aux aurores, aux horreurs , disait sa mère. Elle se dit que personne ne l’attendait aux Saules. Elle vérifia, en caressant le flanc du sac, comme elle l’avait déjà fait dans le taxi, que les clés de la maison étaient bien dans la poche close par la fermeture Éclair. Elle se souvint de la liste pour Fatima, déposée à sa place habituelle, de la tasse de thé oubliée sur la table en opaline noire du salon et qui aurait la matinée entière pour refroidir et laisser sur le rebord de la porcelaine un cercle brun et laid.
Elle saisit son portable, adressa un message à Louis : Mon chéri, je suis dans le train. Je t’appelle dès mon arrivée aux Saules . Elle pensa qu’il répondrait vite : J’attends ton appel ma douce. Bon voyage . Ce qu’il fit, à peine une poignée de secondes plus tard. Elle l’imagina encore dans le vaste lit, nu jusqu’à la ceinture. Sa peau qui sentait bon, son bras écarté afin de saisir le portable posé sur le chevet d’acajou. La chaleur de l’oreiller. Le jonc d’or blanc cerclant son poignet. La chambre, immense, tendue de soie prune et son autoportrait accroché aux cimaises. Elle se pelotonna davantage, l’image la rendait à ces heures paresseuses, au cœur du matelas tiède, sous le drap doux, au côté de son corps à lui, grand et fort d’homme qui savait tout. Elle ouvrit le magazine à la page de l’horoscope, cherchant la rubrique travail . Le wagon se remplissait lentement, épisodiquement. Des gens seuls, vieux. Une femme, forte et souriante. Léa lui rendit son sourire, par habitude. Elle se dit qu’elle allait s’endormir et que le voyage passerait vite, mieux qu’un songe. Elle regarda sa montre. Elle regardait toujours sa montre, des dizaines de fois, s’excusant, lorsqu’elle n’était pas seule, de ce qu’elle appelait son manque de savoir-vivre.
Elle partait pour la mer froide et verte, pour marcher chaque jour une petite heure sur le sable gris veiné des rigoles d’eau, et le bonnet de laine enfoncé jusqu’aux sourcils. Se reposer, ne rien faire d’autre. L’Earl Grey bu debout devant le bois qui craque et brûle dans la cheminée. Le plaid sur les genoux, un biscuit croqué à demi, puis abandonné sur la soucoupe. Les paumes posées bien à plat sur les radiateurs et le nez collé à la fenêtre. La buée imprimée sur la vitre et un cœur dessiné alors. Un cœur ou autre chose, selon le caprice du moment. La maison fraîche comme un coquillage pour elle toute seule, assise en tailleur sur le Chesterfield râpé. La douche brûlante prise en chantonnant faux avant la serviette nouée en paréo. Le sable fin entre les orteils qui filait ensuite vers la bonde. Respirer les odeurs des algues glacées, du sable giflé par le vent.
L’idée calme du bonheur.
Elle mouilla son index, tourna une page du magazine. Sans trop la lire. Tout se passait bien, pas d’anicroches, le moins possible.
Le contrat signé avec la galerie américaine prévoyait précisément la vente de ses toiles, le pourcentage consenti par Joshua, encore beaucoup d’argent en somme. Elle les revoyait une à une, peintes de sa main, à l’huile, comme les anciens, car moi, j’ai de la technique , patiemment, tout ce travail infini, des semaines et des mois passés dans l’atelier en écoutant Miles Davis jusqu’à en avoir les tympans crevés, saturés, sous les regards consentis de Louis, de Zélie, d’Elsa aussi, de Paul.
La tige d’un verre de chablis entre ses doigts, celle qui s’autoproclamait sa meilleure amie hurlait au chef-d’œuvre : Ma Léa, alors là, tu me bluffes. Vraiment, je te jure, tu me bluffes ! Mais où tu vas chercher tout ça, dis ? Si chère Elsa. Les mails quotidiens de Joshua, disant : Bien ton vert, de mieux en mieux ce vert, mais l’ocre est fatigué, on dirait… Le nu de Maud, tu y tiens pour l’exposition ? Il est à Genève chez les Peterson… car moi, j’ai pensé plutôt, à la place, tu sais, ce qui avait déjà été montré à Londres, il y a quoi, deux, trois ans, le Couple de filles…Ses toiles, la vraie vie couleur sépia, du gris clair au gris foncé, épais, de blanc craie, avec de moins en moins de cobalt, d’outremer, de Sienne, d’indigo, la couleur s’effaçant au fur et à mesure, sa vie de peintre, depuis les Beaux-Arts jusqu’à l’année dernière ou presque. Ces toiles, des dessins, crayon ou fusain, des nus, de femmes, d’hommes, graves, les yeux grands ouverts, pas tristes mais réservés, empruntés, gênés on aurait dit, embarrassés d’être nus dans l’atelier, face à elle, face à ceux ou celles qui les regarderaient désormais, accrochées à un mur de chambre, d’entrée, de salon, de bureau, de couloir.
Choisir les modèles, leur demander de poser pour une femme, nus. Pas si simple. Au début de sa carrière, elle plaçait une petite annonce écrite sur le dos de sa carte de visite dans les écoles de danse ou de théâtre, les salles de sport, punaisée dans l’étroite vitrine cadrée de bois, face aux douches. Les Folies Bergère lui procuraient des corps lisses, parfaits, fermes, ventre creux, de femmes et d’hommes rasés, imberbes, épilés, parfumés, épaules rondes et larges, cuisses souples, pieds cambrés faits pour la course et le saut, des heures. La danseuse ou le danseur prenait la pose et la lumière, des matinées entières, sans une plainte, sans une crampe, refusant le peignoir en éponge, asexués, une plastique idéale de mannequin de vitrine, acceptant qu’elle les touche, au sein, au coude, au ventre, replaçant le pied sur l’autre pied, la main droite sur l’épaule gauche, faisant saillir le muscle, gonfler la peau nue. Ils se laissaient faire, vaguement engourdis par son parfum, ses mains tièdes, lisses, en confiance et ils murmuraient comme après le sommeil, Ça vous va ?
Le succès était venu. Depuis, il y avait eu tant de travail et la cote qui s’envole. Lorsqu’elle peignait, nul n’avait le droit de pénétrer dans l’atelier, même pas Paul. Elle se souvenait de son fils, la tête tournée vers la porte toujours close. Tout petit. Au bord des larmes. Après les premiers articles, les premières télévisions, des femmes, des hommes, des femmes pour leurs enfants lui demandaient par lettres, par mails maintenant, de poser pour elle. Léa répondait rarement et jetait les photos. Fatima retrouvait les morceaux de papier brillants dans la corbeille. Léa avait laissé Louis veiller à ce que les toiles, toutes emmitouflées dans des caisses blanches, imprimées de grosses lettres noires, rassurantes, parviennent à New York. Sans elle. Elle attendait sa première rétrospective, à la fin du mois de juin prochain, en Amérique. Léa Debarry, peintures. 1988-2016. Les deux dates jointes ainsi faisaient selon elle pierre tombale. Joshua, le galeriste américain, son mari durant huit années, pensait le contraire. Depuis leur première rencontre et ses presque vingt et un ans, elle écoutait Joshua qui décidait de tout, la presse, le cocktail, les alcools, le choix des photographes, des invités, de l’accrochage, même le choix de l’affiche. Paul au Tricorne . Paul, le grand portrait de son fils, le polytechnicien. Elle avait pris l’habitude de se taire au bon moment.
Elle ferma le magazine. Ouvrit le paquet de bonbons, retirant l’opercule du bout de l’ongle. Elle

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents