Léo et son ombre
174 pages
Français

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Léo et son ombre , livre ebook

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Description

Par un beau matin d’hiver, quelques années avant la grande guerre, Firmin et Bertha sont de très mauvaise humeur. Non seulement Bertha est enceinte, mais elle attend des jumeaux.



Ces enfants, dont ils ne veulent pas, seront élevés par la maman de Bertha qui, même s’ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau, réalise très vite qu’ils ont des caractères très différents. Léonard, dit « Léo » est un meneur, un caractériel, tandis que Léopold, que ses parents surnommeront très rapidement « l’autre », est doté d’une nature douce et timide.



Les années passent et au grand désespoir de la grand-mère, les parents ne cherchent même pas à les distinguer l’un de l’autre. Léo profitera très vite de leur ressemblance, se faisant régulièrement passer pour « l’autre » quand il peut en tirer profit.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 août 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414473687
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194, avenue du Président Wilson - 93210 La Plaine Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-47367-0

© Edilivre, 2020
1
Firmin Boichot marche à grandes enjambées sur la route pavée. Il regarde distraitement les mosaïques en grès qui défilent sous ses pas en formant des arabesques régulières sur toute la largeur de la route.
Il rumine, le front plissé, approfondissant des rides déjà bien marquées sur tout son visage. Elles dénoncent une vie au grand air par tous les temps.
Il est fermier et content de l’être, malgré que cela lui impose une vie dure. Avant lui, son père l’a été, son grand-père aussi. C’est tout naturellement qu’il leur a succédé sur ces terres appartenant à la famille depuis tant et tant d’années.
Il tient beaucoup à sa ferme, idéalement située le long de la rivière. Il sait que beaucoup la convoitent car toutes ses pâtures ont un accès au cours d’eau. C’est une chose inestimable, il ne doit jamais abreuver son bétail lorsqu’il est dehors. L’homme sait que rien que pour cela, tous les fermiers des environs connaissent son bien et lui envient.
Mais, aujourd’hui, ce n’est pas à cela qu’il pense. Il y a cinq minutes, il vient de sortir de la pharmacie, car, ce matin, Bertha, sa femme n’a même pas su l’accompagner pour l’aider pour la traite.
Elle n’a que trente-trois ans, et voilà plus de quinze jours qu’elle est malade quand elle se lève. Elle ne digère plus rien correctement et il lui semble même qu’elle a perdu quelques kilos. Aussi, quand tout à l’heure, elle lui a demandé de “courir” chez le pharmacien pour aller lui chercher du bicarbonate de soude, il a bien ronchonné pour la forme, mais, au fond de lui, cela le soulageait de constater qu’elle voulait enfin se soigner. Ce qu’il ne savait pas, c’est qu’elle en utilisait depuis plus de dix jours et que cela ne lui avait pas fait grand-chose. Il avait donc laissé son ouvrage pour se rendre au village.
— Heureusement, avait-il pensé que, en ce moment, le travail ne presse pas trop !
Il avait décidé de faire le chemin à pied, il savait qu’il lui aurait fallu plus de temps s’il avait attelé son cheval à leur vieille carriole pour parcourir le long détour que faisait le chemin carrossable en sillonnant les deux hameaux perchés sur la colline pour rejoindre le village qu’il laissait derrière lui.
Il était donc parti, l’esprit préoccupé par la santé de sa femme, il s’en était ouvert au pharmacien, espérant que celui-ci pourrait lui conseiller une drogue efficace. L’homme lui avait posé quelques questions qu’il avait trouvées plutôt saugrenues, mais il s’était assis sur une des chaises installées le long du mur faisant face au comptoir lorsqu’il lui avait conseillé :
— Dites à votre épouse d’aller se confier à une sage-femme !
— Mais, ce n’est pas possible qu’elle soit “ainsi” ! avait-il rouspété.
Son interlocuteur avait eu un sourire narquois, imperceptible et avait conclu :
— C’est vite arrivé, vous savez !
Maintenant, ces quelques mots revenaient en boucle dans la tête du fermier, à chacun de ses pas, il maugréait :
— Il ne manquerait plus que cela !
De mauvaise humeur, il continuait son chemin d’une démarche rageuse. Il soliloquait :
— Une bouche de plus à nourrir… par les temps qui courent…
Il avait quitté la route pavée pour s’enfoncer dans un étroit sentier, il était passé dans un petit bois et avait descendu quelques marches un peu trop hautes que la nature avait étalées en suivant la rivière qui ronronnait doucement sous un soleil de fin d’été. Lorsqu’il sortit des bosquets, il aperçut le toit de sa ferme, ou plutôt, les toits de son bien car sa demeure était flanquée d’étables et de granges disposées sans ordre suivant, sans doute, les possibilités offertes à ses ancêtres, ou peut-être, suivant leurs humeurs.
Alors, il lui vint en tête, une idée d’ordre pratique, ce fut tout de même en maugréant qu’il lança à un invisible interlocuteur :
— Si c’est ainsi, au moins, que ce soit un garçon !
Il n’acheva pas sa phrase, mais il s’était dit que dans une bonne vingtaine d’années, ou, peut-être même avant, il serait certainement heureux d’avoir un solide coup de main. Il venait d’avoir quarante ans à la Saint Joseph… cela commençait à compter !
Il continua son chemin. Pour entrer sur ses terres, il passa dans des espèces de chicanes, savamment formées par des clôtures en fils de fer barbelés car il devait laisser la possibilité de passer aux pêcheurs et même aux promeneurs qui voulaient longer le bord de la rivière. Il y avait déjà quelques années qu’il avait pris la décision de ne plus se fier aux barrières que ses prédécesseurs avaient installées et que bien trop de personnes négligeaient de refermer. Combien de fois, n’avait-il pas dû faire la chasse à du bétail en fuite ! Maintenant, grâce à cet ingénieux stratagème, jamais aucune bête ne pouvait plus prendre la poudre d’escampette !…
Quand il rentra, sa femme n’était pas mieux que quand il l’avait quittée. Lorsqu’il lui rapporta les paroles du pharmacien, d’une voix hargneuse, il conclut bêtement :
— Tu aurais pu faire attention !…
Elle s’anima un peu pour lui répondre vertement :
— Tu ne penses pas que tu aurais pu te retenir ?
Elle précisa :
— D’ailleurs, ce que t’a dit l’apothicaire, j’y avais pensé aussi, cela fait bien neuf semaines que je ne me suis plus “revue” !
Ils aboyèrent encore un bon moment, l’homme finit par conclure :
— De toute manière, c’est fini, nous ferons chambre à part !
— Il est bien temps, grogna-t-elle encore, et où veux-tu aller dormir, nous n’avons qu’un lit !
Il sortit en haussant les épaules, elle s’énerva un peu plus et prit le ciel à témoin lorsqu’elle conclut :
— Je n’ai rien demandé, moi, j’avais assez de travail comme cela, et puis, si je dois être malade pendant des mois comme je le suis depuis des semaines, je ne sais vraiment pas comment je vais tenir le coup !
— J’aurais bien peur d’être demain, continua-t-elle encore en soupirant, je ne sais pas comment je vais parvenir à faire le beurre et la maquée !
A la ferme des Prés-Mouillés, l’ambiance d’habitude déjà pas très chaleureuse devint carrément froide. Firmin et Bertha en étaient arrivés à se lancer des regards noirs pour un “oui” ou pour un “non”.
Il n’avait plus été question de la situation dans laquelle la femme était supposée être, d’autant plus que les malaises qu’elle avait connus s’estompaient au fil des jours.
Elle alla tout de même se confier à sa mère qui habitait à presque deux heures de marche de la ferme. Celle-ci vit tout de suite une métamorphose chez sa fille, elle l’obligea presque à aller chez Célina, la seule accoucheuse des environs qui avait aidé à venir au monde, la majorité des jeunes de moins de vingt ans des alentours.
Celle-ci eut tôt fait de conclure que Bertha était déjà bien forte pour ses trois mois de grossesse, elle prédit que la naissance devrait avoir lieu vers le quinze mars.
La fermière prit des accords avec sa mère et mit son mari devant le fait accompli. Cette dernière qui vivait seule depuis des années allait déménager chez eux. Elle viendrait bien à point pour l’aider dans ses lourdes tâches pendant les dernières semaines avant son accouchement. Elle pourrait aussi la remplacer lorsqu’elle serait alitée, car dans le temps, elle avait tenu jusque six vaches. Par la suite, elle s’occuperait du bébé.
La future grand-mère avait accepté le “marché” que lui avait proposé sa fille, car, non seulement, elle avait été veuve très jeune, mais elle avait aussi perdu ses deux fils, l’un à neuf ans, l’autre à vingt, il ne lui restait que Bertha. Bien entendu elle était persuadée qu’elle n’aurait pas d’autres petits enfants que celui qui était annoncé. Malgré ses airs indifférents, elle aurait été désolée de ne le voir que rarement. Elle connaissait le caractère de Firmin, elle ne s’en occuperait pas et il serait le premier à baisser les armes !
Comme prévu, l’homme rouspéta pour la forme. Marcelline était encore vaillante et serait une aide gratuite, il faudrait bien la nourrir, mais, cela était un moindre mal. Quant à la vieille femme, cela l’arrangeait aussi, elle avait si difficile de nouer les deux bouts !
Le temps passait, la future grand-mère trouvait sa fille bien forte, quant au fermier il ne lui parlait jamais de son état, il était toujours partagé entre des sentiments divers. Bertha lui en voulait encore un peu, mais sa mère était parvenue à lui faire admettre que cette future naissance était plutôt une bonne chose.
2
Peu après le nouvel an, Bertha revit l’accoucheuse, celle-ci lui dit sans ménagement :
— Forte comme tu es, à mon avis, tu nous prépares une fameuse surprise !…
Elle éclata de rire. Devant l’air abasourdi de son interlocutrice, elle précisa d’un ton enjoué :
— Ou nous nous sommes joliment trompées sur la date de la naissance, ou il y en a deux !
Son hilarité stoppa net devant le visage décomposé de la future mère, elle tenta de la rassurer :
— Oh, tu sais, lui dit-elle, ce n’est pas parce qu’il est rare d’avoir des jumeaux que c’est dramatique, tu es costaude, tout ira bien.
Mais Bertha n’avait pas pensé à son accouchement, elle s’était inquiétée par la réaction qu’allait avoir Firmin.
Elle rentra le visage sombre, d’humeur taciturne. Elle avait décidé de ne se confier à personne, même pas à sa mère. Elle avait exigé de Célina qu’elle ne parla à quiconque des déductions dont elle lui avait fait part, mais Marcelline remarqua tout de suite le nouveau comportement de sa fille.
Bientôt, elle la questionna :
— Toi, lui dit-elle, en la fixant dans les yeux, tu me caches quelque chose, mais ne me prends pas pour une idiote, tu ne penses tout de même pas que je n’ai pas remarqué que tu es bien forte pour tes sept mois !

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