Le Bateau de CUFFE ET CINQUE
312 pages
Français

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Le Bateau de CUFFE ET CINQUE , livre ebook

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Description

Lorsque Rachel, la fille du propriétaire de la plantation Cruger, accouche de Cinqué, un métis, son père ne peut accepter ce déshonneur infâme et décide de lui cacher son fils en prétextant qu’il est mort-né. Elle découvre la cachette et s’enfuit avec Cinqué. M. Cruger perdra la vie en essayant de la ramener à la maison.Rachel prend les rênes de la plantation, libère tous les esclaves, et ne garde que ceux qui souhaitent rester comme salariés. C’est un scandale dans le sud des États-Unis esclavagiste. Pourtant, quitter le Sud, n’est pas si simple : le train clandestin et le bateau de Cuffe semblent être des mirages. L’espoir se transforme en liberté quand les troupes d’Abraham Lincoln entrent dans la plantation.Le bateau de Cuffe et Cinqué c’est aussi une merveilleuse histoire d’amour entre Rachel, prête à tout pour vivre avec Shamki, le père de son fils, et ce dernier qui se refuse le bonheur d’un amour idyllique parce que son peuple vit dans la souffrance. Heureusement, Cinqué, le fils du scandale et d’un amour plus fort que les préjugés raciaux, porte tout l’ascendant mystique d’une connexion avec l’Afrique profonde. Les sept étoiles brillent.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 août 2022
Nombre de lectures 4
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Blaise Ahnai Bay
Le bateau de Cuffe et Cinqué Roman
Proximité, août 2022
Du même auteur Les Carnets du soleil, nouvelles, Proximité, 2019. (Sélection Grand Prix littéraire de l’Afrique noire). Le Patron des machines, Éditions de midi, 2020. L’Idylle de Marc et Aïcha, Afrédit, 2021. Ces Sentinelles près du bonheur, Prix international Immaculée Éditions.
Éditions Proximité, Yaoundé, août 2022 République du Cameroun Tél : +237 6 99 85 95 94/ 6 72 72 19 03 Courriel : editionsproximite@gmail.com ISBN : 9956 429 001818
à Fanta Suzanne
AVANT-PROPOS
J’ai toujours pensé que l’acte décrire devait découler du désir de dire quelque chose de singulier. Toni Morrison disait : «S’il y a un livre que vous aimeriez lire et qui n’est pas encore écrit alors, écrivez-le». La perception ou l’enseignement de l’histoire de l’esclavage sur notre continent se limite bien vaguement au commerce triangulaire, sans plus. Et très peu de livres écrits sur les conditions des personnes emportées établissent un lien véritable entre ces personnes et leur continent, sur le plan culturel et spirituel. En dehors deRacinesetl’Africain, je n’en connais presque pas. De plus, il est toujours nécessaire d’écrire des histoires qui se distancent des visions comme celles de Thomas Dixon puisqu’on nous dit : «Qui censure quoi et lorsqu’on commence, où doit-on s’arrêter?» L’histoire comme l’art ne doivent pas être effacés, mais annotés. L’histoire de l’esclavage doit nous rappeler que l’esclavage ne saurait en aucune façon et à aucun moement de l’hitoire être quelque chose de moralement acceptable. Si nous claironnons que ce qui est mauvais n’a jamais existé ou ne doit jamais avoir existé, sommes-nous dans la vérité? Doit-on lutter contre le mal en effaçant toutes les traces de son passage? Si nous ignorons nos erreurs du passé, nous sommes condamnés à les répéter. Là où il y a de l’ombre ou mensonge, nous avons le devoir de restaurer la vérité. Ceci est donc l’histoire de nos ancêtres emportés. Ils sont présentés avec tout ce qu’ils ont pu endurer. Ces ancêtres avaient une terre d’origine, une histoire, une culture, une civilisation. Ils n’étaient pas esclaves, on les a forcés à l’être. Il s’agit de s’écarter également des perspectives révisionnistes montrant l’esclavage comme une nécessité
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vouée au bien de l’homme noir content d’être rudoyé et asservi. Mais ce livre est aussi un hommage à la vie où qu’elle soit sur la planète puisque nous nous adressons à la condition humaine entière. Nous élevons aussi notre voix contre l’esclavage moderne que ce soit en Lybie ou n’importe où dans le monde. J’ai voulu que le livre ait à la fois une dimension épique, historique, mystique, mythique, culturelle et spirituelle. Car il n’y a pas que la retranscription des faits dans l’acte d’écriture qui doit associer la souplesse de l’imagination à la rigidité de la raison. L’acte d’écriture qui permet non seulement de retranscrire la réalité, mais aussi de créer un univers indépendant, qui se replie sur lui-même, cet univers qui reste le reet du réel, mais qui s’en affranchit en conduisant le lecteur dans les labyrinthes à la fois familiers et inconnus. Cet acte qui ouvre de nouvelles possibilités, de nouvelles perspectives en maintenant ses liens avec notre histoire. Toutefois une œuvre dont l’objectif est de transmettre la haine ou des stéréotypes haineux mérite-t-elle d’exister? Non et non. L’art est le domaine du partage, de l’échange, de la communion, de la discussion, de la critique constructive, du plaisir. Il n’y a pas de place pour la haine ou le dénigrement dans l’art. Toute œuvre qui se donne pour objectif de transmettre la haine ou de dénigrer d’autres humains n’est pas à mon avis une œuvre d’art. Elle ne mérite pas de circuler ni même d’exister.
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Il était né sur ces terres hostiles et étrangères, porté dans les entrailles d’ascendants échangés contre des barres de fer, du drap écarlate, des galetons rouges, de l’eau-de-vie. Un canon pour douze âmes! La traversée s’était faite dans leurs entrailles avec des hommes, des femmes et des enfants entassés, rangés au fouet, classés comme des cuillères. Des hommes, des femmes et des enfants étouffant dans les relents des besoins, la promiscuité avec les captifs crevés, de brefs instants pour voir la lumière du soleil puis retrouver le parfum le plus favorable, le vinaigre de l’entrepont nettoyé. Que savait-il de ceux qui s’étaient jetés à la mer pour que leurs âmes regagnent leurs terres ancestrales? Pour que leurs âmes, par cet acte, échappent à une vie de bête de somme. Cette vie qui était la leur depuis leur naissance. Et, nom d’une vache verte! Comme ces terres de servitude étaient fertiles! Elles n’étaient pas comme les terres de la Nouvelle-Écosse si pauvres, si démunies et si rocailleuses. Le coton poussait sous l’ardeur de leur labeur forcé. La canne aussi que ceux-là appelaient tendrement or blanc. Il faisait encore sombre quand ils se mettaient à travailler. Le petit déjeuner venait plus tard. Parfois il ne venait pas. Quand il était riche, il s’agrémentait souvent de l’os de jambon. Il fallait préparer le sol en hiver, planter au printemps, cultiver en été, récolter
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en automne. Au sifement des fouets qui laissaient leurs sinistres baisers sous forme de zébrures sur le dos. Durant le printemps, certains répandaient le guano, de l’engrais fait d’excréments d’oiseaux de mer et de chauve-souris. Ceux chargés de planter travaillaient en deux groupes. On les voyait se scinder en deux groupes proches qui se mettaient à s’éloigner l’un de l’autre, traçant les mêmes lignes en directions opposées. Certains étaient munis de herses. 10, 20, 30, 50, 60 gallons d’eau. C’était ce qu’il fallait aux blanchisseuses pour tremper, bouillir, laver et rincer les vêtements des champs. Ils travaillaient tous de l’aube au crépuscule. Un soir, l’un demanda à l’autre : Tim, est-ce à moi ou à toi de sonner la n des travaux? C’est à moi n’est-ce pas? Dieu du ciel, tu t’entends? Tu crois que c’est un honneur? Vraiment. Vas-y, sonne la n des travaux, sonne chaque jour, sonne autant que tu le voudras. Et laisse-moi en dehors de ça. Je ne voudrais pas que demain on écrive dans les livres que deux idiots se disputaient l’honneur et le prestige de sonner la n ou le début de leurs travaux forcés. Non, mais tu t’entends? Tu t’entends? Ce n’est pas possible. Ce n’est pas possible. Je dois rêver. Tu as ressenti de la erté dans ma voix, Tim? Ne porte pas sur moi un faux jugement. Ton accusation est absurde. Ce n’est pas un honneur pour moi de sonner le début ou la n de nos travaux.
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Ceux qui prétendaient vivre de façon plus luxueuse étaient tonneliers, travaillaient dans la maison, employés dans l’usine, s’occupaient des équipements. Ils décidaient du moment où les feuilles de tabac devaient être cueillies, où le coton devait être récolté. Quand les produits étaient prêts, ils faisaient charger et acheminer le produit, s’occupaient des chevaux. Le maître ne semblait pas, malgré leur statut, leur montrer une affection d’exception. C’étaient des propriétés. La seule personne pour qui il avait montré une profonde affection était son dresseur de coq, mort il n’y avait pas longtemps de cela. Il avait accroché au salon son chapeau avec sept plumes luisantes de coq xées dessus. Ce chapeau faisait partie de ses objets sacrés tout comme l’épée de son grand-père suspendue au-dessus de la cheminée. De toute évidence, ces gens ne quémandaient pas son affection, mais désiraient leur liberté, la rêvaient, la fantasmaient.
Cooper Shamki se réveilla ce matin-là en sursaut. Shamki était le nom africain qu’il s’était donné, mais que celui qui disait être son propriétaire n’acceptait pas. Il bailla, s’étira et se mit à songer avec inquiétude à la vieille Ira qui toussait beaucoup. Il lui fallait trouver un moyen d’arranger son toit qui laissait passer la pluie et la neige, transformant la poussière de sa chambre en boue. Ne lui fallait-il pas reconstruire toute la demeure de la pauvre en utilisant des matériaux plus solides? Le maître lui en donnerait-il l’autorisation? La demeure de cette pauvre vieille exigeait d’être
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reconstruite. Cette femme était un puits de sagesse et de vertu. L’âge lui avait pris sa force physique, mais elle restait un trésor. Tiens. Il pouvait reconstruire sa cabane de manière solide en utilisant de la mousse espagnole. La mousse espagnole associée à d’autres matériaux pouvait donner plus de résistance à sa demeure. Il en avait vu dans les chênes, mais en trouverait-il assez? Certainement. Plus tard, le soleil se leva. L’astre se mit à ricaner en préparant pour le reste de la journée une chaleur plus féroce que celle qu’il répandait à cet instant précis. Le paysage, comme indifférent à la douleur des travailleurs forcés, s’étalait en exhibant avec erté ses courbes à travers les collines et les montagnes. Les chênes se balançaient avec sérénité dans la brise matinale. La propriété dans laquelle ils vivaient était cernée d’une immense muraille. L’entrée principale était bâtie d’une manière particulièrement artistique avec, dans le segment qui en constituait le toit, une plaque à vent reliée à une girouette qui indiquait la direction du vent. On pouvait voir au-delà des murailles un paysage qui s’efforçait d’être charmeur, et exhibait des montagnes verdoyantes, malgré l’austérité que subissaient les esclaves. L’enceinte comportait la grande maison du maître avec une énorme pendule sur la façade principale, la maison du surveillant, des écuries, une serre chaude et un moulin à vapeur.
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