La Vie héroïque de Paul Suarez
118 pages
Français

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La Vie héroïque de Paul Suarez , livre ebook

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Description

Le jeune Paul a grandi entre la Plaine Saint-Denis et le nord de Paris. De personnage en marge de la société, il va accéder au rang de héros et même au-delà. Traversant les événements marquants de son époque (guerre d’Algérie, Guerre froide, guerre du Vietnam), il va intégrer un nouvel état et appartenir à une nouvelle race d’hommes. Mais ce destin, Paul Suarez va tenter de le fuir...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 décembre 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782334240345
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-24032-1

© Edilivre, 2017
Prologue
La nuit était bien choisie pour admirer la ville lumière sous les premières gelées d’automne. Le taxi parisien conduisait Gareth Stevenson qui sortait d’Orly en direction de la capitale. La féérie nocturne masquait l’aspect délabré et crasseux de la périphérie d’une ville perdue dans une époque morose. La voiture stationna au pied d’un immeuble à l’allure modeste du Boulevard Magenta. Gareth Stevenson en sortit. Ses cheveux gris, son teint pâle et ses rides trahissaient un âge avancé. Il portait des lunettes et un vieux chandail sous sa veste usée et passée de mode. Retraité de l’armée depuis fort longtemps, ce vétéran du Viêt-Nam coulait des jours tranquilles et modestes quelque part en Arizona. Mais poussé par la nostalgie, et peut-être d’autres raisons, il avait entrepris ce voyage en France afin de retrouver ce Spanish Frenchie qui avait servi à ses côtés sous le drapeau américain. Paul et lui s’entendaient bien à l’époque et il avait donc plaisir à le retrouver après quelques décennies mais surtout il voulait absolument percer un mystère que Paul ne souhaitait lui révéler que de vive voix.
La porte s’entrouvrit. Cependant, là où Gareth Stevenson s’attendait à trouver un vieillard rabougri comme lui, il tomba sur un jeune homme d’une trentaine d’année.
– Bienvenue Stevenson ou Gareth si tu préfères nous sommes de vieux amis maintenant, je t’attendais !
– Mais ce n’est pas possible… tu es le fils de Paul ?
– Non, je suis Paul Suarez ! C’est moi avec quasiment le même aspect physique qu’il y a quarante ans…
– Comment est-ce possible ? C’est une blague ?
– Non ! Laisse-moi te raconter…
Le paris gagne
Le petit Paul déambulait dans les rues de la Petite Espagne, le quartier peuplé par les communautés italiennes et espagnoles, situé sur la Plaine St Denis. Il était assis sur le bord du trottoir et observait les grands jouer. Soudain Francisco, Gino et Alberto surgirent, frappant dans le cuir usé d’un ballon en direction d’un terrain vague. Le terrain suintait encore la boue de la pluie fraîchement tombée sur la terre mais les culottes courtes ne craignaient pas la souillure. Le match qui battait son plein fut soudain interrompu par les remous remontant du coin de la rue. C’est alors qu’une foule compacte apparut, armée de drapeaux rouges et occupa la place centrale en hurlant et en levant le poing vers le ciel. La plupart revêtait des bleus de travail maculés de tâches d’huile et de graisse. Alors qu’ils redoublaient en cris, leurs visages devinrent plus graves car une nuée de policiers venaient d’investir les lieux et se tenait face à la foule. Les deux parties se défièrent un long moment avant la charge et le déchaînement de violence, de coups de matraque, jusqu’à la dispersion de la foule suffocante, ensanglantée et boitillante. Quelques-uns restaient encore assis dans un coin de la place ou ils erraient, hagards, affichant des regards mêlés d’incompréhension et de frustration.
La famille Suarez avait posé ses valises dans ce quartier en 1924. Paul était le petit dernier d’une fratrie composée de trois frères et une sœur. Le premier, Salvador, était une grande brute, un teigneux qui cherchait souvent la bagarre. Fernando, le deuxième était beaucoup plus réservé et fragile. Et enfin Concha se trouvait être la petite protégée de la famille. Ils étaient les enfants de Maria et Victor Suarez qui avaient quitté une Espagne exsangue et misérable, guidée par le fascisme et gagnée par les aspirations anarchistes et l’exil de masse. Victor Suarez, maçon de son métier, œuvrait sur des chantiers pour faire vivre la famille. Salvador et Fernando travaillaient aussi. Il avait pour projet de mettre des sous de côté afin de monter leur entreprise familiale. Concha secondait sa mère dans les tâches ménagères et apprenait à coudre. Quant à Paul, bien qu’étant encore jeune, il ne montrait aucun intérêt pour le sens des responsabilités familiales. Il passait son temps à vagabonder toute la journée. Au début, il faisait quelques petits coups gentils comme chaparder des pommes dans le jardin du vieux Ladoncha ou attacher des casseroles aux queues des petits chiens. Mais dernièrement il avait dépassé les bornes. En effet, son père avait du le chercher à la gendarmerie pour tentative de cambriolage dans une propriété bourgeoise. Ses deux principaux amis étaient Marco dit « Le Gitan » et Ahmed dit « Le Kabyle ». Quant à Paul son surnom était « el Listo ». Paul venait d’avoir 14 ans. Il détestait ce quartier pourrissant que les immigrés avait bâti de leurs mains. Il n’avait qu’une envie, c’était de sortir de là.
Un après-midi d’été comme les autres dans la Petite Espagne, les anciens émergeaient de leur sieste quotidienne et prenaient le frais à l’ombre assis sur des chaises en osier. Les habitants pouvaient passer des heures, durant l’été, à regarder les enfants jouer, ou à discuter avec les voisins. Ceux-ci amenaient alors leurs chaises et convergeaient en un point pour improviser une réunion de chaises. Les femmes en tabliers s’affairaient, ramassaient le linge, s’occupaient de leurs progénitures. Elles administraient les lieux comme de vraies fourmis ouvrières à l’intérieur d’un nid, tandis que leurs maris étaient à l’extérieur et subvenaient aux besoins de leurs familles respectives dans les usines métallurgiques ou les manufactures locales. Certaines jeunes filles y travaillaient également. L’univers de Paul et de ses amis contenait un endroit particulièrement important : un terrain vague que les enfants utilisaient pour leurs innombrables jeux. En tête, le football, très prisé de ces petits latins. Le terrain vague jouxtait des concessions jardinières qui le séparaient du quartier voisin. Sur ce terrain, Paul, Gino, le Gitan et le Kabyle côtoyaient les frères Arjona, Francisco et Jean, ainsi qu’Alberto Calatrava. Ils y passaient l’essentiel de leur temps lorsque la météo se montrait clémente. Parfois, malgré la pluie et la boue, ils n’hésitaient pas à affronter les éléments afin de se prendre l’espace d’un moment pour les gloires du football national et international : Raymond Kopa, Ferenc Puskas, Fritz Walter ou encore Stanley Matthews. Par mauvais temps, ils pouvaient aussi aller au cinéma. C’était un autre moyen de s’évader de la réalité quotidienne de leur quartier et de sa promiscuité réductrice en découvrant les grands espaces du Far West avec Marlon Brando, en voyageant dans l’espace ou en traquant les gangsters dans la jungle urbaine de Chicago. Trois ans plus tard, Paul était devenu un rude gaillard qui roulait des mécaniques et courait les jupons dans les bars mal famés de Paris et de la banlieue nord. C’était le début de l’époque des blousons noirs et des Harley. Les jeunes imitaient James Dean et adoptaient la banane. Paul s’en tenait à un look assez classique mais sa trogne de métèque le rendait aussi voyou que ses deux collègues.
Arrivé à un certain âge, on changeait de terrain de jeux : Paris. La ville de lumière éternelle dont le cœur avait souffert de l’occupation sans jamais éteindre son âme. Elle représentait le théâtre de nouvelles expériences pour des jeunes pousses ayant puisé toute l’énergie maigre de la banlieue. Jusque là, Paul et sa bande gagnaient leurs frissons en dévalisant des petits entrepôts mais la découverte des nuits parisiennes les fit pénétrer dans un monde irréel. Ainsi, ils devinrent très vite des habitués de certains lieux branchés de Pigalle comme l’Etoile Bleue, un cabaret sympathique.
Ce soir là, au milieu d’un brouhaha oppressant qui s’échappait des sous-sols sordides, des tas de types s’agitaient comme des mouches autour de la table de jeu. Ils jouaient au crapp’s, un jeu très populaire dans les casinos et les tripots d’Outre-Atlantique. Deux fieffés lascars menaient la partie. L’un était petit et basané. L’autre était plus grand et mince. Le premier portait son chapeau de travers comme un amerloque et une cigarette pendait à ses lèvres. Le second affichait un visage émacié mais un nez aplati par des années de boxe. Paul s’approcha d’eux. Il sortit de sa poche un billet de mille francs qu’il jeta sur la table au milieu des autres billets à demi froissés qui s’y trouvaient déjà. Le Kabyle vint le rejoindre.
– Dis donc ! Mille balles ! T’es timide ce soir !
– J’suis pas venu pour jouer mais pour te voir !
– Ben j’suis là !
– Attends ! Je vais voir si tu me portes chance…
Le lanceur agita les dés dans un gobelet et les jeta sur la table : l’un d’eux marquait trois, l’autre quatre.
– Sept du premier coup ! Ben dis-donc t’es en veine ! Tu veux pas rejouer un coup ?
Paul ramassa son dû sans sourciller.
– Je te l’ai dit je ne suis pas venu pour jouer.
Le berbère fit la moue. Son visage au nez aquilin, placé sous des cheveux noirs et crépus se renfrogna. Ce visage sentait fort l’Afrique du Nord mais ses yeux verts atténuaient cette impression. Né dans les montagnes près de Tizi Ouzou, cet orphelin de père, décédé alors qu’il n’avait que sept ans, était arrivé en Métropole juste après la Libération. A quatorze ans, il volait pour la première fois. Au départ ce n’était qu’un petit receleur de pièces autos et un cambrioleur avisé mais avec Paul ils avaient décidé de monter en grade. Ils voulaient rejoindre le milieu des caïds du nord de Paris.
Ils remontèrent les marches pour sortir de la cave où se déroulaient les jeux puis ils sortirent dans la rue. La nuit était déjà tombée. Le Kabyle s’impatientait de savoir ce que Paul voulait lui dire.
– Attend un peu ! Accompagne-moi d’abord je dois passer voir Léa à l’Etoile Bleue.
– Ah ! Ben comme ça tu me la présenteras. Il

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