Là où le fleuve ne coule pas
90 pages
Français

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Là où le fleuve ne coule pas , livre ebook

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Description

Le Game est attendu par le monde entier, des deux côtés du fleuve ; distraction pour les uns, passion pour les autres, il soulève du côté des bas quartiers un espoir d’évasion. Car cette année les participants sortent du mauvais côté du fleuve, de cette population que l’on a rejetée des décennies plus tôt. Et les jeunes Gamers sont bien décidés à s’en sortir. Mais la Compagnie qui gère les jeux ne leur laisse aucune chance, le monde s’en rend vite compte ; et d’un jeu va surgir une prise de conscience, car la vie des Gamers nous ramène tous au fleuve, et la colère d’une mère peut faire trembler les ponts.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 juin 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332946485
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194 avenue du Président Wilson – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-94646-1

© Edilivre, 2020
Prologue
Je suis un terminateur.
Je rôde en bordure. Je sais que c’est confus. Mais comment expliquer à ceux qui ne savent pas ? C’est ma réalité.
Écoutez. Vous êtes assis à cette conférence, et vous vous ennuyez à mourir. Votre esprit s’envole, vous vous dites que vous avez eu « un blanc ». Mais non, votre esprit était ailleurs, attiré par un autre lieu. Vraiment ailleurs. Mais vous n’en gardez aucun souvenir, vous n’avez pas eu le temps de saisir cet espace. Moi je le peux. Je le vois. Tout le temps. C’est comme regarder un objet en fixant l’espace qui l’entoure, ne pas le chercher en face, on le voit, on le devine, il est là. J’ai cette faculté depuis toujours. Je vois les bordures.
Je suis un terminateur.
Le terminateur est la ligne de séparation entre le jour et la nuit. D’un côté on voit, de l’autre c’est le noir. Mais le noir n’efface pas la réalité ; le terminateur est le gardien de la nuit, de ce que l’obscurité nous cache. Être un terminateur c’est cela, guetter le changement, surveiller la lisière du crépuscule. Garder le souvenir du jour.
Nos dons ont disparus, et avec eux nous avons perdu les mondes de la nuit qui nous entourent. Nous les pressentons mais ils demeurent invisibles. Sauf pour moi.
Je suis un terminateur, je vois le jour sur des mondes cachés.
J’ai vu couler le fleuve…
Chapitre 1
Manir – (quartier des bars)
Pas de quoi pavoiser en fait ; sur trente candidats, nous n’étions que six à avoir l’âge requis. Et sur les cinq les autres étaient tous moches. Enfin je crois qu’ils doivent intégrer quelques moches à l’histoire, mais là le quota était plein. Alors sur le lot des cageots, la pomme rouge ça a été bibi ! Yeah. Mom va en faire une attaque, mais quand je reviendrai avec la prime, même si ça se trouve avec le gros lot, elle m’embrassera comme le fils prodige que j’ai jamais été. Enfin j’espère ; on a vu des répudiations pour moins que ça ! Marrant le nouveau concept de l’émission, enfermer des ados ou des trous du’c paumés a dû lasser l’audimat. Je me demande quand même quel est le cinglé qui a imaginé la suite de leurs realsitcom à la gomme. Houps ! Je dois à tout prix résilier ces sentiments trop sains, et baver d’admiration devant mon grand nouveau concepteur, sinon ils iront peut-être rechercher dans moche-city les autres candidats que je viens de winner. Et le flouze qui m’attend à la sortie, la célébrité pour me tirer – avec mom – de blues city, j’en ai besoin. Allez, le plus dur est fait. J’ai ma chance. Surtout ne pas la gâcher en leur montrant que je possède finalement un QI, et même la connexion avec le cerveau homo hérité de ma kyrielle d’ancêtres… ça leur trouerait le cul d’avoir engagé un gars assez intello pour se servir de leur divin ordi central et falsifier son état civil zone. Après, après je leur montrerai. Je leur montrerai comme que c’est facile de truander leurs feuilles de renseignements – orphelin mom, tu te rends compte ? J’ai signé leur contrat de sans famille, j’ai confié mon taxi à Metkoum, il est réglo, il donnera à mom de quoi bouffer. Mais pour l’instant je dois remplir une valise de fringues et objets fétiches… De toute façon quoi que je choisisse ils seront contents. Ils croient nous connaitre par cœur. Salauds. J’ai douze semaines pour gagner vos crédits. Après je me fais le best-seller du siècle en racontant cette expérience inédite et comment j’ai floué les plus grands maîtres de l’arnaque. J’espère qu’y aura des gonzesses baisables. Je m’en fais pas pour ça : y’en a toujours, le cul, ça fait partie du contrat, ça dope l’audimat. Il faut que j’y aille. J’ai un sac à préparer. Mom va pas aimer que je parte, depuis qu’on s’est réunis tous les trois, elle aime pas que je parte. Mais tenir quelques semaines dans leur clapier ça devrait pas être si dur, ça sera même du gâteau comparé à l’asile où qu’elle m’avait perdu avec Franz en croyant nous envoyer en centre de vacances. Franz s’en est jamais remis. Pas de bol. J’y vais. Et après ça petit frère, je te jure que t’auras des vacances, des vraies.
Sept – (quartier des docks)
Ouais ! Ouais ! Ouais et re-Ouais ! Ils m’ont choisi, je vais rentrer dans ce foutu worldgame ! Depuis que je sais regarder, j’ai jamais raté une de leur retransmission. Et là ce sera moi ! Et les mecs, ce sera moi dedans ! Ouais. Il paraît que le concept est nouveau cette année. Je m’en fous, je m’adapte. Ils m’ont dit qu’ils me prenaient parce que je suis drôle et pas trop mal foutu. Elle est bien bonne, je me doutais bien que c’était pas pour mon QI, les mecs ! En fait je vais devoir demander au patron des jours, mais quand il verra la pub que je peux pas lui faire !!! Augmenter il sera obligé de me ! Je me demande à quoi ressemblent les autres. La grille était obscure cette année. Parce que chaque année depuis mes huit ans je postule. Mais c’est la première fois que je suis majeur, hé ! A la case parents j’ai marqué zéro. Parce que comme parent, on peut pas compter un bioteckel offert pour mes deux ans par l’assistance publique. Mais je l’emmènerai mon Tickou. Ils ont dit oui, et rien que là, tu vois, je sais que ça va bien se passer. La seule chose au fond qu’ils voulaient être sûrs, c’est que je sois quelqu’un de gentil, et là personne de mon entourage n’a osé leur dire le contraire. Z’avait pas intérêt. Pas que je sois le mauvais gars au fond, mais bon, faut pas me chercher. J’ai quand même regardé la case qu’on sera autant de mecs que de nanas, ça peut aider. Parce que moi trois jours sans nanas je disjoncte. On pourra pas se voir en direct y disent, ça fausserait le jeu : mais j’m’en fous, une fois fermée leur putain de porte, je bidouillerai un peu pour qu’on ait des images, c’est mon boulot, je répare les postes et les antennes tombées des camions, je suis un génie de la bidouille, ça le fera, ça impressionne toujours. Et toute la terre anneau me regardera ! Là ce sera top. Je serai une star ! Ouais. Je vais faire mes sacs. Ouais !
Yoah – (quartier des Immeublesvilles – extérieur zone de béton)
Cette année le concept a changé, c’est la première chose dont on nous ait informés. Et hop je te fais signer une décharge en cas de décès, invalidité, ou autre guigne. Qu’est-ce qui peut bien nous arriver sur un plateau télé ? On n’a pas hésité longtemps, quand on n’a plus de famille, plus de fric, plus d’amis, qu’est-ce qu’on a à perdre ? Ils recherchaient un couple sans attache, de préférence sans personne qui regrette de les voir partir quelques mois loin du monde. La place était pour nous. Avec un peu de chance le fric le sera aussi. Moi ce qui m’a le plus branché c’est l’idée des mini bêtes. J’ai jamais vu une vraie bête à part les rats et les clebs de la rue ; j’ai bouffé des chats, mais j’ai jamais vu ailleurs qu’à la télé de ferme ou de plantations. Et nous on a un rêve avec Deb, depuis toujours, un rêve qui nous vient de mon vieux : posséder de la terre. Pour redevenir de vrais hommes. Vivre de la terre, dans une ferme. Avec le manque de bol d’être nés du mauvais côté du fleuve, là où les gens ont tellement peu de macadam à eux pour circuler que l’idée même d’un jardin c’est dingue comme de vouloir Pluton. Je me dis : si les pleins aux as planqués qui regardent ce world game nous remarquent, on peut gagner et on s’en sortira, on aura notre terre, ou au moins peut-être les jardins des autres à cultiver. Deb elle a peur, mais de quoi je lui dis ? Pendant des semaines tu vas pas t’occuper de bouffer ou de dormir au sec, t’auras des habits, et même des potes avec toi ! Elle a peur, je sais pas moi, qu’on s’engueule, qu’on sache pas, mais qu’on sache pas quoi ? T’as vu le niveau des conversations dans ces putains d’endroits ? Y’en a trop eu. Y savent plus quoi inventer. Et nous on a la chance de pouvoir entrer dans LE nouveau concept. Faudrait être cinglé pour refuser. Elle dit que tout le monde couche avec tout le monde, moi je m’en fiche, je l’aime ma Deby, comme elle est, et si d’autres se la tapent, je m’en fous, du moment qu’elle me reste. Elle est belle. Je suis sûr qu’elle fera pousser des fleurs dès qu’on lui montrera comme que. Elle a des doigts d’ange.
Deb – (quartier où se trouve Yoah)
Yoah il a jamais peur de rien, c’est pour ça que je l’aime. Toute môme il m’a ramassée à la sortie de l’immeubleville, mes parents venaient de mourir d’une maladie interdite. On m’avait jeté hors des murs parce que je risquais de contaminer le reste des bâtiments. Ils ont brûlé toutes mes affaires, mes livres, mes poupées, mes robes ; j’avais cinq ans, mais j’ai compris tout de suite que j’irai jamais plus à l’école, ni à la foire, ni au cinéma. Fini pour moi les copines et les sucreries. J’étais dehors. J’étais damnée. L’extérieur je connaissais que par les vidéos, le froid je l’ai appris dès qu’ils ont refermé la porte, la pluie acide je l’ai connue dès que j’ai levé les yeux vers un ciel invisible. Maman disait toujours que la richesse des sociétés de nos immeublevilles c’est la solidarité, l’entraide et l’affection. « Ton IV c’est plus que ta cité », elle disait, « c’est ta famille élargie ». Tu parles. Un feu de mes parents. Une porte qui se claque. J’ai fait trois pas en pleurant parce que mes yeux piquaient à cause de la pluie. Je me suis accroupie sous une porte cochère et j’ai serré mes jambes entre mes bras pour ne plus trembler. Il n’y avait pas d’étoile. J’avais peur, on sait ce qui se passe dehors, ils mangent les enfants, ils violent les femmes, ce sont des diables, les extérieurs.
Alors la lumière s’est assombrie parce qu’une silhouette immense se tenait devant moi ...

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