107
pages
Français
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2013
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Ebook
2013
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Publié par
Date de parution
22 octobre 2013
Nombre de lectures
0
EAN13
9782764412077
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Publié par
Date de parution
22 octobre 2013
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EAN13
9782764412077
Langue
Français
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Du même auteur
La faute de Roy Dupuis, Montréal, Léméac Éditeur, 2010.
La mort de Blaise, Montréal, Léméac Éditeur, 2008.
Le souvenir blanc des Cyclades, Laval, Trois, 2005.
Les Saintes Marie de la mer, Montréal, L'Hexagone, 1997.
Entre l'aleph et l'oméga, Montréal, L'Hexagone, 1990.
Projet dirigé par Marie-Noëlle Gagnon, éditrice
Conception graphique : acapelladesign.com
Mise en pages : Andréa Joseph [pagexpress@videotron.ca]
Révision linguistique : Diane-Monique Daviau et Eve Patenaude
Québec Amérique
329, rue de la Commune Ouest, 3 e étage
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Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.
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Les Éditions Québec Amérique bénéficient du programme de subvention globale du Conseil des Arts du Canada. Elles tiennent également à remercier la SODEC pour son appui financier.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Mercure, Luc
La Mezquita
(Collection Littérature d'Amérique).
Texte en français seulement.
ISBN 978-2-7644-2520-6 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-1206-0 (PDF)
ISBN 978-2-7644-1207-7 (ePub)
I. Titre. II. Collection Littérature d'Amérique.
PS8576.E723M49 2013 C843’.54 2013 C2013-941358-8
PS9576.E723M49 2013
Dépôt légal : 4 e trimestre 2013
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés
© 2013 Éditions Québec Amérique inc.
www.quebec-amerique.com
À Yannick
Première partie
Itinéraires
1
Un éclair et une religieuse
Maria lui a ordonné deux fois de ne pas s’approcher d’elle ; il ne l’a pas prise au sérieux. « Tu vas me chanter : “Toréador, en garde”, peut-être ? »
Elle ne comprend pas ce qui s’est passé. Elle sort de la chambre, noue son foulard jaune sur ses cheveux, empoigne sa valise puis verrouille derrière elle la porte de sa maison.
Au bout de cinq cents pas, elle jette ses clés dans un puisard. Puis elle s’écroule.
— Ça va, madame ?
Maria n’a pas le souvenir des derniers pas qu’elle a faits. Le choc de sa tête contre le trottoir lui a permis de retrouver ses esprits. Ses esprits : elle en a donc plusieurs ? Que découvrira-t-elle encore d’elle-même qu’elle ne connaît pas ?
Il n’y avait aucun être humain dans son champ de vision au moment où elle a perdu conscience. De quel hasard a surgi ce jeune homme qui lui demande comment elle va ? L’a-t-il vue jeter ses clés dans le puisard ?
Elle essaie de lui sourire qui lui tend la main et l’aide à se relever.
— Vous êtes sûre que ça va ?
Maria n’a pas encore dit un mot. Pourquoi ce jeune homme lui pose-t-il à nouveau cette question comme si elle lui avait déjà répondu : « Oui, ça va » ? A-t-elle perdu la mémoire non seulement des secondes pré cédant sa chute, mais aussi de celles qui l’ont sui vie ? Non, puisqu’elle se souvient que le jeune homme lui a demandé, une première fois : « Ça va, madame ? » En répétant sa question, il veut lui suggérer de répondre : « Oui je vais bien », afin qu’il puisse continuer son chemin sans remords, sans se demander s’il n’aurait pas dû insister – il a insisté : il lui a demandé deux fois si ça allait – pour la conduire à l’urgence d’un hôpital, il y en a sûrement un pas trop loin, nous sommes dans une grande ville où les hôpitaux quoique débordés sont nombreux, et quel rendez-vous serait si important qu’il ne pourrait y arriver avec un léger retard pour avoir – peut-être – sauvé la vie d’une femme écroulée sur le trottoir ?
Il faut qu’elle parle au jeune homme pour le rassurer, qu’il puisse se remettre à marcher, l’esprit tranquille. Lui, il n’a qu’un seul esprit, elle en est sûre. Il doit suivre son chemin, son unique chemin, sans doute rectiligne, qui n’est pas le sien à elle.
— J’ai simplement buté à cause d’une faille – dans le trottoir, je veux dire.
Le jeune homme examine le trottoir à la recherche d’une faille, puis le visage de Maria. Elle n’a sans doute aucune blessure apparente, pas la moindre éraflure, aucun sang qui tacherait son fichu jaune.
— Vous êtes bien sûre que ça va ?
Maria lui sourit, hoche la tête. Le jeune homme s’éloigne, se retourne une fois puis, voyant que Maria se tient toujours debout, qu’elle a repris sa valise, qu’elle ajuste son fichu sur ses cheveux, poursuit son chemin.
Maria, debout sur le trottoir, ressent un irrépressible désir de dormir. Elle sait qu’elle ne doit pas s’y abandonner, se compte heureuse de ne pouvoir retourner chez elle où la tentation de s’étendre quelques minutes serait grande. Un petit coma de deux ou trois jours lui ferait pourtant le plus grand bien.
Enfant, elle est un jour tombée de bicyclette. Ce matin-là, sa mère qui s’en allait travailler lui a donné de l’argent pour qu’elle achète deux pâtisseries pour le repas du soir. « Des pâtisseries ? Un mercredi ? » « On va célébrer le départ de ton père. Jamais plus, tu entends, jamais plus il ne… Choisis les pâtisseries que tu veux. » Maria revenait de la boulangerie en tenant le guidon de sa bicyclette d’une seule main, l’autre serrant la boîte qui contenait un éclair et une religieuse. Dans un virage, elle a perdu l’équilibre et pour ne pas abîmer les pâtisseries, elle a lâché le guidon. Sa tête a heurté le trottoir – Maria ne se souvient plus si elle a perdu connaissance cette fois-là. Elle est remontée sur sa bicyclette, un peu sonnée mais soulagée que la boîte n’ait pas été défoncée. De retour à la maison, après s’être assurée que les pâtisseries étaient intactes, elle a senti le besoin de s’allonger ; elle s’est dit que c’était normal après le choc qu’elle avait subi. Elle est allée se coucher, s’est réveillée une heure plus tard. Maria a raconté l’incident à sa mère lorsqu’elle est revenue du travail. « Tu aurais pu ne jamais te réveiller ! » s’est-elle écriée, furieuse. Au souper, elle en a rajouté. « Tu trouves que ça valait la peine de risquer la mort pour deux pâtisseries ? Tu dois apprendre à te protéger, ma fille. Je ne serai pas toujours là pour le faire. » Sa mère l’a privée de dessert ; Maria s’est dit que dorénavant, elle ne confierait ses malheurs à personne.
Le jeune homme est disparu. Maria se remet à marcher, se rend jusqu’à la gare routière, monte dans l’autobus à destination de l’aéroport. Elle n’est pas absolument certaine que son passeport et son billet d’avion soient dans son sac, mais elle ne vérifie pas leur présence en y glissant la main. Pourtant, si elle a oublié l’un ou l’autre, elle ne raterait pas seulement un viol ou perdrait quelques centaines de dollars. De toute façon elle ne pourrait pas rentrer chez elle pour les récupérer.
Rater un viol. C’est bien ce qu’elle s’est dit.
À l’aéroport Maria présente ses documents au comptoir d’enregistrement, reçoit sa carte d’embarquement. 29A. On lui attribue une place côté hublot sans qu’elle l’ait demandée. C’est ce qu’elle voulait. Une fois assise, elle ne se lèvera pas de son fauteuil. Le vol a lieu de nuit, elle prendra un somnifère. À défaut d’un coma de deux ou trois jours, un somme de deux ou trois heures lui permettra de ne pas arriver à Malaga complè tement épuisée.
Malaga. De cette ville elle ne sait que le nom, celui d’un vin doux qu’elle n’aime pas.
Elle a deux heures à tuer avant l’embarquement. Elle franchit le contrôle de sécurité sans problème. On ne lui pose aucune question, on ne lui demande pas de retirer ses souliers, aucun signal ne se déclenche quand elle passe sous l’arche qui détecte les objets métal liques. Personne ne re