LA FILLE DU TRAIN
152 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

LA FILLE DU TRAIN , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
152 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Recueil de nouvelles inspirées de personnages réels, à la fois différents et semblables dans leur lutte pour s'adapter aux aléas d'une société qui ne pardonne pas et dont les histoires croisées s'entremêlent: Chadia accepte son sort parce que c'est ainsi; Camélia perd ses repères dans un délire absurde; Nermine lutte férocement pour s'affirmer face à l'imposture; Farid se révolte contre l'injustice, et d'autres personnages encore, empêtrés dans des situations aussi absurdes que cocasses. Tous ces personnages illustrent un quotidien outrepassant parfois la raison, un quotidien qui frise l'insensé.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2018
Nombre de lectures 20
EAN13 9789954744376
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LA FILLE DU TRAIN
Nouvelles© Editions Marsam - 2018
Collection dirigée par Rachid Chraïbi
15, avenue des Nations Unies, Agdal, Rabat
Tél. : (+212) 537 67 40 28 / Fax : (+212) 537 67 40 22
E-mail : marsamquadrichromie@yahoo.fr
Conception graphique
Quadrichromie
Impression
Bouregreg - Salé - 2018
Dépôt légal : 2018MO3903
I.S.B.N. : 978-9954-744-37-6 Fatiha El Galai
LA FILLE DU TRAIN
NouvellesDu même auteur
• L’identité en suspens, 2005,
Editions l’Harmatan - Paris et ARCI-Rabat
• Les enfants du destin, l’amour impossible,
2007, Editions Marsam
Couverture
Oeuvre de Aïssa Ikken 5
La flle du Train
Le train flait à toute allure. Les paysages se suivaient et se
ressemblaient. Aux villes et villages succédait la campagne où les
champs labourés depuis longtemps attendaient impatiemment la pluie.
C’était la saison des belles couleurs, la palette des bruns passant du
jaune au marron ravissait le regard. On apercevait, de-ci-delà, quelques
arbres dont les feurs commençaient timidement à pointer le nez. La
beauté de la nature faisait oublier le délabrement de certains lieux
habités. Mais de tout cela, Farid n’en avait cure. Dès le départ, il avait
sorti son travail qu’il avait déposé sur la tablette rabattue devant lui. Il
se félicita d’avoir choisi la première classe et du côté fenêtre, les autres
places ne disposant pas de plan de travail. En prévision du long trajet, il
avait prévu de terminer un texte relatif au reportage qu’il avait effectué
dans une région du sud de la France. N’ayant pas pu le rendre à temps
à son journal, il s’était donné ces quelques heures pour le parachever
et l’expédier. Bien sûr, les trains d’ici n’étant pas encore équipés du
wif, Farid avait pris soin de se procurer une clé 3G dès son arrivée à
l’aéroport.
La première fois qu’il est revenu au pays, après avoir passé de
nombreuses années à l’étranger, Farid a eu beaucoup de mal à se
réadapter. Après l’obtention de son diplôme de journaliste à Paris, il
avait trouvé un travail de pigiste dans un petit journal. Ce travail ne
nourrissant pas son homme, il avait dû se mettre à nouveau à la recherche
d’un meilleur gagne-pain. Après maintes et maintes tentatives toutes
plus infructueuses les unes que les autres, il trouva la poule aux œufs
d’or : journaliste dans un des plus grands quotidiens de la place. Il
fallait batailler incessamment pour prouver sa compétence, surtout
quand on est étranger, dans ce milieu où la concurrence est rude. Farid 6 Fatiha El Galai
était obnubilé par la volonté de bien faire. Il n’était pas question pour
lui de se laisser aller. Mais il ne regrettait rien puisque ses efforts et
son acharnement au travail avaient fnalement abouti. On lui permit
de faire des reportages. C’était son rêve. Bien sûr, au début, on ne
l’envoya pas trop loin. Les premiers reportages qu’il ft le menèrent
souvent dans les quartiers dits sensibles. Evidemment, on pensait
qu’il était le mieux placé pour ce genre de travail, vu ses origines.
Or, Farid n’avait pas grand-chose à voir avec ce milieu. C’était
deux mondes, deux univers complètement différents. Il dut d’ailleurs
l’expliquer plus d’une fois à quelques-uns de ses collègues qui avaient
la fâcheuse habitude de faire une totale confusion entre lui et les jeunes
de banlieues. Eux, étaient nés, pour la plupart, dans ces quartiers ; ils
étaient généralement issus de familles défavorisées et leurs parents analphabètes ; de par leurs conditions familiales, ils étaient en
échec à l’école ; et de par tous ces facteurs handicapants, ils étaient
rejetés par le reste de la société. Lui, n’avait rien à voir avec tout
cela. C’était vrai que son pays d’origine était sous développé et que
sa famille ne roulait pas sur l’or, mais ses parents étaient instruits et
exerçaient chacun dans son domaine, lui-même avait fait une brillante
scolarité et il n’était venu en France que pour faire des études.
Dès lors, son statut n’avait aucun lien avec celui des jeunes issus de
l’immigration. Il avait beau s’évertuer à tenter de faire comprendre
la différence, pour certains, la chose restait toujours obscure. A un de
ses collègues, sans doute le plus borné de tous, qui lui disait « bon,
ok, ok, tu n’es pas comme ça, mais quand même tu es musulman
comme eux… », Farid répliquait : « que vient faire la religion dans
tout ça ? c’est quoi cette manie de coller aux gens des étiquettes
en fonction de leur religion ?» Loin de dénigrer la banlieue et ses
habitants, au contraire, c’était là qu’il avait fait les plus intéressants
de ses reportages, Farid fulminait de colère devant la bêtise humaine.
Bien que développée, cette société regorgeait décidément d’esprits
bornés et ignorants. Il se trouvait même certains qui imaginaient le
Maroc comme un désert rempli de sable où le seul animal existant
est le chameau. Et Farid en avait rencontré. Aussi, quand on lui avait
demandé s’il voulait faire des reportages à l’étranger, ni une ni deux,
il avait sauté sur l’occasion. Fuir, s’éloigner de cette atmosphère La fille du train 7
malfaisante, quelle aubaine ! et c’est ainsi qu’il s’était retrouvé à
voyager de temps en temps pour couvrir certains événements. Et
c’est grâce à ses affnités avec le monde arabe, lui disait-on, qu’on lui
confait la plupart du temps les reportages ayant trait ou portant sur
ces contrées. C’est ainsi qu’il revenait de temps en temps au Maroc.
La rencontre internationale qu’il venait couvrir cette fois et dont le
thème ne l’intéressait pas spécialement lui permettait néanmoins de
revenir dans une belle ville qu’il aimait beaucoup et surtout de revenir
au pays de ses racines.
Farid tapotait sérieusement sur son clavier. Quand le train s’arrêtait,
il relevait la tête, cherchait du regard le nom de la gare, et se remettait
au travail. Il s’était donné environ quatre heures, la durée du trajet,
pour terminer. Côté téléphone, il était tranquille, personne ne pouvait
le déranger. Il éteignait son appareil dès l’atterrissage. Farid était
très économe et ne voyait pas l’intérêt d’investir dans un téléphone
puisqu’il le faisait déjà dans une clé 3G, ce qui lui permettait aussi de
communiquer par mail.
Le va-et-vient lors des arrêts ne le perturbaient pas, sauf quand
un passager passait parfois la tête par la porte du compartiment
et repartait aussitôt en s’apercevant que les lieux étaient occupés.
Mais cela n’arrivait pas souvent, la première classe n’étant pas aussi
fréquentée que la classe économique. Dans le compartiment, il n’y avait
qu’une dame d’un certain âge, qui s’était endormie après avoir bien
étalé ses affaires sur toute la longueur de la banquette, certainement
pour dissuader de nouveaux arrivants, y compris Farid qui occupait
la banquette opposée. Les premières haltes furent assez brèves. A
Casablanca, c’était plus mouvementé. Des énergumènes, encombrés
de paquets variés, ouvrirent brusquement le compartiment. Sans prêter
attention aux personnes présentes, ils inspectèrent les porte-bagages.
Apparemment satisfaits, ils s’apprêtaient à hisser leurs fardeaux
audessus des têtes des passagers quand Farid, incrédule, se leva et exigea
une explication. La dame, elle, dormait profondément. Les individus
étaient des commerçants qui s’approvisionnaient dans le nord et qui,
faute de place dans leur compartiment, dispatchaient leur marchandise
où ils pouvaient. Compréhensif, Farid avait tout de même exigé que
l’un d’entre eux restât en compagnie des bagages, au cas où le contenu 8 Fatiha El Galai
des paquets serait douteux. Pestant contre cette perte de temps, Farid se
remit aussitôt au travail en ignorant l’importun qui le remerciait. Le train
était reparti depuis quelques minutes, quand la porte du compartiment
s’entrouvrit discrètement. Une jeune flle chuchota des excuses en
direction des occupants avant de s’asseoir aux pieds de la dormeuse
qui prenait toute la place sur une banquette prévue normalement pour
quatre personnes. Comme si elle dérangeait, la jeune flle s’était faite
toute petite. Farid ne s’en occupait pas, il allait prendre du retard et il
n’aimait pas ça. Il avait décidé de ne plus s’interrompre, au diable les
importuns. Mais c’était oublier qu’il était dans un train et au Maroc. A
peine partis de Casablanca, la portière s’ouvrit à nouveau, sans aucune
délicatesse. « Café, thé, sandwich ? » demanda une voix nasillarde. Le
commerçant, bien évidemment, acheta quelque chose. Farid leva la tête
et se replongea sur son écran. Une fois la porte refermée, il dégustait
enfn la tranquillité et se disait qu’en se concentrant suffsamment, il
viendrait à bout de son texte. Hélas, la trêve fut de courte durée. Tout
le monde, y compris la vieille dame, avait sursauté quand la sonnerie
d’un téléphone avait retenti bruyamment. Et ce tintamarre venait encore
une fois du côté du fameux commerçant qui, sans aucun égard pour ses
voisins, s’était mis à hurler comme s’il voulait ameuter le monde entier.
Tout le compartiment, pouvait maintenant savoir exactement d’où cet
homme venait, chez qui il se rendait, pourquoi, quand, comment. Farid
et la jeune flle se regardèrent, incrédules. La vieille femme, qui n’avait
pas encore réagi, s’était tournée vers notre homme et l’avait regardé
méchamment pour lui signifer de baisser le ton de ses hurlements. Non
seulement il l’avait réveillée mais il agissait comme s’il était seul, faisant
preuve d’une impolitesse outrancière dont il ne se rendait même pas
compte. L’homme en imposait par son allure. Vêtu d’un costume d’assez
mauvais goût, une chemise qui laissait paraître un ventre bedonnant,
des chaussures à bouts pointus et recourbées, il devait mesurer au bas
mot environ un mètre quatre-vingt-dix. Sa voix de stentor exaspérait
les passagers qui n’osaient rien dire. Il parlait un mélange de berbère,
d’arabe et de français arabisé qu’on arrivait à comprendre aisément
malgré des termes que Farid mettait u

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents