Je vis dans le passé
272 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Je vis dans le passé , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
272 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

L'être humain peut difficilement se remettre de son passé. Celui-ci continuera à le hanter, de même que l'esprit qui est en lui. Les gens autour de lui ne le voient que comme un vestige et comme une extension de son passé. Les incidents, les erreurs, les insultes subies peuvent être oubliés par l'individu, mais les autres qui l'entouraient les lui rappelleront si nécessaire. Par-dessus tout, personne ne pardonnera les erreurs historiques.



À travers les voyages et les expériences que vit sa narratrice, l'auteur évalue le présent de Pondichéry, la ville coloniale de l'Inde française et d'Auroville, la ville spirituelle et universelle, par leur passé, avec un langage de post-colonialisme.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 mai 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414525423
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0075€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-52543-0

© Edilivre, 2021
« Le présent est jugé par le passé. »
- 1 -
25 mai 2018. Lieu : États-Unis d’Amérique, Californie, Aéroport de Los Angeles, Terminal 2, porte numéro 26. En milieu d’après-midi.
— Q ue penses-tu faire ? C’était la deuxième fois qu’elle me posait cette question.
Elle n’était probablement pas loin de moi. Ayant choisi un espace idéal et gardé une distance appropriée afin de bien l’entendre, elle me posa cette question, simple et directe et la réponse ne nécessitait pas beaucoup de réflexion. Si elle portait sur la “Vérité”, cela prendrait-il du temps pour répondre ? Peu importe. Ce qui me préoccupait, c’était le timbre de la question et son contenu, en quelque sorte comparables aux flèches venant de nulle part qui ciblent des cerfs affectueux broutant tranquillement dans une forêt ; voilà mon véritable dilemme. Elle me dit que je tentais de la passer outre, en faisant la sourde oreille. Elle répéta avec une ardeur renouvelée que nous, elle et moi, étions la même personne, ajoutant un petit détail pour préciser qu’elle en était le début et moi, la fin. C’est-à-dire qu’elle était Mira-1 et moi, Mira-2. Quelle ténacité !
Aujourd’hui, si je retrace mon passé, il est hallucinant ! Il est vrai que jusqu’à présent j’avais passé ma vie, même au grand jour, à rechercher l’obscurité et le brouillard au lieu de la lumière du jour et de l’air pur. Pourtant, malgré mon jeune âge, j’avais appris davantage de la vie en marchant sur des gravats et des éclats de verre. Bien que ma naissance ressemble à beaucoup d’autres, je suis sûre que ma mort sera différente ; ma vie ne se terminera pas par une perte de mémoire et elle ne me laissera pas déféquant sans m’en rendre compte ou respirant bruyamment à pleins poumons ; enfin, le toucher n’est absolument pas un moyen pour moi de reconnaître mes proches. Cette nuit-là, j’étais profondément endormie dans une maison d’hôtes à Auroville, près de Pondichéry, dans le sud de l’Inde. Au milieu de la nuit, je me réveillai avec la voix de la fille une fois encore, et qui me surprenait depuis un certain temps. Sans raison valable, pourtant je la suivis.
Après une longue marche, je me retrouvai seule dans une forêt dense, sombre et profonde. Je ne voyais pas les nids d’abeilles et n’entendais pas leur bourdonnement autre part. Croyez-moi, il n’y avait pas de bruits d’oiseaux comme ceux des pélicans, des bécasseaux, des hérons, des flamants roses présentés par Madhavan au lac Usuteri à Pondichéry, ou les oiseaux que j’avais eu l’occasion de voir à Auroville, moineaux, merles des Indes, tourterelles, perroquets ou pics. Où étaient-ils allés ?  Je me le demandais… Devant moi se trouvait une butte et, en poussant les buissons sur le côté, je montai plus haut et regardai : c’était horrible ! Même aujourd’hui la scène me reste dans la mémoire comme une nature morte. En me la rappelant aujourd’hui, je maîtrise si peu mes nerfs que je frissonne et tremble. À l’endroit où mes yeux s’étaient posés, je voyais un fleuve tel un être cloué au lit, l’eau stagnait, couverte de mousse et d’algues. Au bord, des corps épars de paons… Je redescendis comme une folle, le cœur battant, je les saisis les uns après les autres pour savoir s’ils étaient encore en vie et je compris qu’ils n’étaient rien d’autre que des carcasses. C’est exactement à ce moment-là que je sentis un souffle sur mon cou. Je tournai la tête, devant mon visage, il y avait une fille qui m’effleurait. Deux seins semblables aux miens me touchaient. Elle essaya de m’attraper, je me servis de toute ma force pour l’écarter, mais mes mains pivotèrent dans le vide. Il n’y avait personne. Tout à coup, une voix s’adressa à moi sur un ton assuré :
— N’aie pas peur ! Je suis la même fille que celle qui t’a parlé l’autre jour. Tu ne peux pas tolérer la mort prématurée des oiseaux, je comprends ta souffrance. Dans le monde d’aujourd’hui, toutes les personnes touchées par cette tragédie sont innocentes. Nous ne chassons que le bien en laissant le mal prospérer. Viens, on va réécrire les règles de la chasse, m’expliqua-t-elle.
— Quelle qu’en soit la raison, la chasse est une action injuste, non ? lui demandai-je.
— S’il y a un risque de perdre tous les cerfs, chasser deux ou trois tigres est raisonnable. Même les paons et les perroquets doivent avoir des canines pour déchirer les animaux sauvages. Nous savons l’importance de chasser la guerre par la paix et l’hostilité par l’amitié, eh bien notre chasse est identique.
Après cette réponse claire et satisfaisante, je dormis comme un bébé.
***
L e jour s’était levé. Je ne me souviens plus des traits du visage qui étaient apparus dans mon rêve, mais la voix douce, modulée, et l’explication qu’elle m’avait donnée me firent réfléchir. Je pensais que la relation entre la voix et moi était terminée et qu’il n’y avait aucune raison de continuer… Mais c’était le premier maillon d’une longue chaîne. Si cette voix était telle que celle que l’on entend dans la bouche de certaines personnes, on pouvait la suivre ou bien l’ignorer selon la manière dont on regarde son propriétaire. Or c’était une voix que j’entendais souvent dans ma tête, une sorte d’interrogatoire constant.
Tout avait commencé quelques semaines plus tôt dans un restaurant du Centre des Visiteurs d’Auroville à Pondichéry, dans le sud de l’Inde. C’était la fin de l’après-midi, j’étais sous le choc après la disparition soudaine et incompréhensible de mon amie intime, l’Américaine Jessica. J’attendais l’arrivée du thé vert que j’avais commandé il y avait quelques minutes. En face de moi, derrière la table, j’avais l’impression que la chaise bougeait et que quelqu’un s’était assis, mais je ne pouvais voir personne. Après quelques secondes :
— Que t’est-il arrivé ? Pourquoi as-tu une mine de déterrée ? me demanda-t-on.
La voix était une imitation de la mienne. La conversation entre elle et moi avait débuté ainsi. Je cherchai du regard la fille qui me parlait. Personne. Sauf une image abstraite dessinée par sa voix. Mes yeux parcoururent toutes les tables, il n’y avait toujours personne. Alors que je me dirigeais vers l’origine de la question en demandant :
— Qui est-ce ?
La réponse fut ferme :
— Moi ? Je ne suis rien d’autre que toi. En d’autres termes, je suis l’ombre de ton passé.
Êtes-vous confus ? C’est possible. Moi aussi j’étais confuse ce jour-là. Même aujourd’hui, je ne suis pas encore complètement rétablie. Je ne sais pas si ce “moi” d’aujourd’hui est le résultat de mon karma du passé, comme l’hindouisme le définit, mais la voix insistait sur le fait que mon “moi” du présent était l’unité de tous mes “moi du passé”. Chaque jour, à l’aube, je pense que je suis une nouvelle venue, libre de mes jours d’hier. D’un autre côté, tous ceux qui sont autour de moi, comme l’affirme la voix, s’empressent de me renvoyer à l’époque d’hier. Dans ce contexte, comme beaucoup d’entre nous, je suis aussi une prisonnière du passé. Alors, comment me libérer de ce passé maudit ?
— Disparais ! Pourquoi es-tu derrière moi tout le temps ? demandai-je avec une certaine nervosité.
— C’est mon devoir, dit-elle en ajoutant : je devais te le faire comprendre autrement. C’est ma faute. Voici ma question : que cherches-tu ?
Cette nouvelle approche me toucha et je dis calmement :
— Je ne le sais pas exactement, même si je crois chercher quelque chose depuis quelques jours.
— Crois-tu que l’on puisse chercher sans motif apparent ? Es-tu certaine de le trouver ? me demanda-t-elle soudain dans un éclat de rire.
Je ne m’attendais pas à ce que sa voix puisse mettre à nu ma stupidité. J’avais un peu honte. La défaite me coupa la voix. En imaginant que la jeune fille était devant moi, je restai quelques secondes la tête baissée. Cependant, ne voulant pas cacher mes sentiments, je répliquai brutalement en fuyant ses yeux :
— À ton avis, pourquoi on se lève, on change de tenue, on marche ? C’est ainsi que je cherche. En revanche, ce n’est pas ce que j’ai perdu que je cherche, mais ce que l’on m’a arraché, ainsi qu’à la personne qui l’a fait. En agitant le bassin de ma mémoire, je veux saisir l’alligator en vie, le jeter au bord et le lyncher.
— Enfin, tu viens là où je t’attends ! Mais pour capturer cet animal, il faudra faire attention, sinon l’aventure se terminera mal !
Je n’avais pas bien compris son avertissement. En même temps, cela ne pouvait pas non plus être ignoré, car c’était une voix qui avait de la compassion à mon égard et me proposait des solutions aux problèmes au fond de ma tête depuis quelques semaines. D’ailleurs, je sentais que la locutrice n’était autre que moi.
- 2 -
Les hommes et les femmes attendent d’entreprendre un voyage long et pénible. Eux aussi, comme moi, devaient être fatigués de leurs chemins habituels, des visages qu’ils croisaient tous les jours, des voix facilement reconnaissables et ils cherchaient donc de nouveaux trajets, de nouveaux visages ou de nouvelles voix. Bien que mon point de départ présentât évidemment une similitude avec celui d’autres voyageurs, ma destination n’était pas la même. J’embarquerais en effet, comme eux, à Los Angeles, USA, mais je débarquerais à Chennai, en Inde.
Deux heures plus tôt, j’avais pris un taxi à Pasadena en Californie, pour arriver à l’aéroport. Selon notre planification de la veille, mon amie Jessica devait m’accompagner jusqu’à l’aéroport et me dire au revoir, mais malheureusement la visite surprise de son oncle l’avait empêchée de le faire. J’avais également décliné la bonne volonté d’une amie de Jessica qui avait voulu la remplacer. J’étais donc partie seule dans un taxi. Sur le chemin, le c

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents