Interlope
388 pages
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Interlope , livre ebook

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Description

Énigmatique et métissé, voilà le monde dans lequel Julien essaie de trouver sa place.



Pour lui, les premiers jours du mois de janvier 2015 sont encore festifs et fortement alcoolisés. Il quitte l’obscurité d’un club gay, traverse Paris en suivant la trace d’Hassan, son meilleur ami, séducteur et cynique, pour atterrir dans un bar où il croise deux sinistres individus en pleins préparatifs d’un drame bientôt multimédiatisé.



Autour de lui évoluent les protagonistes d’un univers interlope : sa mère, mystérieuse et distante, sa grand-tante follement hippie, sa voisine anglaise un peu punk, un barman super sexy, Françoise Hardy et aussi quelques Flamands en route pour le carnaval. De rencontre en rencontre, suivant le fil de son histoire personnelle, Julien se livre en musique.



Ces quelques jours d’hiver l’amèneront à sonder les noirceurs de l’âme humaine et, successivement, à faire l’expérience de la haine, de l’amour et de la résilience.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 26 avril 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414523825
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
Immeuble Le Cargo 157, boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous nos livres sont imprimés dans les règles environnementales les plus strictes. Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction, intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-52383-2

© Edilivre, 2021
Exergue







« Créer n’est pas un jeu quelque peu frivole. Le créateur s’est engagé dans une aventure effrayante, qui est d’assumer soi-même, jusqu’au bout, les périls risqués par ses créatures. »
Jean Genet, Journal du voleur
« Il se livrait à la quête de ce Graal terni dans les bars, les saunas mixtes, les lavomatiques, les supermarchés et les fast-foods ouverts tard la nuit, où le gibier était maigre, mais la satisfaction immédiate. Il n’avait pas beaucoup de temps à perdre, se disait-il. La ménopause était pour bientôt ! »
Armistead Maupin, Nouvelles chroniques de San Francisco
0. Été 1982, « Body Language »
Une fois franchie la grille monumentale du château, on devine l’atmosphère hédoniste qui se dégage des lieux. Ici, la recette est un mélange de séduction brute, de musique qui prend les hanches et d’amour au grand air.
Une longue allée mène jusqu’au manoir XIX e siècle, dont la façade classique se niche au milieu d’un parc boisé. Les frondaisons des arbres centenaires s’élèvent bien au-dessus de l’allée de graviers pour souligner le prestige du domaine. L’ancienne maison de maître rappelle une époque révolue dans cette région ravagée par la crise industrielle. Devant le bassin en pierre où scintille le reflet des étoiles, une volée d’escaliers dessert l’entrée principale mais la petite troupe d’habitués contourne la demeure pour y entrer par le côté. Les conversations vont bon train, l’ambiance est joyeuse et les clients se hâtent pour rejoindre l’intérieur du Skyline . Quelques-uns vagabondent entre les voitures pour échanger d’impétueux baisers et, par la même occasion, des bouteilles passent de main en main. Un garçon portant des bretelles sur un t-shirt blanc adresse un clin d’œil à une magnifique poupée blonde – technique d’approche banale –, glisse un bras autour de sa taille et, plus téméraire, caresse la rondeur de ses fesses. L’accueil est ferme, volumineux, prometteur. La fille sourit.
Cette année, l’été fut particulièrement chaud, humide, poisseux, une rareté pour le sud de la Belgique qui connaît une température inhabituelle. La campagne flamande baigne encore dans une touffeur qui plaît aux noctambules enhardis par la douceur de la nuit. Bien après minuit, les allées et venues autour de la discothèque témoignent de leur intention d’en découdre avec la morosité d’un samedi soir dans une zone frontalière, quelque part entre Lille et Courtrai. La porosité de la ligne de démarcation autorise tout : les incursions des jeunes venus s’encanailler au-delà de leur territoire d’origine, les escapades entre clubbers sur les petites routes de campagne, la recherche de nouvelles expériences et, bien sûr, la consommation de shit distribué sous le manteau. Ici, le monde des adultes disparaît pour quelques heures merveilleuses.
Dans le parc autour du château, l’agitation souligne la vigueur d’une jeunesse toujours gourmande de nouvelles sonorités. Une musique industrielle typique du début des années quatre-vingt s’échappe des portes qui s’ouvrent et se referment sur les clients enthousiastes. Les rythmes sont froids, répétés, synthétiques. La mode n’est pas encore à la new beat ou à l’acid house mais les pulsations évoluent furieusement vers la techno underground dont le souffle balaiera les discothèques belges dans quelques années.
Au Skyline , à cette heure avancée de la nuit, la tension érotique est palpable, alimentée par un cocktail détonnant de musique, alcool et drogue. Ouvert quelques mois auparavant, le club connaît un succès remarquable, pile dans l’attente des jeunes Belges et de leurs voisins français. La fête est canaille, c’est ce que les clients apprécient, pas tout à fait sale mais franchement débridée. L’époque est aux plaisirs libres, sans entraves, délivrée du disco formaté des années soixante-dix et pas encore brisée par la pandémie du sida. Ce soir, la musique se diffuse en une succession d’impulsions chargées d’une sensualité brute qui envahit les corps et prend possession des esprits.
Écrasant sous ses ballerines en toile l’allée de graviers blancs, la Fille s’imagine en train de remonter l’allée d’un château où l’attend un bal digne du Grand Siècle. Comme elle est romantique, l’aspect sulfureux des lieux ne l’atteint pas. Au contraire, la proximité du Garçon qui l’accompagne et la chaleur de cette soirée d’été semblent la maintenir dans une douce rêverie. Bousculée par quatre individus énervés, elle s’agrippe à la rampe de l’escalier et se rassure une nouvelle fois dans le regard du Garçon. Elle lui tient fermement la main. Lui sait déjà qu’il est là pour draguer, comme la plupart des clients du Skyline . Mais pour elle, cette nuit, l’heure est aux sentiments exaltés et elle entend bien s’amuser avec le Garçon. Elle l’a rencontré à l’usine et cela fait quatre mois qu’elle le fréquente, d’abord prudemment, puis progressivement, aujourd’hui amoureusement.
Dans le grand hall tapissé de miroirs, elle remarque une clientèle de sa génération bien plus lookée qu’elle : les filles portent des chemisiers et les garçons des vestes sur des t-shirts. À vingt-deux ans, elle n’est plus tout à fait une princesse mais reste dans l’âge indécis d’une jeunesse refusant la maturité. Le Garçon a le même âge qu’elle mais paraît plus à l’aise avec le caissier qui les toise d’un air supérieur. Perché derrière son immense comptoir, il procède aux vérifications avec désinvolture et laisse entrer toutes les jolies gueules dans la discothèque. La Fille a bien vu que certains clients étaient mineurs mais l’ambiance est conviviale et l’accueil largement ouvert.
Contre les soixante-cinq francs de l’entrée, les deux amoureux se retrouvent avec des faux billets dans les mains, une poignée de « skyliners » rouges imprimés en guise de dollars fictifs. Il propose d’aller chercher quatre boissons : il vaut mieux commander plusieurs verres pour éviter de faire la queue, explique-t-il. Elle acquiesce, il a l’air de savoir ce qu’il fait. Des néons roses et bleus fixés à une maquette d’avion suspendue au plafond apportent quelques couleurs dans le hall immense. Elle hésite, perdue dans l’atmosphère saturée par les fumigènes, les éclairages fixes balisent le chemin devant elle. Contournant un escalier monumental en pierre, elle entre dans une salle aux dimensions incertaines, faiblement éclairée, et file directement se poser contre un mur pour observer la piste plus tranquillement. La clientèle se compose surtout de mâles très entreprenants avec les filles, de punks à crête décolorée, de danseurs enlacés et de corps anonymes électrisés par la musique. Pour exister près du bar, il faut être soit très beau, soit très excentrique. La Fille se demande dans quelle catégorie de clients elle se situe : normalement séduisante, pas assez dénudée pour être sexy, jolie sans excès et terriblement impressionnée par la faune autour d’elle. Pas assez excitante, donc, pas assez marginale non plus.
À l’autre bout de la salle, quelques clients se pressent pour accéder à l’étage par l’immense escalier d’où l’on observe les allées et venues. Une galerie suspendue comme un perchoir où la jeune fille devine des activités lubriques. Quelques crânes rasés brillent sous les spots et s’agitent au rythme des beats de plus en plus marqués. La jeune fille reconnaît une mélodie entendue à la radio, un titre de ce groupe anglais, Queen. Body Language . Sous les néons, les impressions du grand hall se mêlent aux images du clip qu’elle a vu à la télé : des peaux gainées de cuir, des bustes huilés et une pulsion sensuelle dans chacun des corps. Les quatre minutes du clip sont saturées de caresses, d’épidermes léchés et d’éclairages indirects, tout y est suggestif. Même elle, si naïve, l’a saisi. Les ambiances se superposent devant ses yeux, la réalité se perd dans la mise en scène vidéo et la musique achève de l’étourdir.
À présent, elle se demande où est passé le Garçon, il a disparu depuis de longues minutes et n’est pas revenu avec les boissons. Comme elle a soif, elle décide de le rejoindre au bar : sans doute fait-il encore la queue pour acheter un Pisang ou un Martini-orange. Elle adore les boissons sucrées, idéales pour bien commencer une soirée. Peut-être les quatre verres sont-ils compliqués à transporter ? Elle pourra lui apporter son aide et enfin trinquer avec lui. Cette nuit sera parfaite puisqu’elle l’a décidé : à vingt-deux ans, c’est sa première sortie en Belgique et le Garçon est charmant. Comme il est beau ! Elle n’a pas cessé de le répéter à sa tante qui la questionnait avec une curiosité excessive. Mais elle a l’âge des secrets et n’en a pas dit plus. Elle caresse son ventre pour sentir un peu la chaleur du Garçon et sa présence réconfortante. Sa peau lui manque déjà. Recoiffant distraitement ses longs cheveux roux, elle essaie de garder une allure apprêtée.
Dans la grande maison, la déco est d’époque : boiseries, moulures en stuc, colonnades et grandes cheminées. La clientèle habituée des lieux évolue nerveusement entre le hall et la piste, au gré des retrouvailles avec les nouveaux venus. Bien que curieuse, elle n’ose pas emprunter l’escalier pour rejoindre l’étage. Devant elle, des corps se balancent, des silhouettes s’étreignent avec ardeur, des couples se roulent des pelles, se défont et passent dans d’autres bras. C’est dégueu, se dit-elle.
Devant le bar, un rapide coup d’œil suffit à lui indiquer que le Garçon n’est pas là. Des verres circulent dans tous les sens, le barman ne sait plus où donner de la tête : inutile de le

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