Guillaume, dit Will
248 pages
Français

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Guillaume, dit Will , livre ebook

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Description

Quoi de plus aventureux que le cours de la Loire pour fuir la maison maternelle ? Au hasard de rencontres amies, ou adverses, toutes instructives, les chemins d'eau mènent Guillaume loin de l'Europe du XVIIIe siècle, jusqu'à être le nouveau citoyen d'une jeune république ; jusqu'à créer un village au plus profond d'une vallée de l'Adirondak...

Et qui sait ? Peut-être sera-t-il l'ancêtre d'une dynastie...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 31 mars 2017
Nombre de lectures 1
EAN13 9782334232210
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-23219-7

© Edilivre, 2017
Exergue

“When there is a will, there is a way”
Proverbe anglais
Merci à :
L’accent circonflexe,
Yvonne M. et Andrew D., mes professeurs d’anglais,
Aux « Encyclopédistes »,
A mes personnages pour lesquels j’ai une sincère affection,
A mon cher époux qui a patiemment attendu le mot « Fin »
A Tronsanges, juin 2016
Livre premier La Loire

Ce matin-là, la mère lui avait ordonné d’aller ramasser les œufs au poulailler ; en lui tendant le panier d’osier, elle n’avait pas oublié de lui rappeler de sa voix sans tendresse les quelques piécettes qui seraient récoltées le lendemain, à la foire du village. Depuis longtemps, Guillaume avait de moins en moins souvenance du goût savoureux des œufs gobés crus, la coquille percée aux deux bouts, le jaune onctueux répandu sur la langue… La mère réservait ces nourritures fragiles et délicates à quelque bourgeois à la santé chancelante, à la bourse ventrue, tout en en privant ses fils.
Le père était mort l’année de la petite vérole, qui avait vu Louis le Bien Aimé emporté pourri de cette maladie, faisant fuir les derniers courtisans de Versailles.
La nouvelle de la mort du roi avait mis longtemps à voyager à travers les provinces, propagée par les voyageurs du coche d’eau, les sergents recruteurs, les négociants en vins, en lin, laines et grains, et commentée en chaire par les hommes d’Eglise.
Les colporteurs de mercerie, les montreurs d’images, les rémouleurs tsiganes, tout un peuple itinérant voyageait au fil des saisons, au rythme du lointain cœur du Royaume de France, loin des guerres qui dépeuplait les provinces.
Restée veuve avec deux fils encore enfants, la mère s’était durcie, telle la toile de son devantier gris. Elle avait Jeanne pour nom de baptême. Le père qui se prénommait Louis en plaisantait souvent : il aurait préféré quelques monnaies d’or à ce prénom royal !
Guillaume tenait le sien d’un ancêtre de Normandie, venu par les rivières dans cette vallée où les garçons étaient mis sous la protection de Saint Martin et de son manteau partagé.
Thibault était né fort et beau ; cependant qu’il grandissait, tout un chacun au village s’était aperçu que le gamin était sourd et muet. Guillaume l’amusait de grimaces et de mimiques, de gestes expressifs aisés à déchiffrer. L’enfant apprenait ainsi à compter, à aider la famille dans les tâches quotidiennes. Il était à « l’écoute » du vent sur sa peau, à l’humidité de la rosée, à l’ombre apportée par les nuages, annonciatrice de l’orage. Sourd au chant des oiseaux, il l’était aussi au sifflement de la vipère, au piétinement des chevaux, aux cris d’alerte, au tocsin. Son aîné lui tenait la main dans le noir angoissant de la nuit.
La mère Jeanne avait insisté auprès du curé afin que Guillaume étudie quelques textes dans la Bible. Il apprit ainsi, à déchiffrer en échange de menues piécettes, offrandes au curé ; puis à y lire des histoires légendaires, comme celle de Salomon et de sa Reine noire, celle de David et du géant. L’Ecriture Sainte le faisait rêver d’anciens héros et de beautés lointaines, sensuelles et parfumées ; il lui était cependant ardu d’admettre les paraboles, les miracles et les mystères, et plus encore de les faire partager par son frère, terrorisé à la vue de ces violentes images sacrées, des gravures du Chemin de Croix.
Vers l’an 1000, l’édification d’un monastère avait nécessité l’ouverture de carrières de calcaire le long du grand fleuve. Pendant le règne des Henri, les affrontements religieux avaient ruiné les moines qui ne s’adonnaient plus guère qu’à la recherche des nourritures terrestres. Et depuis longtemps, la présence d’énormes escargots de pierre effrayaient carriers et sculpteurs, peu rassurés par les exorcismes, les prières et l’eau bénite.
La famille habitait depuis plusieurs générations une maisonnette adossée à la paroi d’une de ces carrières. La façade fermait une cavité servant de pièce commune. Un ancêtre y avait installé l’âtre, dont le conduit débouchait sur le coteau, au milieu d’une vieille vigne. Quelques ceps laissaient retomber leurs sarments sur l’auvent d’ardoises : ombre d’été, grappes en septembre ; on y travaillait à la lueur du matin, jusqu’au couchant, à trier les grains, meuler les lames des couteaux, ou se détendre après l’Angélus du soir.
En contrebas, le sol perdait son niveau et continuait en entonnoir ; emportant eaux de pluie, purins et boues, jusqu’au rivage.
Un appentis couvert de joncs abritait un âne, et quelques chèvres. Les récoltes étaient entreposées dans une ancienne grange couverte de tavaillons. Enclose d’un vigoureux roncier, la basse-cour s’efforçait de retenir les vagabondages volaillers. Fouines et renard venaient prélever quelquefois la plus vieille poule malgré ses alarmes.
Vers la fin de l’été, les mûres ravissaient bêtes et humains. La mère Jeanne fabriquait une boisson fermentée, aussi délicieuse que le cassis, et des tourtes cuites avec un soupçon de crème de lait. Les poules pondaient encore des œufs au jaune orangé, gavées de fruits, de vers et de limaces.
Au matin, Guillaume néglige d’enfiler ses sabots, attrape l’anse du panier et dégringole le sentier marneux, jusqu’à la barrière. D’un regard de chasseur, il repère les nids, traces encore tièdes du sommeil des volatiles, qui ne se risquent pas à se percher dans les ronces. Sa main rencontre l’œuf chaud, frais pondu, puis un autre, et ainsi continue sa récolte : douze poules, une douzaine d’œufs, nombre sacré pour la fermière !
Mais n’en trouve que dix ! Une angoisse lui serre le gosier ; se pourrait-il que la fouine, ou la belette y aient fait visite ?
La mère attend, vêtue pour aller au marché. Son regard va du panier aux yeux de son enfant. Elle se met à lui parler d’une voix telle les frimas de janvier, qui le fait trembler : elle l’accuse d’avoir gobé deux œufs ; il se raidit sous l’injustice. Toutefois, il sait déjà qu’il n’est pas utile qu’il s’en défende. La sentence en serait plus rude.
Elle lui a donné des tâches pour la journée : il lui faut nourrir les bêtes, sans oublier la truie ; donner du foin, des herbes coupées au pied des haies et quelques racines aux lapins ; réparer le harnais de l’âne ; fendre le bois qui finira son temps à la cuisson du pain.
Des sanglots de rage l’étouffent. Il sait que bientôt, il va fuir. Il sait qu’il en aura des regrets, sinon des remords, pour sa lâcheté de quitter le petit frère. Depuis longtemps, il a l’intuition que la mère pourrait bien désirer un nouvel époux. Il se pourrait qu’il se sente de trop, et n’accepte pas un inconnu au cœur du foyer. Non sans un serrement de cœur, sans en avoir trop conscience, il prépare son départ : d’abord, prévoir un peu de pain, une portion de fromage de bique, bien sec, quelques oignons, une tranche de lard, enserrés dans un des grands mouchoirs de cou du défunt père ; trouver une ficelle de chanvre assez longue, afin de porter ses sabots accouplés sur l’épaule ; chercher dans la malle aux habits l’ancienne pèlerine et le chapeau de feutre, avec lesquels, toutes couleurs usées, il passera inaperçu.
Quelques bricoles dans ses poches, qui lui seront d’un bon usage à l’occasion, du moins le croit-il. Sa chemise la plus propre, pour la politesse. Un reste de chandelle de suif. Et le bâton ferré qui aidait le père à mener les bœufs au labour.
Cela devrait suffire, il ne faudrait pas que son jeune corps de treize ans d’âge ne puisse supporter trop de charge.
Désormais, obstiné et pourtant tranquille, il prépare son bagage. Il a compris où et quand commencera la route, sans trop savoir jusqu’où elle le mènera. Il descend le sentier jusqu’au bord du fleuve. Cette nuit, dans l’obscurité du galetas, il a serré Thibault contre sa poitrine, sans pouvoir lui faire partager sa peine. Pieds nus, silencieux, il a dit adieu à ce paysage nocturne, à ces bruits familiers, le craquement d’une poutre, le bêlement rêveur des chèvres, le cri d’une chouette avant son envol. Il lui faut maintenant suivre le rivage à main droite par le chemin des mariniers. S’éloigner, avant les hésitations et les regrets.

Accoutumé depuis l’enfance à marcher les pieds nus, Guillaume avance dans la lueur de la lune montante, sur le ruban crayeux du chemin de halage. Cependant, ses pieds commencent à être douloureux. Pas question d’enfiler les sabots, trop sonores. Tremper les pieds dans l’eau fraîche ne ferait qu’en ramollir la corne. Ralentir la marche, prendre un peu de repos…
Au coude du fleuve, il repère brusquement une barque au cliquetis de sa chaîne d’attache ; la lueur et l’odeur d’un feu de bivouac qui s’éteint…
Le garçon se fige tout debout, ne sachant que faire : amis, ennemis, brigands peut-être ? Certainement pas gentilshommes !
Le ciel lui tombe brutalement sur le crâne ; à demi assommé, il parvient à comprendre qu’il a débusqué des braconniers de Loire, pêcheurs clandestins de saumons et d’anguilles, relevant nuitamment nasses et filets.
Prestement ficelé, le gamin, très fâché d’être réduit à l’état de salaison, est aussi vite bâillonné. Sur la barque à fond plat, une hutte bâchée abrite des pluies et des regards. Le jour vient. Chacun peut enfin scruter l’adversaire : d’un côté, un garçon imberbe, incapable de protester, un chiffon puant sur la bouche, de l’autre, trois hommes faits qui éclatent en un bon rire franc. Ils dénouent ses liens. Guillaume hurle, mais sa collection de jurons n’est pas à la hauteur, il s’en rend bien compte. Les pêcheurs ont l’air de comprendre son langage, mais lui leur découvrira une manière de communiquer bien étrange.
La bande a sacrifié un saumon, grillé sur le feu de camp rani

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