First Lady
125 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
125 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

C’est le jour de l’investiture. Florence gravit les marches du palais de l’Élysée. La voici, avec Jérôme, l’homme de sa vie, élevée aux plus hautes fonctions de l’État. Mais l’euphorie est de courte durée. Le soir même, la Première dame est plongée dans la tourmente. Très vite se pose la question de sa place et de sa liberté. Juliette et Marianne, la fille et la meilleure amie du Président, sont elles aussi aux premières loges. Cette victoire est un peu la leur. Elle va bouleverser leurs vies. Trois destins mêlés. Trois héroïnes qui vont devoir se dépasser. Et finalement se battre pour sauver le Président... ou se sauver elles-mêmes. Ce roman à thèse, écrit par une mère et sa fille, explore du point de vue féminin le lien entre pouvoir, amour et liberté – tout en nous entraînant dans une intrigue au suspense haletant. Coralie Miller, auteure de documentaires et metteuse en scène de théâtre, a notamment adapté la célèbre pièce Les Monologues du vagin, dont elle a dirigé une lecture avec trois femmes politiques : Marlène Schiappa, Roselyne Bachelot et Myriam El Khomri. Dominique Miller, psychologue clinicienne, psychanalyste, a enseigné à l’université Paris-VIII et a été directrice du Collège freudien. Elle est notamment l’auteure chez Odile Jacob de La Psychanalyse et la Vie. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 septembre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738148889
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE  2019 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4888-9
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À Aria et Luca, petite femme et petit homme de ma vie.
Coralie M.

À Aria, Léa, Luca, Margot, Noah et Sacha.
Dominique M.
« La femme n’existe pas. »
Jacques L ACAN , Le Séminaire. Livre XVIII, D’un discours qui ne serait pas du semblant
PREMIÈRE PARTIE
Un long dimanche de fiançailles
1

Elle se maquille. Un peu plus que d’habitude. Elle souligne ses yeux bleus par un trait de crayon marine, peigne ses cils avec ce mascara noir qu’elle vient de s’acheter. Pas de rouge à lèvres. « La bouche ou les yeux, il faut choisir », lui disait sa mère. Tiens, pourquoi je pense à maman tout à coup ?
Question cruciale : doit-elle mettre du fond de teint ? Elle n’en utilise jamais. Un simple coup de blush sur ses pommettes saillantes, et voilà. Mais aujourd’hui ? Il y aura des caméras et des photographes. L’événement réclame tout de même de l’extraordinaire. Déjà qu’elle n’a pas voulu prendre de maquilleuse.
Elle imagine cet éditorialiste qui se prend pour un poète : « Et ce front qui brillait comme un appel de phare, un SOS à la lueur d’une lampe torche, ne nous raconte-t-il pas le doute qui la tiraille ? Si elle doute, comment peut-elle l’aider à tenir la barre ? »
Tous ces regards posés sur elle.
Tous ces commentaires.
Bon.
Va pour le fond de teint.
Un texto. C’est Marianne.

— Pas trop le trac ?
— Terrible.
— Prends un Xanax, ça te détendra !
— LOL, comme dirait Clara.
— Ne t’en fais pas. De toute façon, quoi que tu fasses, ils te critiqueront.
— C’est supposé me détendre ?
— À défaut du Xanax… 
Alors, j’en suis où ? Ah oui, le fond de teint !
Est-ce qu’il faut vraiment que je mette du fond de teint ?
 
Ce ne serait pas elle. Ce n’est pas le moment de rompre avec son habitude. Masquer son teint naturel, au risque de se sentir si dissemblable à elle-même ? L’événement est beaucoup trop crucial pour qu’elle prenne ce risque. Au moins, qu’elle se reconnaisse. Elle a déjà suffisamment le sentiment de devenir une Autre ! Et puis pourquoi aurait-elle à se masquer justement aujourd’hui ? Les femmes doivent toujours être parfaites. Eh bien non, elle ne le sera pas. Ou du moins, elle le sera selon ses propres critères. Même aujourd’hui. Surtout aujourd’hui.
C’est décidé.
Pas de fond de teint.
 
L’interphone. Le chauffeur est arrivé.
Son cœur, soudain, pique un sprint. Elle souffle. Tout va bien. Elle pense à celles qui l’ont précédée. Si elles y sont arrivées… Pourtant, certaines en ont vu de toutes les couleurs. Les dernières surtout. Moquées, détestées. « C’est l’époque qui veut ça », lui a dit Jérôme quand ils en ont parlé. Sans doute. Mais si ça lui arrive, à elle ? Comment le vivra-t-elle ? Comment le vivront les enfants ? Ils n’ont rien demandé.
Elle se regarde dans le miroir. Elle a bien fait de choisir cette robe. Au moins, de ça elle est sûre. Avec Jérôme, ils se sont concentrés sur la question. Sujet crucial : comment devait-elle s’habiller un jour comme celui-là ?
— Tu vas transmettre un message, lui avait-il soufflé. Ta robe devient un uniforme d’apparat. Elle va dire qui tu es, et du même coup qui je suis. Elle sera mon étendard, que j’aurai approuvé, épousé même !
— Dix ans d’études, plus de vingt ans de carrière, et c’est ma robe qui sera ton étendard.
— La France est un vieux pays.
— Le monde est un vieux pays.
— C’est vrai que lui aussi va nous regarder…
Puis il l’avait enlacée, plein de cette douceur qui si simplement la rassure. Et lui fait accepter tant de choses.
Ce sera Alaïa. Elle l’a tout de suite su. De quoi dire sa modernité. Et garder un peu de sa liberté. Pas si sage, l’étendard. À son image.
Ce qu’elle ne lui a pas dit, c’est à quel point sa robe est un étendard pour elle aussi, comme pour bien des femmes. C’est un voile… qui affirme un « je suis ». Puisque l’apparence prime, autant se l’approprier. Être mince, tout en gardant des formes, c’est son programme depuis toujours. Son corps musclé et solide est une armure qu’elle doit entretenir. Rien ne l’en écarte encore à cinquante et un ans. Quelle discipline elle s’est imposée ! Manger peu, faire sa gym trois fois par semaine, courir le week-end, et l’été nager une heure le soir dès que possible. Ses amies s’en amusent, la jalousent en secret. Elle impressionne par sa constance et sa réussite. Trois enfants, la direction de tout un service de psychiatrie infanto-juvénile dans un grand hôpital de la banlieue parisienne, des sorties quotidiennes le soir pour des dîners en ville, des réunions médicales, des rendez-vous politiques, et toutes sortes d’activités culturelles. Et toujours impeccable, élégante, souriante, rayonnante même ! Imperturbable image d’une femme pour qui la féminité est naturelle.
Tu parles.
Cette petite robe Alaïa, d’un bleu qui fait ressortir ses yeux, est une enveloppe qui la maintient et la soutient en ce jour où elle doit être le soutien de celui qui va endosser la plus haute des responsabilités. Alors, à l’abri dans l’étoffe compacte et souple qui la cintre, elle croit s’assurer de son intégrité. Elle est une épée, bien au chaud dans son fourreau. Elle se sent belle. Solide. Être dans cette robe, c’est se constituer ou se reconstituer. Et aujourd’hui plus que jamais se faire exister.
L’heure tourne, il faut se dépêcher.
Elle enfile une petite veste, sobre et élégante. Son nouveau statut lui impose de ne pas être trop flamboyante. Une présence aussi imperturbable que discrète. Là, mais pas trop. C’est toute la subtilité du voile féminin : il faut suggérer, et non pas dévoiler ses formes. Toujours montrer et cacher, le difficile exercice d’équilibriste de la féminité. Au point d’ignorer parfois elle-même ce qu’elle cache. Et à qui.
Encore un coup de peigne. Son brushing est toujours aussi résistant avec Stéphanie, sa coiffeuse depuis toujours. Une complice, une confidente, qui sait dompter ses cheveux noirs souvent rebelles, sans les entraver. Juste ce qu’il faut pour que sa coupe reste impeccable malgré ses journées toujours actives.
Elle s’empare de son sac à main préparé la veille, avec ce qu’il faut pour pallier les urgences : son rouge à lèvres fétiche, le petit miroir de poche qu’elle a déniché sur un marché en Provence l’été dernier, un paquet de Kleenex, le stylo que son père lui a offert peu de temps avant sa mort. Et du déodorant – ne surtout pas oublier le déodorant !
 
— Les enfants ! On y va !
Clara, Alexandre et Antonia arrivent au pas de charge, visiblement prêts depuis déjà un certain temps. Fébriles et impatients. Que vous êtes beaux ! Il ne manque plus que Juliette qui, évidemment, a choisi de se préparer seule dans son coin et ordonné que l’on vienne la chercher en bas de chez elle. Telle la princesse qui attend son carrosse, a fait remarquer Antonia.
Alors que la tribu commence à s’engouffrer dans la berline noire aux vitres fumées, encadrée de deux voitures de police, son portable sonne. En parlant de princesse… Florence fait signe au chauffeur de l’attendre, et s’éloigne.
— On arrive, tu es prête ? … Juliette ?
— Tu pourrais au moins dire bonjour.
Rester impassible. Ne pas lui donner d’os à ronger. Surtout pas maintenant.
— Bonjour Juliette. Tout va bien ?
— Je veux être devant toi et tes enfants quand on traversera la cour. D’au moins trois mètres.
— Je ne sais même pas quoi te répondre.
— C’est ma place, c’est moi la première dans sa vie. La seule véritable. Vous, vous n’êtes que des pièces rapportées.
— Tu te rends compte de l’absurdité de ce que tu dis ?
— Antonia et Alexandre ont été livrés avec les meubles quand tu t’es incrustée dans notre vie, non ? Moi, je suis sa fille. LA fille. Sa vraie famille, c’est moi.
— Et Clara ? Ça te rappelle quelque chose ? Elle n’est pas de la vraie famille, elle ?
Silence.
Avec Juliette, Clara est toujours reléguée au silence.
Un silence de mort.
Florence ne lâche pas :
— De toute façon, le sujet est clos. Ton père tient à ce que nous arrivions tous ensemble, main dans la main. C’est un acte fort que de faire venir sa famille recomposée.
— Sauf que moi je ne suis pas recomposée.
— Eh si, Juliette, que tu le veuilles ou non, tu es dans le même bateau que nous.
— Tu crois que je ne vois pas clair dans ton jeu ? Tout ce que tu veux, c’est briller au milieu de nous, que tout le monde se pâme devant cette femme si belle et si forte qui porte cette grande famille vers la gloire. De quoi mettre une nouvelle gifle à maman. C’est ton moment que tu savoures, pas celui de papa !
— Pour quelqu’un qui me déteste, tu me connais mal.
— C’est pas très psy, ça, de parler de haine à sa belle-fille.
— J’ai parlé de détestation. Et aujourd’hui, je ne suis pas psy.
— Alors ça, j’aimerais bien le voir une fois dans ma vie ! Tout ce que tu fais est psy. Je suis sûre que même ta merde tu l’analyses avant de tirer la chasse.
— Ça suffit ! Est-ce que, au moins aujourd’hui, tu peux te taire, et faire ce qu’on te demande ?
— Direct, la dictature ! Elles vont être sympas, les cinq prochaines années avec toi à ses côtés.
Le problème avec Juliette, c’est qu’elle a hérité du même talent oratoire que son père. Jamais à court d’arguments.
Alexandre sort de la voiture. Florence le regarde, attendrie, comme si el

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents