Et si tout recommençait...?
104 pages
Français

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Et si tout recommençait...? , livre ebook

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Description

Qui est Man Tina ? Que lui est-il arrivé pour paraître si sombre aux yeux de tous aujourd'hui ? À travers sa rencontre avec le Capitaine Karmon qui cherche à élucider le mystère autour de l'étrange disparition de Léna, le visage de Man Tina se dévoile sous un nouveau jour. De la Martinique contemporaine, dont elle semble si détachée, à la Guadeloupe, en passant par l'Hexagone ou encore la Colombie, Tina nous fait voyager, remonter le temps, levant ainsi le voile sur une vie pleine de rebondissements, traversant une époque tumultueuse faite de révolutions en marche et de bouleversements des sociétés. "Et si tout recommençait...?" dresse le portrait d'un personnage de l'histoire "Le jour se lève à nouveau", précédente nouvelle de l'auteur parue avec un second récit, "Soléna d'hier et d'aujourd'hui".

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 mars 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342159677
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0049€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Et si tout recommençait...?
Nadi Cade
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Et si tout recommençait...?
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
 
 
Retrouvez l’auteur sur son site Internet : http://nadi-cade.societedesecrivains.com
 
Man Tina, le regard plongé dans le vide, était cependant bien ancrée, cette fois, dans la réalité. Elle repensait à la visite que lui avait rendue le Capitaine Frantz Karmon, au sujet de la disparition de cette jeune fille. Elle en était sûre, il la croyait. Il ne prenait pas cet air condescendant, de pitié ou encore apeuré, comme tous les autres. Ceci dit, il lui en fallait sûrement plus que la vue d’une pauvre vieille prétendue folle pour lui faire peur, étant donné son métier. En tous les cas, lui, il l’avait écoutée, avec attention, et son regard à la fin de l’entretien en disait long. Dieu sait, pourtant, si les représentants des forces de l’ordre étaient une espèce tenue à distance ! Mais celui-ci avait quelque chose de sincère, une bienveillance rayonnait et transparaissait dans sa voix. Cependant ce n’était pas gagné, de lui faire prendre cette histoire pour argent comptant. Au bourg, elle avait bien essayé de les prévenir, tous ! De ne pas traîner à la nuit tombée car la chabine viendrait les chercher un par un, les ensorcelant de son regard devenu rouge comme le sang, signe de l’emprise du diable. Mais aucun n’avait voulu l’écouter. Tous pensaient qu’elle divaguait encore, grâce ou à cause du petit décollage du matin.
Mais justement, ce matin-là, en arrivant au Colibri , le patron avait dû ranger le petit verre qu’il lui destinait par habitude.
« Donne-moi un café, Harry ! Aujourd’hui, au bout de quinze ans, il est peut-être encore temps de changer de voie ! avait-elle murmuré sourdement.
— Eh bien ! Man Tina, tu m’en vois rester coi et secoué pour la journée ! Si ce n’était pas pour changer, je te dirais que ça s’arrose ! Tiens, je t’accompagne avec celui-ci, bien corsé, à réveiller un mort !
— Tu ne crois pas si bien dire, Harry. Tu ne crois pas si bien dire. Écoute-moi…
Elle avait commencé à lui raconter cette nuit de folie et de terreur, puis, devant son air stupéfait, ahuri et incrédule, elle s’était arrêtée net.
— Mais continue, Man Tina ! Dis-moi la suite de ce cauchemar.
— Tu n’as donc rien compris, je te dis la vérité, c’est la réalité ! Préviens-les tous, elle sort la nuit ! Qu’il prenne garde, celui qui se trouve sur son passage. »
Elle avait déposé sa tasse brutalement sur le comptoir et était sortie précipitamment.
Harry ne savait que penser, elle le savait. Il ne croyait pas vraiment à toutes ces histoires qui perdaient de leur sens dans ce monde formaté et aseptisé d’aujourd’hui, et pourtant…
Elle avait l’air si fragile et si démoniaque dans le même temps, cette pauvre enfant. Que lui était-il arrivé ?
Après son départ, et après avoir surmonté sa peur, elle était restée longuement assise sur le bord de son lit, fixant le volet derrière lequel la créature avait fait son apparition. Cette nuit-là, une question était posée et revenait inlassablement heurter l’esprit son esprit. Comment savoir si ce n’était, au final, qu’un songe ? Elle avait bien entendu les coups, le claquement du volet sur le mur. Le vent ? À figure humaine ? Ou ce qui semblait en rester… Elle s’était baissée et relevée à plusieurs reprises. Peut-être y aurait-il une trace, une marque derrière la fenêtre ?
Courageusement, Man Tina s’était extirpée de son lit et, sans même se chausser, était sortie d’un pas furtif, s’engageant sous la véranda pour atteindre, par l’extérieur, la fenêtre de sa chambre. Sur les lattes de bois, elle avait découvert des traces de pas, des empreintes de pieds nus laissées par de la terre. Celle du jardin ? Non, celle du cimetière car, à n’en pas douter, cette jeune fille venait de là. Le jardin était arboré, à cette période, de massifs couverts de fleurs. Au sol s’étalait une pelouse grasse et verte malgré le temps sec, traversée de chemins en gravillons menant aux différents parterres et au perron. Ces marques ne pouvaient venir du jardin.
Dans ce qui semblait être un demi-sommeil, un sourire fendit soudain son visage figé. Il témoignait d’une autre pensée fugace qui la surprenait elle-même.
« Je vais mener l’enquête dès à présent ! Les ténèbres ne me font pas peur », s’était-elle dit courageusement, jetant un regard autour d’elle.
Le sifflement matinal du colibri venu conforter son raisonnement paraissait lui apporter son approbation dans une discussion improvisée.
« Tu verras, mon petit, ils seront obligés de m’écouter », lui avait-elle répondu en se dirigeant vers l’intérieur de la grand-case.
« Dieu seul sait où se trouve cette petite, à l’heure qu’il est, avait-elle encore pensé. Je suis sûre qu’elle est encore parmi nous, qu’elle peut revenir. Elle peut et doit être sauvée. Je ferai ce qu’il faut. Je l’ai déjà fait. »
Dès le lendemain, Man Tina avait commencé à alerter la population, apostrophant les gens dans la rue. Prenant d’abord le ton de l’annonce d’une catastrophe imminente, elle s’était plus tard ravisée, décrivant la jeune fille comme un être en perdition qui avait besoin de leur aide.
S’étant remémorée les événements de cette étrange nuit, et la visite du jeune Capitaine, Man Tina se leva promptement. Elle était bien décidée à garder les idées claires afin de mener à bien cette mission qui s’imposait à elle comme une évidence.
Elle alla cueillir ses citrons verts afin de se préparer une limonade et confectionner ses glaçons à l’aide du jus et des zestes, de façon à être certaine de pouvoir s’en servir un verre dès que l’envie d’un rhum ferait son apparition. Le tout étant naturel, elle n’avait aucun scrupule à râper la peau du citron et à l’incorporer dans ses glaçons. D’un pas agile, elle explora le jardin, à la recherche des citronniers portant les meilleurs fruits, et remercia au passage cette nature généreuse qui subvenait à ses besoins.
Au fond, elle se sentait aujourd’hui… bien mieux !
J’ai encore de bons restes, se dit-elle en s’activant alors que le soleil dardait l’espace arboré de ses rayons puissants à cette heure de la mi-journée.
Tout en rentrant et en se mettant à l’ouvrage, les sensations de cette agilité imprégnaient son corps. Les souvenirs de ce temps où, danseuse, puis chorégraphe professionnelle, elle parcourait des kilomètres en car, à pied, pour donner ses cours et transmettre son art, refaisaient surface. De formation classique, par volonté de sa famille, elle avait acquis cette grâce incontestable qui l’avait toujours caractérisée. Pas très grande, mais d’une allure féline et royale, Tina semblait alors glisser sur les parquets cirés où elle évoluait, se métamorphosant lors des galas et des spectacles donnés.
Ayant terminé sa préparation, Man Tina se servit un grand verre et éprouva le besoin de se laisser glisser sur cette vague d’émotions anciennes en prenant place sous la tonnelle, dans son rocking-chair favori en compagnie du petit colibri.
Lentement, comme une longue ascension en spirale, les images revenaient, se faisant de plus en plus précises, claires, limpides.
Les scènes en Martinique, puis en Guadeloupe, et plus tard à Paris.
Livio, en 1966. Elle était jeune alors, ce n’était que le début. La petite troupe qu’ils avaient montée en Martinique avait bénéficié du timide élan de l’époque. Ce n’était pas encore la grande aventure de l’époque d’Aimé Césaire et du SERMAC des années soixante-dix. Non, juste les prémices.
Une volonté commençait à émerger, la culture pour tous, celle pour nous, les anciens colonisés, mais parvenaient aussi à la surface d’autres mouvements en parallèle, moins réjouissants, des revendications plus violentes. Tout cela en fonction du point de vue que l’on adoptait alors.
Comme cela paraissait lointain et cependant tellement d’actualité aujourd’hui encore.
C’est ce qu’elle se disait, le peu de fois où, décidant de revenir sur terre, elle allumait la radio pour écouter les dernières informations de ce monde.
Le visage de Livio s’imposa brusquement à travers la brume de son esprit, occultant les autres moments de toutes ces années. Il ne lui apparaissait pas comme toutes ces autres fois. Longtemps elle s’était demandé si elle dormait ou était éveillée lorsqu’il lui disait :
— Ce n’est pas grave, je suis là, vraiment dans cette vie avec toi. Regarde-moi, pour preuve ! 
Et de cette façon si incompréhensible, il commençait, il commençait à défaire les bandages qui formaient son enveloppe, celle qu’elle avait tant aimée.
Sous celle-ci, ses os, s’agitant en mouvements secs, articulant ce corps dans le présent.
—  Pour preuve , répétait-il doucement.
Cela semblait si incongru, mais tellement rassurant.
Ils parlaient longuement et lorsque les yeux ouverts dans le jour du monde prétendu réel, elle y repensait, se demandant où il était passé, elle se disait qu’au fond c’était possible.
Le tout étant de savoir dans quelle réalité elle voulait évoluer !
Longtemps, elle n’eut qu’une idée en tête : voir arriver la fin de journée, poser son corps fatigué et ne pas trop vite se réveiller !
Man Tina se prit le visage entre les mains. Peut-être était-ce là, la raison de ces petits rhums au fil de la journée… pour… oublier.
Livio ! Il avait assisté à l’un de ses spe

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