À ma terre - Tome 1
166 pages
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À ma terre - Tome 1 , livre ebook

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Description

15 décembre 2017 – 15 décembre 1362.
Discussion entre le passé et le présent. Discussion entre l’ici et l’ailleurs. Discussion entre la terre qui supporte les corps et la mer qui supporte les âmes. Le premier tome de la trilogie À ma terre est une mise en abyme du texte et du concept d’identité, par le biais de l’aventure, de la romance et de la fantasy. Un premier roman pour Manon Larraufie, qui se situe à la frontière entre deux mondes, deux époques, deux vies, deux femmes que tout oppose. Une histoire qui mène à une oscillation complexe entre néoréalisme et nouvelle fiction, et qui s’inscrit indéniablement dans la veine des sagas contemporaines de fantasy historique pour jeunes adultes.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 janvier 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414186136
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-18611-2

© Edilivre, 2018
Dédicaces


À ma terre, et à celle des autres.
Exergue


Porque tenía miedo de las noches que le llenaban
de fantasmas la oscuridad. De encerrarse con sus fantasmas. De eso tenía miedo.
Pedro Páramo , Juan Ruflo
Note au lecteur
Ce livre n’est pas un roman historique. Ce livre n’est pas un roman sentimental. Ce livre n’est pas un roman d’aventure. Ce livre n’est pas un roman fantastique. Mais il est peut-être un peu tout cela à la fois.
Je ne prétends pas écrire un texte qui restera gravé dans les mémoires de la littérature française de ce début de vingt-et-unième siècle. Je ne prétends pas non plus écrire l’un de ces best-sellers dont regorgent les librairies et les réseaux sociaux.
Je ne suis pas une écrivaine. Je suis une femme qui écrit. J’écris pour les autres, mais aussi, et surtout, pour moi-même. Je ne vois pas en l’écriture une quelconque fonction thérapeutique, un moyen de me faire connaître ou encore de gagner ma vie.
Si ce roman vous distrait. Soit.
Si ce roman ne répond pas à votre horizon d’expectative. Soit.
J’ai toujours eu envie de créer des ruptures. Écrire la nouveauté est impossible. Rien n’est nouveauté. Tout n’est que citation. Et comme la rupture ne peut se faire en un jour, pardonnez cette ébauche de rupture.
Écrire est avant tout un besoin, mais il nous vient du besoin de lire. Je lis depuis toujours et je lirai jusqu’à la fin. L’écriture jaillit ensuite, telle une volonté irrépressible, et le besoin de créer un imaginaire fait alors partie de nous. Quand je n’écris pas je me sens vide, comme si un de mes organes vitaux s’était évaporé et ne savait comment revenir. J’écris depuis mon adolescence et j’écrirai jusqu’à la fin.
 
 
15 décembre 2017
Je supporte de moins en moins bien le bruit, la pollution, le gris. C’est surtout le gris je crois. La ville ce n’est que du gris, et moi je n’aime pas le gris.
En l’espace de six mois tout le monde est mort. Une amie, d’un cancer, puis ma mère, de sénilité précoce, un ancien petit ami de fac, d’un burn out et enfin mon voisin, de je ne sais trop quoi. Il ne me reste plus grand monde autour de moi. J’habite dans une ville d’un million d’habitants mais je me sens seule. Je loge dans un immeuble de cent deux appartements mais je me sens seule. Je vois des dizaines de personnes tous les jours au travail, mais je me sens seule.
Je n’ai que trente-trois ans mais j’ai l’impression d’être au bout de ma vie. Comme beaucoup de gens de ma génération, je suis célibataire, sans enfant, et le peu de personnes que je crois être mes amis me disent, quand je leur demande ce qu’ils prévoient pour la Saint-Sylvestre, « ah bah nous le Nouvel An on le fête entre amis ! ».
Je ne crois plus en rien. Je ne sais pas si c’est la crise qui nous a détruit, ou simplement nos parents, nés pendant le Baby-boom, ayant largement joui des Trente Glorieuses, et qui maintenant jouent aux papis ou mamies gâteaux et s’entêtent à continuer de travailler à soixante-dix ans, alors que nous nous n’avons pas de travail, doctorat en poche ou pas.
Peut-être finalement que si je suis seule, c’est que je veux être seule. Je suis jalouse des collègues de travail qui, pendant leur congé maternité, viennent au bureau présenter leur nouvelle raison de vivre. Et je ris au nez de celles qui divorcent, oui parce qu’après la raison de vivre, souvent on divorce.
J’ai pensé, un jour, me marier avec quelqu’un et avoir plein de bébés joufflus avec lui. Mais heureusement que je ne l’ai pas fait, parce que quand je le croise le samedi matin à la supérette bio, je me dis que dix ans après il ne m’aurait plus du tout fait d’effet.
Oui parce que je mange bio. Il paraît que c’est meilleur pour la santé, mais faudrait-il encore ne pas le mélanger à l’alcool et à la cigarette. Je ne bois pas souvent et je ne fume pas souvent, mais comme toute intellectuelle qui se respecte, il faut bien que je le fasse de temps en temps.
Enfin… je ne sais pas si je suis une intellectuelle. Je suis trop jeune pour en être une, mais trop vieille pour être une étudiante. À quel moment peut-on savoir si on est une intellectuelle ou non ? Je ne suis pas sûre que cela ait grand-chose à voir avec la notoriété, parce que les personnes ayant lu les premiers volumes de ma thèse se comptent sur les doigts d’une main. Mes deux directeurs de recherche, et peut-être, un jour, ma mère avait-elle lu les dix premières pages avant de s’endormir sur son fauteuil à bascule.
Thèse que je n’arrive d’ailleurs pas à terminer. Je suis en doctorat depuis huit ans maintenant. Beaucoup trop de temps pour une thèse, loin d’être assez pour pouvoir écrire tout ce que j’ai envie d’écrire.
Maintenant que je ne donne plus de cours à la fac, que j’ai vidé mon bureau et remballé les monticules de livres qui encombraient la pièce, je vais pouvoir enfin me concentrer pour écrire. Il y a quelques semaines je me suis rendu compte que je n’arrivais plus à rabâcher toujours les mêmes choses aux étudiants de première année. La plupart se réorienteront de toute façon, les autres redoubleront. Et puis, sans doute, les autres professeurs en avaient marre de moi, de ma mine décrépie tous les matins, de mon thé bio à la menthe, de chaque mini dépression quand on m’annonce la mort d’un proche. Quand ça a été ma mère, bien sûr, ils ont compris, mais avec toutes les autres en si peu de temps, ils commençaient à croire que j’étais mythomane.
Aujourd’hui j’ai décidé que j’allais faire mes bagages, le plein de ma voiture et que j’allais rentrer chez moi. Chez moi, pas ici, dans le gris, mais là-bas, dans ma maison d’enfance. Là-bas, ce n’est pas gris. C’est vert. Et c’est bleu. Parce que, comme disait Godard, entre le gris et le bleu, il y a le vert.
Quand je me regarde dans le miroir de la salle de bain j’ai envie de pleurer. Peut-être ai-je été jolie un jour, mais aujourd’hui je ressemble à une larve qui se traîne dans le métro, puis dans son trente mètres carrés, puis dans le métro, dans son trente mètres carrés, et encore dans le métro… En m’observant je me suis rendu compte que j’avais absorbé la couleur de la ville. Mon teint est gris, mes cheveux châtains sont devenus noirs et ternes, mes habits sont gris et noirs, mon sac à main est gris. Même dans l’appartement tout est couleur de ville, la télé est noire, l’imprimante est noire, le frigo est gris, les rideaux sont gris. L’odeur de la ville a réussi à s’immiscer dans les interstices des fenêtres. Partout on peut sentir le gris de la ville, le métro, la fumée, la rue, le plastique, le métal.
J’ai besoin de voir du vert et de sentir du vert. Alors je pars.
 
 
15 décembre 1362
Cet hiver me paraît plus rude que les précédents. La neige s’installe doucement depuis plusieurs jours déjà et aucun rayon de soleil ne semble vouloir la faire disparaître. Le château des Castelnau, seul, s’élève au-dessus de la brume. La pierre rouge de l’édifice incendie le ciel telle une flamme qui navigue sur la mer.
Peut-être que quelque part quelqu’un m’observe. Depuis la cour il est peut-être possible de m’apercevoir, une petite silhouette perchée au sommet du donjon, la tête haute, le regard perdu dans l’horizon. J’ai conscience de me tenir là depuis un certain temps, comme un drapeau que l’on aurait brandi après une victoire. Je sens mon cœur battre à chaque fois que le vent me fouette le visage et soulève mes longs cheveux. Parfois j’ai la sensation qu’ils se sont imprégnés de la couleur de la pierre et qu’ils ont pris des reflets cuivrés, mais mon imagination me joue sûrement des tours. En observant les terres qui s’étendent à perte de vue tout autour, chaque pan de colline, chaque champ autrefois labouré, chaque maison autrefois habitée, je peux sentir le sang du Quercy qui coule dans mes veines. Derrière moi, deux drapeaux cinglés par le vent du nord s’élèvent vers le ciel, celui du Quercy et celui des Plantagenêt. Une envie irrépressible de déchirer et de brûler ce dernier m’envahit chaque fois que je me tiens à côté. La guerre est une mauvaise chose, elle fait pleurer des femmes et détruit des terres. Elle est comme la peste, elle se répand vite et quand elle finit par s’arrêter, c’est qu’elle y a déjà laissé trop de victimes.
Je m’appelle Eleanor de Castelnau Calmont, dernière de ma fratrie, la seule fille d’Hugues III et de sa troisième et dernière épouse. Je suis orpheline depuis quelque temps déjà. Seule contre tous, c’est cette terre de feu qui me permet de garder la tête haute, de sourire aux visiteurs du château, de m’habiller chaque matin comme si j’allais rencontrer des gens importants au cours de la journée. Peut-être qu’après tout je ne ressemble pas aux autres femmes de mon rang. Je manie l’épée comme mes frères et c’est en parcourant les vallées du Haut-Quercy à cheval que je me sens libre, indépendante comme un soldat sans attache, mais qui, pourtant, ressent le besoin de retourner souvent sur les terres de ses ancêtres.
L’air, toujours cruellement solitaire, envahit la campagne qui se déploie sans fin sur l’horizon. Je sens ce vent féroce, farouche et éternel qui m’enveloppe de sa solide étreinte. Quand il sursaute, mes cheveux se lèvent comme pour avertir une quelconque âme égarée de ma présence. Quand il s’apaise, mes cheveux retombent sur mon visage et me cachent les yeux. Je ne vois plus rien et pourtant mes sens se décuplent. Je sens le froid qui m’envahit et fige mes os, j’inhale l’odeur âpre de la rosée, j’entends les pas qui se pressent dans la cour et une petite voix, dans un recoin de mon cerveau, qui me chuchote de descendre.
J’inspire lentement, humant l’air frais comme s’il s

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