1492. Il est des nôtres
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Description

3 août de l’an de grâce 1492, Palos, Andalousie. Juan et ses trois compagnons devaient partir pour les Indes, mais leur nuit de beuverie en décidera autrement. Pour eux, ce ne sera pas l’Amérique, mais l’Armorique. Après tout, « l’aventure, c’est l’aventure ». Adieu l’Espagne, bonjour la Bretagne : les prémices de l’Union européenne ! Arrivés sur terre, les quatre garçons dans le vent créent le premier boys band de l’histoire, assistent à la création du festival de Crozon, et croiseront un certain Leonardo, artiste pizzaiolo à ses heures perdues. Entre les apéritifs généreux, les débats syndicaux et la saison touristique, Juan rencontrera la belle Marianne, pour le meilleur et pour le pire...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 décembre 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748396232
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

1492. Il est des nôtres
Gérard Bodénès
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
1492. Il est des nôtres
 
 
 
 
I
 
 
 
3 août de l’an de grâce 1492, Palos, ville d’Andalousie, sud de l’Espagne. La nuit termine péniblement son quart, le jour s’apprête à prendre la relève. Le carillon sonne cinq heures, les gens ont des frissons et claquent des dents.
Le vent est frais, il fait un froid de canard à ne pas mettre une cuisse dehors. Une forte agitation règne dans les bas-fonds de la ville, surtout dans le port. C’est un véritable branle-bas, tout le monde est sur les quais et sur les ponts. Chacun s’active à embarquer le nécessaire suffisant pour un long périple. Les trois caravelles, Santamaria, Pinta et Nina dépassent la charge autorisée. Les normes de sécurité ne sont pas respectées, le contrôleur ferme les yeux. La veille, l’amiral Colomb et les deux frères Pinson ont recruté l’équipage. Celui-ci n’a pas pu être trié sur le volet du fait du manque de candidats. L’amiral a un projet fou, il veut traverser l’Atlantique pour rallier les Indes. Personne n’est revenu d’un tel périple, ça ne se bouscule pas au portillon. Le voyage n’est pas de tout repos, il peut y avoir de mauvaises rencontres. Le climat s’avère redoutable et la route maritime est hérissée de malfaisants. Il y a toutes sortes d’objets flottants identifiés comme des bateaux pirates. Pour attirer l’aventurier, le recruteur fait des promotions non négligeables. Le service est allégé, et en dehors de celui-ci, la ration de tafia est à volonté. L’engagement porte sur l’aller simple, le marin profite rarement du retour. L’heure est enfin venue de recenser l’équipage. Tout le monde est présent ? Non. À l’appel des palefreniers et des mousses, il manque quatre engagés…
 
Des bruits sourds et lourds de sabots sont accompagnés de chants marins. Ils réveillent les habitants qui, les yeux fermés, dorment du sommeil des justes. Les énergumènes sont bras dessus, bras dessous, des flacons dans les mains. L’heure est grave, ils tentent désespérément de rejoindre leur embarcation. Il y a du vent dans les voiles, bien souvent contraire, qui retarde leur avancée. Noirs, ils ont fait la nuit blanche en arpentant les divers débits de boisson. Le quatuor a fêté dignement son engagement vers des nouvelles aventures. Les gérants tenanciers se frottaient les mains en voyant arriver ces lascars. Mais, leurs cheveux avaient viré au blanc quand ils les voyaient repartir. Les tavernes n’étaient plus qu’un spectacle de désolation après leur passage. Une simple réflexion, ou juste un mal entendu, pouvait déclencher une rixe.
Hommes d’honneur, ils régalaient au final l’assemblée par une générale. Puis, requinqués, ils repartaient de plus belle, en sillonnant la rue de la soif. Avec toutes les ardoises générées, ils auraient pu couvrir une bâtisse entière. L’intégralité de la solde y est passée, il ne leur reste plus un sou vaillant. Normalement, le chemin le plus court est la ligne droite, mais pas toujours. Les hommes pratiquent tant bien que mal le slalom en arpentant les ruelles. Comme quatre chiens dans un jeu de quilles, rien ne résiste à cette tempête. Sans discrétion, ils renversent les poubelles qui retardent la marche en avant. Par chance les chemins sont étroits, ils ne connaissent ni chutes, ni fractures. Les bordures des maisons évitent ainsi une inflation dans les arrêts maladie. Ils pourront surtout honorer leur mission sans connaître la honte du forfait. Attirés par l’odeur, les chiens errants les suivent, à l’affût des restes de repas. En effet, pour éviter les afflux de maux de ventre, les hommes se vidangent. Au plaisir des animaux, ils siphonnent l’estomac avant de se réapprovisionner. Le foie est à rude épreuve, le niveau de vin absorbé est visible par le gosier. Ils adhèrent au principe de la goutte de trop qui peut faire déborder le vase. Comme les vessies se remplissent vite, ils doivent faire des haltes fréquentes. Ils baptisent alors les façades, tout en urinant loin pour ménager leurs sabots.
 
Les randonneurs ont un grand moment de solitude quand ils arrivent au port. Dans l’horizon pas si lointain, ils voient uniquement l’arrière des caravelles. L’issue est radicale, ils se trouvent de fait dans la position des déserteurs. La réglementation ne plaisante pas sur le sujet et les sanctions sont sévères. Ils risquent une lourde peine et ne plus profiter du soleil avant longtemps. Selon le jugement, ils peuvent être jetés dans l’arène, en pâture aux lions. Ou alors, ils subissent le supplice du sel et de la chèvre en place publique. Si la décision est clémente, ils gagnent un séjour nourri et logé en cellule. Les coupables veulent réparer, mais sans finances, la négociation est délicate.
En compensation, ils proposent leurs services au premier navire en partance. À bord, la boisson est à volonté, ils préfèrent sans hésiter la gnôle à la geôle. C’est la roulette russe pour la destination future, mais ils n’ont pas le choix. De toute façon, ils sont à la rue et à quai, plus rien ne les retient en Hispanie. Ils ont tout vendu, maison, terre et cheval, pour gagner le nouveau monde. Le capitaine par intérim, un cousin éloigné de Colomb, accepte le marché. Il leur dit cependant qu’il ne prend pas la route de l’Ouest vers les Canaries. Le tracé monte par le nord en contournant les côtes portugaises et françaises.
 
C’est la première intervention du destin pour ces jeunes en culotte courte. Les compagnons de fortune, et d’infortune, ont de la bouteille et fière allure :
Négociant l’affaire, Juan évite les longs discours pour ne pas être découvert. Lucas son cadet, Fredo et Oscar, pas encore majeurs, lui doivent le respect. Ils sont palosiens, de cœur ou de corps, en fonction des escales des marins. Ils prennent non pas la direction des Amériques, mais celle des Armoriques. La voilure est donc changée, sous le principe : « l’aventure c’est l’aventure ».
 
 
 
II
 
 
 
Avec des signes extérieurs d’ivresse, ils gagnent précautionneusement la coupée. Il serait de mauvais goût de débuter le métier en bénissant un matelot à la mer. Par superstition, Oscar pose délicatement et en premier le pied droit à bord. Fredo suit comme une ombre et embarque tête baissée sous la casquette. Puis, les deux frères, peu fiers, ferment la marche, en cachant leur tangage. Le quatuor tente de faire illusion pour ne pas donner de regrets au recruteur. Fin connaisseur, le capitaine n’est pas dupe et voit de la gîte dans leur allure. Il se rappelle sa prime jeunesse, ferme les yeux sur l’état manifeste d’alcool. Pour l’ambiance, le pacha apprécie la scène, préférant gérer des bons vivants. Il doit connaître ses sbires et prend la longue-vue en les examinant un par un.
 
Proche de la vingtaine, Juan semble propre sur lui et a la tête sur les épaules. Grand de taille, il sent l’air frais des hauts, plutôt que la pollution des sols. Il dépasse tout le monde d’une tête et connaît quelques soucis pour se vêtir. En avant-garde pour la mode, il porte par nécessité des pantalons courts. Brun, ses yeux couleur « automne » s’harmonisent avec un teint rougeâtre. Celui-ci est la conséquence de siestes excessives issues des sorties festives. Sans crème, les rayons ravageurs du soleil ont laissé un souvenir indélébile. Il a une inclinaison pour les boissons vendues dans les débits du même nom. Il n’a déjà plus toutes ses dents, les dentistes n’ayant pas de pignon sur rue. Juan n’est pas franchement beau, mais il n’est pas vraiment laid non plus. Il dispose d’un certain charme qui lui permet quelques prises dans son filet. À tout instant, il use et abuse d’un sourire naturel, tirant sur la provocation. Ses mimiques sont ironiques et narquoises, quand il se moque discrètement. Elles peuvent tirer sur la goguenardise, quand il veut blesser ouvertement. De caractère entier, sa langue n’est pas dans la poche, réservée à sa main. Il se froisse avec les gens qui se prennent, ou le prennent, trop au sérieux. Ne pouvant dire noir quand il pense blanc, il ne doute jamais de ses valeurs. Il claque ainsi souvent la porte en présence des gens qui vivent d’apparence. Gai, il préfère rire des événements plutôt que d’avoir un jour à en pleurer. Sa principale joie de vivre repose sur la vision du soleil avant et après la pluie. Avec un humour particulier, son cercle d’amis est fort restreint, mais fidèle. Il est souvent entouré de joyeux drilles, toujours favorables au dernier verre. Son avenir a basculé un soir avec ses amis lors d’une longueur en comptoir. Euphoriques, ils ont signé un pacte pour effectuer ce voyage au long court.
 
Lucas, le demi-frère par sa mère, lui ressemble comme deux gouttes d’eau. En y regardant plus près, la première est plus ressemblante que la seconde. Plus petit par la taille et par l’âge, il est le cadet de la famille recomposée. Ingénieux, il aurait pu aller loin s’il n’avait eu de mauvaises fréquentations. Don naturel reçu de son père, il a des mains en or, contrairement à son frère. Elles se mettent en action pour défendre son honneur ou celui d’une belle. Si une rixe explose lors d’une soirée, Lucas est souvent au cœur de la mêlée. Le nez en garde un souvenir à jamais, ayant fait les frais d’un coup déplacé. Un contrat sur la tête avec les gens du voyage, il y a urgence de fuir Palos. C’est pourquoi, il met de la distance en signant pour un séjour sans retour. De la génération 74, il a fêté ses dix-huit printemps, comme Fredo et Oscar.
 
Fredo est le plus agité

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