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À l'âge de quatre ans, un drame a bouleversé la vie de Keir. Seule une petite fille aux mains collantes et aux poches pleines de bonbons saura l'apaiser au point de lui faire tout oublier. Des années plus tard, alors qu'il s'apprête à rejoindre les rangs de l'IRA, comme ses parents avant lui, l'Irlandais doit quitter Belfast. Parce qu'il fuit. Belfast. Sa famille. Ses idéaux.
Voilà maintenant dix ans que Keir s'est reconstruit un semblant d'existence loin des siens. Mais le destin n'épargne jamais un Kinsella. Un événement tragique l'oblige à repartir dans sa ville natale. Là-bas, rien n'a changé. Ni les conflits. Encore moins la violence. Et surtout... surtout, elle. Seena. Sa soeur. La seule qu'il ait jamais désirée. La seule qui lui soit interdite. Entre une famille qu'il ne connaît plus vraiment, l'IRA toujours active et le poison de ses sentiments envers Seena, Keir devra, une fois de plus, faire un choix.
"Des vérités, il y en a à la pelle, mo fairy. Toutes différentes. Pour blesser. Pour aimer. Pour tuer. J'en ai une pour chaque jour avec toi. Sans toi. Parce que chaque pas est une agression. Chaque geste, une torture. Une bataille dans la guerre que nous menons."
***
— Ne recommence pas comme lorsque nous étions ados. Ne me fuis pas en couchant avec elle.
— Il n’y a rien entre nous, Seesee.
— Il y a toujours eu un nous, Keir, je le corrige du tac au tac. Il y aura toujours ce nous. Je suis épuisée de faire semblant. En être conscients et le combattre sont deux choses différentes... Tu es là depuis seulement quelques heures, et je n’en peux déjà plus de...
Je ne termine pas ma phrase, la laisse en suspens dans ce silence hurlant qui nous étouffe.
— Je serai certainement reparti dans...
— Justement. Je te perdrai. Encore.
Il soupire, ses doigts broient ma hanche, tapissent mon derme de chair de poule. Après une seconde de réflexion, il me colle rapidement sur le front un baiser chaste avant de s’éloigner de moi d’un pas.
— Si je ne la baise pas, il ne te touche plus jusqu’à mon départ, souffle Keir, ses iris aussi sombres que les miens.
***
Milyi Kind
Northman Rhapsody
ISBN : 978-2-37652-213-3
Titre de l'édition originale : Northman Rhapsody
Copyright © Butterfly Editions 2019
Couverture © Droniou - Adobe Stock
Tous droit réservés, y compris le droit de reproduction de ce livre ou de quelque citation que ce soit sous n'importe quelle forme.
Cet ouvrage est une fiction. Toute référence à des événements historiques, des personnes réelles ou des lieux réels cités n'ont d'autre existence que fictive. Tous les autres noms, personnages, lieux et événements sont le produit de l'imagination de l'auteur, et toute ressemblance avec des personnes, des événements ou des lieux existants ou ayant existé, ne peut être que fortuite.
ISBN : 978-2-37652-262-1
Dépôt Légal : Décembre 2019
20191312-1200
Internet : www.butterfly-editions.com
contact@butterfly-editions.com
Aux paillettes. Et au chocolat. Surtout au chocolat. Tout est sa faute.
« Le chocolat est bien évidemment la matière dont sont faits les rêves. Des rêves riches, noirs, soyeux et doux qui troublent les sens et éveillent les passions. » Judith Olney.
Bref. Je mange beaucoup trop de chocolat.
Tri rudan a thig gun iarraidh : an t-eagal, an t-eudach ‘s an gaol.
Trois choses arrivent sans être conviées : la peur, l’amour et la jalousie.
Proverbe irlandais.
Avant-propos sur le conflit Nord-Irlandais
Le conflit nord-irlandais a débuté à la fin des années 1960 et est considéré comme terminé. Il s’agissait d’un mouvement pour les droits civiques et contre les discriminations que subissait la minorité catholique. Ces troubles divisaient les républicains (principalement catholiques) désirant l’indépendance de l’Irlande du Nord, d'une par,t et les Loyalistes d'autre part.
Le but des Républicains, comme se revendique l'IRA, est de mettre fin à l'autorité britannique en Irlande du Nord et de créer une République irlandaise sur l'ensemble de l'île.
Toutefois, la violence continue, mais de façon plus occasionnelle et cachée. La plupart des groupes paramilitaires ont déposé les armes au profit de la politique. Cependant, certaines « cellules » – particulièrement celles composées par de jeunes membres – perdurent et entraînent des violences comme à Belfast ou Derry en prônant le combat par les armes.
C’est pour séparer ces deux communautés et éviter les heurts que Belfast est littéralement coupée en quartiers distincts par ce que l’on appelle des « murs de la Paix ».
Ici, Keir Kinsella, sa famille et les leurs appartiennent au camp républicain et sont partie prenante dans une cellule se revendiquant de l’IRA.
PS : Au cas où certaines auraient l’impression de connaître les titres de chapitres… bien vu ! Ce sont tous des titres de films ! J’adore entremêler mes passions.
- 1 - N'oublie jamais
Belfast,
Keir, 4 ans
J’ai quatre ans. Je suis un grand garçon maintenant, a dit Maman avant de me cacher dans le placard de sa chambre, celui où elle m’a appris à jouer au roi du silence. C’est drôle de se réveiller pour s’amuser à chat en pleine nuit et en pyjama. Même Papa participe, pour une fois.
Alors, pourquoi elle pleure ?
Et puis, normalement, je suis puni si je vais là. Papa y range des choses qui ne sont pas pour les enfants, mais je ne sais pas quoi. Il ne veut jamais le dire. Je suis trop petit. Et je dois me mêler de mes affaires. Pas des siennes.
Alors, pourquoi aujourd’hui je peux ?
J’ai perdu une dent, hier, c’est peut-être ça... La petite souris a déposé une grosse pièce sous mon oreiller pour me récompenser de pas avoir pleuré. Mes doigts sont tout collant de confiture à l’abricot. C’est ma préférée, et quand personne ne me voit, je tire une des chaises de la cuisine pour aller en manger. Si je salis les belles robes de Maman, Papa me mettra une fessée. Alors, je les garde au fond de mes poches comme m’a montré oncle Niall. Parce que c’est comme ça que les garçons ont l’air cool... même si je suis pas sûr de savoir ce que ça veut dire. Mais bon, lui, tout le monde assure qu’il est fun... La porte s’ouvre encore. C’est Maman. Elle est belle avec ses cheveux d’or comme les princesses. J’aime bien les contes, faut pas le dire : c’est un secret. Si je veux être l’homme de la maison, je dois pas faire la fillette. Elle se penche, m’embrasse le bout du nez comme elle le fait tous les matins et tous les soirs. Sa main douce caresse ma joue.
— Je t’aime, mo Fairy...
J’ouvre la bouche pour répondre, mais elle pose le casque de son Walkman sur ma tête sans me laisser parler et enclenche la musique. Du rock. J’aime ça. J’aime danser avec elle dans le salon et qu’on fasse les fous pendant que les yeux de Papa roulent parce qu’on l’agace. C’est pas vrai. Je vois bien moi qu’il sourit, et puis, il finit toujours par rejoindre Maman et lui faire des papouilles en passant la main dans mes cheveux pour y mettre le bazar. La cassette démarrée, elle referme la porte en me faisant un petit signe, l’index sur sa bouche. Je m’accroupis sous son gros manteau. J’aime pas ça, par contre. Il fait trop chaud et la laine, ça gratte. Puis j’ai envie de faire pipi. Si j’attends trop, j’arriverai plus à viser et je veux pas m’asseoir comme les filles... c’est trop nul. Tout à coup, la porte s’arrache.
J’ai quatre ans. Et je sais. Je sais pas vraiment quoi sauf que je dois avoir peur.
Et je hurle.
Ooo
Il me tient par la main. Trop fort. Il me fait mal. On est devant la porte d’une maison, et tout ce que je sais, c’est que je veux Maman et Papa. Mais je les verrai plus. Il dit que je vais avoir une nouvelle famille. Ou que je serai bientôt dans un trou. Parce que les cochons vont en enfer. J’ai pas compris. Moi, j’ai juste froid et faim. Je le regarde encore. Il fait peur avec ses cheveux noirs et toutes ses cicatrices sur la tête. Même sa barbe, elle est pourrie. Il entre sans frapper. C’est pas poli, ça... mais je me tais. On dirait un peu chez moi. Ça sent comme quand Maman fait des gâteaux pour le goûter. Une dame est là. Elle se baisse pour me regarder droit dans les yeux. Elle a l’air gentille. Alors, je décide qu’elle, je l’aime bien.
— Il s’appelle Keir. Tu le places où tu veux, mais à toi de garder l’œil sur lui, Deirdre.
Le sourire sur sa figure me fait du bien dans mon cœur surtout que sa voix à lui, elle ressemble à celle d’un chien qui aboie. Mais j’ai quand même faim. Elle se relève et répond. Je comprends pas tout sinon que je vais rester avec elle et sa famille. Parce qu’elle a un coup d’âme pour moi. Mes épaules se haussent. Je veux juste manger. Boire. Faire pipi aussi avant de mouiller mon pantalon et récolter une trempe. Ils m’oublient, et je sais pas quoi faire. Quelque chose m’accroche. En fait, c’est quelqu’un. Quand je regarde ma main, je vois des petits doigts mêlés aux miens. Une gamine. Moi, je suis un grand. Elle, c’est un bébé. Riquiqui Girl. Elle a des cheveux et des grands yeux noirs avec une petite bouche toute rose. Et surtout, elle a une sucette... trop la chance ! Mon ventre gronde.
— Tu veux jouer ?
Comme dit ma Maman à moi, elle gazouille.
— T’es qu’un bébé. Je joue pas avec les bébés. Je suis grand, moi, je lui explique, sérieusement.
Elle me tire la langue avant de sourire et de me montrer sa poche. Elle a même pas toutes ses dents.
— Mais, moi, j’ai des bonbons... chuchote la petite fille.
— T’as gagné, je viens.
Elle se met à rire. C’est joli, on dirait des oiseaux qui s’envolent... enfin, je crois.
— Je gagne toujours.
Ooo
Belfast.
Keir, 10 ans.
La porte de ma chambre s’ouvre à la volée en rebondissant contre le mur. Je soupire quand je vois mon microbe de sœur sur le seuil. Elle, elle a encore fait une bêtise. Ses joues sont aussi rouges que les coquelicots dans le jardin et son regard fuit le mien. À se dandiner comme ça, je sens que, cette fois, elle a bien cafouillé. J’ai peut-être que dix ans, mais lorsque ça la concerne, je sais. Ma cadette est une peste doublée… d’une peste. J’enlève mes écouteurs et balance mes pieds hors du lit afin de m’asseoir. Exaspéré, je glisse mon Walkman sous mon oreiller. Avec elle, je ne peux jamais être tranquille. The Cure attendra. De toute façon, si je l’ignore, elle continuera encore et encore jusqu’à retenir enfin mon attention.
— Qu’est-ce que tu as encore fait, Seena ?
— Rien...
Elle hésite à m’avouer sa bourde et, ça, ça sent très mauvais. Mes doigts passent dans mes cheveux blonds pour les lisser en arrière. Dès que je suis stressé, ce vieux tic revient. C’est-à-dire toutes les nuits. Quand ces cauchemars embrumés me poursuivent.
— S’il n’y a rien, va voir Braedan. Allez jouer les moustiques, et laissez-moi tranquille.
Je vais pour me rallonger quand ses yeux s’agrandissent de peur. Ils s’écarquillent tellement qu’on dirait qu’ils lui ont mangé le visage. Je me lève et me plante devant elle.
— Je répète, Seena. T’as fait quoi ? Encore ?
Ses petites mains enroulées l’une autour de l’autre s’entrouvrent, et j’aperçois avec horreur le collier préféré de Maman. Cassé. La chaîne est rompue et les perles répandues dans ses paumes.
— Tu vas être punie à vie, ma vieille ! je m’exclame en reculant, craintif.
Ses paupières clignent plusieurs fois de suite pour chasser les larmes qui s’amoncellent. Oh, non de non ! Punaise ! Je vois tout de suite où elle veut en venir... À chaque fois elle me fait le coup ! Une bêtise et qui répare derrière Seena ? Keir.
— Pas cette fois, ma p’tite ! Tu te débrouilles !
— Elle va me fesser, geint-elle, en reniflant.
— Ouais. Plutôt deux fois qu’une même. Tu vas plus pouvoir t’asseoir pendant au moins une semaine, c’est certain.
Pleure pas... Non, pleure pas... et vlan ! Elle chiale comme un gros bébé.
Soudain, j’entends les pas de Maman dans l’escalier. Elle monte les marches quatre à quatre en rouspétant si fort que les poils de mes bras se dressent. Sans réfléchir, j’arrache le collier de ses menottes et le serre si fort que j’en ai mal aux paumes. Notre mère se campe devant nous, les poings sur les hanches. Son regard furax fait