284
pages
Français
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2022
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Ebook
2022
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Publié par
Date de parution
28 avril 2022
Nombre de lectures
1
EAN13
9782414573745
Langue
Français
Julie, cadre trentenaire dans une agence de communication, collectionne les amours malheureuses avec des hommes de passage puis confie ses déboires à sa collègue Marion, mariée et mère de deux fillettes. Elle ne sait plus quelle fable inventer depuis que son amie lui inspire un sentiment qui dépasse la simple connivence professionnelle. Elle tente de lutter contre cet amour naissant qui la trouble et la submerge, mais sa volonté s’effrite et elle se trahit au cours d’un week-end.
Pour les deux femmes commence alors un parcours d’introspection au cours duquel, au gré de leurs expériences et de leurs rencontres, elles apprendront à porter un regard différent sur l’existence, l’amour et la sexualité avant d’assumer leur identité et de bouleverser leurs vies enracinées dans une société encore paralysée par les médisances et la bienséance.
Publié par
Date de parution
28 avril 2022
Nombre de lectures
1
EAN13
9782414573745
Langue
Français
Couverture
Copyright
Cet ouvrage a été composé par Edilivre
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com
Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.
ISBN numérique : 978-2-414-57375-2
© Edilivre, 2022
Julie
Chapitre 1
Le nez sur son écran, Julie aperçoit Marion passer en trombe devant son bureau. Elle se lève et se précipite à sa porte vitrée.
— Marion, tu t’en vas ? On se voit à la danse ce soir ?
— Je ne sais pas trop encore, je suis à la bourre. J’ai une urgence avec l’OPA 1 sur P'tite Com’, et je dois rendre mes commentaires au boss demain matin. En plus, je dois partir dans cinq minutes pour récupérer les filles à l’école, les faire manger et les mettre au lit. Un véritable marathon, alors s’il faut en plus que je prenne le métro pour aller au studio…
— Je vois… Mais essaye de venir quand même parce que Raul a prévu de nous enseigner un nouvel enchainement… et une surprise.
— Ah bon ? Quel genre ?
— Aucune idée, mais tu connais Raul, ça sera certainement una terrible sorpresa.
— D’accord, je fais ce que je peux. Au pire, je demanderai à Romain de m’accompagner. À plus !
Julie retourne s’asseoir à son bureau, balayée par le cyclone qu’elle a tenté de faire dévier de sa trajectoire. Elle soupire. Pourquoi un tel acharnement ? Elle sait qu’elle ne doit rien espérer, et pourtant elle ne peut s’en empêcher. Plus elle côtoie Marion, plus elle l’aime. Et plus elle l’aime, plus elle souffre. On ne tombe pas amoureuse. Pas d’une femme. Pas d’une femme mariée et mère de deux jumelles de quatre ans. Strictement interdit. Verboten . Estrictamente prohibido . Non par la morale dont elle n’a que faire, mais par la loi de la vie, par le bon sens et par elle-même. Elle ne veut pas s’engager sur un chemin tortueux aux obstacles trop nombreux. Et en supposant que Marion partage cette folie, elle ne quitterait jamais son mari et ses enfants pour vivre cet amour inepte. Non, bien sûr que non. Quant à elle, elle ne pourrait plus se regarder dans un miroir si elle devait provoquer un drame familial, la rupture d’un couple, la séparation d’une mère d’avec ses enfants. Elle se ressaisit. Rien de tout cela ne se produira jamais, et pourtant, elle ne peut s’empêcher d’échafauder des scénarios aux problématiques éthiques inexistantes.
***
Julie occupe un poste de responsable marketing dans une agence de communication spécialisée dans les nouvelles technologies, Web@com. Au début des années 2000, les start-ups et microentreprises poussaient comme des champignons et faisaient appel à l’agence pour monter leurs plans de communication. Les collaborateurs, débordés par tous ces nouveaux clients, ne pouvaient plus prospecter ni gérer les dossiers en cours. Pour faire face à cette demande croissante, la direction a alors pris la décision de recruter un autre responsable marketing qui travaillerait en étroite collaboration avec elle.
Quelques jours après la parution de l’annonce dans la presse spécialisée, le défilé des candidats potentiels a commencé dans les bureaux de Web@com. Dès que l’un d’eux passait la porte de l’agence, il était jaugé par Pauline, l’hôtesse d’accueil, qui transmettait ses impressions à Julie par téléphone. Celle-ci informait immédiatement tous les collaborateurs, et avant que le pauvre bougre n’ait atteint le bureau des ressources humaines, l’équipe avait déjà analysé le C.V., évalué ses chances et parié sur la longueur de l’entretien avec monsieur Bérot, le directeur. Les candidats se ressemblaient, plus fades les uns que les autres : des informaticiens aux lunettes sans contour qui portaient la cravate de leur père, ou qui s’accrochaient à leur mallette comme aux jupons de leur mère. Certains semblaient terrorisés, d’autres moins timorés, mais un point commun les réunissait, ils entraient dans le bureau du directeur le visage crispé et en ressortaient moins de dix minutes plus tard, détendus mais déçus.
Le jour où Marion a poussé la porte de l’agence, Pauline, surprise, a bredouillé « C’est une femme » à son réseau d’informateurs. Julie a alors entraperçu une tornade magnifique aux yeux verts et aux longs cheveux roux et bouclés filer chez le directeur. Les collègues, aussi surpris que Pauline, ont improvisé un conciliabule dans le hall en attendant le verdict. Quand, une heure plus tard, monsieur Bérot a enfin ouvert la porte pour la laisser sortir, l’assemblée s’est carapatée dans les couloirs comme des cloportes dérangés pendant un festin, feignant d’être concentrés sur un graphique ou simulant une conversation téléphonique.
L’entretien avait dû satisfaire monsieur Bérot, car il arpentait les bureaux avec sa nouvelle collaboratrice pour la présenter à ses chefs de projets. En une heure seulement, elle avait acquis la confiance du grand patron. Il vantait ses compétences et son expérience, mais nul doute que son physique avantageux avait facilité sa décision.
Marion Chatel, souriante, serrait la main de chacun des collaborateurs en écoutant avec attention les commentaires élogieux de monsieur Bérot. Il papillonnait autour d’elle, l’entrainant d’un bureau à l’autre, lui vantant l’ergonomie des postes de travail et la décoration fine et soignée du hall d’entrée. Pourtant d’un naturel réservé, il se montrait sous un nouveau jour, avenant et enthousiaste.
Il ne tarissait pas d’éloges quand il lui a présenté Julie. S’il pensait tout ce qu’il disait, elle devait lui demander une augmentation d’urgence.
Le directeur a expliqué à Julie que Marion – après quelques légères modifications de son contrat de travail – rejoindrait bientôt l’équipe, et il l’arrosait d’une pluie de compliments pour l’inciter à accepter sa proposition. Elle restait figée, silencieuse et quelque peu gênée, pendant qu’il déclinait ses compétences.
Quelques minutes ont passé avant qu’elles puissent enfin se saluer. Sa poignée de main ferme, oscillant entre souplesse et rigueur, révélait une personnalité franche, directe et sincère. Elles se sont souri et Julie a immédiatement su qu’elles deviendraient amies.
Monsieur Bérot a accéléré cette entente en désignant Julie comme sa mentore pour qu’elle lui transmette les méthodes de travail et le savoir-faire de l’entreprise. Marion écoutait patiemment et enrichissait les propos de Julie de ses propres expériences. En plus de sa plastique, elle faisait montre d’intelligence en toute situation.
Les mois passaient et leur collaboration s’intensifiait. Lorsqu’elles n’avaient pas prévu de déjeuner avec un client, elles se retrouvaient dans un petit restaurant de quartier au menu unique. Marcelle, la patronne, les gâtait de ses spécialités, poireaux vinaigrette, œufs mimosas, bœuf bourguignon, blanquette de veau, riz au lait, tarte Tatin… Elles se régalaient de ces plats snobés par la génération du bio et du végane. Mais ce jour-là, quand Marcelle a apporté leurs assiettes, elles en ont inspecté le contenu, se sont regardées et ont explosé de rire. De la langue de bœuf accompagnée de sa purée et de carottes. Une première pour les deux femmes qui n’osaient pas se lancer.
— Vas-y d’abord, toi.
— Je te laisse cet honneur. Je ne vois pas pourquoi je devrais être le cobaye dans cette histoire.
— OK, alors on goûte toutes les deux en même temps.
Comme deux gamines, elles ont découpé un petit morceau qu’elles ont porté à leur bouche en fermant les yeux. Puis après avoir avalé, elles ont comparé leurs sensations. Marion a été la première à s’exprimer.
— Ce n’est pas mal, en fait. On doit juste éviter d’analyser ce qu’on mange.
— Tu as raison, ce n’est pas mauvais… Mais j’ai quand même l’impression de rouler un patin à une vache !
— Vous n’aimez pas ?, a demandé leur hôtesse qui s’était approchée après les avoir entendu rire.
— C’est particulier, mais oui, c’est bon.
— Ah, ça me fait plaisir, c’est rare de trouver des amateurs de viande chez les gens de votre génération. Dans ce cas, revenez demain, je cuisine la joue comme personne !
S’esclaffant de plus belle, elles ne pouvaient plus avaler une miette supplémentaire. Marcelle a alors compris qu’elle ne les reverrait plus pendant la semaine du bœuf.
***
De temps à autre, pour fêter un nouveau contrat ou à l’occasion d’un remaniement interne, monsieur Bérot organisait des séminaires pour souder les salariés de l’agence. Quelques réunions sérieuses s’inséraient dans le programme de cohésion d’équipe pour justifier l’aspect professionnel de l’événement, mais ces teams building servaient surtout de prétexte pour se détendre, nouer de nouvelles amitiés ou des partenariats avec ses collègues de travail.
Un soir, alors que la plupart des collaborateurs étaient montés se coucher, Marion et Julie étaient restées au salon pour discuter. Après deux ou trois verres, elles ont abordé des sujets plus personnels pour la première fois. Julie pressait Marion de questions, voulant tout apprendre de son histoire d’amour avec Romain depuis leur première rencontre.
Si Marion devait tout raconter depuis le début, la nuit promettait d’être longue. Ils se connaissaient depuis l’adolescence et avaient traversé de nombreuses épreuves avant de se marier. Les jumelles avaient attendu les neuf mois réglementaires pour entrer en scène et depuis, leur embarcation naviguait au beau fixe sur une mer d’huile.
En revanche, la vie sentimentale de Julie avançait sur un radeau moins stable. Elle passait de passions en déconvenues et la durée de ses relations n’excédait pas quinze jours. Elle ne put entrer dans les détails, sans cesse interrompue par Romain, qui envoyait des textos à sa femme. Marion ne s’était jamais absentée aussi longtemps depuis la naissance de ses filles et les petites se languissaient de leur maman. Romain n’arrivait pas à s’en sortir et l’appelait à l’aide sans répit. Marion a répondu aux deux premiers textos en ignorant les aut