Les Merveilles du monde invisible , livre ebook

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Extrait : "Le milieu du dix-septième siècle fut une des périodes les plus glorieuses pour la pensée humaine. C'est alors que notre grand Descartes, réfugié en Hollande, publia son immortel Discours sur la méthode, qui forme, à proprement parler, la base de la philosophie moderne. À peu près à la même époque, un savant hollandais, nommé Swammerdam..."
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35

EAN13

9782335043341

Langue

Français

EAN : 9782335043341

 
©Ligaran 2015

I Le Stanhope
Le milieu du dix-septième siècle fut une des périodes les plus glorieuses pour la pensée humaine. C’est alors que notre grand Descartes, réfugié en Hollande, publia son immortel Discours sur la méthode , qui forme, à proprement parler, la base de la philosophie moderne. À peu près à la même époque, un savant hollandais, nommé Swammerdam, formait le noble dessein d’appliquer à l’étude du monde extérieur un instrument nouveau que nous pourrions appeler le télescope des infiniment petits.
Swammerdam fut si vivement frappé de l’ordre et de la grandeur des harmonies qui se révélèrent à ses yeux, qu’il appela Bible de la nature le grand ouvrage qu’il rédigea, le microscope en main. C’est un nom heureusement choisi, car aucun livre ne met plus victorieusement en lumière la sagesse de la Providence qui a créé le monde, et qui veille sans relâche à la conservation de son œuvre. Une sorte de révélation inattendue a ajouté ses lumières à celles de la raison naturelle. Aux yeux que nous avons reçus en naissant sont venus s’en joindre d’autres que la science nous a donnés.
Moins d’un siècle après la mort de ce grand homme les savants matérialistes, que Frédéric le Grand avait réunis autour de lui, sont parvenus à vicier la méthode essentiellement française de Descartes. Les héritiers de ces sophistes sont parvenus à tirer de l’emploi d’un instrument si propre à mettre en évidence la sagesse de Dieu des notions malheureusement erronées, qui, surtout il y a une vingtaine d’années, ont exercé une influence déplorable sur l’éducation de la jeunesse.
L’arme de la raison et du bon sens est devenue celle de l’erreur, du mensonge et de l’orgueil. Des sciences prétentieuses et vaines d’origine étrangère, ont envahi nos écoles nationales, et préparé tous nos malheurs.
Il est temps de faire cesser cette invasion des barbares de l’intelligence, et de revenir aux saines traditions qui ont fait la France si glorieuse.
Le microscope lui-même peut aider à guérir les blessures intellectuelles et morales qu’il a servi à faire. Il sera une des armes les plus précieuses de la réorganisation scientifique de la France, car nulle ne convient mieux à notre nature gauloise, vive, impressionnable, artistique, si merveilleusement douée, par conséquent, pour reconnaître les traces du passage de l’auteur de la nature.
L’éducation qui convient à un peuple libre n’est point celle dont une nation asservie peut faire ses régals peu chers. Comme le dit le grand Condorcet, l’art du professeur n’est point d’enseigner le peu qu’il sait, mais d’apprendre à ses élèves l’art d’apprendre.
Aussi notre triomphe sera-t-il complet si nous décidons ceux qui nous lisent à jeter de côté notre ouvrage et à prendre le microscope pour s’assurer que nous ne les avons point trompés, et voir par eux-mêmes au lieu de nous charger de voir pour eux.

Fig. 1 Microscope Stanhope. 1 Microscope monté. – 2. Tube. – 3. Pièce portant le microscope. – 4. Anguillettes du vinaigre vues avec cet instrument.
L’instrument que nous les engageons à manier est un petit appareil portant le nom de lord Stanhope, grand seigneur anglais, mort à Genève en 1816, et qu’ils pourront acheter partout pour 1 fr. 25.
Les plus utiles auxiliaires de la science microscopique sont ces marchands errants qui suspendent quelquefois au-dessus de leur boutique un tableau sur lequel on voit une goutte d’eau peinte avec les animalcules qu’ils y montrent.
Il n’y a rien d’exagéré dans les promesses que font ces honorables colporteurs scientifiques. La représentation donne et au-delà tout ce que la parade permet d’espérer et de concevoir.
J’ai été fier et heureux à la fois, quand j’ai vu que quelques-uns de ces professeurs errants montrent en étalage des exemplaires de mon monde invisible . Leur suffrage éclairé m’a complètement dédommagé des persécutions et des critiques, mieux que ne l’aurait fait un rapport favorable de l’Académie des sciences.
Ces microscopes à la Stanhope se composent essentiellement d’un petit prisme en verre, enchâssé dans un disque de cuivre. Le bout sur lequel on place l’œil a été rodé dans une matrice qui lui a donné la forme d’une petite sphère. Sur la face opposée, qui est restée droite, on colle, à l’aide d’un peu d’eau ou même d’un peu de salive, les objets que l’on veut grossir, et on regarde par transparence en se tournant du côté de la lumière.
Le disque de cuivre est placé sur un tube dont l’intérieur a été noirci, précaution qui rend la vision plus facile. En sortant de la petite lentille, la lumière qui a traversé longitudinalement le prisme, change brusquement de direction. Il en résulte que les rayons venant de la face opposée s’écartent d’une manière prodigieuse. Le grossissement ainsi obtenu est donc d’une énergie énorme, c’est comme si l’on dilatait l’objet lui-même en lui donnant des dimensions cent fois plus grandes sans changer sa forme.
Ces petits morceaux de verre se vendent à si bon marché, que M. Dagron, l’habile photographe qui a inventé la correspondance microscopique par pigeons, les fabrique à la grosse. Sur le devant il colle une petite photographie, aussi imperceptible que ses dépêches aériennes du siège. Le tout est renfermé dans un petit étui en corne et porte un petit anneau, de sorte que l’on peut s’en servir comme de breloques. Si vous n’avez pas compris les explications précédentes, démontez un de ces petits instruments, qui vous coûtera vingt ou vingt-cinq centimes, vous vous rendrez parfaitement compte du jeu du petit microscope que notre habile compatriote a si bien utilisé et par conséquent de l’instrument si simple inventé par le grand seigneur anglais.

Fig. 2 Photographie Dagron. 1. Lunette portant la photographie microscopique. – 2. Coupe de la lunette. – 3. Partie supérieure démontée. – 4. Verre taillé, de grandeur naturelle, montrant la photographie en vraie grandeur. – 5. Image amplifiée d’un paysage.
Si j’étais maître d’école dans un village, je m’arrangerais pour avoir toujours, dans un tiroir que j’oublierais de fermer, des microscopes Stanhope, montés dans un bouchon. Je serais heureux quand il manquerait quelques pièces, car je serais certain que mes élèves ne tarderaient pas à s’en servir en secret, croyant le faire à mon insu. J’ajouterai que cette méthode un peu la cédémonienne ne tarderait point à développer une habileté des plus remarquables, et qu’une éducation régulière, faite à coup de pensums, ne saurait jamais donner.
II Les loupes
Les loupes sont des lentilles convergentes, taillées avec soin de manière à grossir l’image des objets vus à travers. Quelquefois, lorsque les loupes ont des dimensions considérables, on les place à une distance notable. C’est ce qui arrive lorsqu’elles sont destinées à amplifier les dimensions d’une photographie et à lui donner un relief plus ou moins analogue au stéréoscope.
La situation la plus favorable pour la loupe se calcule dans tous les cas, qu’elle soit grosse ou petite, à l’aide d’une formule mathématique. Nous engageons le lecteur à la chercher par expérience ; qu’il commence par placer la loupe en contact avec l’objet, et qu’il fasse varier les distances. Après un petit nombre de tâtonnements, il saura bien vite comment se placer dans toutes les circonstances favorables pour voir l’objet qu’il étudie avec le plus d’avantage.
La planche ci-jointe montrera un certain nombre de formes usuelles, et n’a pas besoin d’être accompagnée d’explication. Nous dirons seulement que le doublet est une loupe composée de deux loupes placées lune derrière l’autre. La première est la seule qui grandisse directement l’objet, la seconde ne fait que dilater une seconde fois l’image produite par la première. Quelquefois, comme on le verra par la gravure ci-contre, les loupes simples sont au nombre de trois, que l’on peut combiner de plusieurs manières différentes, afin d’obtenir les grossissements intermédiaires.

Fig. 3 Grande et petite loupe à main.
Sans tant de complications instrumentales, on se procure des lentilles d’un grand pouvoir en fondant un fil de verre très mince par une de ses extrémités. En opérant ainsi on parvient à former

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