La lecture à portée de main
136
pages
Français
Ebooks
2022
Écrit par
Geneviève Winter
Publié par
Studyrama Editions
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2022
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Publié par
Date de parution
01 janvier 2022
Nombre de lectures
58
EAN13
9782749553016
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
2 Mo
Publié par
Date de parution
01 janvier 2022
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58
EAN13
9782749553016
Langue
Français
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2 Mo
Couverture
Titre
pour comprendre
les mythes littéraires
2 e édition
par
Geneviève Winter
Agrégée de lettres classiques, inspectrice d’académie, inspectrice pédagogique régionale (H)
Copyright
Retrouvez toute la collection
50 / 100 fiches
sur notre site
www.librairie.studyrama.com
Pour Joachim et Rachel
Édition : Myriam Pasek
Correction : Marie-Noëlle Garnier
Mise en page : Valeria Cassisa et Alain Béthune
© Bréal, septembre 2021.
Toute reproduction même partielle interdite
ISBN : 978-2-7495-5301-6
Sommaire
INTRODUCTION
PARTIE I – Mythes d’origine et mythes bibliques
1. L’âge d’or
2. Le Déluge
3. L’Apocalypse
4. Caïn
5. Jacob
6. Job
7. Moïse
8. Satan
PARTIE II – Lieux, itinéraires et cycles mythiques
9. L’Atlantide
10. L’Eldorado
11. La guerre de Troie
12. Le jardin d’Éden
13. L’éternel retour
14. Le Juif errant
15. Le mythe du héros
16. La décadence
PARTIE III – Mythes gréco-romains
17. Antigone
18. Aphrodite
19. Apollon
20. Dionysos
21. Électre
22. Dédale et Icare
23. Achille et Énée : le destin tragique des demi-dieux
24. Le Minotaure
25. Narcisse
26. Œdipe
27. Orion
28. Orphée
29. Phèdre
30. Prométhée
31. Sisyphe
32. Thésée
33. Ulysse, figure de l’intelligence
PARTIE IV – Mythes européens
34. La légende arthurienne et Merlin
35. Le mythe du Graal
36. Tristan et Iseut
37. Jeanne d’Arc
38. Le Cid
39. Don Juan
40. Faust
41. Hamlet
42. Louis XIV, le Roi-Soleil
43. Napoléon
PARTIE V – Les femmes fatales
44. Médée
45. Les Sirènes
46. Judith
47. Salomé
48. La Loreley
49. Carmen
50. Les sorcières
BIBLIOGRAPHIE
Introduction
Du mythe au mythe littéraire
Comment la littérature s’est-elle emparée du mythe au point de lui assurer une jeunesse toujours renouvelée ? Si la réponse à cette question est impossible, ces 50 fiches sur les mythes littéraires se proposent d’inviter les étudiants qui abordent le domaine des lettres et des sciences humaines ainsi que la culture générale à découvrir et à interroger une connivence éternelle : celle qui tisse des liens entre des récits immémoriaux et une littérature en perpétuel mouvement.
Cet ouvrage ne repose donc sur aucun présupposé théorique : longtemps considérée comme l’héritage fabuleux de l’enfance du monde – le muthos – par opposition au logos de la pensée rationnelle qui en serait l’âge adulte, la notion de mythe peine encore à être définie : il est admis aujourd’hui, si l’on s’en tient à une formulation simple, que le mythe est une fiction, souvent habitée par le merveilleux ou l’invraisemblable et pourtant tenue pour vraie parce que, de façon détournée, elle donne sens au monde. On considère généralement les mythes comme issus de la tradition orale et de récits anonymes, et construits autour de situations analogues ou de scénarios répétitifs dont les variantes correspondent à ce qu’un moment donné d’une société veut leur faire raconter, expliquer, révéler.
Au-delà de cette définition ouverte, mais contestable et contestée, les mythes ont suscité des travaux de grande ampleur, entrepris au début du xx e siècle et jusqu’à aujourd’hui dans le champ des sciences humaines. Les interprétations stimulantes dues à Georges Dumézil, Mircea Eliade et Claude Lévi-Strauss, pour ne citer que les plus connues, notamment, ont tenté de donner une définition universelle des mythes dits « ethno-religieux ». Pour certains, ils procèdent d’un langage structuré autour de « mythèmes » : ces unités minimales qui se combinent selon diverses configurations seraient ainsi constituées en « modèles » et en « patrons » appelés à se reproduire ; pour d’autres, c’est par leur lien avec le sacré qu’ils répondent à une quête angoissée des origines en renouvelant constamment un certain nombre d’archétypes.
Face à ces hypothèses scientifiques, les travaux considérables de Pierre Brunel 1 et des équipes qu’il a réunies autour de lui à partir des années 1970 sur la notion de « mythe littéraire » ont rappelé une réalité : quelle que soit son origine, le mythe ne survit pas dans la littérature, il est littérature car il ne naît véritablement qu’à l’écrit, ne vit et ne se renouvelle que dans les œuvres littéraires et les arts. Malgré l’existence d’une tradition orale antérieure à L’Iliade, L’Odyssée ou à la Bible, par exemple, ce sont ces œuvres épiques ou poétiques qui donnent au mythe son caractère fondateur et qui lui ont assuré un brillant avenir. Un exemple est fameux : c’est uniquement sur le texte d’une tragédie de Sophocle et non à partir de documents archaïques que Freud a échafaudé les hypothèses sur lesquelles se fonde sa théorie du complexe d’Œdipe. Bien que l’on puisse considérer la notion de « mythe littéraire » comme un « syntagme bâtard » 2 pour reprendre les termes trop modestes de Philippe Sellier, sa présence en littérature est incontestable, riche et en permanent mouvement.
La sélection qui s’imposait ici s’est donc fondée non sur la nature et les origines du mythe lui-même mais sur sa fréquence, sa vitalité et le foisonnement de ses variantes dans les œuvres littéraires en France et en Europe. Il en va de même pour le principe d’organisation en cinq chapitres de cet ouvrage : on a ainsi regroupé les mythes d’origine antique et judéo-chrétienne, ceux qui sont nés des récits bibliques, ceux qui s’attachent à des villes mythiques, les figures héritées de l’Antiquité classique, les mythes nés en Europe du Moyen Âge à l’époque moderne et contemporaine et le mythe des femmes fatales. Sans négliger les apports extérieurs, l’essentiel est ici de comprendre comment l’imagination d’un auteur se saisit d’un patrimoine mythique avec ses « invariants » et ses « variantes ». Signe des temps que nous laisserons aux étudiants le soin d’exploiter eux-mêmes : la présence envahissante des grands mythes littéraires au cinéma, dans les séries télévisées et mêmes les jeux vidéo : ils sont décidément indestructibles.
1 . On trouvera dans les indications bibliographiques la référence de ces ouvrages dont Le Dictionnaire des mythes littéraires.
2 . Dans un article essentiel de 1984, repris en 2005 dans Essais sur l’imaginaire classique , Paris, Champion Classiques, 2005.
PARTIE I
Mythes d’origine et mythes bibliques
1 L’âge d’or
Comme l’écrit Eliade dans une définition célèbre, « le mythe raconte une histoire sacrée ; il relate un événement qui a eu lieu dans le temps primordial, dans le temps fabuleux des commencements ». Le mythe de l’âge d’or illustre parfaitement cette définition ; il tente de raconter, d’expliquer et de révéler l’énigme des rapports entre l’homme, mystérieusement surgi dans l’univers, et la nature, ainsi que sa résolution par l’existence des dieux. Créant l’archétype d’une harmonie originelle et vite perdue entre les hommes et les dieux, il va très vite hanter durablement l’imaginaire de notre littérature.
1 ) Du mythe à la littérature
A. Origine et naissance du mythe
Le mythe de l’âge d’or est probablement né à Sumer ( iv e et iii e millénaires), chez l’une des premières civilisations historiques du Proche-Orient située dans le sud de la Mésopotamie, près du golfe Persique. Ce récit cosmogonique vise, à côté des mythes de création, à représenter les tout premiers moments de la vie sur Terre. La vision d’une harmonie originelle créée par les dieux pour les hommes tire son nom de l’« âge d’or » de la mythologie grecque mais elle se décline en diverses variantes selon les civilisations : à Sumer le mythe de Dilmun et en Égypte le mythe de Ré et d’Isis identifient cette représentation à un lieu. Les Grecs et les Romains en ont fait une période. Ainsi inaugure-t-il un cycle des âges de l’humanité appelé à se reproduire. L’âge d’or correspond en Grèce au règne de Chronos, à Rome au temps de Saturne. Après sa fin brutale, trois âges « minéraux », d’argent, de bronze et de fer, vont se succéder, pendant lesquels les hommes verront se déliter le rêve d’une période heureuse dont ils attendent avec nostalgie le retour.
B. Les invariants du mythe
Après les Sumériens, qui imaginent un monde sans bêtes féroces, sans haine ni violence et dans lequel la nourriture ne manque jamais, Hésiode, au vii e siècle av. J.-C., décrit l’âge d’or presque dans les mêmes termes dans Les Travaux et les jours : « Autrefois, l’humanité vivait sur la Terre à l’écart et à l’abri des souffrances, de la lourde fatigue, des maladies. » Aux peurs ancestrales de l’homme, le mythe de l’âge d’or oppose la triade fameuse : paix, abondance et justice. Toutes les variantes du mythe reprennent l’idée de paix : entre l’homme et la nature, entre les hommes entre eux, entre les dieux et les hommes, « car les dieux et les hommes ont même origine » (v. 108). Cette paix, qui s’identifie en Égypte à une sorte de paradigme civilisateur, se retrouve dans la description que fait Homère de lieux paradisiaques comme les îles des Bienheureux et la Schérie. La Bible s’empare évidemment de ce mythème à travers la concorde idéale entre le dieu et ses créatures et l’image du jardin d’Éden (voir fiche 12 ) qui accueille Adam et Ève dans la Genèse. L’idée d’abondance et de fertilité naturelle de la Terre traverse toutes les variantes du mythe sous la forme de jardins, d’îles, d’oasis, envahis par la prolifération d’une végétation nourricière, entretenue par la proximité d’eaux courantes et s’offrant aux hommes sans leur imposer le moindre travail. Le troisième élément, la justice, est plus tardif, car il suppose une société organisée. Il se fonde en Mésopotamie sur l’idée d’une imitation par l’homme du modèle divin, en Égypte sur la structure commune à la nature et à la société dans un cosmos harmonieux. Pour les Grecs, la justice est d’origine divine et, pour décrire une constitution idéale, Platon revient au mythe de Chronos.
Dans toutes les civilisations, la fin de l’âge d’or est provoquée par la rupture de cet équilibre dont l’homme est généralement coupable. Avide de connaissance