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Français
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Publié par
Date de parution
13 juillet 2022
Nombre de lectures
0
EAN13
9782384420889
Langue
Français
Paul Féval Fils (1860-1933)
"Un matin d’avril de l’an 1641 – le roi Louis Treizième portant la couronne des lys, et Armand Duplessis, Cardinal-Duc de Richelieu tenant le sceptre – les gardes de faction à la Capitainerie du Louvre virent déboucher du quai de l’École un jeune homme, à l’allure militaire, qui se dirigeait de leur côté d’un pas rapide et dégagé.
Le nouvel arrivant portait le pourpoint à collet de buffle, traversé d’un baudrier de cuir, les grandes bottes passant le genou et le haut chapeau à bord relevé piqué d’une seule tête de plume, qui formaient la tenue de campagne des soldats de l’armée des Flandres. Une longue et fine rapière à coquille ronde, suspendue à son baudrier, complétait cet accoutrement martial.
Arrivé près des factionnaires, il porta la main au bord de son feutre en guise de salut et interpella cavalièrement en ces termes :
– Holà ! camarade ! pouvez-vous me dire si M. de Guitaut est au Palais ?
Celui à qui s’adressait plus particulièrement cette question était un beau garde, en costume de parade : revêtu de la casaque brodée et coiffé du large feutre à grand panache.
Sans répondre, il toisa dédaigneusement ce porteur de rapière, qui osait se présenter chez le Roy comme dans un camp – botté et éperonné – et qui se leurrait du fallacieux espoir d’être admis, en cet équipage, près M. le Capitaine des Gardes de la Reine."
Ecrit avec Maximilien Lassez.
Tome I
Que s'est-il passé pendant les 20 ans qui séparent les 2 romans d'Alexandre Dumas : "Les trois mousquetaires" et "Vingt ans après" ?
Publié par
Date de parution
13 juillet 2022
Nombre de lectures
0
EAN13
9782384420889
Langue
Français
D’Artagnan contre Cyrano
Tome I
Le chevalier Mystère
Paul Féval fils
Maximilien Lassez
Juillet 2022
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-38442-088-9
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 1086
Avant-propos
Une négligence d’Alexandre Dumas
Qui ne se souvient de la préface des Trois mousquetaires ?
Dans cette préface, le grand Dumas rapporte qu’après avoir lu les Mémoires de M. d’Artagnan , frappé par la consonance « mythologique » des noms d’Athos, Aramis et Porthos, il eut la curiosité d’éclaircir l’identité de ces personnages, évidemment déguisés. Ses investigations seraient demeurées infructueuses si l’érudit Paulin Pâris ne lui avait signalé l’existence d’un manuscrit in-folio, « coté, dit-il, sous le n° 4772 ou 4773, et ayant pour titre : Mémoires de M. le Comte de la Fère, concernant quelques-uns des événements qui se passèrent en France vers la fin du règne de Louis XIII et le commencement du règne de Louis XIV ». C’est la première partie de ce précieux manuscrit que le romancier déclare offrir à ses lecteurs, prenant l’engagement, si elle obtient du succès, de publier la seconde.
Dumas se vantait volontiers de « violer parfois l’Histoire, mais jamais sans lui faire un enfant ». Aussi, ce modeste désaveu de paternité rencontra-t-il bien des sceptiques. De plus une lacune invraisemblable nous mit martel en tête. Ici M. Lassez et moi nous en appelons à tous les fidèles du prodigieux amuseur qui n’ont pu manquer d’éprouver une surprise semblable à la nôtre ; pourquoi le romancier a-t-il mis un intervalle de vingt ans entre Les Trois mousquetaires et leur suite ? Pourquoi la préface est-elle muette sur ce point délicat ? Doit-on admettre que des héros de cette envergure aient pu s’endormir de 1628 à 1648 et n’accomplir aucun fait digne d’être noté, durant cette période de leur vie, alors qu’ils étaient en pleine jeunesse ? Ou bien Athos aurait-il eu une amnésie portant sur vingt ans de la vie de ses inséparables ? Cette dernière hypothèse, d’ailleurs, n’a pas lieu d’être retenue, puisque le manuscrit s’intitulait relatif à « la fin du règne de Louis XIII » – mort en 1643, c’est-à-dire seize ans après la fin de la première partie de l’ouvrage de Dumas.
Non ! l’époque trouble qui a vu la fin du Grand Cardinal et les obscurs débuts de la fortune de Giulio Mazarini, la mort de Louis le Juste et les nouvelles amours de sa reine, cette époque, fertile en incidents romanesques, n’avait pu être choisie par nos vaillants jeunes gens pour accrocher à un clou leurs chatouilleuses épées.
Ce silence énigmatique devait dissimuler quelque mystère oublié ou dédaigné par notre illustre devancier ; tout un roman peut-être dont les mémoires du Comte de la Fère devaient fournir les éléments. Talonné par ce rêve d’épopée enfouie, comme un diamant, dans la quiétude poussiéreuse du département des manuscrits de la Bibliothèque Nationale, nous fûmes un jour arracher à leur sommeil les mémorables in-folio.
– Numéros 4772 et 4773 ? s’effara le vieux bibliothécaire. Ah ! c’est la première fois... depuis le vol...
– Quel vol ?
Le bonhomme fit la sourde oreille.
Un instant après nous pouvions constater que le premier manuscrit s’arrêtait à l’année 1628 ; comme Les Trois mousquetaires , et que le second commençait en 1648... Vingt ans après !
– Ah ! dit le conservateur, témoin de notre trop visible déconvenue ; en avril 1848, m’a-t-on dit, M. Dumas qui, durant les troubles de février, avait été cloîtré à l’Hôtel des Haricots, avec bon nombre de ses confrères, revint ici pour consulter le manuscrit intermédiaire, le troisième in-folio...
– Il y avait un troisième in-folio ?
– Certainement, le 4772 bis ; d’une écriture différente de ces deux que voici... Mais M. Dumas avait eu tort de le négliger à ses premières visites ; il ne devait pas le retrouver. Le bis s’était envolé avec les fédérés qui campèrent dans cette salle le 24 février.
L’été suivant, au cours d’une promenade en Vendée, nous nous étions arrêtés au bourg de la Caillère dans la maison hospitalière du châtelain.
– Pourquoi ne passeriez-vous pas la saison parmi nous ? proposa-t-il.
– S’il y avait une petite maison à louer ?
Un gros propriétaire venait justement serrer la main du châtelain.
– Parbleu ! fit ce dernier, vous avez de la chance. Louez son paradis à Grimaud.
Grimaud ! Ah ! quel souvenir réveilla ce nom brusquement prononcé. Puisque nous nous étions décidés à laisser les mousquetaires à leur léthargie et les souvenirs d’Athos à leur poussière, il y avait impertinence de la part du hasard à nous rappeler nos espoirs évanouis. Mais il y a une providence pour les chercheurs. Jouissant de notre embarras, dont il paraissait deviner la cause, le châtelain ajouta doucement :
– Vous qui écrivez des livres, vous n’avez pas été sans lire Les Trois mousquetaires de Dumas ?... Oui, n’est-ce pas ? Eh bien, Grimaud est le propre descendant du silencieux valet d’Athos... Chez lui, il a de vieilles paperasses. En temps de pluie, ça pourrait vous distraire.
Tourné vers le gros homme, nous osâmes cette question :
– N’auriez-vous pas le 4772 bis ?
Alors, le muet déborda, éloquent !
– Oui bien ! Il est à moi ! Écrit de la main même de mon arrière-aïeul... Repris par mon père en 48...
– Repris ?... Pourquoi repris ?... et comment ?...
– C’est une histoire !... Avant de mourir, paraîtrait-il, Monsieur le Comte fit appeler mon ancêtre et lui dit : « Grimaud, tu as trop écrit sous ma dictée... Il faut anéantir le manuscrit qui éclaire le mystère des jardins d’Amiens... On ne doit pas toucher à la Reine !... »
– Et vous l’avez, ce manuscrit ?
– Sans doute. C’est du nanan.
Le soir même nous étions installés au « paradis » de Grimaud, arrière-petit-fils, et prenions connaissance, chose imprévue, de la haute écriture de Grimaud, le silencieux, qui s’était délassé de se taire en écrivant.
C’était l’abrégé d’un récit fait à son maître par le plus jeune des mousquetaires : « D’une aventure secrète et des rapports délicats qu’eurent entre eux MM. d’Artagnan et de Cyrano-Bergerac. »
Moins heureux que Dumas nous ne pouvons pas dire que nous avons transcrit tel quel le récit recueilli par Grimaud. Il y a loin des éloquents mémoires d’un gentilhomme à l’abrégé d’un laquais. Nous espérons pourtant qu’on verra, sans indifférence, revivre deux héros illustrés par la plume inimitable de deux maîtres : le Béarnais d’Artagnan et le Gascon Cyrano.
P AUL F ÉVAL F ILS .
I
Un nez de... gentilhomme
Un matin d’avril de l’an 1641 – le roi Louis Treizième portant la couronne des lys, et Armand Duplessis, Cardinal-Duc de Richelieu tenant le sceptre – les gardes de faction à la Capitainerie du Louvre virent déboucher du quai de l’École un jeune homme, à l’allure militaire, qui se dirigeait de leur côté d’un pas rapide et dégagé.
Le nouvel arrivant portait le pourpoint à collet de buffle, traversé d’un baudrier de cuir, les grandes bottes passant le genou et le haut chapeau à bord relevé piqué d’une seule tête de plume, qui formaient la tenue de campagne des soldats de l’armée des Flandres. Une longue et fine rapière à coquille ronde, suspendue à son baudrier, complétait cet accoutrement martial.
Arrivé près des factionnaires, il porta la main au bord de son feutre en guise de salut et interpella cavalièrement en ces termes :
– Holà ! camarade ! pouvez-vous me dire si M. de Guitaut est au Palais ?
Celui à qui s’adressait plus particulièrement cette question était un beau garde, en costume de parade : revêtu de la casaque brodée et coiffé du large feutre à grand panache.
Sans répondre, il toisa dédaigneusement ce porteur de rapière, qui osait se présenter chez le Roy comme dans un camp – botté et éperonné – et qui se leurrait du fallacieux espoir d’être admis, en cet équipage, près M. le Capitaine des Gardes de la Reine.
La patience ne devait pas être la vertu maîtresse du jeune militaire. Se voyant en butte à cet examen dépourvu d’aménité, il fronça légèrement le sourcil et se mordit les lèvres.
D’un ton plus bref il répéta :
– Hé ! monsieur, je vous demande si je puis voir M. de Guitaut ?
– Adressez-vous à l’officier de service, répondit l’autre, en tournant le dos.
Le soldat hésita un moment. Peut-être se demandait-il si, avant de passer outre, il ne devait pas tirer raison de ce sans-gêne impertinent. Mais, à la réflexion, il prit le parti de répondre au dédain par le mépris. Pivotant sur ses talons, de son pas résolu, il pénétra par le guichet dans une petite cour, où un bel officier, doré et chamarré, s’amusait à exciter les chevaux attelés à un carrosse.
Les bêtes généreuses, agacées par une longue attente, piaffaient et encensaient pour le plus grand amusement des laquais et d’un somptueux cocher.
Ayant salué derechef, le jeune homme exposa sa requête.
– Le Roy étant à Chantilly et la Reine faisant retraite aux Carmélites, il serait bien surprenant que M. de Guitaut fût au Louvre, où il n’a que faire !
Telle fut la réponse de l’officier qui, pour la faire, daigna à peine détourner la tête vers l’intrus.
– Circonstances regrettables ! Vraiment, je ne pouvais les deviner, rétorqua le petit soldat d’un ton vif. Pourtant je ne puis m’en tenir à une réponse aussi équivoque, vu l’importance de la communication dont je suis chargé et son urgence.
« Je vous prie donc, Monsieur, de faire savoir à M. de Guitaut – ou, à son défaut, à son neveu M. de Comminges – que je suis là à l’attendre et de lui faire tenir, de suite, ce mot d’explication.
Ce discours avait été débité avec un tel ton d’assurance, que l’officier se décida à quitter les carrossiers et à examiner ce commissionnaire, si peu familiarisé avec les usages de la Cour et qui paraissait, néanmoins, si sûr de son fait.
Il vit devant lui un grand garçon dans toute la fleur de la jeunesse. Cet étrange porteur de requête gardait même encore, de l’enfance, la fraîcheur duvetée du teint et la candeur du regard. Sous cette apparente ingénuité, pourtant,