Le réseau Phénix
94 pages
Français

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Description

Amiens, mai 1940. La ville est dévastée par les bombardements allemands. Parmi les survivants, deux adolescentes, Cécile et Solange, accompagnées de leurs parents, rejoignent la colonne de civils qui ont choisi de fuir. Commence alors l’exode vers un improbable refuge, interrompu parfois par les attaques aériennes et la rencontre de Paul, un apprenti horloger sous le charme duquel Cécile ne tarde pas à tomber. Ayant choisi eux de rester en ville, Jean et son père Fernand, garagistes, sont mandatés par le baron de l’Estoc, pour transférer un somptueux coupé Bugatti en zone libre. Lors de la prise en charge du véhicule, Jean fait la connaissance d’Alcide, le fils du baron, un singulier personnage avec qui il ne tarde pas toutefois à devenir complice.

Amiens, juin 2019. Elliot, un étudiant en droit qui cohabite avec sa jeune sœur Mona, élève en terminale, découvre dans la soupente de leur mezzanine une étrange mallette contenant des vieilles cartes, des tracts jaunis, les pavés de plastique. Ils partent sur la trace d’un ancien réseau de résistants au nazisme.

Amiens, novembre 1941. La vie sous l’occupation allemande a bien changé le quotidien des Amiénois qui sont revenus peupler la ville quelques mois après les bombardements. Le rationnement de la nourriture et le couvre-feu sont à l’ordre du jour, ainsi que des conditions parfois déplorables de relogement. Solange, Paul, Jean et Alcide sont-ils prêts à accepter sans réagir des conditions de vie de plus en plus insupportables ? Et comment vont-ils faire pour protéger Cécile, leur amie juive ?


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 septembre 2021
Nombre de lectures 165
EAN13 9782215181125
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Table des matières Les bombes Le départ La rencontre Journal intime de Cécile La découverte Le transfert Le retour Journal intime de Cécile L’exhumation L’arrestation La cache Journal intime de Cécile Le garage L’attentat Le réseau Phénix Journal intime de Cécile La lettre Juste avant l’orage L’heure H La révélation Dossier pédagogique Bibliographie et autres ­ressources utilisées Remerciements Page de copyright
Points de repère Cover Title Page Copyright Page Remerciements Corps de texte
À mon mari,
À mes enfants,
À é dith et Thérèse.
Le vrai courage, c’est, au-dedans de soi, de ne pas céder, ne pas plier, ne pas renoncer. Être le grain de sable que les plus lourds engins, écrasant tout sur leur passage, ne réussissent pas à briser.
Jean-Pierre Vernant.
1
Les bombes
Amiens, dimanche 19 mai 1940
P ersonne n’avait osé s’installer dans les carrés de lumière filtrant des soupiraux, tant l’obscurité de la cave paraissait être le seul refuge valable pour se terrer comme des rats. La concierge, le bibliothécaire à la retraite dont Beata ne se rappelait jamais le nom, la famille modèle du premier étage avec les trois enfants, moins le papa bien sûr, le couple très âgé du rez-de-chaussée, ces anciens confiseurs qui avaient toujours une sucrerie à offrir à sa fille Cécile. Ils étaient tous là. Dix corps recroquevillés dans un silence noué, petite grappe d’humanité perdue sous le flot des bombes qui s’abattaient au-dehors.
Beata tentait en vain de contenir les sursauts qui faisaient bondir son cœur à chaque impact. D’autres sons, plus effrayants encore, leur parvenaient parfois : une voix ­interpellant quelqu’un, hurlant presque, ou encore le bruit des talons qui battaient le pavé pour s’enfuir à chaque assaut des stukas. Le corps de sa fille blottie contre elle réclamait en silence un réconfort, mais Beata n’était qu’une boule d’angoisse diffuse. Elle aurait tant aimé lui offrir des paroles rassurantes et des bras qui ne tremblent pas, comme l’aurait fait Szymon. Au lieu de cela, elle ne faisait que resserrer son étreinte au fil des minutes, et Cécile en vint à se dégager doucement car son bras lui faisait mal.
– Pardon, ma chérie. Oh mon Dieu, viens-nous en aide.
Szymon, où était-il ? Quelles heures sombres vivait-il de son côté ?
Elle recroquevilla ses jambes sous sa jupe de jersey marine maculée de poussière, invita doucement sa fille à poser la tête sur ses genoux et ferma les yeux.
Ils ne connaîtraient donc jamais la paix.
Elle avait fui sa Pologne natale et les rues colorées de Varsovie pour échapper aux pogroms, ces éclats de violence parfois sanglants à l’encontre du peuple juif et qui laissaient le gouvernement indifférent. Elle avait vraiment cru à une terre promise en arrivant en France. Sa rencontre avec Szymon, polonais lui aussi, leur mariage vécu comme une évidence et l’arrivée de leur délicieuse Cécile avaient éclairé son chemin, ravivé l’espoir de jours meilleurs. Mais voilà que le ciel s’assombrissait de nouveau.
Son mari avait été mobilisé la semaine précédente par le gouvernement polonais. Son Szymon, affecté à la première ­division de grenadiers. Son Szymon, avec une arme à la main, lui qui, il y avait si peu de temps encore, déployait son chaleureux sourire et ses tissus choisis avec soin sur tous les marchés de la Somme. D’un regard, il savait quelle couleur ou quel motif mettraient le plus en valeur le teint de telle cliente, d’un geste sûr, il extirpait de son monticule de rouleaux l’étoffe qui conviendrait le mieux pour restaurer les fauteuils de telle autre. Il était fait pour cela, caresser, choisir et vendre du tissu, et non pour dégoupiller une grenade. Mais quel homme était fait pour la guerre ?
Il fallait arrêter de douter. Szymon avait promis : il reviendrait. Certes il était marchand forain, mais cela ne l’empêchait pas d’être un homme vaillant et fier de ses origines, et il comptait sur Beata pour s’occuper de Cécile et faire preuve de courage.
– Vous ne croyez pas qu’on pourrait tenter de sortir pour aller voir ce qu’il se passe ? Cela fait au moins une heure que l’on n’entend plus grand-chose…
Beata avait reconnu la voix du bibliothécaire, bien que celle-ci soit voilée par ces heures passées à se taire.
– Euh, oui, vous avez raison. De toute façon, je crois qu’il va falloir se résoudre à partir, cela devient… délicat, parvint-elle à articuler.
– Allez-y vous tous, ne vous préoccupez pas de nous, souffla le vieux monsieur du rez-de-chaussée. Avec ma femme, nous avons décidé de rester, nous sommes bien trop vieux pour aller courir sur les routes.
– Mais enfin, vous n’y pensez pas ! Les Boches vont revenir ! La trêve ne durera que le temps de la nuit, demain Dieu sait ce qu’ils vont nous faire subir !
La concierge laissait éclater son inquiétude, et tous se levèrent pour faire diversion afin de ne pas inquiéter les enfants.
– Bon, jeunes filles, il est temps d’épousseter vos robes et de monter prendre quelques bagages. Allez mon grand, lève-toi et suis tes sœurs. Que diriez-vous d’aller passer quelques jours chez tante Eugénie ? Je crois qu’elle a trois nouvelles poules, cela va en faire des œufs à ramasser et des gâteaux à faire, qu’en dites-vous ?
La voix de la mère de famille du premier étage était si haut perchée qu’elle n’en était guère rassurante, mais son courage touchait au cœur.
– Oui maman, opinèrent ses trois enfants de manière quasi inaudible.
Il était presque vingt heures lorsque la porte de leur immeuble s’entrouvrit timidement sur une place du Marché-Lanselles vidée de ses habitants. Auparavant, chacun avait pris soin d’emporter le strict nécessaire, inutile de se charger outre mesure, l’urgence était de se mettre à l’abri le temps que les troupes alliées neutralisent l’ennemi commun. Les informations dont disposaient les Amiénois étaient parfois contradictoires : si le journal Le Progrès de la Somme minimisait l’avancée de la Wehrmacht, le bouche-à-oreille, lui, allait bon train, nourri par l’arrivée récente de réfugiés belges et hollandais, et par les cauchemars des aînés qui avaient déjà vécu le traumatisme de la première guerre. Il se disait des nazis qu’ils étaient capables des pires exactions : soldats brûlés vifs, femmes violées et enfants massacrés. En tout cas, une chose était sûre : l’armée du Reich venait d’accomplir une manœuvre-éclair en passant par la Belgique et en encerclant Français et Britanniques dans le Nord.
Amiens était l’ultime caillou à fouler aux pieds avant qu’Hitler ne marche sur Paris.
Le bibliothécaire, après un temps d’hésitation, ouvrit grand la porte et fit un pas à l’extérieur. Le petit groupe s’aventura alors à sa suite, retenant son souffle et sur la pointe des pieds. Des éclats de brique et de pierre craquaient sous leurs semelles, et le souffle chaud d’un feu qui brûlait non loin leur parvint, porté par une brise printanière. Un épais nuage de poussière nimbait les immeubles alentour, ou tout au moins ce qu’il en restait. Leurs yeux se plissèrent sous l’effet des particules, s’accommodèrent, puis s’écarquillèrent devant l’effrayant tableau.
Il n’y avait plus rien autour d’eux.
C’était comme si une lame géante avait décapité les habitations, et tous les pâtés de maisons avaient désormais les entrailles à découvert. Beata porta la main à sa bouche lorsqu’elle réalisa que de là où elle se trouvait elle pouvait voir le beffroi, qui ordinairement était hors de portée de vue. Elle ne le reconnut que grâce à l’horloge, car le dôme en fer qui le coiffait encore la veille avait disparu. Ce n’était plus leur place, ce n’était plus leur quartier, ce n’était plus leur ville. Quelque chose, ou quelqu’un, avait subtilisé Amiens et avait installé ce décor de désolation à la place, comme un changement de plan au cinéma. Hagards, ils tournèrent un moment sur eux-mêmes, avant de se reprendre.
– Maman, viens s’il te plaît. Allons vite voir s’ils sont là, tu m’as promis, supplia Cécile.
– Oui, oui, bien sûr, nous y allons. Mais, que fait-on pour les confiseurs ? On ne peut pas les laisser là…
– Beata, soyez raisonnable, lui intima le bibliothécaire. Vous les avez entendus vous-même. Ils ont perdu leur fils unique il y a vingt ans, la guerre ne les effraie même plus. Pour qui, pour quoi devraient-ils se battre ? Et puis, vous savez comme moi qu’ils sont trop âgés pour entreprendre un tel voyage. Allez chercher vos amis, et fuyez. Je m’occupe des autres, ne vous en faites pas. Et surtout, je m’occupe de la concierge : un bâillon sur sa bouche et hop, je la charge sur mon épaule !
Un rire nerveux les secoua tous les deux, qui permit à Beata d’évacuer l’effroi qui la paralysait. Il fallait agir, vite.
2
Le départ
Place du Marché-Lanselles, Amiens, dimanche 19 mai 1940, 20 h 07
S es rideaux fermés plongeaient sa chambre dans la pénombre, et ce manque de lumière ne l’aidait pas à prendre une décision. Le rouge ou le bleu lavande ? Le premier accentuait son côté femme et révélait son éclat, tandis que le bleu adoucissait ses traits et se coordonnait parfaitement avec ses yeux. Cruel dilemme. Ah, ce que la guerre était exaspérante ! Être ainsi obligée de choisir un gilet à la va-vite, ne prendre que le nécessaire, là-dessus maman avait été très claire, et surtout faire rentrer ce « nécessaire » dans cette minuscule mallette…
Solange leva les yeux au ciel.
Elle jeta d’une main désinvolte les deux gilets sur son lit et s’installa devant sa coiffeuse, dont le miroir lui renvoya sa fameuse mine boudeuse que sa blondeur venait toujours adoucir. Les autres filles médisaient derrière son dos lorsqu’elle traversait la cour du lycée et que ses boucles dorées dansaient sur ses épaules. Cela la faisait sourire, et loin de la dissuader de mettre en avant ses atouts, elle redoublait au contraire de soins à la camomille pour que sa chevelure accroche plus encore la lumière.
Et dire que demain c’était dimanche, donc le jour du lavage de cheveux. Mais comment allait-elle faire si elle se retrouvait à vagabonder sur les routes poussiéreu

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