La Neva pour se retrouver
70 pages
Français

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La Neva pour se retrouver , livre ebook

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Description

Aux abords de la Neva, le fleuve qui traverse Saint-Pétersbourg, Méganne ne prévoyait pas tomber amoureuse pour la première fois, ni avoir envie si fort de revoir son père qui l’a abandonnée. Parfois, il faut se rendre à l’autre bout du monde pour mieux se retrouver.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 novembre 2020
Nombre de lectures 12
EAN13 9782896996797
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La Neva pour se retrouver

Marise Gasque
 
 
 
 
 
 
 
La Neva pour
se retrouver
 
Roman
 
 
 
 
 
 
 
2020
Cavales
L’Interligne

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
 
Titre: La Neva pour se retrouver / Marise Gasque.
 
Noms: Gasque, Marise, 1988- auteur.
 
Collections: Cavales.
 
Description: Mention de collection: Cavales
 
Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20200172093 | Canadiana (livre numérique) 20200172115 |
 
ISBN 9782896996773 (couverture souple) | ISBN 9782896996780 (PDF) | ISBN 9782896996797 (EPUB)
Classification: LCC PS8613.A866 N48 2020 | CDD jC843/.6—dc23
 
 
 
 
 
 
 
L’Interligne
435, rue Donald, bureau 337
Ottawa (Ontario) K1K 4X5
613 748-0850
communication@interligne.ca
interligne.ca
 
 
Distribution : Diffusion Prologue inc.
 
 
ISBN 978-2-89699-679-7
© Marise Gasque 2020
© Les Éditions L’Interligne 2020 pour la publication
Dépôt légal : 2e trimestre de 2020
Bibliothèque et Archives Canada
Tous droits réservés pour tous pays







Chapitre 1





P remière constatation : le serveur est beau. Tellement beau que j’oublie de parcourir le menu qu’il a posé devant moi. Il a les cheveux bruns, tirés vers l’arrière. Sur ses épaules carrées se moule un t-shirt rouge carmin et à sa taille est noué un tablier noir. Son regard me plaît. Surtout quand il sourit, car ses yeux adoptent une autre forme.
Deuxième constatation : il ne comprend ni le français ni l’anglais. Sabrina ne tarde pas à le baptiser Dostoïevski en l’honneur de Crime et châtiment, le roman que monsieur Lemieux a mentionné cette année à l’école, même si elle s’amuse à l’appeler « mon amour » à voix haute quand il vient remplir nos verres d’eau. Le rire timide du serveur nous laisse comprendre qu’il sait qu’on fait des blagues inoffensives à son propos.
Nous indiquons ce que nous désirons manger (je pointe l’index vers à peu près n’importe quoi) et il nous fait oui de la tête, toujours avec ce sourire gêné que nous percevons davantage dans ses yeux que sur ses lèvres. Larisa, qui connaît bien le menu, nous commande à toutes les trois un mors , une espèce de cocktail à base de jus de canneberges. Je reçois, comme plat, des petites boulettes de viande enrobées d’une pâte fine, et nous terminons le repas en partageant un gâteau russe ptitchie moloko . Traduction de nos papilles gustatives : gâteau chocolat-meringue.
C’est à la fin de la soirée, le pied à l’extérieur du restaurant, que je remarque des chiffres inscrits sur ma copie de l’addition, accompagnés d’un petit visage souriant.
— C’est quoi, ça ?
La réponse aurait été plus évidente au Canada. On aurait reconnu l’indicatif régional et la façon de disposer les chiffres... Il s’agit d’un numéro de téléphone ! C’est du moins ce que nous en déduisons. Plus spécifiquement, le numéro de téléphone du beau serveur. C’est absurde. En même temps, c’est flatteur, et je ne peux m’empêcher de ressentir une vive excitation. Troisième constatation de la soirée : il fallait que je voyage jusqu’en Russie pour qu’un beau gars s’intéresse à moi. On aurait dû me prévenir, j’aurais fait le voyage plus tôt !
En fait, je n’aurais pas pu le faire sans Larisa. C’est elle qui, depuis le déménagement de son père, voyage chaque année pour le retrouver, et nous rapporte, à Sabrina et à moi, toutes sortes de souvenirs. Surtout, elle revient avec des centaines d’histoires et des photos qui nous font rêver : les cathédrales, les palais royaux, les musées qui cachent des secrets de la ville, la mer Baltique dans toute sa splendeur, les grands ballets, les poupées russes ! Trois années de désir, deux années d’économies, et finalement, onze heures de vol : le rêve se concrétise.
Si j’avais été seule, je n’aurais jamais reconnu l’homme qui, quelques heures plus tôt, nous attendait à l’aéroport de Poulkovo. Il faut dire que je n’avais pas vu Dmitry, le papa de Larisa, depuis presque quatre ans, et qu’il nous a accueillies la tête baissée, les yeux rivés sur son téléphone cellulaire. Une fois en face de lui, nous avons eu droit à un sursaut, à un cri de joie et à un gros câlin de sa part. Décidément, même s’il avait eu la tête relevée, je n’aurais pas su que c’était lui. Mes souvenirs étaient ceux d’un grand homme à l’allure athlétique et aux cheveux noirs bien coiffés. Était-ce le même, celui qui avait rendu ma mère complètement dingue et qui avait réussi à charmer presque toutes les femmes du quartier ? Le Dmitry qui se tenait devant nous avait un ventre en trop, des joues flasques et des cheveux grisonnants. À l’écoute de sa voix, néanmoins, une partie de moi a sursauté. J’avais oublié cet accent mi-parisien, mi-québécois, avec une intonation russe. Et cette manie de toujours ajouter un « hein ! » à la fin de chacune de ses phrases… Je ne pouvais arrêter de sourire. Ça faisait du bien à réentendre. Dans un aéroport bondé d’écriteaux dont je ne pouvais comprendre les messages et de voyageurs fatigués qui vivaient leurs retrouvailles en russe, le français qui sortait de la bouche de Dmitry me ramenait chez moi. Les deux semaines en sa compagnie seraient si plaisantes !
Il semblait heureux d’avoir Larisa (ou Lara, comme il l’appelle tendrement) à ses côtés : il lui flattait la tête de la même façon que je cajole Roméo, mon épagneul. À plusieurs reprises, j’ai remarqué qu’il ne nous regardait pas, Sabrina et moi, quand nous lui adressions la parole. Son attention restait fixée sur sa fille, comme si c’était la première fois qu’il la voyait. Tout lui semblait incroyable : la façon dont elle tenait son sac à main et son téléphone, ses expressions faciales, les vêtements qu’elle portait… tout ! Il la contemplait, les yeux et les lèvres empreints de gaieté. Après une dizaine de minutes, quand l’admiration s’est quelque peu dissipée, il s’est tourné vers moi.
— Méganne, c’est pas croyable à quel point tu ressembles à ta mère, en vieillissant !
Je savais qu’on allait parler de maman à un moment donné, mais pas si tôt, à peine l’avion atterri ! Il a même ajouté un :
— Elle va bien ?
— Oui, oui, elle va bien. Je suis certaine qu’elle est impatiente que je l’appelle pour lui dire que je suis arrivée en Russie. Et elle a hâte que je lui envoie des photos !
— Mais pas tout de suite, hein ! Je serai plus photogénique plus tard, après une bonne douche.
Tiens, une autre chose qui n’avait pas changé : son sens de l’humour. Il nous a même fait croire, quand on s’est rendues à sa voiture dans le stationnement, qu’il était huit heures du matin et qu’il nous amenait déjeuner.
— Je suis toute mêlée, papa ! Je pensais qu’il était huit heures du soir !
— Regardez le beau soleil. Est-ce qu’il ferait si clair si nous étions le soir ?
Aurions-nous mal calculé le décalage horaire ?
— Je blague, a tout de suite avoué Dmitry. C’est la beauté de Saint-Pétersbourg. Le soleil, en été, ne se couche presque pas.
— Ah oui, c’est vrai ! s’est exclamé Larisa en se touchant le front. Je te visite toujours en hiver, et en hiver, c’est le contraire.
— C’est vrai, en hiver, il n’y a pas beaucoup de soleil. Mais en été, c’est tellement vivant, ici ! Vous allez voir, c’est impressionnant. Il y a plein d’activités qui se passent pendant la nuit.
Tout ça, c’était bien beau, mais nous avions tellement faim que nous ne pouvions penser à autre chose. Tour à tour, Larisa et Dmitry nous indiquaient avec excitation des bâtiments et des statues, mais nos estomacs grondaient plus fort que le moteur de la voiture. Dmitry, qui avait déjà mangé et qui avait une course à faire, nous a laissées au Sadko. Mors , boulettes, gâteau, Dostoïevski et numéro de téléphone… Je peux poursuivre là où je m’étais arrêtée.
À notre retour, dans une rue qui porte un nom illisible, Dmitry nous fait visiter son appartement qui sent l’humidité. Les planchers, en bois, craquent sous nos pas. De nombreux murs sont tapissés et les meubles sont anciens. La vieille chaise berceuse dans le salon me rappelle celle qu’avait mon arrière-grand-mère. La télévision à écran plat ne semble pas à sa place, et la tablette électronique, posée sur l’accoudoir du divan, encore moins. Laris

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