Des nuits de sang et d étoiles
156 pages
Français

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Des nuits de sang et d'étoiles , livre ebook

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156 pages
Français

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Description

Sur l'île glaciale de Skane, la Déesse sexprime à travers les couleurs du ciel. Lorsque celui-ci devient rouge, les habitants sont terrorisés car cela signifie quun grave danger est imminent, comme 17 ans auparavant, où la peste avait décimé le village. Dont la mère de la jeune Osa Aussi, quand le ciel sembrase de nouveau, Osa est-elle déterminée à déjouer la prédiction. Bravant les dangers, la jeune fille part demander laide de la Déesse.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 1
EAN13 9791039500432
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’édition originale de ce livre a été publiée pour la première fois sous le titre
« A Shiver of Snow and Sky » aux éditions Scholastic.
© Lisa Lueddecke, 2017, pour le texte
© Scholastic Ltd, 2018
 
© Éditions Auzou, 2018, pour la traduction française
24-32 rue des Amandiers, 75020 Paris
 
Direction générale : Gauthier Auzou
Responsable éditoriale : Krysia Roginski
Responsable studio graphique : Sabrina Regoui
Conception couverture : Alice Nominé
Mise en pages : IGS-CP
Fabrication : Joséphine Boittin
Correction : Agence abcéd’ère/Catherine Rigal
 
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation strictement réservés pour tous les pays.
Loi n o  49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse,
modifiées par la loi n o  2011-525 du 17 mai 2011.
Dépôt légal : octobre 2018
Imprimé en Serbie.
Produit conçu et fabriqué sous système de management de la qualité certifié AFAQ ISO 9001.
 


 
 

AUZOU
 

À mon père.
 
« Même si mon âme est entourée de ténèbres,
Elle s’élèvera vers une lumière infinie.
Et c’est parce que j’ai tant aimé les étoiles,
Que je ne crains pas la nuit. »
 
Sarah Williams
CHAPITRE 1
Skane était bâtie sur des superstitions. Rentreztoujours chez vous en posant le pied droit en premier.Si vous éternuez, cela signifie qu’un de vos ennemis aprononcé votre nom. Ne sifflez jamais en regardant lesoleil, ou vous ferez venir la pluie.
Mais la plupart des croyances concernaient leslumières. Ces lumières étincelantes et colorées quidansaient pour nous la nuit dans le ciel dégagé.
Les lumières étaient le plus souvent vertes. Celavoulait dire que la Déesse était heureuse et que toutse déroulait sans anicroche.
Lorsqu’elles étaient bleues, cela signifiait qu’il allaitneiger. Abondamment. Il valait mieux rassembler ses moutons et ramasser du bois avant que les premiersflocons ne tombent.
Et puis, il y avait aussi les lumières rouges. Lasituation était alors différente, plus rare.
Les lumières rouges étaient un avertissement.
*
Les ondes lumineuses dansaient dans le ciel. Laplupart d’entre nous les appelaient les « lòs », un motqui nous avait été transmis par les chanteurs de runes.Ils avaient traduit ce mot depuis les symboles et lesimages gravés sur les parois des grottes. Les lumièresondulaient, bougeaient comme si le ciel était un lacdans lequel on avait jeté un caillou.
— Que sont les lumières ?
Je posais tous les soirs cette question à mon pèrelorsque j’étais enfant.
Et tous les soirs, il me donnait une réponse différente : « Ce sont les restes du soleil couchant quidansent pour la lune » ; « Ce sont les lumières desétoiles qui se reflètent sur la mer », « Ce sont juste… des lumières. » Je finis par comprendre qu’il n’ensavait rien. Personne ne savait ce qu’étaient les lòs.La Déesse changeait leur couleur, voilà la seule certitude à leur sujet. Ce qu’elles étaient, pourquoi ellesétaient là… tant de mystères qui restaient à ce joursans réponse. Et peut-être à jamais.
L’air se figea et s’alourdit parmi ceux d’entre nousqui observaient le ciel, comme si nous étions au sommet d’une montagne et que le vent avait soudainement arrêté de souffler.
J’avais rejoint quelques villageois assis sur de grosrochers à moitié immergés dans la mer. Lors de nuitscomme celle-ci, lorsque les lumières brillaient si fortqu’elles illuminaient la neige de vives teintes bleues etvertes, nous nous réunissions pour les observer. Quandle ciel réclamait notre attention, nous lui obéissions.
— Elles changent, fit remarquer Ivar à côté demoi.
Mais ses mots résonnaient tels de vagues échos,distants et creux. Mes yeux étaient rivés sur la voûtecéleste et je relevai aussi les changements subtils ci etlà, tandis que les bleus vifs devenaient des roses et des violets. Ces nouvelles couleurs étaient profondes etévoquaient un coucher de soleil.
Mes poils se hérissèrent, mais le frisson qui meparcourait n’était pas provoqué par le froid. La couleur que je voyais à présent dans le ciel se rapprochaitdangereusement d’une autre teinte. Une teinte quepersonne à Skane ne voulait revoir.
C’était il y a dix-sept ans, le ciel devint rougequelques jours avant qu’une épidémie de peste neravage notre village. Une fois installée, la maladieemporta deux cents personnes en quelques jours seulement. Je naquis pendant ce fléau et y survécus. Mamère me mit au monde et mourut. On disait quej’avais de la chance. Un quart des personnes mortespendant l’épidémie étaient des enfants.
J’avais de la chance. Je ne connaîtrais jamais mamère. J’avais de la chance. On m’avait confiée auxfemmes qui venaient d’accoucher. Leurs enfantsconnaîtraient leur mère, son visage et le son de savoix. Ils en garderaient de précieux souvenirs. Je fusguérie et nourrie par des étrangères.
« J’avais de la chance. »
Dix-sept ans, c’était long, mais personne n’avaitoublié. À chaque variation du vert habituel deslumières, même si cela ne durait que quelquessecondes, les villageois retenaient leur souffle.
— Ivar, murmurai-je.
Son prénom résonnait bizarrement dans mabouche, sans rien de familier, quand ma gorge commença à se serrer. D’habitude, la présence d’Ivar merassurait, elle me réconfortait lorsque la vie tentait dem’étouffer ; mais ce soir, sa présence ne changea rien.J’aurais aussi bien pu être seule sur un bateau au beaumilieu de la mer.
Ivar prit une grande inspiration, sa main couverted’une mitaine frôla la mienne.
Sur les bords, les ondes lumineuses changeaient.Bougeaient. Devenaient plus sombres. Une des volutesen particulier, plus haute que les autres, ondulait telleune étoffe dans le vent, elle était presque entièrementpourpre. On aurait dit qu’elle saignait et que le sangse déversait sur les autres lumières, les infectait. Moncorps se refroidit comme si la couleur qui envahissaità présent le ciel était sortie tout droit de mes veines. Les vagues se brisaient en créant une brume lourded’embruns, qui me piquait les yeux, mais je ne pouvais les fermer. Je cherchais désespérément dans leciel des endroits où les lumières n’avaient pas encorechangé, où elles n’avaient pas encore été corrompues,comme si à moi seule je pouvais arrêter ce phénomène.
Il suffit de quelques minutes et le ciel fut entièrement souillé de rouge. Ces lumières rougeoyantespesaient sur nous tous, comme un présage, un avertissement silencieux, accablant que nous ne pouvionstraduire. « Elle approche, hurlait le ciel. La pesteapproche. » Il s’agissait encore de cette peste dévastatrice qui venait nous hanter à quelques décenniesd’intervalle depuis que notre peuple s’était installé surl’île de Skane. Quant à la raison de cette épidémie, ilétait aussi impossible de la connaître que de savoir lenombre de flocons qu’apporterait la prochaine tempête ou encore le nombre de gouttes d’eau nécessairespour remplir la mer.
J’agrippai la roche glacée sur laquelle j’étais assise,mes doigts étaient depuis un moment engourdis malgré mes mitaines. Je pris soudainement consciencede l’extraordinaire dimension des lòs et de ma petitesseen comparaison. « Que suis-je, moi, forme minusculeet inutile, dans ce monde menacé par de terribles évènements ? Combien de ces pauvres hères trouverontla mort d’ici quelques jours ou quelques semaines ? »Une vague de désarroi et de nausée s’empara de moi,je ne parvenais plus à distinguer le ciel de la terre. Jeme pliai en deux, alors que ma tête tournait commesi je tombais dans les espaces noirs qui séparaient lesétoiles. Je fermai les yeux et m’efforçai d’inspirer l’airsec et froid.
« Inspire. Expire. »
Je repris doucement mes esprits en m’accrochantà la roche et en fixant mes yeux sur les quelquesétoiles qui brillaient à travers ce rideau de mauditeslumières rouges. Je m’attendais à ce que la peur paralyse mon cœur et mon esprit à cause de toutes leshistoires que j’avais entendues au sujet du ciel desang, mais ce ne fut pas la peur qui m’envahit. Je fussaisie d’une montée de colère qui dévalait mes veinesjusque-là gelées telle une rivière de printemps. De la colère, parce que j’ignorais pourquoi cela nous arrivait. De la colère

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