Moissons infernales
306 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
306 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Un chemin, une voie, la voie de la saine raison, ouverte sur un monde dans lequel s'active l'assortiment usuel des passions, exacerbant toute une panoplie de forces contraires, aux pouvoirs parfois maléfiques, tel est le propos de ce récit où se mêle le crapuleux ordinaire au fanatisme religieux. Point de parti pris en cela, juste la description d'un monde de douleur, ni condamné à l'abîme ni transporté en un nirvana miraculeusement pacifié. Un récit articulé autour de quatre personnages. Augustin, alerte retraité, secourt un homme, Rachid, d'une agression raciste. Il s'en fera un ami, ainsi que de l'un des deux agresseurs, Fred, et d'un quatrième, Romain, ami de ce dernier, venu compléter la confrérie. Tous quatre seront mêlés à des événements dramatiques, en une confrontation imposée qui leur permettra de les orienter vers une fin heureuse, dans l'unité de leur diversité religieuse et culturelle. Roger Ongaro nous offre un roman comme leçon de philosophie et de tolérance.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 16 juin 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342153637
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Moissons infernales
Roger Ongaro
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Moissons infernales
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
La rencontre
Il était cinq heures du soir ce 15 octobre. Le soleil finissait sa course diurne, prélude à un crépuscule d’arrière-saison, et éclairait encore faiblement la rue Symphorien Combot, presque déserte en ce jour d’un mois d’octobre qui s’était longtemps refusé à annoncer l’automne. Un homme, grand, à la chevelure grisonnante et dont les traits accusaient au moins une soixantaine bien portée, marchait avec nonchalance sur le trottoir en direction de l’avenue de la Marne. Sa carrure, la souplesse de sa démarche, le jeu de ses muscles dans le balancement de ses pas trahissaient l’homme au passé sportif avéré. Nulle hâte ne semblait guider ses pas, mais son œil alerte parcourait l’espace de manière incessante, laissant entrevoir une vive curiosité pour le spectacle de la ville, fort réduit, il est vrai ce jour-là, à cette heure et en ce lieu : quelques voitures passant un bref instant dans le sens unique de la rue qu’il suivait, quelques chalands entrant et sortant des quelques boutiques qui subsistaient alors. Or il advint ce jour-là un événement inattendu qui allait changer pour toujours le cours banal de sa vie. Son attention fut attirée par un groupe de deux jeunes gens, marchant dans le même sens que lui, et qui venaient de le dépasser à sa gauche sur le trottoir d’en face. Deux jeunes hommes forts reconnaissables à leur accoutrement vestimentaire, des familiers du quartier qui ne lui étaient pas inconnus. Il les rencontrait parfois dans cette même rue et dans tout le quartier, silhouettes de jeunes durs, crânes rasés à une époque où cette coiffure se voulait encore un signe, poignets de force, brodequins, blousons et pantalons suggérant un treillis militaire. Ils devisaient gaiement en marchant d’un pas assez rapide. Une conversation banale semblait scander leurs pas. Soudain, notre homme les vit ralentir et paraître se concerter. L’objet de ce changement de comportement lui fut bientôt révélé par son regard porté plus haut. Sur le trottoir suivi par nos deux lascars arrivait en sens inverse, face à eux, un homme correctement vêtu, costume et cravate bleus et mocassins de même ton, mais dont le visage, le teint mat et les cheveux noirs frisés révélaient une origine d’outre-Méditerranée. L’homme que nous accompagnons dans cette rue comprit immédiatement ce qui allait se passer. Assis un jour dans un square voisin, sur un banc proche de celui qu’occupaient les deux compères, il les avait entendus dire tout haut, par provocation peut-être, qu’ils cherchaient à « casser du bougnoule ». Accélérant l’allure il se retrouva à hauteur de ceux-ci au moment exact de leur rencontre avec leur victime potentielle, qu’ils arrêtèrent en faisant mine de lui demander quelque renseignement. Traversant la rue d’un pas rapide, notre homme, dans une inspiration soudaine, sentit la nécessité d’user d’un stratagème propre à suspendre au moins pour un instant le déclenchement de l’agression. Abordant le trottoir au moment où les deux lascars pressaient l’inconnu, il s’avança vers ce dernier la main tendue comme on le fait avec une ancienne connaissance, perdue de vue depuis quelque temps.
— Salut, Momo ! lui dit-il. Comment vas-tu ? Dis, ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vus ! Un an au moins, peut-être deux… Je suis rudement content de te revoir.
Et, avisant la présence des deux compères :
— Mais, excuse-moi, tu es peut-être avec des amis.
L’homme ainsi interpellé, qui n’avait pas bougé, coincé qu’il était entre le mur d’un immeuble et les deux lascars, ébahi par la tournure prise par les événements, répondit simplement :
— Non, ce ne sont pas des amis. Ils voulaient juste me demander si j’avais du feu pour allumer une cigarette.
— Et naturellement tu n’en as pas !
— Non, je ne fume pas.
— Ah, c’est souvent comme ça.
Un sourire ironique, quelque peu narquois, marquait la phrase. S’adressant aux deux jeunes durs, il ajouta :
— Je suis désolé, mais je n’en ai pas non plus !
Puis, s’adressant à nouveau à celui qu’il avait appelé Momo :
— Tiens, pour fêter nos retrouvailles, je t’invite à boire un coup avec moi. Justement on n’est pas loin du bistrot où j’ai mes habitudes, là, juste au coin de l’avenue de la Marne. Comme ça on pourra se parler gentiment.
Puis, se tournant vers les deux compères et s’adressant à eux :
— Excusez-nous, messieurs… Une autre fois peut-être, ajouta-t-il dans une allusion perfide à leur entreprise manquée, dont il n’avait pas mesuré sur l’instant la dangerosité.
Pendant tout ce temps, les deux hommes, médusés, indécis, ne sachant trop quelle attitude prendre, restaient là, inertes, les bras ballants. Ne pouvant se concerter, et dans l’incapacité d’apprécier les capacités de résistance de leurs désormais deux adversaires, un zeste de prudence les retenait. La sûreté recommandait donc à Momo et son compagnon de s’éloigner d’eux le plus rapidement possible, avant qu’ils n’aient pu se déterminer. Prenant son compagnon improvisé par le bras, l’homme l’entraîna à le suivre, et tous deux s’éloignèrent d’un pas mesuré, juste assez ajusté pour ne pas donner l’impression d’une fuite salvatrice.
— Je m’appelle Augustin Thierry – eh oui ! mais mes amis m’appellent Guste.
Aucun son ne sortit de la bouche du présumé Momo, abattu par l’aventure qu’il venait de vivre, toujours sous le coup d’une émotion intense, et pas encore assuré d’être tiré d’affaire. Guste non plus d’ailleurs, car il entendait les pas des deux lascars qui après un instant d’hésitation ayant permis aux deux autres de prendre quelque distance, s’étaient mis à les suivre et semblaient revenir sur eux. Un frisson le long de l’échine avertit Guste que le danger redevenait pressant. Alors, s’arrêtant dans sa marche, imité par Momo qui ne comprenait pas la décision de son compagnon, il attendit d’être rejoint par leurs deux agresseurs potentiels, et s’adressant à eux :
— Au fait, les gars, je crois que vous pourriez demander du feu au bar, là devant nous. Et on pourrait boire un coup ensemble. Pas vrai ! Ce serait sympa, non ? Qu’est-ce que vous en pensez ?
Désarçonnés une nouvelle fois par une proposition aussi inattendue, les deux lascars, à nouveau pris de court, réduits eux aussi à une certaine prudence, à la fois par la carrure de leur interlocuteur et par sa hardiesse à les entreprendre, se regardèrent avec dans les yeux une lueur d’incompréhension.
— Allons, venez, insista-t-il d’un ton volontairement bonhomme. Comme ça on pourra faire connaissance et discuter. On est presque arrivés, le patron est un ami. Alors ? D’accord ?
— D’accord, répondirent-ils, après une ultime hésitation et pratiquement d’une seule voix, sans soupçonner le soupir intérieur de soulagement des deux autres protagonistes.
C’est ainsi que le groupe atteignit le bistrot à l’enseigne « Le rendez-vous des Amis », une petite salle de café fréquentée par des habitués. Le patron des lieux installé derrière son comptoir discutait avec deux consommateurs accoudés au bar, assis sur des chaises hautes devant le « zinc ». Le patron donnait manifestement dans la nostalgie mobilière autant que cabaretière. Les tables étaient de ces tables de bistrot rectangulaires à pieds tournés, que l’on trouvait dans presque tous les cafés avant la guerre, et dont le plateau de noyer, lustré par un long usage du chiffon de nettoyage et de la cire d’abeille, était entouré de quatre chaises dans le même style. La salle était rectangulaire, parallèle à l’avenue de la Marne dans sa plus grande longueur, le bar s’alignait sur le petit côté bâti le long de la rue Combot, près de l’entrée, elle-même percée dans un pan coupé brisant l’angle de façade entre les deux voies. Les murs, dont la partie supérieure était peinte en ocre clair, étaient lambrissés depuis le sol jusqu’à la hauteur d’un mètre environ. Sur le grand côté opposé à l’avenue de la Marne s’ouvrait une porte proche du comptoir donnant sur un petit réduit pourvu de trois portes. Celle de gauche ouvrait sur une petite salle carrée munie d’une fenêtre qui donnait sur une petite arrière-cour. Une autre porte à sa droite portait un panneau indiquant les toilettes, et une troisième conduisait aux cuisines et au domicile du propriétaire. Les deux salles étaient éclairées chacune par deux lustres à trois branches terminées par des luminaires à boules en verre en forme de tulipes, finement gravées et ouvertes vers le bas ; et des appliques murales de même facture complétaient le tout. Une ambiance rétro donc, que ne parvenait pas à démentir le bar, lui-même éclairé par deux rampes lumineuses encadrant une grande glace centrale, flanquée des usuelles étagères sur lesquelles reposent invariablement les variétés de boissons consommables dans l’établissement. Deux autres consommateurs occupaient une table centrale.
— Salut, Jo, lança Guste dès la porte franchie. On va s’installer dans le fond. Pour moi ce sera comme d’habitude. Et il entraîna ses trois invités vers une table placée dans l’angle opposé au bar au-delà de la porte donnant sur la petite salle.
— Salut, Guste, lui répondit Jo, j’arrive dans un instant.
Jo continuant sa conversation avec son client suivait le groupe des yeux, regardant avec insistance les deux plus jeunes d’entr

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents