Les VA-NU-PIEDS
80 pages
Français

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Description

Vie quotidienne d'une famille bretonne etablie au Manitoba. Coutumes, humour, croyances et anecdotes sont racontees avec humour dans une langue facile.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 mars 1992
Nombre de lectures 0
EAN13 9782896118144
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0424€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

2e tirage, 1983
ISBN 0-920944-06-X
PS 8573 .A7
©La reproduction d’un extrait quelconque de cette édition, notamment par photocopie ou par microfilm, est interdite sans I’autorisation écrite des Éditions des Plaines inc.
Dépôt légal à la Bibliothèque Nationale d’Ottawa 3e trimestre 1980
Madeleine Laroche
Les va-nu-pieds

Éditions des Plaines
C.P. 123
Saint-Boniface, Manitoba
R2H 3B4
Préface
Après la lecture d’une humble petite note m’apprenant qu’on écrivait un roman au sujet des Bretons au Manitoba, il n’en fallait pas plus pour me mettre la puce à l’oreille.
En ma qualité de rédacteur en chef de La Liberté je suis allé rencontrer l’auteur.
“Mes parents bretons ont émigré au Manitoba en 1908, pour s’installer dans le petit village de Kerguenan, entre Sainte-Rose-du-Lac et Laurier, où de nombreux autres Bretons s’y installaient en même temps”, raconte Madeleine Laroche.
Attirés au Canada par “la promesse de terres à bon marché”, ses parents, Josèphe et René Pennarun, ont dû trimer dur pour gagner leur croûte dans le petit village de Kerguenan, mot breton qui signifie “village d’abeilles”. Dans le roman de Madeleine Laroche, le nom du village sera changé en celui de Kernevez ou “village neuf”.
Ses parents ont eu huit enfants sur une ferme achetée à bon prix. D’ailleurs, la première école de cette petite bourgade bretonne au Manitoba portera le nom de la famille paternelle, Pennarun. Comme on le sait, le français était réduit à la clandestinité presque dans tous les domaines. “C’est un peu comme à l’époque de mes parents, en Bretagne, à qui on suspendait une cloche au cou s’ils parlaient le breton à l’école”, soulève avec vigueur l’auteur. “D’ailleurs, ajoute-t-elle, je me suis vite rendue compte que la cause française était une cause perdue ici. À l’école, on riait de nous quand on parlait français.”
Après des études à “l’école normale” de Winnipeg, Madeleine Pennarun eut tôt fait de retourner à l’enseignement à l’école de Kerguenan. Ensuite, elle poursuivit sa carrière d’enseignante à Sainte-Amélie, Yorkton, Gladstone et Otterburne. C’est à cet endroit qu’elle prit mari, mais pas nécessairement pays, car pour elle, le petit coin de Bretagne recréé à Kerguenan, au Manitoba, reste toujours la principale source de sa création littéraire.
Qu’écrit-elle au juste? “ J’ai écrit beaucoup de poésie, mais au cours des derntères années, je me suis attachée à rédiger un roman. Je voulais, dans ce texte qui n’est pas un documentaire, montrer au gens du Manitoba une tranche de notre vie bretonne ici”, précise-t-elle.
“Quand on parle des premiers colons, dit-elle encore, on parle beaucoup des Québécois et des Ukrainiens, mais jamais des Bretons . . . moins riches que les autres Français!” Les Bretons possèdent des caractéristiques remarquables. “Le Breton est un type convaincu qui ne démord pas de ses convictions. En d’autres mots, il est têtu. Il ne gaspille rien mais il mange bien. Il est généreux. Il aime la terre comme ses ancêtres qui en faisaient une déesse.”
Une autre caractéristique légendaire des Bretons, c’est la superstition. Les anecdotes ne manquent pas à cet égard: “Nos parents nous faisaient boire un oeuf cru le matin de Pâques — oeuf qui devait avoir été pondu la journée du Vendredi Saint — afin de ne pas avoir de maux de gorge pendant l’année”.
L’authenticité de cette superstition a été vérifiée par Madeleine Laroche qui s’est rendue à deux reprises visiter la Bretagne de ses parents. Voici ce qu’elle m’a dit: “J’ai une cousine en Bretagne qui, encore aujourd’hui, croit aux fantômes. Chaque soir, elle laisse un plat de lait à sa fenêtre pour que les nains puissent venir le boire pendant la nuit et apporter la chance”.
Fasciné par les quelques paroles de la narratrice, j’ai décidé de lui consacrer tout l’espace nécessaire dans La Liberté . C’est ainsi que les lecteurs de l’hebdomadaire ont pu suivre le feuilleton avant de se procurer la publication de cette “histoire bretonne” racontée avec respect et humour.
André-Yves Rompré
à Marie et à Yvonne
Chapitre I
Kernevez
Pour les passants, Kernevez n’était qu’un nom inscrit sur une petite planche au bord de la route.
- Où c’est Kernevez? demandaient-ils, comme si ce probfème était plus pressant que celui des grands politiciens frôlant les bienfaits possibles d’une grande guerre où presque chaque pays du monde entier y participerait. S’ils s’étaient donné la peine de descendre de voiture et de suivre le petit sentier flanqué de deux pins, ils auraient pu jouir d’une promenade exquise. Ce sentier conduisait entre deux haies de “carangana”, tailfées de façon à former deux grands murs verts. Au bout de ces haies, deux lilas se tenaient comme des sentinelles devant un tableau charmant et paisible: on aurait dit un paysage comme on en voit dans un conte de fées.
Il y avait une cabane en rondins, soigneusement blanchie, entourée de “bancs” de fleurs. Les parfums des mignonnettes, des lilas, des oeillets, des roses et des pivoines s’entremêlaient et laissaient momentanément toute personne dans une transe quasi-sen- suelle. Où finissaient les fleurs, se dressait la forêt. Les grands arbres soupiraient, agitaient leurs branches; leurs pieds enfoncés dans un tapis de fougère et de violettes, ils se penchaient, anxieux de protéger ce petit paradis. Un autre sentier partait du seuil de la porte et conduisait au potager et au modeste verger. Derrière le jardin, une demi-douzaine de ruches où des abeilles bourdonnaient sans malice. Kernevez — village neuf.
Le maître de poste, atteint de la nostalgie de son pays d’origine, avait créé en pleincoeur du Manitoba un coin semblable à celui qu’il avait laissé en Bretagne. Un bureau de poste ne fait pas un village, mais monsieur le Manec n’avait pas choisi un nom prétentieux pour son district, et peut-être qu’un jour son bureau deviendrait le noyau d’un petit village? Il rêvait monsieur le Manec.
La route qui reliait les villages l’un è l’autre descendait du sud, faisait un virage de 90° pour dire bonjour à Kemevez, franchissait le pont de la rivière Tortue et tournait à nouveau pour reprendre le nord.
Les habitants de la région formaient un groupe harmonieux. En dépit du fait que les fermes étaient séparées par des grands champs, ils trouvaient le moyen de se voisiner et de s’entraider. Quand on s’aperçut qu’il y avait assez d’enfants pour remplir une école, on la construisit. Une semaine avant l’ouverture des classes, l’école était incendtee, supposément par un vagabond qui s’y était arrêté pour la nuit. Ce fut une catastrophe. Après s’être remis du choc, les habitants en bâtirent une autre. Judicieux Bretons! Cette fois, ils tinrent à ce que l’école soit située assez loin de toutes les families pour ne pas y avoir de jaloux.
Chapitre II
Les Roux
Pas loin de chez monsieur le Manec, juste dans l’angle où le chemin pirouettait de l’est au nord, demeurait la famille Roux. Michel était aussi différent de Marie, en stature et en caractere, qu’un renard l’était d’une brebis. Michel était petit, robuste et maigre, alors que sa femme était forte de taille. Michel était roux, affublé d’une grosse moustache et d’épais sourcils en accent circonflexe; Marie avait le visage pâle et les yeux inquiets. Si Michel s’emportait vite et souvent, sa compagne restait calme et avait le sens de l’humour.
Le couple avait cependant quelque chose en commun. Ils travaillaient de l’aube au crépuscule. Ensemble, ils défrichèrent leur “homestead”, se bâtirent une humble maison en “logue”, une ou deux graineries, une étable, une cabane pour les cochons et une autre pour la volaille. La maison abritait huit enfants qui s’échelonnaient entre quinze et deux ans.
Un soir, au début du mois d’avril, les trois filles et les cinq garçons s’étaient couchés tôt. Marie, tou jours la derntère à se reposer, se préparait à se mettre au lit tout en contemplant les filles couchées dans un grand lit près du sien. Geneviève, l’aînée, dormait légérement, un bras dessous l’oreiller et l’autre encerclant sa petite soeur.
- Même dans son sommeil, Geneviève s’assure du bien-être d’Isabelle. Le regard de Marie se posa sur la petite couchée entre ses deux soeurs. Elle était encore éveillée, à l’aise dans la chaleur du lit. La figure contre le mur, la petite Virginie dormait déjà en serrant un coin de la couverture dans ses mains. Elle n’avait que douze ans, et cependant, elle donnait un bon coup de main quand on avait besoin d’elle pour la besogne coutumière.
Marie souffla la lampe, tira le rideau séparant les deux lits et se glissa entre les draps près de Michel qui ronflait déjà. Fatiguée, elle n’arrivait pas à s’endormir.
- Cinq personnes dans une petite chambre, c’est trop. Il n’y a pas assez d’air. S’appuyant sur le coude, elle ouvrit le rideau tout grand pour laisser circuler la faible brise. Soudain, elle aperçut, éclairé par la lune, un gros rat “caille” qui rampait au milieu de la chambre. Étouffant un cri d’horreur, elle secoua son mari:
- Michel, un rat, un RAT dans la chambre!
- Tu rêves, dors donc.
- Mais non, regarde. Et d’un doigt, elle indiquait le rat qui était maintenant proche de la porte de la chambre. Michel haïssait toute espèce de vermine, spécialement les rats. Furieux, il bondit hors du lit, mais la vilaine créature filait vers la cuisine.
- Cré nom de nom, souffla-t-il, je vais l’abattre cette affreuse bête. Il se dirigea done vers les armes suspendues au mur de la pièce voisine, choisit le plus grand fusil de chasse, y enfila une cartouche, et se rendit à la cuisine. Silencieux maintenant, il fouillait de ses yeux l’ombre de la pièce. Un grand silence y régnait. Impatient, mais toujours aux aguets, il crut entendre le bruit de pas furtifs et celui d’un grignotement. Une lueur provenant de la fenêtre révéla la présence du rôdeur. Se balançant sur sa queue, les yeux luisants, effrontés, il tenait entre ses griffes une croùte de pain. Michel épaula son fusil — pas moyen de voir la mire.
- Tant pis, se dit-il. J’enverrai ce dég

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