148
pages
Français
Ebooks
2013
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
148
pages
Français
Ebook
2013
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Publié par
Date de parution
26 avril 2013
Nombre de lectures
1
EAN13
9782764424216
Langue
Français
Publié par
Date de parution
26 avril 2013
Nombre de lectures
1
EAN13
9782764424216
Langue
Français
De la même auteure
Jeunesse
Le charnier de l’Anse-aux-Esprits , Pierre Tisseyre, 1999.
Un œuf a rêvé , Conte dans le collectif Les œufs/Il était 12 fois… , Le Loup de gouttière, 2000.
Un nuage dans la poche , Le Loup de gouttière, 2001.
Comme une cage grande ouverte , coll. Titan, Québec Amérique, 2004.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
Vézina, Claudine, Le Théâtre des ombres (Titan; 72) Suite de: Comme une cage grande ouverte.
9782764424216
I. Titre. II. Collection: Titan jeunesse ; 72 PS8593.E943T43 2007 jC843’.54 C2006-942201-X PS9593.E943T43 2007
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités d’édition.
Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.
Les Éditions Québec Amérique bénéficient du programme de subvention globale du Conseil des Arts du Canada. Elles tiennent également à remercier la SODEC pour son appui financier.
L’auteure remercie le Conseil des Arts et des lettres du Québec pour son soutien à l’écriture.
Québec Amérique 329, rue de la Commune Ouest, 3 e étage Montréal (Québec) H2Y 2E1 Téléphone: 514 499-3000, télécopieur: 514 499-3010
Dépôt légal: 1 er trimestre 2007 Bibliothèque nationale du Québec Bibliothèque nationale du Canada
Révision linguistique: Liliane Michaud et Diane Martin Mise en pages: André Vallée – Atelier typo Jane
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés
© 2007 Éditions Québec Amérique inc. www.quebec-amerique.com
Sommaire
Page de titre Page de Copyright Dedicace Prologue Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4 Chapitre 5 Chapitre 6 Chapitre 7 Chapitre 8 Chapitre 9 Chapitre 10 Chapitre 11 Chapitre 12 Chapitre 13 Chapitre 14 Chapitre 15 Chapitre 16 Chapitre 17 Chapitre 18 Chapitre 19 Chapitre 20 Chapitre 21 Chapitre 22 Chapitre 23 Chapitre 24 Chapitre 25 Chapitre 26 Chapitre 27 Épilogue Glossaire Remerciements
À Ludovic, Loïc et Hadrien, trois phares dans ma vie... Je vous aime tant !
Prologue
Il arrive parfois que les battements du cœur ne suffisent pas. Quand le passé nous suit, pas à pas, et que les souvenirs deviennent envahissants, comme une boussole qui perd le nord, la raison cherche l’essentiel sans y parvenir. Depuis son retour du Japon, c’est un peu ce que vit Chloé. Le visage de son père, traqué, souffrant, la hante. Les heures doucereuses passées en compagnie de Kiku obaa san 1 lui manquent. Comment désormais conjuguer le passé au présent ? Comment compléter l’arrimage entre Masami et Chloé, sans rien sacrifier, briser, sans rien oublier ?
Auprès des Kawabata, à Kyoto comme à Takao, sa vie japonaise lui inspira un nouveau regard sur elle-même, une sorte de japonitude qui coule maintenant dans ses veines. De Kiku, Chloé apprit l’attention tranquille, la minutie, la patience. Avec Masahiro, elle goûta l’amour et le respect. Or, c’est à son père qu’elle doit ces rencontres déterminantes. N’eût été de son kidnapping, qui sait ce qu’elle serait devenue ?
À présent, plus rien n’est pareil : son père est mort, emportant avec lui tous ses secrets, laissant derrière lui sa fille dévastée par la honte, les doutes, les regrets… et infiniment seule. Du premier jour de son enlèvement jusqu’à aujourd’hui, trois années se sont écoulées, et Chloé n’a jamais cessé d’en souffrir : au bout du monde, dans les montagnes du Yémen, en Égypte, à Tokyo avec son père… Même chez les Kawabata, temporairement privée de son identité par une brève amnésie, Chloé vécut difficilement cette singulière solitude intérieure. Elle a cru un moment que son retour à une vie plus normale, avec sa mère et sa sœur, à Montréal, l’apaiserait lentement, finirait par lui prodiguer suffisamment de réconfort pour qu’elle reprenne contact, restaure la confiance perdue… Paradoxalement, auprès de sa « vraie famille », Chloé ne s’est jamais sentie aussi isolée. Son profond désir de blanchir l’acte de son père, a priori répréhensible, irrita sa mère qui lui opposa une fin de non-recevoir. En dépit des demandes répétées de Chloé, personne ne se montra intéressé à faire la lumière sur le meurtre de son père, pas plus qu’à tenter de comprendre le mobile qui l’avait poussé à enlever sa fille.
Lorsqu’elle a soufflé ses dix-huit bougies, le 7 juillet dernier, Chloé avait beaucoup d’attentes et une liste assez longue de requêtes, mais ce qui lui importait le plus, c’était de retrouver Masahiro, son premier grand amour. Pendant dix-huit longs mois, elle s’était refusé le droit de lui donner signe de vie… «Quelle Masami reverrait-il?» Il fallait bien un jour que cesse cette pudeur qui les privait tous les deux inutilement du bonheur simple d’être ensemble, d’être deux à nouveau, deux à s’aimer, deux à se rappeler… et, peut-être, deux à enquêter.
Chapitre 1
Lundi matin, autour de la table, on s’efforçait de sourire. Les présentations de la veille avaient ravivé des blessures et des souvenirs chargés d’émotions. Chloé servit à tout le monde un thé japonais qui s’harmonisait parfaitement au teint de Masahiro, sujet au vertige du décalage horaire. Lison, la mère de Chloé, s’humecta poliment les lèvres de l’infusion verdâtre, réprima d’un air hautain la grimace que lui inspiraient ses papilles et repoussa la petite tasse avec un sourire acide. Dix minutes plus tard, les ronrons de la cafetière dissipèrent enfin l’épais silence tombé sur la cuisine depuis que Masahiro s’était joint à elles.
Même Marie, moulin à paroles infatigable, fut contaminée par l’humeur massacrante de sa mère et le malaise grandissant des deux amoureux, fraîchement réunis. Bien qu’elle eût en horreur les conversations convenues, l’atmosphère la faisait tellement suffoquer qu’elle lança quelques classiques du genre : «Quelle heure il serait chez toi?» «Comme ça, c’est la première fois que tu mets les pieds en Amérique!», «Tu dois trouver qu’on mange beaucoup de sucre pour commencer la journée», «C’est vrai que vous mangez du poisson au petit-déjeuner?» Comme Masahiro ne répondait que par monosyllabes, Marie se lassa rapidement et se tut, légèrement exaspérée.
Chloé se leva, soudainement libérée de ses pensées, pour faire une deuxième infusion de thé, mais Masahiro suspendit son geste.
— Je prendrais du café, si ça ne t’embête pas.
Chloé rougit. Elle savait très bien que son sencha était beaucoup trop amer.
— Pas très réussi, ce thé, hein ? J’avoue que j’ai perdu l’habitude.
— Nous ne sommes plus au Japon, Masami. Je veux boire ce que tu bois, ce que tu buvais quand je n’étais pas là.
Chloé regarda Masahiro, hypnotisée par cette étrange voix qu’il avait lorsqu’il parlait français et qu’elle avait oubliée. Elle lui sourit doucement en dépit d’un mal de ventre qui lui tordait de plus en plus les boyaux.
— Tu parles vraiment bien français ! C’est étonnant ! s’exclama Marie.
— « Masami »… Je n’aime pas entendre ce nom. Je préférerais que vous ne l’utilisiez pas. Il évoque pour moi de douloureux souvenirs, dit Lison, les yeux au fond de sa tasse de café, avant d’en avaler la dernière gorgée.
Chloé s’aperçut tout de suite du malaise de son amoureux dans lequel l’avait plongé l’insidieuse remarque de Lison. D’un seul regard, Chloé retint Masahiro qui s’apprêtait à se perdre en excuses interminables. Elle s’adressa ensuite à sa mère sur un ton de défi qui surprit tout le monde, y compris elle-même.
— Personnellement, je trouve «Masami» plus joli et, pour moi, il évoque de très bons souvenirs.
Elle se tourna vers Masahiro qui se mortifiait, la tête basse.
— Je te sers un café au lait ?
— S’il te plaît.
Interloquée par la réplique de sa sœur et pressentant une escalade du pathos, Marie saisit son demi-bagel d’une main et son chocolat de l’autre pour disparaître dans le jardin.
— Heureuse que tout le monde ait retrouvé l’usage de la parole, lança-t-elle avant de sortir.
Chloé s’affairait à faire mousser le lait lorsque sa mère lui fit le coup de la guide touristique.
— Alors, Masahiro, commença-t-elle avec un naturel équivoque, maintenant que le passé est bel et bien derrière nous, comme l’admet ma fille, qu’est-ce qu’il vous plairait de découvrir de Montréal pendant votre séjour parmi nous ?
— Je vous demande pardon ? fit Masahiro qui feignait de ne pas avoir saisi la subtilité de la question.
Chloé arriva aussitôt avec son café au lait qu’elle déposa devant son amoureux avec un large sourire pour sa mère.
— Maman se demande ce qu’elle pourrait faire pour que tu deviennes un parfait Montréalais. Je m’en occupe. T’inquiète pas, maman.
Elle se pencha vers Masahiro pour l’embrasser, mais celui-ci recula, l’air ahuri. C’était beaucoup plus qu’il n’en pouvait supporter. Chloé avait-elle donc complètement oublié l’étiquette japonaise ? D’abord surprise et vexée, elle comprit sa maladresse et dissimula du mieux qu’elle put son trouble.
— Tu veux du sucre ?
— S’il te plaît, répondit-il sans la regarder.
— Si Chloé m’avait prévenue de votre visite un peu plus tôt, je vous aurais concocté avec grand plaisir un itinéraire personnalisé pour vous permettre d’apprécier la diversité architecturale de notre ville et son effervescence culturelle. Vous auriez pu retourner chez vous investi d’une mission d’ambassadeur auprès de vos compatriotes. Mais puisque ma fille a préféré me faire la surprise…
Lison fit une pause, légèrement provocatrice.
— Je suis d’avis que vous commenciez par le Vieux-Montréal pour mieux saisir l’américanité du centre-ville. Et, j’y pense, puisqu’ils t’ont rebaptisée quand tu étais là-bas, Chloé, pourquoi ne pas faire de même avec Masahiro ? On pourrait l’appeler… Voyons voir, que dirais-tu de… Stéphane ?
Chloé était écarlate.
— Tu es vraiment désagréable ! Je ne sais pas ce qui t’arrive, mais l’hormonothérapie te ferait sans doute le plus grand bien. Excuse-la, Masahiro. C’est l’âge. Viens, je t’emmène. Je sais ce qu’il nous faut.