La Bibliothèque de Marcel Proust
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Description

Presque tous les grands écrivains sont de grands lecteurs. Et pourtant, il y a chez Proust quelque chose d’incomparable à cet égard. Baudelaire et Ruskin l’ont influencé. Mme de Sévigné, Racine, Saint-Simon ou Balzac lui servent à étoffer ses personnages, voire à les définir. Critique pénétrant, Proust lui-même fut aussi l’un des premiers maîtres du pastiche. Quant à l’écrivain Bergotte, c’est l’une des grandes figures de la Recherche, où chacun se définit presque par ce qu’il lit ou ne lit pas, par sa façon de lire et même de parler des livres. À l’heure où on célèbre le centenaire de la publication de Du côté de chez Swann, Anka Muhlstein ne se contente par d’examiner les livres que Proust a lus dans son enfance et sa première jeunesse. Elle met au jour ce que les mots, l’écriture, la lecture, les livres, les écrivains, bref le rapport à la littérature dans tous ses aspects, ont de central dans l’œuvre proustienne. Peut-être est-ce même ce qui fait de lui le premier des modernes. Auteur notamment de Napoléon à Moscou et de Garçon, un cent d’huîtres ! Balzac et la table, Anka Muhlstein est historienne et biographe. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 10 octobre 2013
Nombre de lectures 3
EAN13 9782738175038
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0650€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

©  O DILE J ACOB, OCTOBRE 2013
15, RUE S OUFFLOT, 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN 978-2-7381-7503-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Pour Louis
Sommaire
Couverture
Titre
Copyright
Dédicace
Distribution
Introduction
I - Premières influences
II - Incursions étrangères
III - Bons lecteurs, mauvais lecteurs
IV - Le baron de Charlus, un lecteur homosexuel
V - Une seconde langue : Racine
VI - Les Goncourt
VII - Bergotte, l’écrivain fictif
Conclusion
Notes
Du même auteur chez Odile Jacob
Distribution

Je mentionne bien des personnages dans cet essai, et ils ne sont peut-être pas tous familiers au lecteur. Voici donc une liste qui lui permettra de les identifier.
 
Le Narrateur n’a pas de nom de famille. À deux reprises dans le roman, on lui donne le prénom de Marcel. Lorsque je parle de Marcel, il s’agit du Narrateur. J’utilise toujours le nom de Proust lorsque je fais référence à l’auteur.
 
La famille du Narrateur est composée de la mère, du père, du grand-père, de la grand-mère et de ses deux sœurs, de la tante Léonie, qui ne quitte pas son lit ; elle habite la maison familiale dans la petite ville de Combray. Sa cuisinière, Françoise, est à son service depuis si longtemps qu’elle aussi fait partie de la famille.
 
Les Guermantes comprennent Basin, le duc, et son épouse Oriane, son frère Palamède, baron de Charlus, son cousin le prince de Guermantes, sa tante Mme de Villeparisis et son neveu Robert, marquis de Saint-Loup.
 
Albertine Simonet est la jeune fille dont le Narrateur tombe amoureux à Balbec, en Normandie. Elle viendra vivre à Paris chez lui, mais, incapable de supporter sa jalousie maladive et son besoin de contrôler tous ses mouvements, elle finira par s’enfuir.
 
Bergotte , un écrivain admirable, est un des trois grands artistes du roman avec le peintre Elstir et le compositeur Vinteuil.
 
Nissim Bernard , l’oncle d’Albert Bloch, un homme d’affaires juif qui a fait fortune, est un homosexuel ridicule.
 
Albert Bloch est un camarade de lycée du Narrateur, très mal élevé et doté d’opinions littéraires aussi fermes que surprenantes.
Brichot , professeur à la Sorbonne, fidèle des soirées Verdurin, se singularise par son pédantisme, surtout en matière d’étymologie.
 
Charlus , le frère cadet du duc de Guermantes, est un homme brillant, étrange, à la fois doux et violent, dont l’homosexualité sera dévoilée au cours du roman.
 
Françoise , la cuisinière, suit les parents du Narrateur à Paris après la mort de tante Léonie, et devient la gouvernante susceptible et intransigeante du Narrateur.
 
Jupien , un giletier, absolument dévoué au baron de Charlus, s’efforce de satisfaire toutes ses fantaisies. Il finira par abandonner son métier pour devenir, grâce au baron, le propriétaire d’un bordel pour homosexuels.
 
Legrandin , un voisin de campagne, snob redoutable, extrêmement cultivé.
 
Charles Morel , un violoniste talentueux, lâche et corrompu, se soumet à la protection de Charlus, bien qu’il soit également attiré par les femmes. Il rompra avec Charlus après une scène violente orchestrée par Mme Verdurin.
 
Le marquis de Norpois, ambassadeur à la retraite, est l’amant de Mme de Villeparisis et un ami du père du Narrateur.
 
Robert, marquis de Saint-Loup , le meilleur ami du Narrateur, est passionnément amoureux de Rachel, une actrice juive, mais finira par épouser Gilberte Swann.
 
Charles Swann , le fils d’un courtier juif, est un vieil ami de la famille du Narrateur et leur voisin de campagne. Il est également un intime des Guermantes. Son goût artistique, ses connaissances en matière de littérature sont reconnus et appréciés de tous. Après une longue et tumultueuse liaison, il finira par épouser Odette de Crécy, une dame à la réputation douteuse. Ils auront une fille, Gilberte.
 
Le marquis de Vaugoubert est ambassadeur à la cour fictive du roi Théodose.
 
M. et Mme Verdurin ont un salon aux prétentions artistiques sur lequel Mme Verdurin, la patronne, règne avec autorité. Implacable, elle en exclut toute personne soupçonnée d’indépendance. Elle et son mari sont passés maîtres dans l’art de masquer leur ambition mondaine.
 
Vinteuil , un compositeur, vit une existence si modeste et si retirée à Combray que personne, parmi ses voisins et ses connaissances, n’imagine qu’il puisse être un artiste génial. Sa fille, toujours appelée Mademoiselle Vinteuil, est portée vers les femmes, au grand désespoir de son père.
Introduction

Mon titre peut prêter à confusion : la bibliothèque dont je vais meubler les rayons est-elle matérielle ou virtuelle ? La réponse est aisée. Si je m’étais préoccupée des livres tangibles de Proust, je n’aurais pas eu grand-chose à en dire. Proust quitta l’appartement familial à la mort de sa mère, en 1905. Il avait trente-quatre ans. Grâce aux conseils de Mme Catusse, une amie de Mme Proust qui l’aida dans le choix des meubles à garder, il s’installa boulevard Haussmann en emportant des caisses de livres. Je doute fort qu’il les fît jamais déclouer. Toute sa vie il se plaignit qu’elles encombraient sa salle à manger, toute sa vie il emprunta les livres les plus courants à ses amis et toute sa vie il se plaignit de ne pas avoir sous la main les volumes dont il avait besoin. Il lui arrivait de prêter à Georges de Lauris un livre qu’il venait d’acheter, un Sainte-Beuve ou un Mérimée, et de lui recommander de le garder au cas où lui, Proust, en aurait besoin : « Chez moi il se perdrait. » En fait, cela avait peu d’importance. Les livres qui comptaient, il les avait dans sa tête et peut-être décrivait-il la sienne en évoquant celle de Saint-Loup, l’ami aristocratique et intellectuel du Narrateur de La Recherche  : « Sa tête faisait penser à ces tours d’antique donjon dont les créneaux inutilisés restent visibles, mais qu’on a aménagées intérieurement en bibliothèque 1 . »
Qu’ils suivent une tradition établie ou qu’ils s’élèvent contre elle, qu’ils se considèrent classiques ou révolutionnaires, rares sont les écrivains qui ne sont pas aussi de grands lecteurs. Proust ne fait pas exception à cette règle. Dès son enfance, la lecture a été une source constante de plaisir et d’exaltation. Il se distingue cependant de ses collègues par l’immense rôle que la littérature joue dans son œuvre.
Proust semble incapable de créer un personnage sans lui mettre un livre entre les mains. Deux cents personnages habitent le monde qu’il a imaginé, et une soixantaine d’écrivains flottent autour d’eux. Si l’influence de Chateaubriand et de Baudelaire est surtout sensible dans la manière dont lui, le romancier, a envisagé son livre, en revanche Mme de Sévigné, Racine, Saint-Simon ou Balzac servent avant tout à étoffer ses personnages. Enfin, Proust est si imprégné des œuvres de ses auteurs de prédilection qu’il accorde une place importante dans son roman à leurs personnages. Ainsi, la Phèdre de Racine est intimement liée au Narrateur, et Charlus ne serait pas lui-même sans le soutien du Vautrin de Balzac.
Il y a autant de manières d’aborder un roman aussi complexe que La Recherche qu’il y a de lecteurs. J’ai choisi, pour ma part, d’en fouiller le tuf pour éclairer des sujets aussi variés que les affinités littéraires de Proust, sa passion pour les grands classiques du XVII e  siècle, sa curiosité des écrivains contemporains et l’incroyable habileté avec laquelle il truffe de citations le dialogue de ses personnages. Ses amis prétendaient qu’il avait tout lu et n’avait rien oublié. Un livre qui s’attacherait à sonder son immense culture risquerait fort d’être aussi long que La Recherche. Mon ambition est plus modeste : examiner les livres qu’il a lus dans son enfance et sa première jeunesse, ces livres qui l’ont transformé en un lecteur passionné et lui ont permis d’échapper aux confins du monde enfantin ; souligner l’influence de Ruskin et de Baudelaire, influence souterraine, parfois difficile à déceler et pourtant essentielle, et enfin accorder une attention particulière à Racine et à Balzac. Proust a lu les tragédies du premier et les romans du second d’une manière si personnelle qu’on retrouve leurs personnages et leurs tics de langage dans les contextes les plus inattendus.
Proust s’est toujours défendu d’avoir écrit une œuvre autobiographique, mais la tentation d’éclairer le Narrateur par l’auteur est toujours présente, d’autant plus que Proust a donné son prénom au Je de son livre. Dans cet essai, Proust désigne toujours l’écrivain, et Marcel ou le Narrateur font référence au Je du roman.
I
Premières influences

Comment Proust lisait-il ? Dans son enfance, comme nous tous : pour l’histoire et pour les personnages. Pourtant, même tout jeune, il prenait la lecture très au sérieux, et le fait que les grandes personnes tenaient cette occupation pour un simple passe-temps le scandalisait. « Comment tu t’amuses encore à lire, ce n’est pourtant pas dimanche, grondait ma grand-tante, en donnant au mot amusement le sens d’enfantillage et de perte de temps 2 . » Pour le petit Marcel Proust, comme pour l’enfant de Combray, la lecture était un acte traumatique et non pas une distraction. Il pleurait chaque fois qu’il finissait un livre, n’arrivait pas à s’endormir tellement il était désolé de se séparer de personnages pour lesquels il s’était pris

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