Dynamique et perspective des français d Afrique subsaharienne
216 pages
Français

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Dynamique et perspective des français d'Afrique subsaharienne , livre ebook

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Description

Il faut le dire tout de suite : ce livre témoigne des relations – que l'on ne peut mettre en doute – tributaires des changements d'une langue chaque fois qu'elle change de lieu et qu'elle s'acclimate dans son nouvel environnement. Cette langue est alors appréhendée comme une voix de son mariage avec le lieu tangible, en même temps qu'elle témoigne de possibilités nouvelles de sens orientées vers ce mariage. C'est que, malléable, éclatée, dispersée, la langue – en passant entre et sous les mots, par la dissipation dans les vocables de la logique discursive d'ici, de là, de là-bas – s'ouvre à l'expérience de laisser parler le lieu tangible. Car, parce que son réel coïncide avec son lieu d'actualisation et l'imagination créatrice de ses locuteurs, il n'y a plus « le français d'Afrique subsaharienne », mais « des français d'Afrique subsaharienne », non pas une forme figée, mais un ensemble de pratiques mouvantes qui se solidifient.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 juillet 2016
Nombre de lectures 3
EAN13 9782342053739
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0041€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Dynamique et perspective des français d'Afrique subsaharienne
Jean-Alexis Mfoutou
Connaissances & Savoirs

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Connaissances & Savoirs
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Dynamique et perspective des français d'Afrique subsaharienne
 
 
 
 
Abréviations de mots
 
 
 
adj .,        adjectif
adv .,        adverbe
Ant .,        antonyme
chap.,         chapitre
Coréf.,         coréférent
fém .,        féminin
intr .,        intransitif
invar.,         invariable
loc .,        locution
loc. adj .,        locution adjectivale
loc. adj. ou adv .,        locution adjectivale ou adverbiale
loc. adv .,        locution adverbiale
loc. nom .,        locution nominale
loc. verb .,        locution verbale
masc .,        masculin
n .,        nom
n. et adj.,        nom et adjectif
n. fém.,        nom féminin
n. masc.,        nom masculin
n. masc. pl.,        nom masculin pluriel
nom .,        nominal
pl .,        pluriel
précéd.,         précédent
qqn.,        quelqu’un
sing.,         singulier
suiv.,         suivant
Syn.,         Synonyme
tr.,        transitif
v.,        verbe
verb.,         verbal
v. intr.,        verbe intransitif
v. tr .,        verbe transitif
V.,         voir (indication de renvoi).
 
 
 
Introduction. À la recherche du sens
 
 
 
Le présent ouvrage a pour objectif d’ouvrir la recherche sur les mots du français et leurs sens en Afrique subsaharienne.
Par-delà leur prise en charge par des communautés humaines différentes, il s’agit d’ouvrir aussi les mots et leurs sens à la perspective complémentaire – à la fois indispensable et novatrice – pour l’acclimatation même de la langue dans tel ou tel lieu tangible. C’est de la vie des mots et de la langue – celle qui est en usage ici, là, là-bas et qui s’oppose à la Langue : objet presque magique dont les mots devraient représenter, dans une vue aristotélicienne de cette Langue, l’essence même des choses – dont il s’agit en chaque lieu. Nous pourrions même parler de « bonne santé de la langue », entendue en son sens positif. Comprenons : celle qui est promue chez les locuteurs de tel ou tel espace communicationnel, de telle ou telle catégorie socio-culturelle, dans telle ou telle culture. C’est-à-dire celle en fonction de laquelle se forgent et se justifient les évolutions sémantiques en chaque lieu. « Sémantique, formé sur le grec « sêmainô » (signifier), nous apprend le sémanticien P. Guiraud (1969 : 6) lui-même dérivé de « sêma » (signe) est à l’origine l’adjectif correspondant à « sens » : un changement sémantique est un changement de sens, la valeur sémantique d’un mot c’est son sens ; puis du mot on l’applique à tout signe ; on parle de la fonction sémantique des couleurs dans le blason ou les pavillons de la marine, de la valeur sémantique d’un geste, d’un cri, d’un signe quelconque au moyen duquel nous transmettons un message et nous entrons en communication avec autrui. Est sémantique tout ce qui concerne le sens d’un signe de communication et tout particulièrement les mots. »
L’objet de ce livre – la sémantique linguistique – étudie les mots au sein de la langue : qu’est-ce qu’un mot, quelles sont les relations entre les formes et le sens d’un mot dans telle ou telle communauté humaine ? etc.
On reconnaît aisément dans l’expression « bonne santé de la langue » – nous ne l’avons pas pensée dans la littérature courante, mais rencontrée chez les locuteurs ayant accepté de répondre à un questionnaire sur l’imaginaire linguistique – le souci de prendre en compte à la fois la langue telle qu’elle est effectivement parlée et l’image, les représentations que les locuteurs ont de leur manière de parler. Cela nous a paru exiger de nouvelles investigations, complémentaires des précédentes qui se limitaient par exemple – pour le cas du français en Afrique subsaharienne – à faire un inventaire des particularités lexicales. Notre réflexion porte sur la notion de « santé de la langue », sur l’évolution de celle-ci, sur ses variations sociales et géopolitiques, bref, sur son état de santé en rapport avec l’environnement, ainsi que sur sa gestion personnelle et communautaire la plus conforme en chaque lieu. De la sorte, notre préoccupation première devient le point de départ de nouvelles recherches pluridisciplinaires.
Notre réflexion sur la « santé de la langue française » en Afrique subsaharienne, en effet, nous l’avons ordonnée au long des deux grandes parties de ce livre (chap. 1 et 2).
Dans le chapitre 1, nous avons présenté le corpus. Comment les mots sont-ils formés ? Comment apparaissent-ils dans le discours ? Ainsi, nous avons parlé des homophones, de la dérivation, ainsi que du sens prédictible et du sens attesté des mots.
Poursuivant la réflexion, nous avons dans le chapitre 2 montré l’évolution sémantique des mots dans différents pays d’Afrique noire francophone. Ce chapitre 2 est un vivant reflet des transformations des sociétés africaines (voir par exemple baignoire, bailleur, banquier,  etc., cf. chap. 2). Nous avons montré les différentes évolutions sémantiques d’un même mot en fonction de l’environnement dans lequel ce mot est utilisé. La langue apparaît ainsi en transition entre l’idéal et la réalité de sa pratique effective dans des environnements différents. Et comme ce glissement de l’expérience vécue par la langue dans la généralité, c’est ce qui caractérise la parole ordinaire des locuteurs, il est naturel que le souci du sociolinguiste s’attache aux mots, et s’efforce d’allier langage, locuteur et environnement. Langage, locuteur et environnement sont, en effet, associés l’un à l’autre dans cette recherche. Et comment sont-ils présents dans ce que nous tentons de comprendre, sinon pour chacun d’eux, par leur mode d’être et de se manifester, qui dans ce cas constitue un rythme.
Les souvenirs, les accents que les locuteurs gardent placés sur des moments, les instants vécus plus intensément que d’autres dans un environnement donné, se portent ainsi en avant ou demeurent présents – et c’est là un mouvement qui a ses hésitations et ses décisions – dans le sens des mots, dans la manière de parler d’une communauté humaine (voir par exemple appolo, effort de guerre,  etc., chap. 2), dans le comportement langagier des locuteurs qui peuvent ou non utiliser tel ou tel mot à l’oral et/ou à l’écrit (cf. chap. 2).
Nous verrons dans cet ouvrage que du fait de ce rythme, la langue prend appui, pour sa nécessaire acclimatation – et sa confiance aux locuteurs – sur ces autres rythmes, de l’environnement, de l’histoire, etc., que sa condition terrestre lui enseigne ou même fait vivre en elle : la manière de parler d’une communauté humaine est un rythme, le rythme permet à la langue de rester en accord avec le lieu de son actualisation, c’est-à-dire de se réconcilier, en chaque milieu, avec elle-même (voir par exemple baignoire, bailleur, caleçon, tablette, etc., chap. 2).
 
Nous savons que c’est par des impressions visuelles que le lieu se manifeste à l’être humain le plus souvent, mais il n’est pas moins vrai que c’est aussi par des sortes d’évocations que les locuteurs ont précieusement conservées dans leur parole, qu’ils ont pouvoir de décrire ce qu’ils voient, de l’inscrire dans leurs mots et les sens qu’ils assignent à ceux-ci (voir par exemple, bouger, bousiller, cabanon, caïman, caleçon, carré, circuit, chiffonner, ceinture, carte de photo, etc., chap. 2). Les sens différents d’un même mot ici ou là prouvent cependant que la parole ne garde évidemment pas la totalité de l’impression qui a fait tel ou tel lieu ou telle ou telle réalité extralinguistique au moment de sa rencontre – cette infinité d’aspects et des sens des mots vécus ensemble par les locuteurs d’une même langue –, mais elle sait dire que l’on était alors dans un lieu, que l’on verbalisait ce qu’il avait de particulier (voir par exemple ceinture, damer, barrer, doungourou, etc., cf. chap. 2). Souvenirs visuels, souvenirs linguistiques aussi, ou même de saveurs ou d’odeurs. Et cela, c’est donc parler d’une manière donnée et non autrement, c’est signifier le lieu tangible d’alors, ce lieu d’un certain moment et d’une certaine culture, en son être même – en ce qu’il a de particulier, de spécifique, qui est l’élément fondamental dans lequel la langue se ressource.
Nous verrons dans ce livre que le sens d’un mot, c’est assurément le fauteur sinon de trouble, du moins d’illusion : rien de ce qu’il dit ne peut s’inscrire dans le champ du réellement partageable par tous, car il n’est qu’une suite de représentations toujours incomplètes que n’enchaîne que le regard des locuteurs dans un environnement donné, non la loi du monde. Mais en cela même, que fait-il, sinon parler aux locuteurs immédiatement, constamment du réel extralinguistique tel que les locuteurs croient qu’il est.
Le sens n’est pas dans la nature, il se réduit à sa seule émergence, porté à la fois par les réalités socioculturelles, l’imagination des locuteurs et par on ne sait quoi dans l’invisible (voir par exemple barrer, corbeau, descendre, descente, doungourou, etc., cf. chap. 2). Mais dans l’acte même de sa présence – alors que tout ce qui existe est à chaque instant du regard des locuteurs déjà dispersé, éclaté, dans et par les emplois multiples que les savoirs et les besoins des locuteurs projettent sur eux – le sens d’un mot est appelé à évoluer d’un environnement à un autre (Burkina Faso, Cameroun, Congo-Brazzaville, Côte d’Ivoire, Gabon, Tchad, etc., cf. cha

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