LA Mondialisation : une maladie imaginaire
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Description

Depuis une trentaine d’années, on a tendance à amplifier, parfois grossièrement, la portée de la mondialisation et à en déformer la réalité. Selon plusieurs, l’accélération de la mondialisation conduit à l’avènement d’un monde « sans frontières », exacerbant la concurrence entre les nations.
Ces critiques face à la mondialisation sont-elles justifiées ? C’est en examinant les données sur la performance économique et sociale des pays sociaux-démocrates et libéraux, en décortiquant la situation de l’emploi et en expliquant les inégalités qui y sévissent que nous pouvons cerner la portée de la mondialisation dans nos vies. Les conclusions sont claires : l’État-providence est bien vivant et la social-démocratie est toujours le modèle économique et social le plus performant.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 mars 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9782760644038
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Stéphane Paquin
La mondialisation: une maladie imaginaire

Les Presses de l’Université de Montréal


La collection «Le Monde en poche» est le fruit d’une collaboration entre le Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal (CÉRIUM) et les Presses de l’Université de Montréal (PUM). Elle braque les projecteurs sur les grands enjeux internationaux de l’heure. L’éclairage se veut critique et le propos accessible. Chaque ouvrage présente une analyse, une réflexion et une mise en contexte historique et interdisciplinaire qui vont au-delà de l’actualité.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Titre: La mondialisation: une maladie imaginaire / Stéphane Paquin. Noms: Paquin, Stéphane, 1973- auteur. Description: Mention de collection: Le monde en poche Comprend des références bibliographiques. Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20210042486 Canadiana (livre numérique) 20210042494 ISBN 9782760644014 ISBN 9782760644021 (PDF) ISBN 9782760644038 (EPUB) Vedettes-matière: RVM: Mondialisation. RVM: Automatisation. RVM: Économie politique et politique. Classification: LCC HF1365.P37 2021 CDD 337—dc23 Mise en pages: Chantal Poisson Dépôt légal: 1 er trimestre 2021 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2021. www.pum.umontreal.ca Les Presses de l’Université de Montréal remercient de son soutien financier la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).





Introduction
Rien n’explique mieux la nostalgie du bon vieux temps… qu’une mauvaise mémoire. Malgré une croissance sans précédent de la richesse depuis la Seconde Guerre mondiale, la mondialisation et l’automatisation provoquent un mécontentement grandissant dans les pays développés et engendrent, dans une partie de la population, un sentiment de déclassement économique et social qui remet en cause ses principes et ses conséquences. Ironiquement, c’est aux États-Unis que ce mécontentement paraît à son comble – États-Unis qui sont pourtant les principaux architectes de l’ordre économique des dernières décennies.
Depuis les années 1990, l’accélération de la mondialisation conduit, selon plusieurs, à l’avènement d’un monde «sans frontières». La terre est plate, affirme Thomas Friedman, chroniqueur au New York Times , ce qui exacerbe la compétition mondiale entre les nations. Cette dernière est plus intensive et intrusive que par le passé et soulève aussi plus d’inquiétude qu’autrefois.
Le scepticisme qu’inspire la mondialisation se traduit notamment par un appui accru aux partis populistes, qu’ils soient de droite ou de gauche. Même si le populisme (le peuple face à «l’élite») réunit une vaste gamme de mouvements politiques, ces derniers ont en commun leur opposition à la mondialisation. À droite, on tend à être réfractaire à l’immigration, on pleure le déclin de la souveraineté nationale; à gauche, on s’inquiète des effets du libre-échange et de l’automatisation sur les travailleurs et sur l’emploi, on déplore l’effondrement de l’État-providence et de la social-démocratie, la concentration de la richesse (le fameux 1%) et la montée des inégalités.
Ces critiques sur la mondialisation sont-elles justifiées? Celle-ci est-elle coupable de tous ces maux? Et si oui, de quelle façon? Autrement dit, comment agissent vraiment la mondialisation, le libre-échange et l’automatisation sur l’État, les programmes sociaux, l’emploi et la social-démocratie?
Sans surprise, on a tendance à amplifier, parfois grossièrement, la portée de ces phénomènes, aussi réels et importants qu’ils soient, et à déformer la réalité. Tout comme le malade de Molière redoute la maladie et en exagère les manifestations, on redoute la mondialisation et l’automatisation et en exagère les symptômes. On convoque alors les médecins, des charlatans le plus souvent, qui prescrivent force médicaments inutiles, voire dangereux. Mais quelles sont ces exagérations, quels sont ces mythes qu’inspire la mondialisation? On dit que les États et les États-providence battent en retraite, que les taxes trop élevées nuisent à l’exportation, que les gouvernements n’ont d’autre choix que de réduire les dépenses publiques, que la social-démocratie est en crise et que si ce n’était de la mondialisation, tout irait pour le mieux.
C’est en examinant froidement les données sur les performances économiques et sociales des pays sociaux-démocrates et libéraux, en décortiquant la situation de l’emploi dans ces pays et en comprenant la raison des inégalités qui y sévissent que l’on pourra réellement cerner la portée de la mondialisation sur nos vies. Il faudra aussi, certainement, garder à l’esprit le fait que cette mondialisation si critiquée est loin d’être aussi intense qu’on veut bien le dire. Et l’on verra alors qu’en fin de compte, eh bien non, celle-ci n’a pas tué l’État-providence ou la social-démocratie, contrairement à ce que croient les uns et les autres.


Dégonfler les mythes
Avant de comprendre les effets de la mondialisation, de la concurrence internationale, du libre-échange et de l’automatisation sur l’emploi, les inégalités, sur l’État-providence, les exportations des pays développés et la social-démocratie, il faut savoir, comme l’ont montré plusieurs études, que certains politiciens, médias, acteurs du monde de l’entreprise et universitaires tendent à en exagérer l’ampleur.
Ainsi, lorsqu’on demande par sondage à des citoyens, à des étudiants du monde entier, à des gens d’affaires ou encore à des représentants des pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) d’estimer l’importance de la mondialisation en tenant compte de ses diverses catégories – que ce soit les communications, le commerce international et les investissements directs étrangers –, comme l’a fait Pankaj Ghemawat, professeur à la Stern School of Business à l’Université de New York, les répondants en exagèrent systématiquement les grandes tendances, et de beaucoup 1 .
L’ancien professeur de santé publique internationale à l’Institut Karolinska de Stockholm, Hans Rosling, confirme cette inclination. Dans le cadre de ses recherches, il a mené des sondages sur les grandes tendances mondiales, par exemple sur la proportion de la population mondiale qui vit dans l’extrême pauvreté, sur l’espérance de vie dans le monde ou encore sur les changements climatiques. Il a découvert que les réponses qu’il recueillait se révélaient systématiquement fausses. Elles s’écartaient à ce point de la réalité que, selon lui, un chimpanzé choisissant une réponse au hasard aurait mieux cerné les faits que les professeurs d’université, journalistes, banquiers et lauréats du prix Nobel d’économie auxquels il avait soumis ses questionnaires 2 . Mais alors, si même les spécialistes surestiment le phénomène, comment savoir ce qu’est au juste que la mondialisation?
Une définition
On peut définir la mondialisation comme un ensemble de processus, technologiques, politiques ou économiques, qui conduisent à une diminution des obstacles aux échanges et qui accentuent l’interdépendance mondiale dans différentes sphères d’activité: économie, commerce, finance, culture, immigration, etc. Même si la recherche sur la mondialisation constitue un champ relativement récent, la réalité que décrit le mot est cependant très ancienne: le commerce international, les investissements étrangers, les multinationales, les pandémies, les mouvements migratoires existent depuis longtemps. Sans utiliser le concept de mondialisation, cela fait ainsi plusieurs siècles que les auteurs décrivent la chose.
Adam Smith, par exemple, dans sa magistrale Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations , publiée en 1776, écrit sur la mobilité internationale des capitaux. Il soutient que contrairement à la terre, le capital est mobile et que son détenteur peut déplacer ses avoirs à l’étranger lorsqu’il se trouve soumis à un impôt «onéreux». Et en investissant à l’étranger, il forcerait la fermeture des industries locales que son capital finançait.
Un autre exemple plus frappant encore nous vient du Manifeste du Parti communiste publié en 1848. Dans cet opus, Karl Marx et Friedrich Engels mentionnent très explicitement les modalités de la mondialisation telle qu’on la conçoit de nos jours: le marché mondial, l’industrie qui perd progressivement sa base nationale, des matières premières en provenance du monde entier… Les auteurs écrivent même qu’aux nations autosuffisantes se substitue progressivement une «interdépendance universelle des nations».
L’économiste britannique John Maynard Keynes a également largement décrit la mondialisation au début du XX e siècle. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, il estime que «le cours ordinaire de la vie économique et sociale» est presque entièrement mondialisé. Dans Les conséquences économiques de la paix , publié en 1919, il soutient qu’un Londonien peut commander des produits, jouer sa fortune à la bourse ou encore voyager aux quatre coins du monde sans la moindre difficulté.
Si le phénomène n’a donc rien de nouveau, il existe un consensus pour parler de deux mondialisations en particulier. La première survient à la fin du XIX e siècle, avant d’être freinée par la Première Guerre mondiale, la Grande Dépression et finalement la Seconde Guerre mondiale. La deuxième mondialisation débute en 1945. Selon plusieurs, elle s’accélère pour atteindre des niveaux sans précédent dans les années précédant la crise de 2008. Certains spécialistes, comme Dani Rodrik de l’Université de Harvard, parleront d’«hyperglobalisation» pour décrire cette période. Depuis, la mondialisation de l’économie se maintient à un niveau élevé malgré un léger recul depuis 2008.
L’accélération de la mondialisation entre 1990 et 2008 s’expliq

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