Euromed archéo cours n°4 dendrochronologie
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La Navigation du Savoir - Réseau des Arsenaux Historiques de la Méditerranée UNION EUROPEENNE UNESCO UNIVERSITE DE MALTE PROGRAMME EUROMED - HERITAGE II PROGRAMME MEDITERRANEE MEDITERRANEAN INSTITUTE ___________________________________________________________________________ 1 Groupe de Recherche en Archéologie Navale Sous-projet n°6 Formation aux techniques de l’archéologie sous-marine ___________________________________________________________________________ Cours n°4 Archéologie sous-marine et dendrochronologie Frédéric GUIBAL U.M.R. 6116 C.N.R.S. Institut Méditerranéen d’Ecologie et de Paléoécologie Faculté des Sciences et Techniques Saint-Jérôme 13397 Marseille Cedex 20 Introduction L’étude de la cargaison, du matériel de bord et des monnaies délivrés par les épaves de navires renseignent sur la date du naufrage mais n’apportent aucune information sur la date de construction du navire. Celle-ci peut être connue grâce à l’analyse dendrochronologique des pièces constitutives de l’architecture du navire, rendant ainsi la dendrochronologie particulièrement précieuse pour l’histoire maritime et l’histoire de l’architecture navale. Méthode ...

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Langue Français

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1
La Navigation du Savoir - Réseau des Arsenaux Historiques de la Méditerranée
UNION EUROPEENNE
UNESCO
UNIVERSITE DE MALTE
PROGRAMME EUROMED - HERITAGE II
PROGRAMME
MEDITERRANEE
MEDITERRANEAN INSTITUTE
___________________________________________________________________________
2
Groupe de Recherche en Archéologie Navale
Sous-projet n°6
Formation aux techniques de l’archéologie sous-marine
___________________________________________________________________________
Cours
n°4
Archéologie
sous-marine
et
dendrochronologie
Frédéric GUIBAL
U.M.R. 6116 C.N.R.S.
Institut Méditerranéen d’Ecologie et de Paléoécologie
Faculté des Sciences et Techniques Saint-Jérôme
13397 Marseille Cedex
20
Introduction
L’étude de la cargaison, du matériel de bord et des monnaies délivrés par les épaves de
navires renseignent sur la date du naufrage mais n’apportent aucune information sur la date
de construction du navire. Celle-ci peut être connue grâce à l’analyse dendrochronologique
des pièces constitutives de l’architecture du navire, rendant ainsi la dendrochronologie
particulièrement précieuse pour l’histoire maritime et l’histoire de l’architecture navale.
Méthode
Dans les régions soumises à des climats qui imposent à la végétation une période d'activité et
une période de repos au cours d'une même année, les arbres élaborent chaque année, au
niveau de leurs racines, tronc et rameaux, un anneau de croissance appelé cerne annuel.
L’épaisseur d'un cerne résulte de l’action d'un ensemble de facteurs parmi lesquels entrent en
jeu des facteurs abiotiques dont certains demeurent constants pendant toute la vie de l'arbre
(sol, altitude, exposition, topographie) tandis que d'autres varient au sein d'une même année et
d'une année à l'autre (climat), et des facteurs biotiques variables au cours de la vie
de l'arbre
(âge, concurrence inter-individuelle et inter-spécifique, attaque de ravageurs, interventions
humaines).
L'influence des facteurs climatiques se traduit par un cerne épais lors d'une année où les
conditions météorologiques ont satisfait les exigences climatiques de l'espèce, mince dans le
cas contraire. Si le facteur climatique prime sur les autres facteurs, les mêmes séquences de
cernes minces et de cernes épais peuvent être observées sur les séries de tous les arbres d'une
même espèce poussant sous un même climat ; par exemple, tous les hêtres du nord-est de la
France présentent un cerne très mince lors des années 1960, 1964 et 1976 du fait des
précipitations particulièrement faibles ces années-là.
3
La dendrochronologie vise à synchroniser (interdater) des séries de cernes après avoir
identifié sur différents échantillons des séquences de cernes particulièrement minces ou épais
séparés par le même nombre d’années. Lorsque l’un des éléments comparés est déjà daté à
l’année près, il a une valeur de référence et permet de dater les échantillons avec lesquels il
présente des séquences de cernes minces ou épais communes. La chronologie de référence
(étalon) est établie sur la base de séquences de cernes caractéristiques communs à des séries
partiellement synchrones qui sont recueillies sur des arbres vivants, puis sur des bois plus ou
moins anciens, manufacturés ou non : charpentes, pieux de fondation, arbres subfossiles
conservés dans des sédiments (voir figure). Le résultat revêt l'aspect d'une courbe qui traduit
la variation moyenne de l’épaisseur des cernes annuels au cours du temps d'une espèce
donnée (chêne, hêtre, sapin, mélèze, ...) dans une région géographique dont les limites sont
liées à son identité climatique. La courbe présente une succession de pics (années
climatiquement favorables) et de creux (années climatiquement défavorables) qui, par
comparaison avec la courbe représentative d'un échantillon de bois à dater (pièce d’épave)
permet d’attribuer l'année d'abattage de l'arbre d'où provient l'échantillon, donc dater ce
dernier. Simple dans sa conception théorique, l'élaboration d'une chronologie de référence
valide sur une très longue durée, par exemple, les 2 derniers millénaires, peut se heurter à des
périodes mal documentées et être ralentie pendant plusieurs années.
Dans son application à l’architecture navale, la dendrochronologie peut donc dater l’année
d’abattage des arbres dans lesquels les pièces ont été débitées et aussi préciser la provenance
géographique des arbres utilisés pour la construction du navire.
Limitations et contraintes
Il est donc clair que toute datation absolue par la dendrochronologie exige la disponibilité
d’au moins une chronologie de référence représentative de l’essence et de la région
considérées. Une autre exigence porte sur le fait qu’il est très difficile de dater un échantillon
correspondant à une pièce isolée et qu’il faut travailler sur des lots d’échantillons homogènes,
c.a.d. au moins une douzaine de pièces de la même essence pour un même navire.
Cela est lié au fait que :
1)
Des anomalies anatomiques se traduisent, certaines années, soit par des cernes absents,
soit par des cernes dédoublés, qui viennent fausser le nombre réel de cernes. Ce type
d’anomalie ne peut être détecté qu’en comparant plusieurs échantillons issus d’arbres
différents.
2)
La synchronisation repose sur l'amplification du facteur environnemental régional annuel
au détriment du facteur individuel. Cela passe par l'élaboration de chronologies moyennes
fondées sur la sommation d'au moins une dizaine d'échantillons pour acquérir une
chronologie suffisamment représentative.
3)
Compte tenu des modes de débitage des pièces dans une bille (tronc d’arbre), la datation
de plusieurs pièces au sein d’une même structure garantit une meilleure interprétation de
l’année d’abattage des arbres utilisés.
Deux autres contraintes s’ajoutent aux précédentes. Pour des raisons statistiques, l’analyse
dépend de la longueur des séries analysées, c.a.d. du nombre de cernes présents su les pièces :
sur le terrain, l’échantillonnage doit impérativement porter sur les pièces offrant plus de 60-80
cernes. Enfin, certaines essences
(
ex
. saule, peuplier, essences fruitières) se prêtent mal à la
datation par la dendrochronologie car leur croissance en diamètre dépend davantage des
conditions édaphiques que des conditions climatiques. Soulignons aussi que chez d'autres
4
essences (
ex
. cyprès, olivier), de nombreux cernes dédoublés ou à la concentricité altérée ne
permettent pas d'acquérir des séries de données exploitables.
A la lecture de ce qui précède, on conçoit que dans les tentatives de datation par la
dendrochronologie, l’échec est assez fréquent. A la différence d’une autre méthode de
datation du bois tel le carbone 14 qui arrive toujours à dater la mort de l’organisme étudié en
se basant sur une loi physique et un dosage du carbone 14 résiduel, la dendrochronologie
échoue souvent. Néanmoins, même si les échantillons demeurent non datés, c.a.d.
« flottants », soit pour des raisons liées à l’échantillon lui-même, soit parce que les
chronologies de référence ne sont pas suffisamment performantes, ils présentent un intérêt
réel pour l'archéologue dans la mesure où, si ils sont suffisamment nombreux et si ils
présentent, comme nous l’avons vu ci-dessus, plus d’une soixantaine de cernes, ils peuvent
renseigner sur : a) la date relative de leur mise en place (réparation, remploi) et donc préciser
la durée de navigation du navire, b) le nombre et l'âge des arbres utilisés pour la structure
étudiée, c) la façon selon laquelle
les billes furent travaillées, d) certaines caractéristiques de
la formation forestière d’où proviennent les billes (degré d'ambiance sylvatique, mode de
traitement sylvicole, perturbations diverse, ...).
Enfin, il doit être souligné que nombreux sont les cas dans lesquels le gisement étudié ne
soulève aucune question d’ordre chronologique. Dans ce type de situation, il ne faut pas
oublier que les séries de cernes issues d’un tel gisement peuvent contribuer à améliorer l’état
des référentiels, soit en comblant une lacune chronologique de la chronologie de référence
locale, soit en contribuant à initier un référentiel propre à une région nouvelle : en
conséquence, il est d’intérêt public, pour les études futures, d’alerter la communauté des
denrochronologues pour qu’un de ses représentants puisse venir recueillir des données qui,
plus tard, s’avéreront précieuses.
Application à la Lomellina
La première application de la dendrochronologie à l’épave
Lomellina
eut lieu au cours des
campagnes 1989 et 1990.
Un premier prélèvement fut d’abord effectuée sur un ensemble de pièces très facilement
accessibles, toutes débitées dans du chêne. Ces pièces qui n’étaient pas en place au moment
du prélèvement étaient interprétées comme des éléments de cloisons : une date d’abattage de
1478 fut obtenue. Cette date d’abattage était peu compatible avec la longévité des grands
navires ronds de l’époque estimée en moyenne à une douzaine d’années, faisait de la
Lomellina
un navire anormalement âgé au moment du naufrage.
Une deuxième série de prélèvements fut réalisée en 1990 sur des varangues trouvée en place.
Ces dernières faisant sans aucun doute partie de la structure du navire. Cette nouvelle analyse
aboutit à une date d’abattage de 1502.
Ce résultat concorde davantage avec la
Lomellina
dont le naufrage est survenu en septembre
1516.
En conclusion, il en résulte que si les structures du navire ont été construites dans les
premières années du XVIe siècle avec du bois récemment abattu, c’est du bois de réemploi
qui fut utilisé pour construire ses cloisons internes.
5
Figure : Schéma de l'établissement d'une chronologie de référence à partir d'échantillons partiellement
synchrones qui présentent des séquences de cernes caractéristiques communes.
6
EXIGENCES DE LA DENDROCHRONOLOGIE
(METHODE DE DATATION)
LES PRELEVEMENTS
AVANT
- après dégagement et couverture photographique de la coque, examen détaillé de toutes les
pièces de bois disponibles sur le gisement ; identification et observation du plan transversal
(révélateur de l’essence et de la longueur de la série de cernes) de chaque pièce de bois ;
- sélection des essences exploitables par la dendrochronologie (
sensitive species
) ;
- recherche de la présence de l’année terminale (avant abattage) sur l’échantillon : recherche
de l’écorce ou de l’aubier.
- sélection des pièces fournissant plus de 60 cernes. Attention aux pièces à forte section
transversale pas forcément les plus intéressantes! Nombre minimal d’échantillons par
essence : 12.
- identification des reprises, réparations et remplois (autant de pièces qui méritent, après
identification, d’être prélevées pour une meilleure connaissance de l’histoire du navire).
PENDANT
Si une gangue quelconque recouvre par endroit le bois, il n'est pas conseillé de tenter de
l'enlever sur le site car le risque de détruire et perdre l'aubier (bois périphérique fonctionnel
dont l'intégralité permet au dendrochronologue de préciser l'année d'abattage de l'arbre utilisé)
est réel.
- récolte des échantillons (restituables) sur la pièce
:
- carottages (orifice de diamètre 21mm) nécessitant une alimentation électrique;
possibles sur bois humides seulement si la cellulose n’a pas été dissoute (cas très rare).
- sections transversales épaisses de 3 à 10 cm, selon la solidité du matériau (à réaliser à
l'aide d'une scie ou d'une tronçonneuse, loin des embranchements, départs de racines et
autres traumatismes susceptibles d’entraîner des déformations anatomiques).
- macrophotographies de la pièce (contraste maximal) : travail sur tirage-papier.
- moulages (
ex
. silicone) sur la pièce
in situ
ou sortie de l’eau : mesures sur duplicata.
- localisation des échantillons sur plan et numérotation.
APRES
- conditionnement des échantillons humides dans sac P.V.C. étanche. Une fois tous les
échantillons conditionnés, il est recommandé de les disposer dans une caisse rigide afin
d'amortir les chocs éventuels et éviter ainsi .... leur multiplication involontaire.
- en l'absence de chambre froide, les échantillons peuvent être conservés sans problème plus
d’une année dans une pièce sombre où la température moyenne n'est pas trop élevée et dans
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laquelle l'amplitude thermique et hygrométrique est la plus réduite possible dans l'attente
d'être mesurés.
- pas de formol (toxique) ni aucun autre produit susceptible de polluer une éventuelle future
analyse de la teneur en radiocarbone.
- traitement des plans transversaux destinés à améliorer la lecture anatomique des cernes
:
ponçage et polissage des échantillons de bois sec ; traitement des échantillons humides à l’éta
t
humide avec rafraîchissement à la lame de rasoir.
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DENDROCHRONOLOGIE
Pour en savoir plus ...
- Baillie, M. G. L., 1982.
Tree-Ring Dating and Archaeology
. Croom Helm, London, 274p.
- Baillie, M. G. L., 1995.
A slice through time. Dendrochronology and precision dating.
B.T. Batsford Ltd, London, 176p.
- Fritts, H.C., 1976.
Tree-rings and Climate
. Academic Press, London, 567p.
- Kaennel, M. et Schweingruber, F.H., 1995.
Multilingual Glossary of Dendrochronology
. WSL/FNP Birmensdorf, Paul Haupt Publishers, Bern, 467p.
- Lambert, G.-N., Lavier, C., Perrier, P. et Vincenot, S., 1988.
Pratique de la Dendrochronologie.
Histoire et Mesure
; III, 3, 279-308.
- Lambert, G.-N., 1998,
La dendrochronologie, mémoire de l'arbre. In :
La datation en laboratoire
, Collection "Archéologiques" (A.
Ferdière
ed
.), Errance éd., Paris, 13-69.
- Langouet L. et Giot, P.R., 1992.
La datation du passé. La mesure du temps en archéologie
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- Munaut, A.V., 1988.
Les cernes de croissance des arbres. La dendrochronologie.
Typol. des
sources du Moyen-Age occidental,
fasc. 53, 51p.
- Schweingruber, F.H., 1983.
Der Jahring. Standort, Methodik, Zeit und Klima in der Dendrochronologie,
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1988, Kluwer Acad. Publishers, Dordrecht, 276p.).
- Schweingruber, F.H., 1993.
Trees and wood in dendrochronology
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- Schweingruber, F.H., 1996.
Tree Rings and Environment : Dendroecology. WSL/FNP Birmensdorf, Paul Haupt Publishers, Bern,
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- Trenard, Y., 1978.
L'art de faire parler le bois. Initiation à la dendrochronologie
. Centre Technique du Bois, Paris, 59p.
Ouvrages collectifs :
-
Revue d'Archéométrie,
1980, n° 4.
-
Applications of tree-ring studies. Current research in dendrochronology and related subjects
, B. A. R.,
Int. Ser. 333, 1987 (Ward, R.G.W. ed.), 232p.
-
Les Mystères de l'archéologie. Les sciences à la recherche du passé
. Presses Universitaires de Lyon,
1990, 287p.
-
Methods of Dendrochronology ; Applications in the Environmental Sciences
. (Cook, E. R. et Kairiukstis
L.A. eds.), 1990. Kluwer Acad. Pub., Dordrecht, 394p.
-
Les veines du temps. Lectures de bois en Bourgogne
. Musée Rolin, Autun, 1992, ISBN 901 288.
-
Radiocarbon
, 1996, Tree Rings, Environment and Humanity (J.S. Dean, D.M. Meko and T.W. Swetnam
eds.).
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Adresses utiles
Olivier GIRARDCLOS et Christophe PERRAULT
Laboratoire de ChronoEcologie
Faculté des Sciences La Bouloie
16, route de Gray
25030 Besançon Cedex
Vincent BERNARD
UMR 6566 CNRS Civilisations Atlantiques et Archéosciences
Laboratoire d’Anthropologie
Université de Rennes I
Campus de Beaulieu
35042 Rennes Cedex
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