Antonio Barberini (1608-1671) et la papauté. Réflexions sur un destin individuel en cour de Rome au XVIIe siècle - article ; n°1 ; vol.108, pg 407-442

MELANGES_DE_L-ECOLE_FRANCAISE_DE_ROME - Poncet Olivier

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Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée - Année 1996 - Volume 108 - Numéro 1 - Pages 407-442
Olivier Poncet, Antonio Barberini (1608-1671) et la papauté, p. 407-442. L'important fonds de la Secrétairerie des brefs de l'Archivio segreto Vaticano permet de jeter un éclairage nouveau sur la vie et la carrière du cardinal Antonio Barberini (1608-1671). Ce neveu du pape Urbain VIII (1623-1644), singulièrement proche de la couronne de France, fournit un des meilleurs exemples des conséquences et des limites du népotisme pontifical ayant existé au cours des deux premiers tiers du XVIIe siècle. L'étude de ses rapports avec la papauté, dans laquelle il trouva tour à tour une protection et une source de persécution sont riches d'enseignements sur le fonctionnement de la monarchie pontificale de l'âge moderne.
36 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par	MELANGES_DE_L-ECOLE_FRANCAISE_DE_ROME
Publié le	01 janvier 1996
Nombre de lectures	32
Langue	Français
Poids de l'ouvrage	2 Mo

Extrait

Olivier Poncet
Antonio Barberini (1608-1671) et la papauté. Réflexions sur un
destin individuel en cour de Rome au XVIIe siècle
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée T. 108, N°1. 1996. pp. 407-442.
Résumé
Olivier Poncet, Antonio Barberini (1608-1671) et la papauté, p. 407-442.
L'important fonds de la Secrétairerie des brefs de l'Archivio segreto Vaticano permet de jeter un éclairage nouveau sur la vie et la
carrière du cardinal Antonio Barberini (1608-1671). Ce neveu du pape Urbain VIII (1623-1644), singulièrement proche de la
couronne de France, fournit un des meilleurs exemples des conséquences et des limites du népotisme pontifical ayant existé au
cours des deux premiers tiers du XVIIe siècle. L'étude de ses rapports avec la papauté, dans laquelle il trouva tour à tour une
protection et une source de persécution sont riches d'enseignements sur le fonctionnement de la monarchie pontificale de l'âge
moderne.
Citer ce document / Cite this document :
Poncet Olivier. Antonio Barberini (1608-1671) et la papauté. Réflexions sur un destin individuel en cour de Rome au XVIIe
siècle. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Italie et Méditerranée T. 108, N°1. 1996. pp. 407-442.
doi : 10.3406/mefr.1996.4438
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_1123-9891_1996_num_108_1_4438OLIVIER PONCET
ANTONIO BARBERINI (1608-1671) ET LA PAPAUTÉ
RÉFLEXIONS SUR UN DESTIN INDIVIDUEL EN COUR DE ROME
AU XVIIe SIÈCLE *
L'histoire du népotisme pontifical reste encore à écrire. Pour tout
connaisseur des travaux de Wolfgang Reinhard, cette assertion sonnera
comme une provocation tant il est vrai que ses travaux ont amplement
contribué à la meilleure compréhension de ce qui fut tout à la fois un
comportement social et une forme du gouvernement de l'Église universelle
et de l'État ecclésiastique1. Avatar, éternel et inhérent aux sociétés hu
maines, du clientélisme et du favoritisme d'un côté, solution aux pro
blèmes posés aux souverains pontifes de l'époque moderne dans la
conduite de leurs affaires, d'État et privées, de l'autre, le népotisme jouit
généralement d'une mauvaise image que l'enrichissement considérable de
parents et proches des papes et l'ascension sociale foudroyante de leurs fa
milles ont aidé à entretenir. Cette confusion des genres n'a sans doute pas
peu contribué à la naissance du débat engagé entre W. Reinhard, qui abord
ait résolument le problème sous l'angle des relations socio-politiques en
cour de Rome à travers le pontificat de Paul V Borghese, et Madeleine Lau-
rain-Portemer, qui choisissait de se placer sur le terrain des institutions de
la papauté en retraçant l'évolution de la charge de surintendant de l'État
* Abréviations utilisées.
A. S.V. : Archivio Segreto Vaticano
Arch, concis. : Archivio concistoriale
B.A.V. : Biblioteca Apostolica Vaticana
Barb. lat. : Barberini latini
Segr. Brevi : Segreteria dei Brevi
Urb. lat. : Urbinates latini
1 Wolfgang Reinhard, Nepotismus. Der Funktionswandel einer papstgeschichtli
chen Konstante, dans Zeitschrift für Kirchengeschichte, LXXXVI, 1976, p. 87-108 et
Papstfinanz und Nepotismus unter Paul V. (1605-1621). Studien und Quellen zur
MEFRIM - 108 - 1996 - 1, p. 407-442. 408 OLIVIER PONCET
ecclésiastique2. Ce n'est pas ici le lieu de reprendre leurs thèses3. Toute ten
tative de résumé en la matière se solderait inévitablement par un appau
vrissement des apports que constituent ces deux études et des nuances dé
veloppées par les deux auteurs dans leurs analyses du phénomène.
Tout au moins est-il possible de présenter ici les points qui demeurent
acquis au terme de ces recherches et qui n'ont pas fait l'objet d'une remise
en question radicale. Ainsi, pour reprendre une distinction chère à W.
Reinhard, le népotisme présente-t-il deux fonctions4. Une fonction de sou
veraineté ou de domination (Herrsckaftfunktiorì) tout d'abord, en vertu de
laquelle le népotisme est conçu comme une aide, un soutien apporté au
pape dans la définition et la consolidation de son pouvoir sur l'Église, le
Sacré Collège et l'administration pontificale. La chose est particulièrement
nette chez les papes du XVe siècle, qu'il s'agisse de Pie II, l'un des tout pre
miers à théoriser cette conception du pouvoir5, ou de Sixte IV. L'accession
du cardinal Borgia au trône de saint Pierre sous le nom d'Alexandre VI
constitue certainement un sommet en la matière. Le népotisme remplit par
ailleurs une fonction d'entretien ou de subsistance (Versorgungsfunktion)
qui permet au pape d'asseoir ou de faire progresser la position de ses
proches6. Les deux fonctions coexistent, seule leur prépondérance est va
riable selon que la seconde est condition et conséquence de la première ou
qu'elle devienne une fin en soi. Reinhard proposait de considérer que vers
1500 s'effectue le passage de l'une à l'autre (Funktionswandel). L'on peut ce
pendant raisonnablement penser, avec M. Laurain-Portemer, que l'évolu
tion n'est pas aussi tranchée et qu'il s'agit davantage d'un mouvement cy
clique que linéaire. En effet, il paraît difficile de considérer que le souci dy-
Struktur und zu quantitativen Aspekten des päpstlichen Herrschaftssystem, 2 vol.,
Stuttgart, 1974 (Päpste und Papsttum, 6, 1-2).
2 W. Reinhard, Papstfinanz· ■ ■ , et Madeleine Laurain-Portemer, Absolutisme et
népotisme. La surintendance de l'État ecclésiastique, dans Bibliothèque de l'École des
chartes, CXXXI, 1973, p. 487-568, réimpr. dans Études mazarines, Paris, 1981, p. 403-
479.
3 Je renvoie, pour ce faire, à la réplique de M. Laurain-Portemer aux critiques
formulées par Reinhard (Nepotismus..., p. 171-173) : Ministériat, finances et papauté
au temps de la réforme catholique, dans Bibliothèque de l'École des chartes, CXXXIV,
1976, p. 396-405.
4 W. Reinhard, Nepotismus..., p. 146. *
5 W. Papa Pius. Prolegomena zu einer Sozialgeschichte des Papsttums,
dans Von Konstanz nach Trient. Beiträge zur Kirchengeschichte von den Reformkonz
ilien bis zum Tridentinum. Festgabe für August Franzen, Remigius Bäumer éd., Mun
ich, 1972, p. 261-299 et Paolo Prodi, // sovrano pontefice. Un corpo e due anime : la
monarchia papale nella prima età moderna, Bologne, 1982, p. 36-38.
6 W. Reinhard, Nepotismus..., p. 171. ANTONIO BARBERINI ET LA PAPAUTÉ 409
nastique n'ait été envisagé que comme un corollaire par les papes d'avant le
XVIe siècle tandis que leurs successeurs auraient soudainement fait de
cette préoccupation le moteur même de leur gouvernement.
Moins sujette à discussion, la périodisation entre grand et petit népo
tisme est la suivante. Jusqu'au pontificat de Pie V, le népotisme prend des
proportions politiques aux conséquences énormes pour l'avenir même de
l'État ecclésiastique, sous l'effet essentiellement des inféodations de terri
toires très importants à des parents du pape, dont la concession des duchés
de Parme et de Plaisance aux Farnese par Paul III marque sans nul doute
un point extrême. Le concile de Trente, qui réaffirme dans le chapitre I de
sa vingt-cinquième session les aspects négatifs du népotisme et en renforce
la condamnation, et surtout la bulle Admonet nos du 29 mars 1567, qui in
terdit les inféodations dans l'État ecclésiastique, inaugurèrent le temps de
ce qu'il est convenu d'appeler le petit népotisme, terme sous lequel on en
tend une exploitation des possibilités données par le passage sur le trône de
saint Pierre pour procurer une place eminente dans la société aux parents
du souverain pontife7.
La forme institutionnelle du népotisme se cristallise autour de la fonc
tion de surintendant de l'État ecclésiastique dont la genèse remonte aux
années 1540-15508. Pendant près d'un siècle et demi et à de très rares
éclipses près, la direction des affaires de la papauté est confiée au cardinal-
neveu, véritable premier ministre du pape. Il faudra les excès, jugés comme
tels par les contemporains, du pontificat d'Urbain VIII et en particulier la
malheureuse guerre de Castro, dont les dépenses devaient tant obérer les
finances pontificales, pour que cette institution originale soit réprouvée
dans un même mouvement avec le népotisme entendu comme source d